Double File
115 pages
Français

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Description

Philippe Mandelle, président d’une entreprise familiale de spiritueux, passe pour un homme qui possède toutes les qualités. Mais sa disparition entre Bruxelles et Paris, dont les ressorts psychologiques se devinent peu à peu, masque une seconde disparition, plus inquiétante.
Au fil de l’histoire, dans un Paris populaire et bourgeois, des personnages de l’ombre vont révéler toute leur importance : Philippe, « je ne suis pas un héros », Antoine, son fils, qui a fait un choix audacieux, Camille, ancien séminariste, plongé dans un univers de pouvoir et François-Xavier, collaborateur loyal et narcissique. Sans oublier Ann, l’épouse, qui présente une étrange réticence à lancer un avis de recherche… Et Marie, médecin, qui peut devenir barbare et à laquelle Philippe, lors d’une nuit de violence et d’amour, pourrait redonner le goût d’être « fidèle à ce bonheur, même éphémère ».
Les souffrances et les humiliations subies par Philippe Mandelle auraient sans doute suscité la compassion de tous si la noirceur de la victime ne se révélait en filigrane. Une noirceur qui n’est pas sans rappeler le caractère vulnérable, insondable, voire schizophrène des humains.
Qui est réellement Philippe Mandelle ? Pourquoi a-t-il choisi de laisser en double file ceux qui comptent ? Et surtout, qui a le plus grand intérêt à le voir disparaître ?
Cet ouvrage, à mi-chemin entre le roman psychologique et l’intrigue, allie rigueur, spontanéité et sensibilité. Le style, soigné, voire intimiste, tout en préservant le suspens, rend cette fiction singulière et originale.

Informations

Publié par
Date de parution 31 octobre 2012
Nombre de lectures 5
EAN13 9782312005478
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0015€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Double File

