Je m appelle Simon
106 pages
Français

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Description

A la veille de la sortie de prison de Georges Tessier, incarcéré depuis vingt-quatre ans, Joséphine, sa fille de 30 ans enceinte de quelques mois, disparaît mystérieusement. C’est le début d’une enquête policière mais aussi l’effondrement de toute la famille, sa mère Sara, son frère Sébastien et son compagnon Eliot. Simon, le cousin et complice de la petite enfance de Joséphine, va également connaître les moments les plus périlleux de sa vie. Une intrigue de famille, pesante et sans artifices dont le dénouement bouscule les repères habituels. Le personnage de Simon n’est ni aimable ni détestable, il est hors des standards classiques, en marge de la société, dans une solitude et un horizon sans issue.

Informations

Publié par
Date de parution 19 septembre 2017
Nombre de lectures 1
EAN13 9782312054971
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Je m’appelle Simon
Patrick Daspremont
Je m’appelle Simon
Roman
LES ÉDITIONS DU NET
126, rue du Landy 93400 St Ouen
Du même auteur :
Le singulier destin de Cyril Dumont
© Les Éditions du Net. 2015
*
Sketo / TAPA Σ
© Les Éditions du Net. 2015

© Les Éditions du Net, 2017
ISBN : 978-2-312-05497-1
À Marie -B.
Avant -propos
Ce roman nous mène à suivre la solitude et la tristesse d’un homme pour qui la vie s’est chargée de trancher les marges qui rendent encore l’existence supportable. Souvent je pense à tous ces gens, ceux qu’on ne remarque pas, qui passent leur chemin dans l’indifférence générale, sans rien dire ni rien attendre, et surtout sans rien demander à personne. Pourtant ils sont là. Le temps s’engouffre dans leur vie, et y fige cette petite misère ordinaire qui leur colle définitivement à la peau. Oui, bien souvent, confortablement installé au volant de ma voiture ou derrière les vitres d’un café, j’observe ces personnes d’un autre monde, d’un autre temps, d’une autre exigence. Comprendre leurs secrets m’attriste et pourtant je m’y efforce. Je suis frappé par mon impuissance à apporter un peu de couleurs aux décors de leurs misérables existences. Trop souvent je me limite à ressentir de la compassion, maigre participation à accompagner ces errances.
Ce livre leur est modestement dédié, afin que toutes ces personnes sachent qu’elles ne sont pas aussi seules qu’elles pourraient le croire !
Chapitre 1
Avril 2012. Quelque part en France
« Je m’appelle Simon ! »
C’était ce qu’il tentait vainement d’articuler malgré des efforts surhumains doublés d’une extrême concentration mentale. Mais dans sa bouche les mots ne parvenaient pas à se former. Ses lèvres demeuraient figées et une inquiétante crispation de ses mâchoires lui interdisait le moindre mouvement de la langue. Il ne pouvait plus rien faire ; même simplement espérer paraissait illusoire. De toute façon, au plus profond de sa gorge aucun son ne parvenait à prendre vie et malheureusement cela semblait bien être définitif.
Le silence qui vibrait dans le froid de sa nuit le ceinturait désormais telle une mortelle étreinte, comme cloué au pilori pour cet inconcevable sacrifice que probablement personne ne comprendrait jamais. Il emporterait donc avec lui, c’était sûr maintenant, les raisons de cette indifférence qu’il nourrissait pour l’humanité entière, en particulier cette rancune pour l’individu qu’avait été cet homme détesté depuis toujours. Cela avait été certainement présomptueux de sa part d’aller au bout de son entêtement, mais au moins il savait qu’il partirait fier de lui tels ces héros anonymes, fantômes oubliés qui vont clopinant en désordre sur les chemins de retour d’un front aussi lointain que symbolique. Oui, il ferait partie de ces écorchés misérables et mystiques à la fois, drapés tout comme eux des derniers oripeaux de son incommensurable supplice.
La vie l’avait mené à tant de détestations que plus rien pour lui n’avait désormais de réelle importance, pourtant, comme par défi pour lui-même, afin de rassurer peut-être l’ego de sa survivance, il s’efforçait encore et encore de gémir mentalement :
« Je m’appelle Simon Leguenec, oui, je suis Simon Leguenec ».
Il était à bout de forces et, une fois encore, rien ne passa le seuil de son esprit. En son for intérieur, il ne comprenait pas vraiment ce qui lui était réellement arrivé. Dans son errance, il ne cessait de s’interroger. Pourtant cela ne lui semblait pas si difficile de simplement dire : « Simon Leguenec ».
