Le poison mystérieux
68 pages
Français

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Description

Le docteur Pastant a tout pour être heureux ! Membre de l’Académie de médecine, Commandeur de la Légion d’honneur, propriétaire de sa clinique, de bons revenus, une fortune personnelle, trois garçons et une fille qui se mariera sous peu...


De plus, il est amoureux d’une jeune femme, certes, dépensière et quelque peu vénale, mais si belle...


Malheureusement, le tableau s’obscurcit quand son fils cadet tombe mystérieusement malade et meurt en quelques semaines...


Puis, c’est au tour de l’aîné de succomber des mêmes symptômes que son frère.


Quand le benjamin est touché, la paranoïa et la suspicion s’installent au sein des survivants de la famille...


Alors que chacun s’épie, se soupçonne, se méfie de l’autre, des domestiques, de la dulcinée, d’un confrère jaloux... Fernand, le futur gendre, craignant que sa fiancée soit la prochaine visée, va mener son enquête pour découvrir l’identité du ou de la coupable avant qu’il soit trop tard...

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Informations

Publié par
Nombre de lectures 3
EAN13 9791070034088
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0007€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

LE POISON MYSTÉRIEUX
Récit policier

par René SCHWAEBLÉ
*1*
UNE MORT PRESQUE SUBITE
 
Le docteur Pastant, membre de l'Académie de médecine, commandeur de la Légion d'honneur, gagnait de deux à trois cent mille francs par an grâce à sa clinique de l'avenue de l'Alma. Ses nombreux travaux, entre autres ses deux gros traités sur la toxicologie, l'avaient rendu célèbre dans l'univers entier. Ses confrères le reconnaissaient comme maître incontesté de la science des poisons, et chaque fois qu'à propos d'un drame les experts ne pouvaient se mettre d'accord le docteur Pastant les départageait en dernier ressort.
Il possédait personnellement une fortune élevée — quatre ou cinq millions — ayant épousé la fille d'un gros entrepreneur, morte presque subitement après lui avoir donné quatre enfants avec lesquels il habitait maintenant un somptueux appartement avenue des Champs-Élysées.
Le docteur aimait assez la réclame et l'argent. Il chérissait les tableaux, les bibelots, les tapisseries, il voyait tout en grand, et ses excentricités coûteuses lui assuraient une réputation de vaniteux, d'original. D'aucuns le traitaient de fou. Au fond, bon homme, généreux, serviable à condition qu'on sût le prendre par son côté faible — la flatterie — qu'on n'hésitât pas à l'appeler « cher Maître » gros comme le bras ! Par-dessus le marché, il ne détestait pas le champagne ni celles qui l'aidaient à le sabler.
De sorte qu'il élevait un peu ses enfants à l'américaine, ne leur refusant rien, mais les laissant aller et venir à leur guise, s'en occupant en somme le moins possible. Bon père ? peut-être pas ; mauvais père ? assurément non. Aussi régnait dans la maison le plus grand désordre, chacun déjeunant ou dînant à son heure, venant ou ne venant pas, mais parfaitement heureux de rencontrer l'autre.
Les trois garçons avaient : Henri dix-sept ans, Jean seize, et André quatorze. La fille, Madeleine, qui venait d'entrer dans sa vingtième année, était fiancée à un jeune médecin, Fernand Tirol, qui, comme dans les romans, l'aimait et qu'elle aimait. Le mariage devait avoir lieu dans quelques mois. Mais le docteur s'en désintéressait complètement, ayant promis de donner trois cent mille francs de dot à sa fille, et persuadé qu'ainsi il avait rempli tous ses devoirs de père. Quand il les rencontrait il leur demandait en riant : « Ça va les amours ? », et s'en allait à ses affaires.
Ses affaires...
Justement, ce soir-là, Madeleine et Fernand en causaient :
— Après tout, disait celui-ci, qu'il l'épouse ! C'est évidemment profondément regrettable de voir un homme de cet âge, un savant célèbre, un père de famille s'amouracher d'une femme de cette espèce ; votre père abdique tout bon sens, toute dignité. Mais les génies, et c'est vraiment un génie, ont souvent de ces aberrations : une case se développe au détriment d'une autre, et chez lui la case de la médecine a détruit la case de la respectabilité.
— Et il n'y a rien à dire, rien à faire. Il est buté, et plus nous lui ferions d'observations, plus il s'entêterait. Cette femme est une habile comédienne, il la prend pour la créature la plus honnête de la Terre et pour la plus désintéressée !
