Histoire de vie , livre ebook

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Comme tout un chacun, Jacques n’a pas choisi d’être ce qu’il est. Produit de l’inné et de l’acquis, il se révèle être un psychopathe par le viol et l’assassinat de sa propre sœur. Ensuite, son histoire est semblable à celles de tant d’autres détraqués de l’existence. Un parcours semé de cadavres aux quatre coins du monde, puis, comme Ulysse, vieux et fatigué, il rentre au pays pour y accomplir l’apogée de son odyssée.

Pierre, un gendarme chargé de mener l’enquête sur trois meurtres sordides. Antoine, un écrivain raté, misanthrope à ses heures, alcoolique à toutes. Camille, sa sœur, empêtrée dans ses amours interdits. Hélène, la muse mortifère de passage. Autant de personnages qui vont parcourir ce récit et chacun essayant de comprendre, à sa façon, ce qui échappe à l’entendement commun.

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Date de parution

08 avril 2014

Nombre de lectures

0

EAN13

9782332697646

Langue

Français

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-332-69762-2

© Edilivre, 2014
Dédicace

A ma femme Carole.
(Je sais, cela fait fayot, mais je n’ai pas le choix.)
« L’Histoire de Vie » est utilisée en sociologie pour susciter des témoignages d’anonymes. D’hommes de la rue comme aiment à les appeler les sciences humaines. Elle tente de valoriser des vies simples, qui, aux dires de leurs protagonistes, n’auraient rien d’intéressant qui mériterait d’être relaté.
Elle s’étaye sur la maïeutique, chère à Socrate, qui pensait que chacun possédait déjà en soi ce qu’il croyait avoir à apprendre de l’extérieur. Socrate, comme la sage-femme qui aide à l’accouchement du nouveau-né, révélait à la conscience de son interlocuteur des vérités philosophiques. Ainsi l’interrogateur répondait lui-même à ses questions par un subtil échange d’opinions entre les deux hommes. Ce procédé a évidemment ses limites et il serait étonnant que notre inconscient conserve bien au chaud l’équation de l’énigme du monde…
1
« Vous n’êtes ni policier, ni chirurgien, ni avocat. Votre histoire n’intéressera ni les séries, ni les téléfilms, ni les films. Elle ne sera pas vue à la télévision (gage de vérité), et pas davantage lue dans les livres. En fait, elle n’intéresse personne me direz-vous ! C’est faux votre histoire intéressera vos proches ! Laissez-moi écrire votre vie. Laissez-moi écrire votre “Histoire de Vie.” et laissez un témoignage à votre famille.
Contactez-moi vite au 06.XX.XX.XX.XX »
Antoine :
Voici par quelle annonce racoleuse je gagnais mal, chaque jour que Dieu fait si mal aussi, ma vie et immanquablement chaque fois que je la lisais, la nausée me prenait. Une nausée insidieuse qui m’envahissait totalement me rappelant où j’en étais arrivé. Le seul exutoire à cela : une bonne rasade de bourbon, bue à la fidèle flasque qui ne quittait jamais la poche déformée de ma vieille veste de velours côtelé.
Ce travail alimentaire n’était même pas celui d’un nègre anonyme ayant quand même la satisfaction d’écrire des textes sinon passionnants du moins quelques fois intéressants. Mon travail à moi était de remplir des pages avec du vide, de l’inconsistant, du dérisoire, du pathétique…
* * *
Antoine Manoir, 38 ans, célibataire, le plus souvent seul et le plus souvent désespéré. Il est brun, mince, de taille moyenne et légèrement courbé. Il marche de cette allure singulière qui lui donne l’impression de lutter contre le vent, contre des forces antagonistes, contre la vie en général, comme si l’air qui l’entourait, avait pour lui seul, une consistance particulière, une sorte de matière visqueuse qui ralentit sa progression et ses mouvements. Nous voici en présence d’une personne qui fait des efforts au quotidien, où tout devient effort. Effort de se lever, de se laver, de s’habiller, de s’alimenter… tout ce que l’on fait sans même y accorder ne serait-ce qu’une pensée devient pour lui un combat permanent. Antoine doit faire l’effort de vivre.
Physiquement, on ne peut pas dire qu’il soit beau, mais il possède un charme ténébreux incontestable qui séduit les femmes à leur insu. La première impression n’est pas flatteuse. Elles commencent par ne rien lui trouver qui vaille la peine de pousser plus loin une relation. La majorité d’entre elles, d’ailleurs s’en tient à cette résolution. Mais pour celles qui sont amenées à le fréquenter davantage, elles finissent en général par tomber sous le charme.
Son mal-vivre donne envie de protéger ce paumé fragile. Il faut faire un effort pour l’apprécier, comme ces films d’art et d’essai qui commencent avec des codes cinématographiques auquel on n’est pas habitué, puis finissent par récompenser, celui qui n’a pas décroché dans les quinze premières minutes, par la découverte d’une perle d’émotion et de sensibilité, un regard intelligent sur la vie. De même, il faut une initiation pour apprécier Antoine. Malheureusement, on ne peut pas ajouter « à sa juste valeur », car une fois prise au piège de son attirance, la conquise ne recevra, que très peu de compensations. Au point de la laisser désemparée, ne pouvant même pas justifier son choix par le : « qu’est-ce que j’ai bien pu lui trouver la première fois ? » car la réponse serait inévitablement, sans appel : « rien ! ». Antoine gagnait à être connu, dans un premier temps, puis oublié dans le second.
Antoine a vécu deux longues années, ce fut son record de longévité, en ménage avec une jeune femme et cette cohabitation s’est avérée encore plus pénible pour lui que la solitude. Il en a déduit qu’il n’était, décidément, pas fait pour la vie de couple et a repris ses anciennes habitudes de vieux garçon.
Il loge maintenant dans un meublé, un petit deux pièces qui n’a de coquet que le fait d’avoir été décrit comme tel dans l’annonce immobilière. Il habite à Montreuil, à l’Est de Paris, une banlieue ex-populaire, nouvellement « bobo », transfuge communiste passée à l’écologie de marché, celle où l’on consomme tout autant mais différemment en condamnant radicalement le capitalisme.
Antoine n’a jamais connu son père, ce dernier ayant préféré déserter le domicile conjugal juste après sa naissance. Cette délicatesse a fait qu’ayant été élevé sans image paternelle, ce manque ne lui a jamais manqué, au point qu’il en demeurait toujours étonné et perplexe de lire tant de récits de recherche désespérée du père ou de la mère absents. Sa sœur, bien qu’ayant sensiblement connu le même vécu que lui, souffre de cette carence affective. Nous sommes tous semblables pourtant, il faut bien reconnaître quelques particularités à l’individuel commun. Il aime à répéter : « Mieux vaut un père absent, qu’un père tyran. »
La mère d’Antoine, Suzanne, est dans un établissement spécialisé pour troubles mentaux, atteinte d’une forme de la maladie Alzheimer, elle y séjourne depuis quatre ans, maintenant. Il a vécu ce drame sans douleur, avec un détachement qui lui a laissé la crainte d’être un infirme de l’affectif, une sorte d’étranger à la Camus, incapable de partager des sentiments au quotidien avec autrui, traversant la vie sans réaction aux agressions, prenant tout ce qui vient avec la même équanimité, se voyant le témoin distancié de sa vie avec, en toile de fond, l’impression d’avancer dans rien pour aller vers rien. Ce mal être lui fait prendre les bouleversements du quotidien avec cynisme et dérision, tout devenant dérisoire et futile à ses yeux. Il traverse la vie avec nonchalance.
Seule, sa sœur, sa cadette de huit ans, lui révèle, qu’il n’est pas totalement cet alien athymique, par la tendresse et le désir de protection qu’il ressent pour elle à chacune de leurs rencontres.
Pour finir cette présentation, notons qu’il est « irrécupérablement » athée et a suivi un cursus laborieux de journalisme. Qu’il est enfin, bien qu’il ne veuille pas le reconnaître, alcoolique et qu’il fume trop comme le lui répète sans cesse sa sœur.
Antoine :
Voilà ! Je venais de mettre le point final à l’histoire sans histoire d’une septuagénaire enfermée dans son appartement étroit comme dans son étroite solitude.
Ce travail, un livre de cent vingt-sept pages, m’avait coûté encore plus que les derniers écrits. Chaque biographie m’épuisait davantage, comme si les trésors d’inventivité que je devais déployer pour assembler, pour rapiécer, pour ravauder les éléments épars de matière se nourrissaient de la mienne. Je devais m’attendre à me retrouver, un jour, exsangue et desséché avant l’âge. Au moins pouvais-je me consoler en pensant que je ne demanderai jamais à quiconque d’essayer de donner une substance à mon existence vide de sens.
De plus, comme le dit souvent ma sœur « essaye de voir le côté positif des choses ». C’est fini et je vais pouvoir toucher mon dernier cachet. Et oui, je préfère me voir intermittent du spectacle plutôt qu’en charognard, flagornant vieux et vieilles pour qu’ils me nourrissent, aussi. J’appelle cachet mes émoluments si durement gagnés.
Je crois que ce qui me déplait le plus dans mon job, c’est qu’il m’oblige à me contrarier, à être un usurpateur, à trahir ma nature en écrivant des platitudes mielleuses. Je ne me salis pas les mains dans de sombres négoces, je les poisse de bons sentiments. Mes mains sont poisseuses et j’ai beau les laver tous les matins à l’eau bénite additionnée d’une rasade de bourbon à l’église qui jouxte mon troquet de neuf heures, rien n’y fait elles restent collantes.
Autre nécessité de la profession : demander des acomptes le plus souvent possible, pour éviter de devoir aller réclamer son dû à la famille, protégée, pour la circonstance, derrière le cercueil de mon client. Cela ne m’est arrivé qu’une seule fois, le diable m’en préserve. Autant dire que la situation était pour le moins gênante et que, pire, je n’ai rien touché. Chacun se drapant dans sa dignité outragée, j’ai quitté le cimetière la queue entre les pattes et laissé les héritiers se partager les restes tièdes de mon sujet littéraire.
Cette anecdote m’a servi de leçon, car depuis j’exige d’être payé chaque semaine contre la remise d’une trentaine de feuillets, jamais plus, car après mon client estimerait que c’est trop cher payé pour le temps passé. Rançon de ma mesquinerie, je dois le plus souvent me taper les compliments larmoyants de mes clients à la lecture de la livraison hebdomadaire. La seule consolation à cela est que quelquefois, le vieux, jamais la vieille, me sert un verre pour me faire patienter durant le déchiffrage de mon texte. Autre leçon empirique : remettre des copies en gros caractères, jamais inférieurs à une police 14, pour éviter la recherche erratique des lunettes, voire de la loupe, pendant quinze minutes supplémentaires. Et rien n’y

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