Le Rapporteur
255 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Le Rapporteur , livre ebook

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
255 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Arnaud Kokas s'ennuie. Journaliste financier, il se questionne sur le sens de sa vie. Son patron l'emmerde, et il se demande pourquoi il fait ce boulot qui ne sert qu'aux privilégiés. Soudain, il est pourchassé dans les rues de Montréal par des tueurs implacables et puissants. Il se retrouve rapidement sur Naraka, seule planète où l'on trouve le khal, une molécule qui permet les voyages intersidéraux. Kokas est rapidement plongé dans une guerre sans merci menée par une empereur psychopathe, le Sphinx, et ses alliés, les Oloruns, une secte secrète, violente et fanatique qui rejette le modernisme au nom de Dieu. Kokas doit faire preuve de ruse et lutter pour survivre, en compagnie de la mystérieuse Bao, guerrière des forces spéciales galactiques, femme-chat énigmatique au regard métallique, dont la planète meurtrie par l'hiver nucléaire est peuplée presque exclusivement de femmes. Kokas, lui, ne pense qu'à une chose : retrouver le confort douillet de son condo du Vieux-Montréal et un cappuccino glacé de chez Tim Hortons !

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 30 mai 2018
Nombre de lectures 2
EAN13 9782923375601
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0800€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Éditeur
Maison des Éditions TNT
4264, Sainte-Catherine Est
Montréal (Québec) H1V 1X6
(514) 256-9000
info@editionstnt.com
www.editionstnt.com
Copyrigh t - Tous droits réservés à Stéphane Desjardins.
Toute reproduction, distribution et vente interdites sans l’autorisation de l’auteur et de l’éditeur.
Illustration couverture avant
Toxic Art
Photo couverture arrière
Lucie Hortie
Peinture couverture arrière
Arpi
Conception de la jaquette
Juan@ca
Corrections
Marie-Carole Daigle et Denis Desjardins
Monde moderne oblige, nous avons appliqué dans cet ouvrage quelques-unes des rectifications proposées par la nouvelle orthographe.
Mise en page
Danielle Simard et Raymond Viger
Dépôt légal
Bibliothèque et Archives nationales du Québec 2018
Bibliothèque et Archives Canada 2018
ISBN
Papier 978-2-923375-54-0
Epub 978-2-923375-60-1
PDF 978-2-923375-61-8
Imprimé au Québec




À Lucie, pour son amour, tout simplement.
« Ils ne savaient pas que c’était impossible, alors, ils l’ont fait. »
— Mark Twain


Le Calder
Une petite bruine flottait à quelques centimètres de l’eau.
Mais le quai devant Habitat 67 était pratiquement invisible, complètement enveloppé dans la vapeur qui venait du Saint-Laurent. L’assemblage emblématique de cubes semblait flotter sur un nuage. Penché au-dessus des remous du courant Sainte-Marie, les coudes sur le métal du garde-fou du quai de l’Horloge, Arnaud Kokas contemplait l’île Sainte-Hélène et le pont Jacques-Cartier.
À part le vrombissement de la ville, tout était calme.
Il était six heures du matin. Kokas ne dormait pas depuis plusieurs heures. Il avait jugé préférable de marcher dans le Vieux-Port plutôt que de rester dans son lit à tourner d’un bord et de l’autre.
Dans quelques minutes, le furieux soleil d’automne allait se lever derrière le pont Jacques-Cartier et dorer les tours du centre-ville de Montréal. Dans une de ces tours : son bureau. Son cauchemar.
Depuis des mois, il se levait en rogne. Après avoir ingurgité ses Special K noyés dans du lait 1 % ou un pain doré nappé de plus de sirop d’érable qu’il n’en fallait, il marchait de son condo, rue des Sœurs-Grises, vers son bureau, boulevard René-Lévesque, au 36 e étage, avec vue jusqu’à Jay Peak, au Vermont, par beau temps.
« Mais qu’est-ce que je fous sur cette terre ? À quoi je sers ? Qui se souviendra de moi quand je serai parti ? »
Il se posait souvent ce genre de questions le matin, parfois enragé, souvent triste. Il prenait désormais des antidépresseurs légers, de petites pilules bleues, « comme du Viagra de l’âme », blaguait-il avec ses rares amis.
Arnaud Kokas travaillait au Journal de la finance , une filiale obscure d’un énorme conglomérat de 42 000 employés, coté à la Bourse de Toronto, comprenant imprimeries, magazines, postes de radio, sites Internet, journaux et stations de télé. Il était rédacteur en chef, donc cadre intermédiaire. Ce qui voulait dire, dans les faits, qu’il se faisait chier par son patron, responsable d’une dizaine de titres de la presse économique et financière, et par ses employés, dont il aurait botté le cul de certains si ce n’était proscrit dans les manuels du bon gestionnaire justement publiés par son employeur. Manuels que ses patrons ne respectaient pratiquement jamais.
Surtout, il s’ennuyait ferme.
Il avait mené une bonne carrière de journaliste pigiste pendant une vingtaine d’années. Il n’avait jamais gagné de prix prestigieux. N’était pas une vedette du petit monde des médias du Québec. Il avait été engagé comme rédacteur en chef d’un journal hebdomadaire dans une petite ville des Laurentides. Puis s’était fait recruter par un magazine spécialisé en assurance. Enfin, il avait accepté de diriger la rédaction d’un journal desservant l’industrie des services financiers. Ses lecteurs étaient banquiers, conseillers financiers, assureurs, courtiers. Tous ces gens se préoccupaient davantage du rendement de l’avoir des actionnaires de leur employeur que des intérêts de leurs clients.
Kokas encadrait une quinzaine de personnes, des professionnels dévoués et, pour la plupart, sympathiques. Dans le monde de la finance québécoise, il était même une vedette bien que, dans la rue, il passât incognito... Il était bien payé, avait la possibilité de voyager et possédait un condo confortable, payé. Aucune dette. Quelques placements judicieux lui avaient procuré un bon coussin en cas d’urgence. Il vivait seul. Ni femme, ni enfants, ni colocataire. Quelques amis avec qui il skiait la fin de semaine, à Jay Peak, Sutton ou, parfois, au Massif de Petite-Rivière-Saint-François. Un cousin l’accompagnait souvent, l’été, dans une virée à vélo sur la piste du P’tit Train du Nord, jusqu’à Mont-Tremblant, s’il en avait le courage. Ou dans les environs du mont Orford, ou dans le col de Jay, s’il voulait suer un peu.
À 40 ans, il s’interrogeait sérieusement sur le sens de la vie. Avec l’expérience qu’il avait acquise, son boulot devenait routinier. Les exigences de la haute direction et de son patron immédiat le laissaient froid. À qui servait son talent ? Ses lecteurs étaient généralement à l’aise financièrement, sinon riches. Ils ne pensaient qu’à leurs commissions provenant de la vente de fonds communs, FNB, polices d’assurance-vie temporaire ou universelle, bourses d’études et toute la panoplie de placements REER ou CELI. Son journal valorisait les pratiques exemplaires en matière de vente, de bureau sans papier, d’éthique et de déontologie, s’attardait aux derniers produits inventés par les compagnies de fonds communs, analysait la situation macroéconomique mondiale ou nord-américaine. Fallait-il choisir des fonds de pays émergents ou se replier sur ceux de grandes capitalisations américaines, alors que la Chine paraissait traverser une période d’essoufflement et que l’Europe ou le Japon n’arrivait plus à se sortir de son marasme ? Les experts tergiversaient sur la proportion à consacrer aux liquidités, aux actions ou aux obligations en de telles circonstances.
Il fallait aussi, dans une perspective de préservation du capital ou d’optimisation fiscale, tenir compte du taux d’imposition des dividendes, moins élevé que celui des obligations. On pouvait choisir un fonds commun de type corporatif, qui permettait de multiplier les transactions entre les différentes catégories de fonds clones, sans payer d’impôt sur le gain en capital. Ou choisir une « vie universelle », mais il fallait alors réussir le test d’exonération touchant les fonds accumulés au bout de sept ans…
Ses lecteurs se gavaient de ce type d’informations. D’autant plus que l’industrie canadienne des fonds communs facturait les frais les plus élevés de la planète. Kokas évoluait donc parmi les nantis et les puissants : certains de ses lecteurs accumulaient chaque année une fortune en commissions, d’autres dirigeaient des banques et des compagnies d’assurance, des sociétés de fonds, des firmes de gestion, des caisses de retraite. Plusieurs s’adonnaient à la gestion privée pour des clients à « valeur nette élevée », une autre manière de qualifier la richesse et le privilège. Certains des textes qu’il commandait s’attardaient aux stratégies d’évitement fiscal à la limite de la légalité. D’autres abordaient les techniques de diversification de portefeuilles de placements avec un angle top-down.
Mais où étaient passés ses idéaux plus ou moins révolutionnaires de sa jeunesse ?
Au sortir de l’adolescence, il aurait aimé faire du reportage pendant la guerre de Bosnie. Ou quelques grandes enquêtes comme celles que l’on voyait à la télé chaque jour depuis deux mois sur la mafia qui avait infiltré l’industrie de la construction. Or, il travaillait pour des Capitalistes. Faisait-il avancer l’humanité dans le bon sens ? Il en doutait. De plus en plus. Car l’écart entre les riches et les pauvres avait sérieusement augmenté en une décennie. La théorie voulant qu’il faille accommoder les riches pour qu’ils créent de l’emploi et partagent leur richesse, le trickle down , était un leurre.
Kokas avait écrit une quinzaine de milliers d’articles en carrière. Mais personne ne se souviendrait de lui après sa mort. Il ne cherchait pas la célébrité. Il voulait juste sentir qu’il avait contribué à quelque chose de positif. Chaque jour amenait son lot de nouvelles sur les catastrophes naturelles, les guerres, les famines. Il jugeait les Québécois bien calfeutrés dans leur petit confort de pays membre du G7. Il ne se passait pratiquement jamais rien de significatif au Canada et encore moins au Québec. Se plaindre du prix des bananes ne constitue pas une critique positive de la société.
Sa vie manquait de sens. Sa jeunesse avait disparu. Il était malheureux dans sa prison dorée. Il se sentait même coupable de s’en plaindre à son entourage, car il était pleinement conscient de faire partie de la caste des privilégiés : il avait voyagé dans des pays pauvres, alors que certains membres de sa famille élargie trimaient dur à épandre de l’asphalte ou à servir des hot dogs au salaire minimum.
Mais la perception du vide de son existence le rongeait de plus en plus. Il n’avait pas le courage de lâcher son boulot. Pour faire quoi ? Travailler bénévolement en Haïti ou à la léproserie de Mère Teresa ? Un de ses collègues avait d’ailleurs signé un reportage peu flatteur sur la sainte et ses œuvres de charité...
Il regardait donc le courant du fleuve, déjà à demi aveuglé par les rayons du soleil levant qui passaient au travers de la structure de métal du pont Jacques-Cartier, alors qu’un cargo se frayait un chemin vers le bassin Alexandra. Il était seul dans la fraîcheur de septembre. Il se retourna. Le soleil frappait déjà les façades en pierre de la rue de la Commune, encore couvertes de rosée. Le dôme argenté du marché Bonsecours se reflétait dans le bas

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents