Veni, vidi, Vichy
21 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

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Description


Une enquête à Vichy

Dès son arrivée devant l'hôtel Aletti de Vichy, le commissaire retraité Langsamer est accueilli par une agitation pour le moins inhabituelle dans cette tranquille station thermale auvergnate.
Puget, le commisaire local, se trouve être un ancien camarade d'université de Langsamer. Ce dernier a donc tôt fait d'être informé de la situation : un célèbre jockey anglais vient d'être retrouvé mort près de la piscine de l'hôtel... Les talents d'enquêteur de Langsamer vont encore une fois se révéler bien utiles.



Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 14 août 2014
Nombre de lectures 8
EAN13 9782823818857
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0011€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

couverture
Jean-François Pré

Août meurtrier

Veni, vidi, Vichy

12-21

C’est en traversant le pont de l’Allier, avec tous ces drapeaux qui claquaient au vent, couleurs flambant sous le soleil, qu’on se sentait vraiment à Vichy. Georges Langsamer adorait cette entrée en ville. On avait la sensation de franchir la frontière des vacances. Le monde du labeur derrière soi.

Sitôt après le pont, il prit à gauche pour longer les quais de l’Allier pendant trois cents mètres, puis ensuite tourner à droite. Il aperçut alors les frondaisons du parc et les murs de l’hôtel Aletti, sur sa droite. En début d’après-midi, la station thermale somnolait. Comme pour se mettre au diapason des curistes dont le processus digestif empesait la mobilité. Le mercure faisait toujours des bonds en été. À Vichy, on ne parlait pas d’effet de serre mais d’effet cuvette. Avec l’air continental pour ventiler la rôtissoire. Aux heures chaudes, il n’y avait jamais grand monde dehors. C’est pourquoi Langsamer fut surpris par l’animation qui régnait devant la porte tambour de l’hôtel. Un policier en uniforme lui fit signe de circuler. Il objecta qu’il avait retenu une chambre à l’Aletti, mais rien n’y fit. On lui demanda d’aller se garer ailleurs. Plus intrigué que contrarié, il s’exécuta, contraint de retourner sur les quais pour trouver une place. Il laissa ses affaires dans le coffre et revint vers l’hôtel, pensant envoyer un groom chercher sa voiture quand les choses se seraient calmées.

Quelles choses ?

Dans le hall de l’Aletti, policiers et civils couraient tous azimuts, en état de surexcitation. Téléphone collé à l’oreille, la main en porte-voix, certains hurlaient dans le brouhaha, pour se faire entendre de leur correspondant. Langsamer en déduisit qu’il s’agissait de journalistes. À coup sûr, il s’était passé quelque chose. Sur le chemin de la réception où il allait se faire connaître, l’ex-fonctionnaire de police entendit crier son nom. Il se retourna et reconnut immédiatement Puget, le commissaire de Vichy. Ils avaient fait leur droit ensemble, rue d’Assas à Paris. Depuis, ils s’étaient revus deux ou trois fois puis, délocalisés, l’un à Deauville l’autre à Vichy, leurs rencontres s’étaient espacées pour devenir inexistantes. Gérard Puget n’avait pas changé. Petit bonhomme sec et nerveux, il était resté tel quel, seules les années avaient laissé leurs traces sur son visage. Ses cheveux étaient toujours noirs comme du jais… ou peut-être se les faisait-il teindre. Sa tenue demeurait très soignée et son brushing, susceptible de résister à un vent de force neuf. La notabilité vichyssoise n’aurait jamais toléré un commissaire débraillé.

– Qu’est-ce que tu fous là ? demanda-t-il.

Langsamer haussa les épaules.

– Comme tout le monde.

– Ne me dis pas que t’es venu boire cette saloperie d’eau sulfureuse ! s’exclama Puget avec un rictus de dégoût.

– Ça, mon vieux, c’est un alibi médical. En fait, tu n’es pas sans savoir que la Grande Semaine des courses a été déplacée de juillet en août. Tu connais mon péché mignon pour la flambe…

– Tu parles si je sais qu’il y a des courtines en ce moment, dit Puget en désignant d’un signe de tête le charivari qui régnait dans son dos. Avec ce qui nous arrive, ça serait difficile de ne pas le savoir.

– Qu’est-ce que c’est que ce bordel, au juste ?

– Viens voir.

Puget prit Langsamer par le bras, l’attirant vers le couloir menant à la piscine. Ils coupèrent deux barrages d’agents en uniforme et enjambèrent les scellés. Devant l’eau bleutée, dans un fracas de tables et de chaises cassées, gisait un corps. Un corps duquel la vie s’était échappée, comme le sang qui nappait le carrelage autour du crâne brisé.

– Il est tombé du dernier étage, expliqua Puget. À l’heure du déjeuner. La terrasse de la piscine était pleine. Une chance qu’il n’y ait eu qu’un mort ! Pas un blessé chez les clients du restaurant, juste une dame qui a perdu connaissance. Le mort a traversé le dais et s’est abîmé sur la table voisine de la sienne.

– Suicide ?

– Suicide ou meurtre. On ne sait pas. Ça s’est produit il y a une heure à peine.

– C’est qui ? demanda Langsamer en désignant le cadavre qui gisait sur le ventre.

– Justement, quand on parlait des courtines… C’est un jockey. Assez connu, paraît-il.

– Tu as son nom ?

– Je n’y connais que dalle, moi. C’est un Anglais. Grimm ou un nom comme ça.

– Grimes, Ted Grimes, corrigea Langsamer, en hochant la tête avec une moue de respect. C’est une star internationale. Tu vas avoir tout le gratin des courtines sur le dos.

– C’est déjà le cas, dit Puget en se retournant, son regard croisant l’objectif de plusieurs caméras.

– Bon, fit Langsamer, je vais te laisser faire ton travail et tâcher de trouver quelqu’un, dans ce capharnaüm, pour me conduire à ma chambre.

– On se retrouve pour l’apéro ? proposa Puget. 19 heures au bar, ça te va ?

– Si tu veux… mais je suis en vacances. Ne l’oublie pas !

Langsamer préférait mettre les points sur les « i ». Chaque fois qu’il se trouvait sur un lieu de villégiature, un mort tombait du ciel. Comme un fait exprès. Chaque fois, le commissaire du coin était un ancien copain. Comme un fait exprès. Chaque fois, on lui faisait comprendre qu’il pourrait peut-être mettre ses neurones au service de la Mère Police. Comme un fait exprès. Et la retraite, bordel !... À croire qu’un esprit maléfique lui filait le train dès qu’il commençait à respirer l’air des vacances.

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