25
pages
Français
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2017
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Ebook
2017
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Publié par
Date de parution
28 janvier 2017
Nombre de lectures
5
EAN13
9791096448036
Langue
Français
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Date de parution
28 janvier 2017
Nombre de lectures
5
EAN13
9791096448036
Langue
Français
Poupée noire pour petite fille blanche
Pharmakon Jazz Tango I
Michel Juste
2017
ISBN:9791096448036
Cet ebook a été réalisé avec IGGY FACTORY. Pour plus d'informations rendez-vous sur le site : www.iggybook.com
Table des matières
De Marietta au pays basque
Marc
Paysages
L'esprit de sable
Une philosophie et un béret
De Marietta au pays basque
Ellen est née le 2 juin 1988 à Atlanta en Géorgie (Etats Unis). Née de parents aisés, issus de familles anciennes, sudistes et catholiques. Elle avait tout pour être une petite fille modèle : des parents attentionnés, une famille protectrice, et une vie bien réglée et conforme aux standards américains blancs de cet état du sud. La propriété de ses parents était située à Marietta, dans la banlieue d’Atlanta, au bord d’une petite rivière. Elle avait été élevée dans cette ambiance faite d’aisance matérielle, de joie familiale et d’une certaine indifférence vis à vis du monde extérieur.
Son père était directeur dans une usine textile de la région, fier de sa réussite et de sa famille à laquelle il prodiguait tout le temps qu’il pouvait. Ellen était sa seconde fille, la cadette, et il avait un fils – Henry – né deux ans après Emilie leur première fille.
Une famille unie et bienséante dans laquelle Ellen avait grandi.
Sa sœur et son frère avaient trouvé leur voie et leur bonheur – c’est ce qu’elle se disait, à la fois pour se rassurer et pour se donner du courage à réussir – et son père ne manquait pas de lui rappeler à mots couverts.
Que de questions s’était-elle posées durant son enfance, sans trop d’explications suffisantes, jusqu’à l’arrivée brutale des réponses parfois violentes de l’adolescence.
Et aujourd’hui, elle se rappelait une partie de sa jeunesse, mélange de gênes, de plaisirs et de découvertes et parfois de rébellions.
Elle avait obtenu son diplôme final et elle savourait aujourd’hui cette petite victoire sur la vie et sur elle même comme pour se prouver qu’elle était capable de faire aussi bien que les autres.
Ces autres qui l’inquiétaient beaucoup quand elle était petite fille, dans ce milieu qu’elle trouvait maintenant guindé et décalé. Mais tout le monde l’avait félicité, chaleureusement et sincèrement, sa mère étant particulièrement heureuse pour sa petite dernière vis à vis de laquelle elle avait toujours eu un sentiment singulier.
Et elle avait une autre raison de se réjouir et de penser à ces autres. Elle venait de recevoir une carte de son oncle Marc qui la félicitait aussi pour sa réussite à son dernier examen et diplôme. Il l’invitait aussi à venir passer quelques jours en France pour ses vacances. Son oncle Marc ! Elle ne l’avait pas revu depuis de nombreuses années : combien ? : 12, 15 ans ? Elle se rappelait que c’était à l’occasion d’un de ses anniversaires.
Et elle se rappelait très bien ce jour là, il faisait beau et déjà chaud. Après le repas, l’ensemble de la famille était parti se promener le long de la rivière. Le soleil était haut, éclatant dans le ciel bleu comme garant de la sérénité du moment. Et la plus grande surprise fut l’arrivée de son oncle, venu à l’improviste, pour elle ! Et il avait apporté un cadeau magnifique : cette poupée au sourire charmant et avec une robe blanche avec des dentelles, de beaux cheveux à coiffer et sa couleur noire comme celle de Susie, qui s’occupait de la maison.
