La vengeance est un fast-food
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La vengeance est un fast-food , livre ebook

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Description

« La vengeance est un fast-food » est un roman policier dont l’action se déroule dans une bibliothèque universitaire pendant les travaux de remplacement de l’ascenseur. Un matin, les ouvriers en arrivant sur leur chantier trouvent le corps du chef d’équipe au fond de la gaine de l’ascenseur démonté. Toute l’équipe est alors interrogée. La narratrice qui fait partie de l’équipe tombe amoureuse d’un des enquêteurs. Dans l’optique d’attirer son attention, elle choisit de mener sa propre enquête. La suite se déroule dans les bibliothèques du campus, où elle alterne ses investigations et son travail de bibliothécaire.
Au cours de l’enquête non seulement on essaie de trouver le coupable, mais on redécouvre aussi les crimes notables qui ont eu lieu dans plusieurs bibliothèques nationales au cours du siècle dernier. L’enquête nous apprend aussi à interroger les catalogues et trouver un livre demandé d’après des indices approximatifs, montre comment ouvrir un cadenas à code à l’aide d’une aiguille et explique comment regarder un porno à la Bibliothèque nationale. Les références littéraires sont omniprésentes tout au long du polar. Enfin, la connaissance des différents systèmes de classifications permet de découvrir le véritable coupable dans cette histoire.
Après avoir lu ce livre, vous ne verrez plus les bibliothèques de la même façon.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 11 janvier 2019
Nombre de lectures 16
EAN13 9782312064871
Langue Français

