La société de minuit, t1 - Un vent de tourments et d étincelles
123 pages
Français

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La société de minuit, t1 - Un vent de tourments et d'étincelles , livre ebook

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Description

Des rêves qui n’en sont pas vraiment. Un mal mystérieux et inexplicable. De vieilles légendes qui prennent vie. Eva Magaloff croit mener une existence des plus normales à l’Institut Moldovan, jusqu’au jour où elle s’endort et bascule dans un tout autre univers.
Un univers de vents et de tempêtes, de richesse et de pouvoir, de tourments et d’étincelles…

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 13 mars 2023
Nombre de lectures 5
EAN13 9782897658649
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0300€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Chapitre 1
L’Institut Moldovan
Ces jardins étaient les plus enchanteurs qu’Ev a Magaloff avait vus pendant ses dix-sept années d’existence. Même dans la ville de Nastov, juste à côté, où habitaient ses parents, les jardins n’avaient pas cette composition raffinée ni ce charme mélancolique. Certains pouvaient trouver ceux-ci trop chargés avec leurs étangs colonisés de plantes aquatiques, leurs pans de ruines couvertes de mousse et leurs statues de déesses envahies par le vert-de-gris. Il y avait tant de choses à regarder que les yeux, parfois, se perdaient dans l’infinité des détails. La quantité d’espèces de fleurs était impressionnante. Eva aimait particulièrement les dahlias noirs et les roses rouge sang. Il émanait de toute cette flore d’agréables odeurs de terre humide et de parfums capiteux.
Quand elle ne se promenait pas au milieu des arcades gothiques érodées par le temps, vestiges d’une ancienne chapelle, Eva s’asseyait sur un banc pour dessiner. Elle utilisait la plupart du temps un stylo à l’encre noire, plus rarement un crayon à mine. Ces jardins, elle les avait couchés sur papier plusieurs fois sous différents angles, sans jamais se lasser.
Après avoir ouvert son cahier à dessin, Eva demeura longtemps immobile à s’imprégner de la beauté des lieux auxquels la lumière grise du ciel et la légère brume conféraient une atmosphère plus poétique encore. La jeune femme entreprit de tracer le profil de la statue devant elle. Elle se plaisait à croire qu’il s’agissait d’une nymphe déployant élégamment les bras derrière elle pour s’envoler dans un courant d’air. Le silence était profond et paisible.
Penchée sur son cahier, Eva était en train d’ébaucher une jambe couverte de lierres lorsqu’une voix aiguë déchira l’épais mutisme enveloppant le décor :
— Eva ! Te voilà enfin !
Une jeune femme de petite taille au sourire espiègle se jeta à côté d’elle sur le banc. Elle avait tressé ses cheveux lisses et bruns qu’elle trouvait si ternes. Tamara Oginski disait souvent envier la longue tignasse de son amie et lui reprochai t de la négliger alors qu’elle aurait pu en faire de belles coiffures. Mais Eva, aux cheveux épais et ondulés, noirs comme les dahlias qu’elle aimait tant, préférait les laisser libres sur ses épaules.
— Il faudrait y aller maintenant, la pressa Tamara. Le cours va commencer dans quinze minutes et, tout de suite après, nous avons une réunion des comités avec le directeur.
Eva acquiesça d’un hochement de tête avant de refermer son cahier. Elle n’était jamais en retard ; dix minutes suffisaient pour atteindre la salle de classe. Un sentier dallé menait hors des jardins jusqu’à la cour pavée où s’élevait l’Institut Moldovan, un majestueux château entièrement restauré pour accueillir les étudiants privilégiés de Nastov, la ville la plus à l’est de Trovanie.
La Trovanie était un petit pays qui ne comptait que cinq cités : Cartavania, Nastov, Voldav, Solviny et Raminir, autour desquelles gravitaient de modestes villages. Bien qu’en cette fin du XX e siècle, le visage de plusieurs pays européens s’était transformé, modernisé, la Trovanie, elle, avait tout conservé de son charme d’antan, à la fois campagnard et médiéval.
Eva ne se lassait jamais de contempler l’Institut Moldovan. Ce magnifique bâtiment d’architecture gothique arborait un grand nombre de fenêtres en arc brisé dont certaines étaient serties de vitraux multicolores. Deux escaliers donnaient accès à l’entrée principale située au fond d’une vaste terrasse. Les portes, en bois massif, étaient surmontées d’une impressionnante archivolte dans laquelle avait été sculpté, parmi les arabesques, un croissant de lune traversé d’une spirale. Cette entrée principale n’était empruntée que pour des occasions aussi rares que solennelles ; l’entrée des étudiants était celle que l’on utilisait au quotidien. Pour l’atteindre, il fallait longer les murs en pierre sur la gauche jusqu’à une porte plus discrète.
Alors qu’elle était sur le point de pénétrer dans le château, Eva sentit peser sur elle les regards de ses camarades. Le coût d’une éducation privée à l’Institut Moldovan était considérable, mais les parents d’Eva n’avaient pas à débourser puisqu’ils étaient de très bons amis du directeur de l’établissement. Ainsi, Eva Magaloff ne faisait pas partie des gens riches de la société. Sa famille était d’origine modeste et ne possédait pas de fortunes. Cette réalité creusait un fossé entre elles et les autres étudiants qui, parfois, murmuraient sur son passage ou la toisaient avec une expression hautaine.
Eva avait appris à rester insensible au jugement des autres. Elle se savait chanceuse de fréquenter l’Institut Moldovan et elle appréciait particulièrement son site enchanteur et son architecture historique. Ce décor romantique nourrissait ses nombreuses rêveries.
D’humeur toujours agréable et énergique, Tamara enveloppa les épaules d’Eva d’un bras affectueux pour montrer à tous qu’elle était son amie.
— Nous pourrions aller en ville cette fin de semaine, suggéra Tamara. Il y a un petit café que j’aimerais bien essayer.
— J’ai promis à mes parents de leur rendre visite. Une autre fois peut-être…
Sous la voûte d’ogive du corridor, les deux filles marchaient derrière trois étudiants en uniforme bleu foncé. Il existait trois confréries au sein de l’Institut Moldovan : la grise, la bleue et la rouge. Au premier regard, on savait à laquelle les étudiants appartenaient par les couleurs qu’ils portaient. Eva et Tamara étaient de la première : leur uniforme était donc gris bordé de noir et se composait d’une jupe, d’un chemisier et d’un veston. Eva ignorait pour quelle raison on les séparait en trois groupes à leur admission puisque, de toute façon, aucune distinction n’était faite entre les confréries lors des cours. Ce ne semblait être qu’une façon d’organiser la vie étudiante et les résidences.
La salle où se donnait le cours de littérature du jeudi après-midi était l’une des préférées d’Eva. Très lumineuse, elle comportait deux rangées de colonnes fasciculées entre lesquelles on avait disposé de superbes tables en bois de chêne. Tamara s’assit à l’arrière, bientôt imitée par Eva. La plupart des élèves étaient déjà arrivés et les retardataires firent leur apparition dans les minutes qui suivirent. Comme dans tous les autres cours, le nombre de participants était réduit. Cette classe en comptait douze, ce qui était en soi beaucoup puisqu’il n’était pas rare qu’un enseignant s’occupe d’un seul étudiant dans une matière très spécialisée.
En effet, l’une des caractéristiques de l’Institut Moldovan était d’offrir un parcours personnalisé aux enfants de l’élite, dès l’âge de quatorze ans jusqu’à la majorité, soit vingt et un ans. Ils suivaient bien sûr le programme régulier du lycée, mais ils pouvaient également bonifier leur formation de cours très variés, avant de choisir le cursus universitaire de leur choix. Deux facteurs permettaient à l’établissement de fonctionner ainsi : son petit nombre d’étudiants et ses fonds considérables.
Maître Balasko s’avança devant la classe et leva la main pour attirer l’attention de tous. C’était l’un des meilleurs professeurs de littérature du pays. Il était rigoureux, certes, mais très érudit et éloquent. Assister à ses exposés était un vrai bonheur pour Eva.
— Comme je l’avais annoncé au dernier cours, aujourd’hui nous amorçons l’étude d’une œuvre britannique publiée en 1794 : Les Mystères d’Udolphe d’Ann Radcliffe. C’est un roman volumineux, je vous l’accorde, et vous n’aurez qu’un mois pour le lire, alors commencez-en la lecture dès maintenant si ce n’est déjà fait…
Du coin de l’œil, Eva aperçut la grande silhouette d’un jeune homme habillé de gris qui entra en catimini dans la salle de classe. Le plus silencieusement possible, il prit place à côté d’Eva, puis se mit immédiatement à fixer la surface de la table comme si le cours l’ennuyait déjà. Eva lui adressa un regard chargé de reproches qu’il ne capta pas. Elle n’aimait pas que l’on montre un désintérêt aussi évident, surtout à l’endroit d’un maître aussi excellent.
Durant toute la période, maître Balasko leur fit une description minutieuse du contexte historique et du courant littéraire desquels le roman était issu. Eva prit une mu ltitude de notes sans s’arrêter et posa maintes questions.
Quand le cours fut terminé, le jeune homme aux cheveux châtains et aux yeux pâles, assis à côté d’elle, se leva péniblement de sa chaise en lui demandant :
— Pourrais-tu me faire un résumé, Eva ? Ce livre est beaucoup trop long…
— Bien sûr… que non, Lucas, lui répondit-elle sèchement en ramassant ses affaires.
Lucas Moldovan était le fils du directeur de l’Institut. Comme leurs parents étaient de vieux amis, Eva le connaissait depuis l’enfance et l’avait souvent côtoyé. Il n’avait pas toujours été aussi blasé et taciturne. Lorsqu’ils étaient enfants, Lucas avait l’habitude de jouer avec Eva, même si elle était de deux ans sa cadette. C’était seulement depuis qu’elle ét ait entrée à l’Institut, trois ans auparavant, qu’il s’était éloigné d’elle et replié sur lui-même.
Tamara s’approcha d’eux.
— La réunion des comités se tient dans l’auditorium dans cinq minutes, allons-y ! ordonna-t-elle d’une voix joyeuse.
Eva la talonna en hissant son sac à bandoulière sur son épaule. Avec un soupir, Lucas les suivit de sa démarche caractéristique : à la fois rapide et nonchalante.
Chaque confrérie avait un comité étudiant pour la représenter. Le nombre minimal de membres était trois ; six étant la limite maximale. Les élèves étaient majoritairement peu intéressés par ce genre de tâches administratives, c’est pourquoi certains avaient été désignés par le directeur pour compléter les groupes. C’était le cas de Lucas, qui n’était pas là de son plein gré, contrairement à Eva et Tamara, qui s’étaient portées volontaires. Idem pour la confrérie bleue, où un garçon du nom Zack Minsky avait

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