Isabelle Deflandre
Double File













Les éditions du net 70, quai Dion Bouton 92800 Puteaux
© Les Éditions du Net, 2012 ISBN : 978-2-312-00547-8
Chapitre 1
François Xavier peste contre la pluie locale de Bruxelles, qui envahit jusqu’à l’intérieur des os. « ça drache ce soir », lui a répété le majordome en lui prenant des mains sa valise, à peine plus lourde qu’un attaché-case. Maintenant il se trouve à son aise dans une chambre d’hôtel chaleureuse. Vite dit, car les couleurs mates blanc et vert d’eau ne correspondent pas à son idée d’une pièce intime, cosy. Du moins, l’importunité de la pluie lui est devenue égale.
Il a passé sur un corps entretenu à la pratique sportive, un peignoir épais autant que douillet, véritable pousse-au-vol. Il se demande vaguement qui pourrait bien posséder chez soi de tels peignoirs aux chaussons assortis. Allongé sur un lit qui pourrait accueillir une famille nombreuse, François-Xavier pense à Philippe Mandelle, son patron, son ami depuis une génération, qui passe à quelques centaines de mètres, la nuit dans un autre hôtel, situé dans la vielle ville de Bruxelles. François-Xavier a fait la route avec son adjoint pour être à pied d’œuvre tôt le lendemain matin. Le Président l’a joué solo.
Philippe Mandelle se plaît à dire qu’il a épousé de nombreuses habitudes et qu’il s’en porte bien. D’ailleurs, il porte presque tout à la perfection : la naissance, le nom, les cheveux, la fortune, le goût, les honneurs, l’amour… Une réussite reconnue, qui le rend lui-même, perplexe, à ses heures. François-Xavier admire le président Mandelle, indiscutablement.
Quand Philippe Mandelle se rend à Bruxelles, ce qui lui arrive environ trois à quatre fois par an, il s’installe à l’hôtel A. et n’aurait pas dérogé à ce rite, quelle que soit sa relation d’amitié avec François-Xavier.
Un peu las, François-Xavier se risque à imaginer les bras dans lesquels Philippe, à cette heure, pourrait rechercher l’amour et le plaisir. Avec Elena, sans doute. Il visualise leur nudité. Celle de Philippe, d’ailleurs. Tandis que Philippe offrirait la possibilité d’une révolte, sa maîtresse le laisserait opérer sur elle les actes et les sacrifices espérés et craints. L’intimité du parcours de leurs corps défaits s’engagerait dans cette voie familière : la sensation de vivre. François-Xavier enviait tout à coup l’organisation de cette fête des sens. Il éprouve, au plus profond de lui, des volumes et des sensations physiques, qui cognent dans sa tête comme l’aboutissement de son rêve éveillé. Il croit entendre la maîtresse de Philippe, incapable de demander grâce. Il perçoit l’intrépidité du sexe de Philippe et soudain, la représentation d’un lien. Son imagination fait le reste, cultivant une image de femme ligotée, dans une abnégation d’elle-même, acceptant d’être froissée par des mains troublées soumettant son corps, affolé. Elle doit être submergée par l’instinct d’aimer et d’être possédée, sans histoire et sans bruit.
François-Xavier vient de jouir, sans histoire et sans bruit non plus.
Il se met sous les draps et attend le matin en convoquant le sommeil.
Bruxelles, vendredi 27 février
De jolies tables, nappées de rose, sont disposées dans la salle à manger de l’hôtel A. La plupart des convives ont l’air plus concentrés sur leur travail que sur le décor. François-Xavier est arrivé à 7 heures 30 pour vérifier les points de logistique avant le Conseil d’Administration et la réunion qui suit. Il est près de 9 heures : il compte voir Philippe, seul à seul.
Philippe Mandelle a rendez-vous dans moins de deux heures avec les membres de son conseil d’administration. Sa société, Mandelle SA, un groupe français, vend des spiritueux en France, en Europe et en Asie également. Elle a réalisé un chiffre d’affaires de 1,2 milliard d’euros, mais Philippe rencontre des difficultés dans son entreprise : les ventes à l’export ne sont pas aussi florissantes, surtout en Chine. En conséquence, Philippe envisage d’ouvrir son capital à de nouveaux partenaires pour dynamiser son développement à l’international. Il est en discussion depuis quelques mois avec un fonds d’investissement, discrètement mandaté par une entreprise chinoise, YUTAO, importatrice de vins et de spiritueux. Ce fonds d’investissement, qui possède également une agence à Macao serait intéressé par une participation dans la SA Mandelle, à hauteur d’environ 30 %, assortie d’une augmentation de capital.
Le président Mandelle a préalablement conduit des discussions, à ce stade assez avancées, avec ce fonds d’investissement, mais il a fait de la rencontre avec les interlocuteurs chinois démasqués une condition majeure pour poursuivre les négociations.
Bien que cette pratique soit peu usitée dans ce cadre d’affaires, une délégation de YUTAO fait le voyage de Beijing, via Shanghai, pour discuter d’une proposition. Cette délégation, menée par Jio Manu, comprend trois personnes. Trois hommes. Ils doivent atterrir à l’aéroport de Bruxelles à 11 h 30. Ils y seront accueillis par l’adjoint de François-Xavier Fronis, à la fois Secrétaire général et administrateur de l’entreprise.
La réunion commencera vers midi, dès l’arrivée des Chinois.
François-Xavier, assis à l’une des tables, appelle de son BlackBerry la jeune interprète chinoise pour s’assurer qu’elle sera ponctuelle, pendant qu’il parcourt d’un œil sérieux la presse belge du matin, au titre humoristique – Le Soir – et qu’il termine un croissant bien français. Il fait pivoter son Blackberry, un cadeau de son ami Philippe.
Il trotte dans sa tête le projet de profiter de cette ouverture du capital pour prendre une participation personnelle, idéalement de 10 %, dans la société. Il a encore récemment évoqué le sujet avec Philippe Mandelle qui ne s’est pas montré chaud à laisser entrer des salariés au sein du capital d’une entreprise familiale . François-Xavier a grincé des dents en s’entendant comparé à des salariés.
Les administrateurs ont pris le Thalys à Paris. La cousine de Philippe, Béryl, arrivée la première, adore les histoires drôles : elle entreprend aussitôt François-Xavier sur l’histoire d’une femme qui croit reconnaître dans son dentiste un ancien camarade de lycée et qui, une fois la bouche libérée et la parole retrouvée, lui dit s’être côtoyés dans le même établissement, à la même époque. Et le dentiste de lui demander :
– Quelle matière enseigniez-vous, Madame ?
Béryl éclate de rire derrière son col à froufrous.
Béryl a précédé de peu « Monsieur Charles », un homme aussi doué de talents que Philippe, dont l’allure charismatique fait, au pire des envieux et au mieux des jaloux. Frère ainé de la famille, Monsieur Charles est accompagné de deux autres actionnaires, Grégoire et Stéphane Mandelle, respectivement frère et neveu de Philippe. Personne n’a été surpris de la nomination de Stéphane en tant qu’administrateur, car son flair et son sens de la diplomatie bluffent Philippe. Ann, la femme de Philippe a signé un pouvoir, formalité qu’elle remplit pour chaque conseil, ou presque, sans pour autant se désintéresser de l’activité de la société.
Camille, distrait, s’est trompé de salle mais il rejoint ses cousins. Le commissaire aux comptes se fait attendre. La jeune interprète fait son apparition. À 10 heures 45, tous sont installés.
Il manque juste le président.
François-Xavier a déjà tenté plusieurs fois de joindre Philippe Mandelle sur son portable qui ne sonne que dans le vide. Il tombe immédiatement sur la boite vocale, dont le message devient agaçant. Monsieur Charles, voyant François-Xavier s’impatienter, suggère d’appeler Ann.
– Oui, opine Béryl, dont la qualité première est certainement la spontanéité. François-Xavier murmure deux ou trois mots à Monsieur Charles qui sourit avec hauteur, en évitant de croiser le regard de ses voisins, qu’il imagine intrigué.
– Laissons-lui encore cinq minutes… Il est près de 11 heures. Monsieur Charles accuse une mine d’autant plus contrariée, que François-Xavier vient de raccrocher après avoir eu son adjoint, Maxime, qui l’a informé que la délégation ne tarderait pas à atterrir.
– La circulation est fluide, a-t-il ajouté, content de transmettre une bonne nouvelle. Mais Philippe n’est toujours pas là. Monsieur Charles appelle Ann. La conversation est courte. Il se tourne vers l’assemblée :
– Ann n’a pas eu de contact téléphonique avec Philippe depuis hier, en fin d’après-midi. Elle appelle Madame Bonner sur le champ, m

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