Extrait

La vengeance est un fast-food
Elena Roumilhac
La vengeance est un fast-food
LES ÉDITIONS DU NET
126, rue du Landy 93400 St Ouen
© Les Éditions du Net, 2018
ISBN : 978-2-312-06487-1
Le chef d’équipe
Je ne connais pas les architectes qui ont conçu la bibliothèque universitaire où je travaille, mais je pense à eux quand je passe aux WC . Les toilettes du personnel sont tellement éloignées des services qu’un aller-retour prend facilement vingt minutes. Du fait de cette perte de temps, elles étaient toujours peu utilisées et encore moins depuis le sinistre accident de cet automne. Plus personne dans l’équipe n’ose y mettre les pieds.
Au mois de novembre la femme de ménage en charge des toilettes avait découvert le corps de notre collègue Yolande Gomez , décédée trois jours auparavant d’un arrêt cardiaque dans une des cabines. C’était l’odeur qui l’avait interpellée. La femme de ménage fit venir l’agent de sécurité qui appela directement la police. La cabine fut entièrement démontée, car le corps, basculé en avant, bloquait la porte. Selon le médecin légiste, Yolande était décédée l’après-midi du jeudi 10 novembre. Elle n’était pas en service public cet après-midi-là, si bien que personne ne s’était rendu compte de son absence. Comment pouvait-on imaginer une chose pareille ? Yolande était très attentive à son état de santé : nourriture d’origine biologique, pas d’alcool, ni de tabac. Adepte des traitements phytothérapiques, elle prenait, pendant la pause, des infusions qu’elle apportait dans un petit thermos.
La femme de ménage se rappelait que le 10 novembre une cabine était occupée, mais elle n’y prêta pas attention. Elle passa vite fait un coup de serpillière et descendit. Rarement utilisées, ces toilettes restaient propres longtemps. Yolande vivait seule, par conséquent, sa disparition resta inaperçue pendant tout le week-end de l’Armistice . Monique , sa collègue de longue date, fut la première à s’inquiéter. Elles avaient rejoint notre équipe à la rentrée, après la fusion de leur bibliothèque, spécialisée en histoire de l’art, avec le fonds de la BU . Monique l’appela à plusieurs reprises, mais personne ne décrocha. Et pour cause. Ce fut un choc terrible. Combien de fois n’a-t-on pas répété depuis que si les toilettes n’étaient pas aussi isolées, peut-être se serait-on rendu compte à temps et aurait-on pu la sauver. Mais il n’y avait aucune possibilité d’imputer aux architectes qui ont fait les plans de la bibliothèque universitaire de Pessac ce défaut de conception qui datait d’un demi-siècle.
***
Je tire la chasse, regarde l’heure et me lave les mains en vitesse. Je viens de terminer ma permanence à la bibliothèque spécialisée en langues étrangères et dois encore régler quelque chose avant de reprendre mon service à la bibliothèque principale. Tout à l’heure j’ai reçu un coup de fil de Garance , une collègue contractuelle. Je n’ai pas cerné tous les détails : elle parlait vite, par des phrases saccadées et entrecoupées de rapides bouffées de cigarette. Mais j’ai saisi l’essentiel : « c’était encore cet enfoiré qui l’emmerdait ».
« Cet enfoiré » est notre chef d’équipe Yann Dubois. N’ayant pas la possibilité de se cloner pour travailler seul avec ses doubles, il est obligé de nous surveiller. À peine a-t-on fait quelque chose qu’il repasse derrière et vérifie. Il ne s’agit pas que de l’équipe des magasiniers. Électricité, informatique, sécurité : i l est partout et surveille tout. Même quand il est en vacances, nous recevons ses mails avec les directives. C’est vraiment regrettable de voir que cette é tourdissante ubiquité est ainsi gaspillée avec une équipe qui ne sait pas l’apprécier.
J’arrive à la bibliothèque principale. Les travaux de remplacement de l’ascenseur sont commencés. Je monte à pied au cinquième étage, destiné aux travaux internes. Il y règne un silence inhabituel. En entrant dans la salle d’équipement, je comprends pourquoi : tout le monde regarde René. Il est le plus âgé de l’équipe et travaille ici depuis longtemps. En ce moment, il couvre un livre avec du film adhésif non repositionnable. Ce n’est pas une tâche facile, la moindre erreur est irrécupérable, mais René couvre les livres comme personne : chacun de ses gestes est précis jusque dans les détails. Le film s’accroche au livre comme une seconde peau sans les bulles et le moindre pli.
Il est si imprégné de cette grâce du travail que l’on devient hypnotisé à force de le regarder. Une fois terminé, René, visiblement satisfait, caresse la couverture et constate que tout le monde l’observe.
« Eh, oui, dit-il, un peu gêné, je caresse les livres. Il ne faut pas être choqué, ajoute-t-il pour Eva, la seule qui continue à fixer ses mains.
– Mais ça ne me choque pas du tout. Tu sais bien que, lorsqu’il s’agit de caresses, je suis ouverte à toutes formes d’expériences. »
Son regard devient rêveur et elle ajoute avec une voix pleine de sensualité :
« Je peux même me joindre à toi pour caresser ce livre.
– Ah, non, pas de dévergondage ! Je ne partage pas mes livres.
– Je te rappelle qu’ici les livres sont de la propriété publique. À partir du moment où ils sont mis en libre accès n’importe qui peut les ramener chez lui et les caresser aussi longtemps que la durée du prêt le lui permet.
– C’est vrai, consent René à contre cœur. Mais je reste le premier. »
Il le dit comme un seigneur féodal aurait parlé de son droit de cuissage.
« Je ne veux pas te faire de peine, intervint doucement Mylène, mais les premiers à toucher les livres sont les catalogueurs.
– Vous êtes loin du compte, le premier c’est André, lorsqu’il en fait la réception et y insère un antivol, remarque Maxime.
– Sa machine n’est pas en panne en ce moment ? s’étonne René.
– Elle l’est, reprend Eva, mais crois-tu réellement que sans sa machine, André ne peut pas se saisir d’un bouquin, lui déchirer sa cellophane et tout doucement lui écarter les pages sur le bureau pour y introduire sa bande magnétique ?
– Décidément, dit René, tu arrives à rendre bandant même le circuit du livre en bibliothèque. »
Eva sourit modestement. Je demande à Mylène :
« Garance est partie ?
– Oui, répond Mylène. Elle n’a pas pu t’attendre, elle devait se rendre à l’école de ses enfants.
– Qu’est-ce qu’il s’est passé avec Yann ?
– Il a trouvé un livre mal classé et en a profité pour aller la moucharder à la direction. Maryse l’a convoqué. Après Garance s’est jetée sur Yann , mais lui, tu sais comment il est, il évite le face-à-face. Il s’est barré. »
Mylène me semble avoir quelque chose de changé depuis notre dernière rencontre, mais je ne sais pas dire de quoi il s’agit. Elle se passe la main dans les cheveux et je comprends : elle a changé de coiffure. Cela veut dire que Mylène a rencontré quelqu’un. Elle va toujours chez le coiffeur avant un premier rancard.
« Tu as changé ta coupe ?! je suis contente d’avoir mis le doigt dessus, ça te va super bien.
– Merci, Ilona.
– C’est pas mal, oui, confirme Régine, en se pinçant les lèvres, mieux qu’il y a deux ans quand tu les avais courts, ça ne t’allait pas du tout, ajoute-t-elle et sans laisser à Mylène le temps de répondre elle sort avec les journaux destinés au présentoir des périodiques.
– Elle a attendu deux ans pour te le dire ? demande Bruno.
– Bien sûr que non, le rassure Mylène. Elle me l’a dit aussitôt qu’elle m’a vu et depuis elle me le répète à chaque nouvelle coupe.
– Je vais voir Yann , dis-je, j’ai deux mots à lui dire.
– Prends un numéro, dit Maxime, c’est bien sa journée. Déjà tout à l’heure Garance a promis de régler leurs différends par bourre-pif. À ce train-là, il ne va pas rentrer entier ce soir. »
Je descends au premier étage. Yann est à la banque de prêt. Dès qu’il m’aperçoit, il essuie nerveusement ses mains sur ses cuisses. Je dis : « Écoute-moi bien, Yann… »
Un bruit assourdissant provenant du chantier envahi le

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