Lettre d un Adjudant-chef à la République
114 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Lettre d'un Adjudant-chef à la République , livre ebook

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
114 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Depuis son enfance dans les années soixante-dix, Roolphe Yam-dé a toujours eu du mal à trouver sa place : ballotté entre la Guinée-Bissau et le Sénégal, tiraillé entre les femmes – marié malgré lui –, les religions – le christianisme et l'islam – et l'armée, le jeune homme verra son destin constamment lui échapper. Lorsqu'une blessure de guerre le cloue sur un fauteuil roulant, son équilibre précaire vole en éclats. Sa femme le quittera, l'État l'ignorera, les autres le mépriseront...

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 18 octobre 2013
Nombre de lectures 2
EAN13 9782342014341
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0060€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Lettre d'un Adjudant-chef à la République
Ansou Boroko Mané
Société des écrivains

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Société des écrivains
14, rue des Volontaires
75015 PARIS – France
Tél. : +33 (0)1 53 69 65 55
Lettre d'un Adjudant-chef à la République
 
 
 
 
 
 
 
La Lettre d’un Adjudant-chef à la République est un roman qui expose l’une des facettes de la culture du peuple balante. Dans ce roman, on nous parle du bétail, perçu comme richesse qui divise une famille et des exigences de la société moderne, auxquelles doivent faire face les conservateurs.
Il relate également la vie de Roolphe Yam-dé, le principal héros, fils de celui qui héritait du bétail de son père et qui sera contraint de tout abandonner pour fonder son propre village.
Prédestiné à gérer les biens de son papa, Ambaya sera le seul de la famille à ne pas être inscrit à l’école, et ce, selon les vœux de son père, Yam-dé.
Touché par ce handicap, une fois dans son village, il s’investit dans l’éducation et la scolarisation de ses trois enfants, dont Roolphe Yam-dé, son fils aîné, inscrit à l’école privée de Simbandi Balante, à vingt kilomètres d’Angobir, à la lisière de la frontière avec la Guinée-Bissau. Il sera confié à un ami de son père, Boniface Mané, et ne rendra visite à ses parents que tous les quinze jours.
Orienté vers le lycée Charles de Gaulle de Saint-Louis du Sénégal, après la réussite de son examen d’entrée en 6 e secondaire, Pythagore, surnom qu’on lui a attribué du fait de son intelligence, fera l’objet de tiraillements entre son père et un prêtre, qui voudraient qu’il fasse la théologie, et sa mère, qui voit la vie pastorale comme une fin à la lignée. Il sera arraché par des missionnaires catholiques après de rudes rencontres familiales.
Choyé par ces jésuites à chaque fin d’année, il fait l’objet de rivalités parmi les jeunes filles de la contrée ; il devient populaire. Il commence à les fréquenter au vu et au su de tous. Il trouve une copine du nom d’Eugénie Sadio, qui portera un enfant dont il est le père. Il est en classe de 1 re secondaire. Sachant qu’il sera exclu de l’institution religieuse, il tente le concours de l’École nationale des sous-officiers d’actifs (ENSOA) de Kaolack. Admis, il poursuit la formation militaire pendant deux ans, pour sortir avec le grade de sergent. À l’issue de celle-ci, on l’affecte à la base militaire des commandos de Thiès, d’où il tisse de nouvelles relations avec une fille qu’il marie malgré lui, car il avait promis mariage à Eugénie. Les parents de sa nouvelle rencontre lui imposent la conversion à l’islam, sinon on le traduirait en justice pour détournement de mineure engrossée, selon l’article 348 du Code pénal sénégalais. Il sauve sa peau. Il marie donc la fille dans la précipitation, à l’insu de ses propres parents. Mis au courant, ces derniers n’admettent pas le mariage exogamique. Il entretient de moins en moins de liens avec les siens. Il échelonne avec le temps. Mais, par devoir de mémoire, l’Adjudant-chef doit régulièrement se confier aux dieux des ancêtres pour tout examen, toute mission qu’il devra honorer, et ce, dans son village.
Malheureusement, envoyé d’urgence au front en Casamance en état de guerre, il n’a pas le temps de se rendre au village pour se conformer au rituel traditionnel. Il sera blessé, évacué en avion militaire de Ziguinchor à Dakar, où on l’internera à l’hôpital principal pour une durée de six mois.
Devenu handicapé, l’Adjudant-chef est incapable de s’habiller, de manger, de faire ses besoins seul et, pire, d’entretenir des rapports sexuels. Sa femme, ne trouvant plus la satisfaction sexuelle, finit par l’abandonner. Ses parents ont eu raison en ce qui concerne son mariage.
L’État du Sénégal l’ignore dans sa prise en charge sociale, psychologique et financière, voire matérielle. Il adresse alors une correspondance au président de la République. Son traumatisme est également celui qu’ont subi des dizaines de militaires, gendarmes et policiers, blessés aux champs de bataille. Ils continuent à être blessés par l’inertie de l’État, après tant de sacrifices pour la nation, pour la défense de l’intégrité territoriale.
Ils sont également méprisés par leur entourage immédiat. Comment les aider à surmonter leurs blessures morales, psychologiques ?
 
