Les Monstres
260 pages
Français

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Description

Dans les paysages austères et désertés du centre de la France, François Riera imagine une drôle d'histoire mêlant obscénité et morbidité. Les Souche, avares tenanciers d'une auberge, usent d'odieux subterfuges pour faire fructifier leurs revenus. Le couple, qui rappelle les Thénardier de Victor Hugo, vit volontairement dans l'indigence, fait passer de la piquette pour de grands vins et sert de la viande avariée. Décrits comme des bêtes, Franck et Rachel se révèlent progressivement être des meurtriers machiavéliques et dénués d'émotions, passant – littéralement – leurs victimes à la casserole. Venant s'approvisionner chez eux, plusieurs habitants du village se livrent impunément à des actes de cannibalisme. Alertés par des disparitions en série, la police mène l'enquête. Dans ce portrait au vitriol, l'auteur pousse à l'extrême le genre du roman policier, qui tourne au grotesque. La langue colorée d'expressions en patois local stimule l'imaginaire et donne au roman une saveur particulière.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 11 janvier 2017
Nombre de lectures 0
EAN13 9782414015986
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0067€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composér Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d'adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-414-01596-2

© Edilivre, 2017
Exergue

« Les personnages et les situations de ce récit étant purement fictifs, toute ressemblance avec des personnes ou des situations existantes ou ayant existé ne saurait être que fortuite. »
Samedi 28 mai 2016
I
Aujourd’hui, samedi
Il ya des lieux qu’il ne faudrait jamais visiter, des gens qu’il ne faudrait jamais rencontrer, mais une force invisible nous y contraint, elle s’appelle fatalité.
Cinq heures du matin, la brume envahit la campagne verdoyante de cette région oubliée du centre de la France. A l’extrémité Sud-Est du département du Puy-de-Dôme, en plein cœur du parc du Livradois-Forez, l’épais ruban cotonneux se répand silencieusement par les champs et les bois. L’humidité froide perle en gouttes de rosée sur l’herbe où paissent quelques vaches endormies. Au détour d’une petite route goudronnée, le bâtiment imposant et délabré de la ferme des Souche s’érige brusquement, rompant la monotonie soporifique des paysages de cette contrée sauvage. Il règne un silence pesant.
Le cri d’un coq vient briser le calme sourd de cette aurore macabre, annonçant le début d’une belle journée de printemps. La froidure mouillée de l’air envahit la chambre des Souche par la fenêtre qu’ils prennent soin de laisser ouverte, ceci dans le simple but de laisser s’échapper les odeurs animales dont ils sont de fervents producteurs. La dernière buche du poêle a finie de se consumer quelques heures auparavant.
Franck et Rachel Souche ne sont pas généreux pour ce qui concerne ce qu’ils considèrent comme superflu : le chauffage.
Il remonte l’édredon de plumes de canard sous son nez. Il tousse et tout en se redressant d’un bond, crache un beau glaviot vert sur l’une des planches du parquet. Il pense à la dure journée de labeur qui les attend, lui et sa « grosse », comme il aime l’appeler. Mais l’idée que le tiroir-caisse de leur auberge s’emplisse du tintement des pièces sonnantes et trébuchantes, le remplit d’une satisfaction qu’il exprime par un sourire béat, laissant apparaitre deux rangées de dents gâtées et jaunies par des années d’absence d’hygiène. Il est vrai que pour le couple d’aubergiste, un dentifrice et une brosse à dent coûtent cher. Cela fait partie de la longue liste de choses dont ils font l’économie depuis longtemps.
Sa femme, Rachel, git sur le flanc à côté de lui, sous son meilleur profil, lui montrant son séant pachydermique.
Elle ronfle.
La bouche grande ouverte, un filet de bave qui lui a coulé dans le cou, finit de sécher. La grosse dort d’un sommeil profond, rêvant comme à son habitude, des sous qu’elle aime compter et recompter chaque fin de journée.
Les Souche vivent dans une ancienne ferme qu’ils ont achetée à vil prix et dont ils ont soigneusement négocié le montant.
* * *
Les anciens propriétaires étaient un couple de retraités suffisamment âgés pour ne plus pouvoir rester dans cette vieille demeure. Ils étaient agriculteurs et terminaient misérablement leur vie. Lui, le père Lacombe, avait un cancer de la prostate, qui, découvert trop tard, ne lui laissait guère de chance de finir l’année. Par bêtise ou par culture, dans ces familles paysannes du centre de la France, on ne songeait à consulter le médecin de campagne que lorsque l’on avait atteint la dernière extrémité. La hantise de se faire fouiller le fondement par un inconnu, avait repoussé d’autant plus l’échéance de la consultation médicale. Bien sûr, le diagnostic avait été abrupt. Ces gens durcis aux travaux des champs, avait encaissé la nouvelle avec fatalité. C’était donc froidement qu’ils s’étaient dit que puisque la route de l’un allait s’arrêter là, il fallait désormais mettre les affaires en ordre pour l’autre. La mère Lacombe ne voulait pas rester seule dans cette vieille bâtisse, loin de tout commerce, avec comme seul voisin le père Tailledru.
Celui-ci était un ancien légionnaire qui s’était installé dans la petite maison de l’autre côté de la route lorsqu’il avait pris sa retraite de militaire. C’était un solitaire, un gars « plein de mystères », comme disait, à qui voulait l’entendre, la mère Lacombe, en levant les yeux au ciel. Le père Tailledru était taciturne. Derrière son carreau opacifié par la crasse, sa mine grise observait les allants et venants, guettant l’évènement qui viendrait rompre la monotonie de sa morne vie. En vain.
