144
pages
Français
Ebooks
2023
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Ebook
2023
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Publié par
Date de parution
29 mai 2023
Nombre de lectures
5
EAN13
9782385011727
Langue
Français
Poids de l'ouvrage
1 Mo
Gabriel Noisy, un jeune peintre parisien, achète à vil prix une demeure sur la côte bretonne, un peu à l’écart du port de Morgat.
La réputation de « maison hantée » du bien n’a pas rebuté l’artiste.
Pourtant, il ne tarde pas à entendre des bruits insolites sans parvenir à en déterminer la cause.
Bientôt, il surprend, la nuit, des silhouettes humaines semblant creuser une fosse autour de chez lui.
Intrigué, apeuré, il fait appel à son ami Georges Morlon, un baroudeur à l’esprit perspicace et investigateur.
Tous deux vont monter la garde sans se douter que leurs découvertes les plongeront dans l’aventure la plus extraordinaire et dangereuse qu’ils n’aient jamais vécue...
Publié par
Date de parution
29 mai 2023
Nombre de lectures
5
EAN13
9782385011727
Langue
Français
Poids de l'ouvrage
1 Mo
I
Où Huguette apparaît
Quand, ayant pris le vapeur brestois qui longe la côte bretonne, on passe entre l'île des Morts et l'île Ronde, on aperçoit, dans la baie de Douarnenez, le petit port de Morgat. Peu de voyageurs visitaient naguère ce pays. Seuls quelques rares artistes, amoureux de la pittoresque beauté des sites, y faisaient escale pendant deux ou trois mois de l'année.
Devant le village surgissent des rochers ardus, creusés par la mer et menaçant de s'y engloutir. Il y a un siècle à peine les troupeaux allaient paître là où on ne rencontre plus que sable et galets. Aujourd'hui encore, les habitants de Morgat sont obligés de calfeutrer leurs maisons pendant les temps d'orage : les vagues de l'océan déferlent jusque dans le village.
C'est là que se passa le drame mystérieux que nous allons raconter.
Un peu à l'écart du port, isolée dans les landes, s'élevait naguère encore une maison que les superstitieux pêcheurs bretons disaient hantée. La nuit nul n'eût osé passer devant son huis et, le jour même, les femmes, en longeant la haie qui l'entourait, se hâtaient en tremblant.
Cette habitation n'avait pourtant rien de bien extraordinaire, si ce n'est qu'elle était très ancienne et qu'elle avait un étage, fait assez rare en vieille Bretagne. Elle était restée inhabitée durant de longues années, en vertu des mauvais bruits qui en éloignaient les acquéreurs éventuels. Son propriétaire, un aubergiste du Crozon, avait depuis longtemps renoncé à l'espoir de la louer.
Un jour, cependant, un jeune peintre parisien, Gabriel Noisy, captivé par la beauté tragique de la côte bretonne, l'avait acquise et s'y était installé, vivant dans une heureuse solitude.
Mais cette quiétude avait été troublée par des phénomènes qui laissaient le peintre très perplexe. Depuis quelque temps, des bruits insolites se faisaient entendre chaque nuit sans que Noisy pût en déterminer la cause.
D'autres incidents inexplicables, comme nous le verrons tantôt, s'étant produits, il avait écrit à Paris, à son ami Georges Morlon, esprit perspicace et investigateur, l'invitant à venir le rejoindre à Morgat.
C'est ainsi que nous trouvons, en ce calme soir d'automne, les deux amis causant dans une chambre que Noisy avait transformée en atelier.
Les derniers feux du soleil couchant baignaient d'un reflet d'or les toiles et les ébauches du jeune peintre et enveloppaient les deux hommes d'une atmosphère d'intimité discrète.
— Tu en étais arrivé, disait Morlon en aspirant, de sa courte pipe, de longues bouffées de fumée qui le plongeaient dans une brume violette, à cette nuit où les premiers bruits te réveillèrent en sursaut.
Noisy se recueillit, les yeux perdus dans le vague, et continua son récit un instant interrompu :
— Comme je te le disais donc, je m'étais endormi d'un sommeil lourd, après une laborieuse journée passée sur la plage. Je ne sais exactement l'heure qu'il était, lorsque les aboiements furieux de mon chien me réveillèrent brusquement. La lune éclairait ma chambre.
« — Paix, César ! criai-je.
« La fidèle bête vint se coucher au pied de mon lit, en grondant sourdement. Je prêtai l'oreille aux bruits du dehors. Parmi la plainte du vent qui faisait frémir les vitres, je crus entendre des chuchotements et des pas étouffés. Je m'habillai à la hâte et ouvris la fenêtre. Les alentours de la maison étaient déserts. Je m'armai et ouvris silencieusement la porte de ma chambre. Des bruits divers, des frôlements, des craquements de boiseries m'arrivèrent distinctement : puis il me sembla qu'une porte se refermait au rez-de-chaussée.
« Sans perdre de temps, j'allumai ma lampe et descendis. Mais j'eus beau inspecter toutes les chambres, fouiller les moindres coins et recoins, rien d'insolite ne frappa ma vue. Je crus avoir été abusé par mon imagination surexcitée et j'attribuai aux pas de quelque paysan attardé les aboiements de mon chien. Je me recouchai et cette nuit s'écoula sans autre incident.
— Jusqu'à présent, remarqua Morlon, je ne vois rien d'anormal.
— Patiente donc ! La nuit suivante, à la même heure, mêmes gémissements de mon chien, mêmes bruits étouffés...
— Même hallucination,
— Non pas, car m'étant, comme la veille, levé et habillé à la hâte, je distinguai, dans le terrain attenant à la maison, des ombres mouvantes. J'ouvris la fenêtre et je vis des silhouettes humaines qui semblaient creuser une fosse.
— Et que fis-tu ?
— Je hélai les nocturnes travailleurs.
— Tu eus tort.
— En effet, car au son de ma voix, les ombres s'évanouirent comme un songe.
— Et depuis ?
— Depuis ? Chaque nuit, je suis réveillé, à la même heure, par les aboiements de mon chien. Les mêmes bruits se reproduisent ; mais les ombres ne se montrent plus…
— Avoue, mon cher Noisy, que ces êtres sont bien peu dangereux et que tous ces phénomènes n'ont rien de bien extraordinaire. Dans quel but les personnages nocturnes que tu as vus, ou cru voir, viendraient-ils hanter ta maison ?
— C'est précisément ce qui m'étonne, l'idée de vol devant être écartée. Aucun objet n'a disparu. On ne vole d'ailleurs pas un peintre, n'est-ce pas ?
— À moins que tu ne te trouves en présence de bandits esthètes, objecta Morlon avec un sourire.
— Ce qui ne peut être le cas, ici, en ce coin perdu de Bretagne. Mais, ce qu'il y a d'étonnant, c'est que chaque matin je trouve les alentours de la maison labourés, comme si on eut fait des fouilles.
— Voilà qui est plus étrange. Qui sait si tu ne dors pas sur un trésor caché.
— C'est peu probable, hélas !
— Cette maison a-t-elle été habitée longtemps et par des propriétaires fortunés, avant que tu ne t'y installasses ?
— Non, elle est restée inoccupée pendant plus de quinze ans, comme pourra te le dire la brave vieille aubergiste qui prépare mes repas et chez qui nous allons aller tantôt. Mais, j'y songe, l'heure du souper va sonner et tu dois être affamé par un long et fatigant voyage.
— J'avoue que je ne serai pas fâché de connaître la cuisine bretonne, d'autant plus que je n'ai guère pu me restaurer en route.
— Partons donc.
Les deux amis s'habillèrent et sortirent.
La nuit tombait. Un vent âpre, venu du large, soufflait impétueusement et de lourds nuages roulaient dans le ciel. Le mugissement sourd de la mer semblait venir des confins du monde.
Noisy et Morlon arrivèrent dans une des premières maisons de Morgat, chaumière sans étage, aux contrevents de laquelle pendait, en guise d'enseigne, une branche de houx desséchée.
— Comment l'appelles-tu, ton aubergiste ? demanda Morlon.
— Anne, la vieille Anne.
— Comprend-elle le français ?
— Très bien, et elle le parle même très couramment, ayant été cuisinière à Paris.
— Tant mieux, car il n'est guère aisé de se faire comprendre en ce pays perdu.
Les deux amis pénétrèrent dans une vaste pièce mal éclairée. Au coin de l'âtre, la vieille Anne était accroupie, tandis qu'une jeune fille, dont la merveilleuse beauté s'harmonisait mal avec le costume de paysanne qu'elle portait, vaquait aux soins du ménage.
— Quelle ravissante enfant ! murmura Morlon.
— Une enfant abandonnée, la fille adoptive de la vieille Anne.
— Elle a plutôt l'air d'une princesse que d'une campagnarde.
La vieille femme s'était levée à l'approche des étrangers et les saluait avec un empressement cordial.
— Dressez vite la table, Huguette, dit-elle à la jeune fille, et mettez une nappe blanche.
Huguette se hâta, toute rougissante.
Le repas, quoique très simple, était copieux et Morlon y fit honneur.
La vieille fille s'était rassise au coin de l'âtre et contemplait les deux amis en dodelinant de la tête.
Gabriel Noisy se tourna vers elle.
— N'est-ce pas, mère Anne, dit-il, que la maison que j'occupe est restée longtemps inhabitée ?
La vieille se redressa :
— La maison hantée !... pour sûr, monsieur Noisy, qu'elle est restée longtemps sans propriétaire.
— Et pourquoi donc, ma brave femme ? demanda Morlon.
— Dame ! parce que personne n'aurait voulu y passer une nuit.
— Pour quelle raison ?
La vieille leva sur le Parisien un regard inquiet ;
— Parce qu'il y revient, répondit-elle.
— Et depuis quelle époque, continua Morlon, cette maison était-elle inhabitée ?
— Depuis la disparition de la « Dame Noire », il y a quinze ans environ.
— Qui était cette « Dame Noire » ?
La vieille Anne était heureuse de parler de tout ce qui avait trait aux temps passés. Elle se recueillit un instant et commença de sa voix chevrotante :
— On ne sait pas exactement qui était cette « Dame Noire » ; mais elle devait être de famille noble. On l'avait ainsi appelée parce qu'elle semblait vouée, par la couleur de ses vêtements et l'expression douloureuse de son visage, à un deuil inconsolable.
« La maison hantée était alors déjà abandonnée. Un soir, on vit de la lumière aux croisées : la « Dame Noire » était dans le pays. On ne savait pas d'où elle venait ni comment elle vivait. Jamais elle ne quittait son logis. De temps en temps, un vieux domestique en livrée venait, chargé de malles et de provisions, et partait le jour même.
— Elle vivait donc seule ?
— Non. Elle avait avec elle une petite fille de quatre ans environ que mon mari aperçut un jour en rentrant de la pêche. Mais elle ne garda sans doute pas l'enfant, car on ne la revit plus jamais que seule.
« Une nuit, Pierre, mon mari, me réveilla.
« — Écoute, me dit-il.
« Je prêtai l'oreille et j'entendis des cris lointains, des appels dans la nuit.
« — Habille-toi, dis-je à mon homme. Il y a un malheur.
« Pierre s'habilla et sortit.
« Au-dehors, le vent soufflait avec rage.
« J'attendis longtemps en regrettant de n'avoir point accompagné mon homme. « Peut-être, pensai-je, est-ce quelque navire en détresse dans nos parages ou un canot qui demande du secours. »
« Les cris s'étaient tus, cependant. L'inquiétude me gagnait et j'allais sortir, à mon tour, lorsque mon mari rentra tout en sueur.
« — Qu'est-ce ? demandai-je.
« Il me répondit :
« — Je n'en sais rien. Les cris sortaient de la maison hantée. J'ai vu Yvon (c'était un de nos voisins