 
 
SibidjMaany
 
 
 
Tenaillé entre une vallée bordée de palmiers et une végétation luxuriante, aux abords des rizières qui font la convoitise des villages environnants, et un plateau de champs fertiles, SibidjMaany était ce petit village de moins de 600 habitants où vivaient en harmonie des Peuhls, cousins à plaisanterie des Balantes, des Manjacks, des Mandings et des Mancagnes réfugiés de la Guinée-Bissau.
Il aurait été fondé, paraît-il, au début des années vingt par un certain Cissel, venu de Simbandi Balante. Les sages et historiens du village avançaient que le premier né du village était un certain N’Faanda Booroly. Pour en reconstituer l’histoire, personne à SibidjMaany n’était en mesure de donner la date de naissance de ce premier citoyen du village, encore moins Booroly lui-même.
Le seul repère que les sages avaient retenu, c’est qu’il avait été fondé tout juste après la Première Guerre mondiale.
L’abondance de ses rizières, qui restaient par moments inexploitées, de ses champs fertiles, du marigot qui l’arrosait, de même que son immense potentiel forestier, faisait de ses habitants de braves exploitants agricoles et halieutiques du milieu. Toute personne qui y vivait avait ses terres à exploiter, selon ses capacités. Les plus courageux étaient récompensés au mérite de leurs efforts physiques. Ici, marier deux ou trois femmes était le signe d’une grande aisance. Ceux qui étaient hissés à ce rang social étaient le plus souvent des propriétaires terriens et d’animaux.
Yam-dé, camarade d’âge de N’Faanda Booroly, était de ces hommes qui avaient su se placer au sommet de la société dans le village. On avançait qu’il exploitait des champs à perte de vue. Jamais dans sa maison il n’y avait de jour où les trois repas n’étaient pas assurés. On disait qu’il était le philanthrope du village pendant la période de soudure. Dans sa maison, on mangeait le mil, le maïs et le riz douze mois sur douze et on disposait d’un troupeau de cent bœufs, d’une quarantaine de chèvres et d’une vingtaine de porcs.
Yam-dé possédait la plus belle construction dans le village. Il était le seul à être propriétaire d’un bâtiment en banco couvert de tôles ondulées. Il disposait également de deux vélos, dont l’un était réservé à ses enfants, et d’un poste transistor. Sa maison était devenue l’hôtel du village. C’était ici que les camarades de son âge et ceux de ses enfants venaient écouter les informations du monde ou emprunter un vélo. Le confort de Yam-dé n’était pas bien accueilli par l’ensemble de la population. Il s’était vu, sur son passage, des gens jaloux de sa réussite, prêts à lui ôter la vie. Il s’en rendit compte le jour où un serpent insolite fut appréhendé dans son guidionkhon 1 .
Quant à ses deux femmes, elles se montraient hautaines, fanfaronnes devant leurs copines du village. Une attention particulière leur était accordée au cours des rencontres féminines. Leur maison était le siège des dames. Elles ne cessaient de vanter la bravoure de leur époux à qui voulait l’entendre.
Ailleurs, dans d’autres familles, des scènes d’histoires étaient notées çà et là, compte tenu des chapelets de doléances de certaines femmes qui auraient voulu égaler les dames de Yam-dé.
Booroly, ami inséparable de Yam-dé, son confident de tous les jours, eut l’audace de le convoquer pour lui parler de son inconfort par rapport aux plaintes et sollicitations de son épouse…
 
 
 
La rencontre
 
 
 
Comme à l’accoutumée, chaque nuit, Yam-dé s’installait dans son petit salon, les oreilles collées à son petit transistor, pour écouter les informations. Analphabète, il parvenait tant bien que mal à glaner quelques mots en langue française.
— Avez-vous passé une belle journée ? s’exclama dans l’obscurité le visiteur noctambule.
— Qui est-ce ? s’interrogèrent les épouses de Yam-dé.
— Vous ne reconnaissez plus ma voix ? C’est moi, Booroly. Où est mon ami Yam-dé ? ajouta-t-il.
Dikgou, la première épouse, lui notifia qu’il était dans son salon. Elle partit l’aviser en laissant dehors Booroly avec sa coépouse en train de bavarder.
— N’Faanda, il te demande de le rejoindre dans son salon, lui dit-elle.
—  Iourrara déé Yam-dé 2  ! lui dit N’Faanda Booroly.
Et à Yam-dé de répondre que tout allait bien. Il installa confortablement son visiteur dans un fauteuil exclusivement réservé à ses invités de marque, qu’il avait acheté lors de son premier voyage à Dakar.
— Tu m’apportes une bonne nouvelle, N’Faanda ?
— Oui, je viens te voir pour attirer ton attention sur un fait. Aujourd’hui, Dieu a fait que tu es le plus aisé du village. Et par rapport à cela, nous nous sentons sous-estimés par nos épouses qui nous réclament des vêtements parce qu’elles veulent s’identifier aux tiennes. En tant qu’ami, cousin maternel, je voudrais que tu puisses leur parler pour contrôler leurs langues lorsqu’elles sont en groupe. Certains acquis doivent rester dans la discrétion. C’était le message que je t’apportais cette nuit.
— Merci beaucoup pour ton franc-parler. Je te suis reconnaissant pour ton comportement. Ce sont elles qui me vendent dehors, ma peau est vendue par elles-mêmes. Ce sont de tels discours qui peuvent précipiter ma mort, me nuire, car elles multiplient les ennemis, les jaloux. Dès demain nuit, je les convoquerai pour leur crac

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents