Salon de madame de Staël, Ambassadrice de Suède
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Description

Extrait : "C'est une des chances les plus heureuses pour une femme littéraire que d'avoir à parler de madame de Staël..., cette femme dont le génie a jeté de si brillants rayons, non seulement sur nous, pauvres déshéritées de toutes les gloires, mais sur le siècle qui la vit naître et celui qui, plus heureux encore, fut témoin de ses succès. Madame de Staël est un de ces êtres que la nature a richement dotés : car elle le fut non seulement par le génie, mais Dieu,..." À PROPOS DES ÉDITIONS LIGARAN : Les éditions LIGARAN proposent des versions numériques de grands classiques de la littérature ainsi que des livres rares. Beaucoup de soins sont apportés à ces versions ebook pour éviter les fautes que l'on trouve trop souvent dans des versions numériques de ces textes. 

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Informations

Publié par
Nombre de lectures 27
EAN13 9782335050585
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0006€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

EAN : 9782335050585

 
©Ligaran 2015

Salon de madame de Staël, ambassadrice de Suède
C’est une des chances les plus heureuses pour une femme littéraire que d’avoir à parler de madame de Staël…, cette femme dont le génie a jeté de si brillants rayons, non seulement sur nous, pauvres déshéritées de toutes les gloires, mais sur le siècle qui la vit naître et celui qui, plus heureux encore, fut témoin de ses succès. Madame de Staël est un de ces êtres que la nature a richement dotés : car elle le fut non seulement par le génie, mais Dieu, en lui donnant son intelligence, lui mit au cœur cette bonté native, cette noblesse de sentiments, cette grandeur dans les pensées qui la firent adorer de tout ce qui l’entourait. On sait bien qu’elle fut la femme la plus remarquable de son temps ; mais tout le monde ne sait peut-être pas que madame de Staël avait un cœur d’or et qu’elle était bonne, mais bonne à être aimée tous les jours davantage dès qu’on l’avait connue.
Son éducation fut singulière, et peut-être doit-on être surpris que cette femme étonnante soit devenue ce qu’elle a été, après avoir été conduite par une main aussi peu faite pour guider sa jeune et brillante intelligence que sa mère. Madame Necker avait une instruction remarquable, et lorsqu’elle se maria peut-être était-elle plus habile que sa fille à cette même époque de sa vie. Son père, M. Naaz, ministre protestant dans le pays de Vaud, avait une instruction savante ; il l’inculqua à sa fille, et madame Necker était une des femmes les plus profondément instruites de son temps. Mais, en même temps qu’elle recevait de la science, son esprit recevait des opinions, et l’une des plus positives était que tout peut s’acquérir par l’étude. Ainsi donc, elle étudiait la société comme elle aurait étudié une question littéraire ; elle observait tout, réduisait tout en système, et tirait alors de tout aussi des inductions et des observations qui, pour être toujours finement exprimées, n’étaient pas toujours justes. Un grand inconvénient de cette manière d’agir, c’est de faire attacher trop de détails aux grandes choses. L’esprit veut trouver à tout un point de contact, et il devient métaphysique.
Il faut ajouter à ce que je viens de dire de madame Necker qu’elle avait une moralité parfaite et que rien chez elle ne donnait l’idée d’une imperfection ; elle était dans cette rectitude qui efface peut-être ce qui est imparfait, et M. Necker le sentait lorsque lui-même disait spirituellement :
Pour que madame Necker fût trouvée parfaitement aimable par le monde, il faudrait qu’elle eût quelque chose à se faire pardonner.
Ce n’est pas qu’elle fût sévère ; elle était même caressante et prévenante dans son accueil, ses yeux bleus étaient doux et gracieux dans leur regard, et l’expression pure et angélique, la naïveté même de sa physionomie contrastait d’une manière adorable avec le maintien raide et compassé que la contraignait à avoir la triste maladie dont elle est morte.
Je ne parle ici de nouveau de madame Necker que pour dire à quel point elle différait avec sa fille, dont la nature de feu avait une puissance terrible sur elle-même, et devait plus tard mettre un obstacle à la réussite d’une éducation qui ne pouvait manquer d’être bizarre, appliquée par une mère comme madame Necker à une fille comme madame de Staël. Madame de Staël était toute âme, toute imagination, tendresse et pressentiment ; tandis que madame Necker n’avait conservé aucun instinct de cette nature si brillante et si riche dans sa fille, habituée qu’elle avait été par elle-même à tout combattre et à tout dominer. Et puis ensuite madame Necker était à la vérité bonne mère, mais avant tout elle aimait son mari. Il était le point dominant de ses affections : lui , d’abord ; et puis le reste venait ensuite… C’est donc par devoir qu’elle entreprit, toutefois avec zèle, l’éducation de sa fille, enfant unique, fruit de son union avec M. Necker.
On pense bien qu’avec sa manie d’appliquer à tout un système, madame Necker en eut un pour élever sa fille : ce fut l’opposé de Rousseau. Madame Necker pensait, au reste, avec raison que le système de Rousseau menait au matérialisme. Voulant le combattre sous toutes ses formes, elle prit la route opposée, et fit agir l’esprit sur l’esprit. Elle avait pour opinion qu’il faut faire entrer dans une jeune tête une grande quantité d’idées ; l’intelligence les mettra bien en ordre ensuite, disait-elle. L’exemple de madame de Staël le prouverait.
Mademoiselle Germaine Necker était une enfant charmante, quoiqu’elle n’eût pas cette beauté qui avait dû être remarquable dans sa mère… Elle était brune, fortement colorée, et offrait surtout l’apparence de la plus belle santé ; ses grands yeux noirs révélaient déjà ce qu’elle devait plus tard prouver à l’Europe, et leur regard parlait de bonne heure la langue du génie.
M. Necker adorait sa fille ; il lui parlait avec tendresse, la caressait, et lui donnait ainsi tout ce qui lui était refusé du côté de sa mère, qui, tout en l’aimant avec amour, ne savait pas revêtir son affection de ces formes douces et tendres qu’une mère sait si bien prendre. Souvent ses regards sévères contraignirent M. Necker à s’éloigner de sa fille…
– Vous défaites mon ouvrage avec votre faiblesse pour Germaine, disait madame Necker.
Mais Germaine avait une de ces natures qui jamais ne se déforment et jamais ne s’altèrent… Elle était aimante, surtout : C’est mon âme qui a fait mon esprit , disait-elle, aussitôt que j’ai vu qu’il était en moi un moyen de plus pour attacher .
Aimer, pour elle c’était la vie ; exister, c’était aimer : aussi son père et sa mère furent-ils longtemps des dieux pour elle. Sa mère, par sa froideur apparente, concentra la tendresse de Germaine pour elle : mais son père en fut aimé avec l’idolâtrie qu’elle aurait eue jadis pour le dieu le plus vénéré ; elle aima son père avec un sentiment indéfinissable : ainsi par exemple, en lui répondant même une plaisanterie, ce ne fut jamais sans émotion, et une émotion vive. Que de trésors dans cette âme ! quelle fête du cœur continuelle !… Madame de Staël devait être adorée !… Eh bien ! avec ce foyer d’amour qu’elle avait en elle, elle fut longtemps à ne dire et ne faire que ce que ses parents voulaient et désiraient. Son amour filial était sa vie… Ne quittant jamais sa mère et son père, témoin de tous les entretiens graves et profonds qui se tenaient dans le salon de sa mère, mais contrainte d’écouter sans parler, Germaine n’eut pas d’enfance, et tant quelle ne fut en effet que Germaine , l’enfant eut une existence misérable, si l’on veut se reporter à l’époque dont je parle et se rappeler quelle âme était dans ce corps d’enfant ; en voici une preuve :
Mademoiselle Necker n’avait que dix ans lorsqu’on présenta M. Gibbon chez sa mère. Il faut avoir connu M. Gibbon pour avoir une idée de ce qui suit. M. Gibbon avait à peine cinq pieds, mais en revanche il était sphérique et pouvait avoir au moins dix pieds de circuit , comme disait M. de Bièvre :
– Lorsque j’ai besoin d’exercice, disait-il, je fais trois fois le tour de M. Gibbon.
Son ventre était surtout une chose à voir !… Il était enfin aussi burlesque qu’on peut l’être.
Mais Germaine ne l’avait pas vu ainsi : pour cette enfant toute âme et tout sentiment, une seule chose avait été visible parmi tout ce qui accablait M. Gibbon, c’était l’extrême plaisir que son père surtout trouvait à causer avec M. Gibbon ; elle imagina un moyen de fixer pour toujours M. Gibbon près de ses parents, afin qu’ils pussent jouir de la société d’un homme qu’ils paraissaient autant aimer, et ce moyen était de l’épouser. Sans doute c’est une plaisanterie comique et qui d’abord porte à rire ; mais on est profondément touché de cette bonté native, de cet instinct sublime de l’âme, qui, sans même deviner le sacrifice, ne voit que le bonheur à donner à ce qu’elle aime. Jamais je n’ai eu un sourire redoubl

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