— La plus désintéressée ! Il lui a déjà offert un collier de perles de cent mille francs, et, si j'en crois un bruit de banque, pas mal de chèques !
— Elle doit lui raconter des histoires extraordinaires qu'il avale naïvement. Cette Georgette Marlin n'en est pas, paraît-il, à son coup d'essai.
— Évidemment ! Mais il ne faut tout de même pas croire tout ce qu'on raconte ! il y a tant de méchantes langues ! On l'a bien accusée d'avoir empoisonné son mari, et on l'a même arrêtée pour ça et gardée en prison six mois ! Votre père, lui-même, après l'exhumation du cadavre, l'autopsie et l'examen des viscères n'a trouvé nulle trace suspecte.
— Et c'est même à ce moment que mon pauvre papa a commencé à l'aimer ! Avec sa générosité et sa fougue accoutumées, il s'est apitoyé sur le sort de cette femme qu'il croyait innocente.
— Dame ! il y a eu un non-lieu.
— N'empêche qu'on a trouvé chez elle de nombreux livres sur les poisons et entre autres les traités de papa.
— Beaucoup de femmes à l'imagination romanesque aiment à les posséder sans avoir la moindre intention de s'en servir, comme certains hommes à l'imagination guerrière aiment à s'entourer d'armes, à meubler leurs murs de panoplies de lances, pistolets, arcs, couteaux, revolvers, etc.
— Enfin... il n'y a qu'à laisser ce pauvre père agir à sa guise ! mais je crains bien qu'il ne rencontre pas avec cette femme tout le bonheur que je lui souhaite, et qu'il ne se prépare une série d'ennuis de toutes sortes.
— Ce n'est pas cela, Madeleine, qui nous empêchera, nous, d'être heureux !
— Certes ! et tout de même si, un peu... La pensée que lui ne l'est pas jettera de temps en temps une ombre sur ma félicité. Papa, voyez-vous, est très bon, trop bon. Il met les apparences contre lui, mais c'est un cœur d'or.
— Je n'en ai jamais douté !
— Il faut le plaindre. Et, ajouta Madeleine en souriant, il faut nous plaindre aussi : car je crains bien qu'entre les mains de la dame la fortune paternelle ne s'envole comme par enchantement.
— Bah ! je commence à gagner suffisamment d'argent pour nous faire vivre tous deux raisonnablement.
— Mais, ma dot !
— Que diable ! nous nous marions dans quelques mois, d'ici là l'aimable personne n'aura pas tout mangé !
À cet instant, un grand bruit de voix venant de la pièce voisine les fit tressaillir. Ils ouvrirent vivement la porte et aperçurent Henri et Jean boxant à grands coups de pied et coups de poing, et s'accablant d'injures et de menaces.
— Sale individu !
— Hypocrite !
— Tu me paieras ça !
— J'aurai ta peau, mon bonhomme !
— Tu ne vivras pas longtemps !
Fernand se précipita, et, au risque de recevoir quelques coups, il les sépara : les deux frères, le linge déchiré, la figure en sang, écumaient de colère.
— Ah ! ça ! êtes-vous devenus subitement fous furieux ? demanda le jeune docteur. Que se passe-t-il ?
Comme ils faisaient mine de s'élancer de nouveau l'un sur l'autre Madeleine intervint à son tour et se plaça entre eux. À la fin, un peu calmés, les frères ennemis s'expliquèrent : à un bal où ils avaient été quelques jours auparavant, tous deux avaient remarqué une jeune fille et tous deux prétendaient l'épouser !
— Vous êtes complètement fous, mes enfants ! s'écria Fernand. À dix-sept ans et seize ans ! Allez donc à l'école, et mouchez-vous d'abord ! Et faites-moi le plaisir de vous raccommoder et de vous tendre la main ! Si c'est permis ! deux frères !
Henri et Jean s'y refusèrent formellement, et s'en allèrent en bougonnant de nouvelles menaces de mort l'un contre l'autre.
— Il n'y a plus d'enfants ! dit la jeune fille.
Pendant ce temps, le docteur Pastant vaquait à ses... affaires. Il dînait en tête à tête avec Georgette Marlin dans un grand restaurant du Bois de Boulogne. Jamais la jeune femme n'avait été aussi ravissante, aussi séduisante. Ses cheveux blonds dans lesquels se piquaient les bleuets de son chapeau de tulle également bleu l'auréolaient d'un nimbe virginal, innocent, contrastant singulièrement avec l'audace de ses sourcils teints en noir et l'excentricité d'une robe trop décolletée. Les bras nus, délicieusement arrondis, elle fumait négligemment une cigarette, et ses yeux énigmatiques suivaient les spirales de fumée qui se dissipaient loin, très loin...
À la vérité, ses préoccupations allaient beaucoup moins loin, elles demeuraient rivées à la terre, elles étaient vulgairement matérielles : Georgette avait encore besoin d'argent ! Elle avait déjà vendu le collier de perles que le docteur lui avait donné, et pour qu'il

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