Le pendu du transbordeur
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Français

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Le pendu du transbordeur , livre ebook

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Description

L’inspecteur MACHARD est dépêché à Rouen pour enquêter sur la découverte, au petit matin, d’un corps pendu en haut d’un transbordeur du port.


Le suicide est à écarter, la victime a succombé d’une balle dans le cœur avant d’être balancée au bout d’une corde.


MACHARD pense immédiatement à un règlement de compte au sein du « milieu » et s’en va parcourir les ruelles malfamées à la recherche de renseignements.


Il ne se doute alors pas qu’il risquera sa vie pour une affaire qui demeurera, selon ses dires, la honte de sa carrière...

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 1
EAN13 9791070035405
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0007€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

LES ENQUÊTES
DE
L'INSPECTEUR MACHARD

LE PENDU DU TRANSBORDEUR
Récit policier

Maurice LAMBERT
I
OÙ IL EST QUESTION D'UN SUICIDE QUI N'EN EST PAS UN
 
Le jour se levait, dévoilant peu à peu le décor de coques noires et rouges, hérissé de mâts de charge, qu'enrobait une tenace purée de pois.
Le port s'apprêtait à vivre sa dure journée, pendant que, sur la vieille cité encore endormie, planait le tintement assourdi des cloches. Un convoi de péniches chargées de pâte de bois de Norvège passa, à demi noyé dans la fumée du petit remorqueur qui le tirait sans hâte.
À bord d'un pétrolier, on entendait des ordres rauques en hollandais, le timbre du « télégraphe », des raclements de chaînes, le rugissement des treuils, tous les sons synthétisant l'activité qui précède les départs qu'il faut toujours exécuter sur un rythme accéléré, car, même en Seine, on doit compter avec la marée.
Du quartier Saint-Sever, de la rue Grand-Pont que dominait la masse orgueilleuse de la cathédrale, de toute l'industrieuse banlieue de Rouen, des centaines de cyclistes affluaient vers les quais encombrés de wagons, de fûts, de ballots, véritable mer d'où émergeaient les longs bras désolés des grues plantées de cinquante en cinquante mètres comme de gigantesques volatiles.
Il faisait froid. Un froid humide qui vous glaçait la gorge. Heureusement, les rideaux de fer des bars commençaient à se relever et le monde du port ne prendrait le travail qu'après la rituelle cérémonie du café arrosé.
À bord des péniches et des cargos en cours de déchargement, la vie reprenait paresseusement. Puisqu'on restait à quai, inutile de se mettre en train plutôt qu'il ne convenait. Pourtant, quelques silhouettes émergeaient des écoutilles, se penchaient sur les rambardes.
Un gros charbonnier anglais, qui sortait de cale sèche, avait raté sa manœuvre la veille et s'était écorché le flanc sur un appontement. Allait-il réussir ce matin, dans la brume ? C'était ce que se demandaient ceux qui avaient quitté leurs cabines tièdes pour voir comment l'Anglais allait s'en tirer.
D'un bateau à l'autre, des commentaires s'échangeaient. On appréciait ou l'on critiquait à quelques mètres du charbonnier qui manœuvrait lentement à grand renfort de coups de sirène. Finalement, l'Anglais, après avoir pivoté sur lui-même, se redressa dans une dernière clameur. On perçut la sonnerie du télégraphe qui ordonnait aux machines « en avant », et la lourde masse fut bientôt absorbée par le brouillard.
Par hasard, alors qu'il allait redescendre dans sa cabine, après avoir assisté au départ du navire, Joseph Barnois, le patron de la Belle-Hélène, leva les yeux si haut que son regard rencontra, à trente mètres en l'air, le tablier du pont transbordeur.
Par hasard également, dans la grisaille humide, il distingua sous ledit tablier une forme oblongue qui se balançait au bout d'une corde invisible.
« Bon Dieu ! On dirait… Mais oui, on dirait qu'il y a un pendu là-haut ! »
Il se frotta les yeux.
« C'est ce sacré brouillard ! ça donne de drôles de formes aux choses… Et pourtant… »
Barnois courut vers l'avant de sa péniche, se pencha pour héler son voisin, lui désigna l'objet de sa surprise.
La réaction du second fut identique à celle du premier et se traduisit par la même exclamation.
— Nom de Dieu ! Ça alors…
Il leur fallait se rendre à l'évidence : un homme s'était pendu à l'une des poutrelles dont l'assemblage constituait le tablier du transbordeur.
Alors, voltigeant de péniches en cargos, de remorqueurs en automoteurs, la nouvelle fit se lever les têtes.
Évidemment, on distinguait mal la chose et rien ne permettait d'assurer qu'il ne s'agissait pas d'une sinistre plaisanterie. Ce ne fut que lorsque le père Bodier émergea du poste du Jacob, avec ses jumelles marines, que l'on cessa d'émettre des suppositions stupides. Les plus sceptiques d'entre les mariniers, ceux « à qui on ne la faisait pas », et aussi ceux dont la vue était défaillante, renoncèrent à tergiverser.
— C'est bien un cadavre !
— Même que c'est un type jeune.
— Quelle idée d'aller se pendre au transbordeur ! Sans compter que ça n'a pas dû être facile.
Maintenant, les jumelles passaient de main en main. Cinquante nez pointaient vers le pendu, qui oscillait doucement au gré du vent. Chacun voulait voir et, ayant vu, tenait à exprimer son avis.
— C'est pas tout ça, grogna Barnois, mais il faut faire quelque chose. Qu'est-ce que vous en pensez, les gars ?
Il fallait faire quelque chose, ils le savaient bien, pour sûr ! Mais ils semblaient incapables de détacher leurs regards de la forme pitoyable qui les hypnotisait. Comme s'ils craignaient qu'un moment d'inattention de leur part permît au mort de disparaître !
Finalement, une discussion s'engagea. Le patron de la Belle-Hélène décida qu'il convenait d'alerter la police. Puisqu'il avait donné l'alarme, on le chargea d'accomplir cette formalité.
Cinq de ses camarades, pénétrés d'importance, l'accompagnaient lorsqu'il fit irruption au commissariat de la rue des Charrettes en hurlant :
— Il y a un homme qui s'est pendu au transbordeur !
Le poste était plein d'agents qui prenaient leur service ou le quittaient. C'est dire que Barnois put s'offrir le luxe d'étonner un nombreux public. La stupéfaction se lisait sur tous les visages.
Un pendu, c'est de la besogne courante. Mais s'il s'agit d'un farceur qui a eu la malice de choisir une potence haute de trente mètres…
— Je téléphone au commissaire, annonça le brigadier, qui prévoyait une sale affaire et qui tenait à esquiver les responsabilités.
 
* * *
 
Sur les quais, au pied du fameux pont, la foule des travailleurs matinaux s'amassait. Détail curieux, on ne regardait plus la cause de tout ce trouble. On ne pensait qu'à commenter l'événement, et les curieux échangeaient un tas de considérations que certains allaient poursuivre...

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