Rouge
78 pages
Français

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Rouge , livre ebook

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Description

Sous la forme de courtes « Nouvelles », la narratrice évoque une enfance drôle et colorée, parfois douloureuse ; son départ en sanatorium religieux et à son retour à la maison après le décès de son père. De sa naissance à ses seize ans, nous nous attachons au parcours atypique et souvent jubilatoire d'une petite fille qui devient une adolescente « difficile ».

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 21 novembre 2012
Nombre de lectures 0
EAN13 9782332522832
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0052€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright














Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-332-52281-8

© Edilivre, 2014
Rouge
Je sors avec peine du ventre de ma mère. Un 10 juin.
Elle mange des cerises entre chaque contraction. J’en garde le goût du rouge.
Rouge comme le sang, rouge comme la vie qui flamboie et s’éteint comme braises en cheminée.
Elle a mis plus de treize heures à m’expulser.
J’ai les cheveux rouges à la naissance… Elle se sent coupable. De quoi ?
Ma mère est âgée. Quarante-deux ans. Ce n’est pas raisonnable.
Plus de dix années se sont écoulées depuis ce funeste 10 juin 1944, mais rien ne s’efface dans ma famille. Mon arrivée dix ans plus tard n’est donc pas la bienvenue… Pas ce jour là !
Je nais dans cette maison qu’elle n’aime pas. Trop de souffrances y sont rattachées. La guerre surtout. Les privations. L’absence de mon père parti la faire… cette guerre étrange. Deux enfants à nourrir. Ma sœur et mon frère. Et tous ces lourds secrets que l’on chuchote entre femmes, dans la cuisine d’où je suis exclue.
J’ai deux ans.
Le jardin, autour de la nouvelle maison que ma mère a enfin obtenue, devient ma grande passion.
Un appel rythmé, les saisons, leurs odeurs, leurs couleurs.
Un caillou rouge et pointu devient mon premier ami. Je tourne, je tourne de plus en plus vite autour de lui avec mon cyclorameur, rouge lui aussi.
Embardée, chute sur le caillou, rouge aussi le genou.
J’ai quatre ans.
Je pédale vite sur mon petit vélo, les framboisiers m’attendent au coin de la maison.
Rouges les genoux, rouges les mains et la robe blanche.
J’ai cinq ans.
C’est ma première rentrée scolaire. Je refuse en hurlant de monter d ans la 4CV de monsieur Rault.
Rouge de colère maman dans la cuisine.
J’ai six ans.
Il neige, je suis en retard. Dans la cour de l’école, Mme Martineau prend son sifflet et me fait un grand signe. J’ai peur. Je fais pipi debout. Rouge de honte.
Le printemps est là.
Pourquoi j’aime tant ma salopette, les coquelicots, les cerfs-volants, les papillons et les poissons rouges ?
Pourquoi l’herbe coupée « ça sent si bon » quand il fait chaud et beau dehors ?
Pourquoi je suis moi ? A cet endroit là ?
Avec ces parents-là ?
Je veux que l’été ne cesse jamais. Je veux aller tous les soirs, ma main dans celle de mon père, voir la Micheline rouge, passer à neuf heures précises, sous le pont des Fainéants.
Je veux m’enivrer de l’odeur de grésil et de papier goudronné quand il fait chaud dans la cabane à outils. Je m’y cache pendant des heures pour lire tous les vieux journaux que mon père garde dans une malle. J’aime l’odeur des vieux papiers. Et, même si je ne comprends pas tout ce que je lis, je fais de sacrés voyages dans la vie des grands.
Le fils des voisins est venu m’y retrouver avec des illustrés. Il a mis sa main dans ma culotte.
Je n’ai pas pleuré mais je lui ai demandé de partir, avec un drôle de voix.
Je veux être un garçon, jouer et dormir dans le jardin pour regarder les étoiles.
J’ai eu une nouvelle bicyclette pour mon anniversaire. Elle est rouge. Je peux sortir du jardin. Je pourrai aller seule à l’école à la prochaine rentrée. J’ai peur mais je l’aime cette peur nouvelle.
Je découvre la rue, ses maisons, ses habitants, chaque jour un peu plus.
Ce matin monsieur Flandre dort dans le fossé, son vélo et sa bouteille de rouge, vide, sont couchés sur lui. Je sais qu’il habite dans une cabane, pas loin d’ici, mais ce n’est pas la route de l’école, je n’ai pas le droit d’y aller. Dommage.
Je regarde bouger les poils de son nez.
Il est tout rouge et ses ronflements me font rire.
Quelle belle journée qui commence…
Une bien belle journée
Ce matin, je suis très occupée à organiser la circulation dans les allées du jardin.
Les gendarmes, dans leurs habits noirs gansés de rouge, empêchent bêtement les fourmis de se rendre au travail ; je suis intervenue en mettant les premiers dans un bocal en verre et en criant très fort : le chemin est libre ! J’ai remarqué que les fourmis n’entendent pas très bien.
Le ciel est bleu et sent le « vert » des tiges coupées des grands lys que mademoiselle Alphonsine apporte à la Vierge Marie – qui entre nous soit dit – préfèrerait sûrement du lait ou des gâteaux pour son petit garçon qui est si maigre. Monsieur le Curé a dit que je devais cesser d’embêter les grandes personnes avec de tels propos.
Bien. Maintenant, je ne parle qu’à ceux qui me comprennent.
Un klaxon. La vieille dépanneuse bleue du mécanicien s’arrête devant l’allée du jardin. Angelin le grand chien jaune est au volant, il rigole de toutes ses dents qui sont jaunes elles aussi et il fait des grands signes.
Je vois passer tendrement enlacés le petit drap housse et la grande couette en coton métis, qui tout à l’heure étaient immobiles sur le fil à linge. Arrive en courant la nappe à carreaux rouges et blancs de Séraphine, poursuivie par la panière à pique-nique de Mère. Les serviettes toujours en retard se glissent dans la poche de ma robe à smocks et m’entraînent vers l’auto, en gloussant de plaisir.
Angelin aboie un air entraînant et tout le monde chante dans la vieille auto bleue.
Les arbres sourient sur notre passage et les fleurs nous lancent des baisers parfumés ; les papillons nous font cortège ainsi que les libellules et les grillons violonistes.
Au bord de la rivière, la vieille Séraphine fait briller le parquet ciré en dansant sur ses chaussons de feutre.
Le couvercle de la panière d’osier s’ouvre sur tous ses trésors… Terrine de lapin, fruits multicolores, bonbons interdits, gâteaux couverts de crème rose, jattes de chocolat onctueux, limonade au citron et j’en oublie.
Le petit drap housse et la grande couette fleurie font bande à part et sont allongés sur l’herbe du pré.
L’arrivée du Dr A. assombrit la matinée.
Sur le perron de la maison, Mère annonce que le pique-nique n’aura pas lieu.
Séraphine a fini de faire briller le parquet.
– Nine ! Mets une robe propre et décente je te prie, et jette ces horreurs d’insectes.
Le corset rose
Au début des années 1960, une petite fille bien tenue portait un corset, lacé dans le dos, avec des baleines souples, ce qui ainsi lui assurait une allure royale dès l’adolescence, et un ventre mou et affaissé dès sa première grossesse.
L’important n’est-ce pas est de ferrer le bon mari, le reste… Il n’est point de bon ton d’en parler.
Un établissement, de...

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