L’ivresse de sa rancœur à l’encontre de son propre corps refusant obstinément de lui obéir le rendait fou de rage. Il n’arrivait à rien, et plus il s’interrogeait, plus il se disait qu’il n’y parviendrait jamais plus. C’était simplement effrayant.
L’obscurité dans laquelle il pataugeait était insondable, et elle suffisait à elle seule à justifier de son immense désarroi. Pour quelle mystérieuse raison ne parvenait-il plus à prononcer son propre nom ? C’était à la fois incompréhensible et terriblement stressant. Une panique d’une horrible intensité l’avait désormais envahi. Il avait perdu pied et se sentait comme un bouchon de liège, balloté par des vagues menaçantes déferlant sur une grève aussi sombre que secrète. Les contours de son misérable esprit demeureraient submergés pour toujours, et son âme moribonde dérivait sur une onde dénuée d’horizon. C’était insupportable et réellement cauchemardesque. Par moments, un improbable ressac estompait ses pires frayeurs, aussitôt remis en question par de nouveaux assauts qu’il redoutait d’être possiblement fatals. Afin de ne pas sombrer définitivement, il se raccrochait désespérément aux moindres bruits encore familiers qui parvenaient jusqu’à lui ; celui lointain et entêtant du bip régulier d’une alarme, l’impact de gouttes qui tombaient avec une régularité obsédante tout près de sa tête, et puis les battements de son propre cœur résonnant sourdement au fond de ses tympans ; tout cela le rassurait, mais si peu.
Depuis combien de temps était-il là à attendre ? Il n’en avait pas la moindre idée, d’ailleurs il ne savait même pas où il se trouvait précisément. Il lui semblait être en position allongée, mais il n’en était même pas certain. Il ne sentait plus le poids de son corps, exactement comme s’il n’en avait plus, comme s’il n’était désormais qu’un voile de brume dans lequel il errait sans le moindre contrôle de sa destination. Prisonnier à jamais d’un monde virtuel, inconsistant et vide de toute certitude. Depuis qu’il lui semblait avoir repris conscience et que cette inexplicable situation s’imposait à ses questionnements, Simon n’avait de cesse de déployer d’infinis efforts, tentant en cela de se remémorer un détail qui aurait pu resituer le contexte dans lequel il se trouvait. Mais rien ne prenait forme dans sa mémoire. C’était le black-out . Des ténèbres insondables, aussi épaisses qu’une lave bitumeuse, poissaient sa vision tout autant que son entendement. Un chaos total. Alors, pour lui-même, il s’imposait de répéter mentalement, comme on ânonnerait un numéro de téléphone afin de ne pas l’oublier : « Je m’appelle Simon, Simon Leguenec ! »
Personne ne lui répondait bien sûr. C’était horriblement inquiétant. Il était seul au monde à barboter dans cet univers absolument dénué de la plus ténue des certitudes, dépourvu de la moindre aspérité à laquelle se raccrocher, exception faite de la toute dernière de ses facultés encore fonctionnelle : celle de l’ouïe. Oui, Simon entendait parfaitement bien tout ce qui se passait autour de lui. Alors qu’il s’étonnait de l’acuité auditive étrangement décuplée dont il était soudainement doté, il perçut très distinctement le souffle que produisait l’air qui pénétrait ses narines. Et soudain, des bavardages de personnes inconnues qui échangeaient des propos le concernant semblait-il. C’était très étrange, car les conversations, qu’il distinguait désormais parfaitement, lui semblaient lointaines sans l’être vraiment. Par moments, ces personnes paraissaient être, juste à côté de lui et soudainement, elles discutaient au bout d’un long corridor. Enfin pour le reste, rien. Absolument rien ne fonctionnait normalement. C’était un cauchemar qu’il vivait éveillé sans parvenir à refaire vraiment surface. Pour la millième fois peut-être, il se hasarda, le cœur en miettes : « Je m’appelle Simon, Simon Leguenec ».
Avril 2015, Ile de la Jatte . 21 h 22
Alors que je dînais Au Petit Poucet sur l’île de la Jatte avec un ami très cher, je lui fis part d’une extraordinaire histoire que me rappelait l’endroit où nous nous trouvions. En m’écoutant, mon ami, bouleversé, jugea que cela ferait un très bon sujet pour mon prochain roman. Comme il insistait pour en savoir plus, j’entrepris donc de lui narrer l’insolite histoire de Simon Leguenec.
– Si je les connaissais ? Mais bien sûr, même très bien. Je les connaissais depuis de nombreuses années, nous allions à l’école ensemble, c’est dire. À cette époque-là, mes parents habitaient Boulevard National. Ceux de Sébastien et Joséphine avaient

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