Tout le monde n’était pas aussi heureux qu’elle. Son père prenait mal cette arrivée non prévue, et avec ce cadeau ! Pour ses grands parents, offrir une poupée noire à une petite fille blanche du sud relevait de la provocation et de l’obscénité. Mais Ellen ne comprit que plus tard toutes ces querelles de grandes personnes et ce poids de la tradition devenu poisseux comme l’atmosphère de fin d’été. Par la suite, sa mère l’avait beaucoup aidé à déchiffrer les non dits, les sous entendus, les oublis, les fausses colères et les idioties. Sa mère aimait énormément son frère Marc, il représentait pour elle un refuge, l’ultime barrière avant le conformisme et l’ennui. Et c’est aussi elle qui avait prévenu Marc des résultats de sa fille Ellen. Elle avait trouvé formidable l’idée de Marc d’inviter sa nièce à passer des vacances chez lui en France.
Ellen avait encore mal dormi, et se sentait lasse. Elle venait de rompre avec son petit ami. Un moment douloureux car ils se fréquentaient depuis deux ans déjà. La décision fut difficile, mais heureusement, partagée. Chacun voulait rester sur ses positions et elle n’avait pas accepté de céder simplement parce que son ami était soit disant du sexe dit dominant. Restaient les souvenirs, les doutes et toujours des questions qu’elle essayait de mettre de côté, mais sans grand succès pour l’instant. Maintenant qu’elle avait son diplôme, il lui restait quatre mois avant de déménager sur Chicago. Elle avait longuement préparé son installation, calculant tout. Et tout était prêt pour son futur travail. Elle disposait d’un diplôme de pharmacien avec une spécialisation en science forensique : elle maîtrisait les méthodes d’investigation et d’analyse pour les enquêtes judiciaires dans les domaines criminel et légal. Et elle se réfugiait dans son projet pour oublier le reste, considéré comme un échec ou une expérience selon son humeur.
Ce matin là en prenant son petit déjeuner, Ellen tenait cette carte entre ses doigts, une carte d’invitation en fait, bien tournée. Hier soir, en remontant dans son appartement après avoir récupéré son courrier, elle l’avait lue et relue, s’imaginant déjà partie, loin de son quotidien devenu terne et carrément barbant. C’est ce qu’elle ressentait à présent que la tension liée à son dernier examen était levée, et elle subissait le contre coup de sa séparation, jusqu’à ne plus supporter sa solitude.
Son enfance, sa jeunesse adolescente, ses études, sa relation désertée, lui donnaient un sentiment de gâchis qui la mettait mal à l’aise. Tout n’était pas négatif, mais elle avait l’impression d’avoir mal utilisé son temps, de n’avoir pas su faire le mieux avec les possibilités dont elle disposait.
Elle appela sa mère le soir même, une longue discussion pour parler de son oncle et de cette invitation à la fois surprenante et originale qui la tentait. Mais elle voulait se rassurer en écoutant sa mère lui parler de Marc, de sa vie et de ce qu’elle pourrait faire là bas. Sa mère lui confia la complicité qu’elle partageait avec lui, depuis leur enfance, et ce, malgré cette séparation subie quelques années après son mariage. Ellen allait voir autre chose, un autre mode de vie, et sans le savoir vraiment elle irait chez Marc à sa place. Elle lui parla aussi des goûts de Marc, tournant ses phrases pour annoncer enfin que Marc était gay. Cela ne choqua pas Ellen, mais elle fut intriguée, comprenant mieux les histoires familiales passées, le poids des préjugés, et elle était d’autant plus attirée par ce personnage, à la fois proche et lointain. Et différent.
Ellen appela son oncle très rapidement, dès le lendemain en fait, une discussion délicate au départ, mais Marc la mit vite à l’aise et l’encouragea à préparer son voyage le plus tôt possible, et il s’arrangerait pour lui consacrer du temps, entre ses diverses occupations.
La perspective de ce voyage en Europe lui occupait l’esprit, elle fit les démarches administratives et alla réserver un billet d’avion pour Paris, aller et retour. Sa mère lui avait bien sûr promis de participer largement à cette dépense, ce qu’elle avait accepté avec plaisir, préférant garder ses économies pour ses frais sur place.