Il se contentait de la compagnie de son chien, d’un vieux chat de gouttière et de ses quelques poules.
Les Lacombe et le père Tailledru n’avait qu’une occasion dans l’année de s’adresser la parole, à la fête du 14 juillet. C’était le seul moment où tout le petit village de Saucière, commune de 304 habitants du Puy-de-Dôme, célébrait la fête nationale et le concours de pâtés en croute. Après la remise d’une couronne mortuaire sur le carré des anciens combattants, l’ensemble des villageois se réunissait autour de l’auberge afin de se laisser aller à des libations qui auraient fait rougir Bacchus. Sous la musique d’un groupe folklorique de la région, et les mélopées de vielles à roue, accordéons diatoniques et cabrettes, le petit monde rustique de Saucière se ruait dans une bourrée endiablée, s’empoignant les uns les autres à tour de bras, valsant aux quatre coins de la place. Les verres s’emplissaient et se vidaient aussi vite qu’il était permis de le dire. La fête se poursuivait jusqu’en début de soirée où, en guise de feu d’artifice, l’ensemble des fêtards mettaient un malin plaisir à se provoquer pour que cela se finisse inéluctablement par une bagarre générale. Le 14 juillet à Saucière était le point culminant de l’année où tout un chacun avait l’occasion de régler ses comptes avec le quidam dont il était le créancier. Tant les hommes que les femmes profitaient de l’occasion pour se soulager d’une rancœur ou d’une jalousie, d’un mot dit de travers ou répété à mauvais escient.
Les Lacombe avaient donc liquidé l’ensemble de leurs terres, pour la plupart en jachère, à des voisins paysans.
Restait cette bâtisse dont ils firent paraitre l’annonce de la mise en vente sur le quotidien local. Ne trouvant acquéreur, ils élargirent leurs investigations au grand Sud-Est.
Les Souche relevant l’offre, sautèrent sur l’occasion. S’étant renseignés auparavant sur l’histoire des vendeurs, ils flairèrent immédiatement la bonne affaire. Ils se présentèrent très intéressés, puis très vite dédaigneux dans le but d’une négociation vile et sordide, dont ils avaient l’usage. Le jeu des marchands du temple fonctionna et le prix chuta si bas que les Lacombe s’en furent dégoutés par la bassesse et l’avarice des Souche. Mais l’affaire était conclue. Madame Lacombe aurait un petit pécule pour agrémenter sa retraite. Des parents lointains avaient eu l’humanité de proposer de les accueillir chez eux.
Les Souche avaient effectués quelques travaux de restauration afin de rendre viable les lieux. Le stricte nécessaire avait été réalisé par Franck et la grosse Rachel. L’acte de vente n’était pas encore signé que le père Souche avait déjà finement établi dans sa tête, un plan comptable de tous les investissements et travaux à réaliser. Il en avait fait part à sa moitié qui elle-même avait trouvé d’autres moyens pour économiser leur précieux argent. L’association des idées des deux « harpagons » avait donné lieu à un bel exemple de mesquinerie.
L’eau coulait d’une source derrière la maison. Le raccordement à la bâtisse avait été fait prestement par le père Souche au moyen d’un tuyau de plastique qu’ils avaient « emprunté » lors d’une balade nocturne. Il n’était pas question pour les Souche de payer l’eau de la ville.
L’électricité avait été réduite à sa plus simple expression : une ampoule au plafond de chaque pièce. Hors de question pour les deux rapaces d’engager des frais inconsidérés dans l’achat d’électroménager, pour chaque cas de figure une solution avait été trouvée. Ils s’étaient passé jusqu’à présent de tout confort moderne, ce n’était certes pas maintenant, après avoir fait l’investissement d’une nouvelle vie, que cela allait changer.
La « gatouille », un débarras attenant à la cuisine, était suffisamment fraiche pour servir de frigo. Pas de machine à laver. Un ancien abreuvoir qui servait de jardinière devant l’entrée de la maison avait été restauré par Franck. Il avait ôté toute la terre et amené un tuyau de la source au bout duquel il avait fixé une vanne. Pour la cuisine il avait agi de la même façon au-dessus de l’évier en béton. La grosse Rachel pourrait y laver son linge comme elle le faisait auparavant, une fois par mois, à l’eau de source et au charbon de bois, ainsi que les bonnes sœurs le lui avaient appris.
La salle de bain était un concept de la civilisation occidentale, un confort moderne, qui échappait aux Souche. Ils avaient conservés le lavabo ainsi que le bac de la douche. Le chauffe-eau avait été démonté et revendu pour quelques pièces qui vinrent compléter leur magot.
Comme disait toujours le père Souche : « l’eau chaude, çà ramollit les chairs ! ». Et surtout ça coute des sous.
Quoiqu’il en soit, l’hygiène chez les Souche n’était certes pas au centre de leurs préoccupations.
* * *
Le réveil sonne. Franck abat sa main boudinée et velue sur celui-ci pour l’arrêter. Il bâille et s’étire. Quelques vertèbres craquent.
Il Pete.
Une odeur âcre et chaude envahit la pièce. Un grognement animal s’échappe de la bouche de Rachel. Elle ouvre un œil vitreux, l’haleine encore chargée des effluves du vin de la veille.
Franck s’assoit sur le lit et se gratte les couilles. Cela fait longtemps qu’il ne s’est plus réveillé sur la béquille et pourtant l’idée furtive d’une copulation frénétique lui trave

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