Les contes interdits - La chasse-galerie
134 pages
Français

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Les contes interdits - La chasse-galerie , livre ebook

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Description

Des bûcherons assoiffés d’émotions fortes.
Des drogues dures qui ont remplacé le petit rhum.
Un Mal que l’entendement ne peut comprendre ou une hallucination qui entremêle les pensées?
Des êtres sans visages ou des têtes sans conscience?
Lisez bien. Regardez bien. Là ! Est-ce le diable que vous avez vu? Hélas, ces choses de l’abîme peuvent prendre bien des visages, selon le regard qu’on leur jette…
Dans cette chasse-galerie sur l’acide, les Contes Interdits plongent la main dans le terroir québécois pour le remuer et trouver ce qui pourrit là-dessous. La légende, repeinte aux couleurs noires de l’effroi, en ressort profondément changée, éclaboussée de sang.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 12 novembre 2020
Nombre de lectures 15
EAN13 9782898085765
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Avertissement :
Cette histoire est une œuvre de fiction. Toute ressemblance avec des gens, des événements existants ou ayant existé est totalement fortuite.
Copyright © 2020 Gabriel Thériault
Copyright © 2020 Éditions AdA Inc.
Tous droits réservés. Aucune partie de ce livre ne peut être reproduite sous quelque forme que ce soit sans la permission écrite de l’éditeur, sauf dans le cas d’une critique littéraire.
Éditeur : François Doucet
Révision éditoriale : Simon Rousseau
Révision linguistique : Marie Laporte
Conception de la couverture : Mathieu C. Dandurand
Photos de la couverture : © Getty images
Mise en pages : Catherine Bélisle
ISBN papier : 978-2-89808-574-1
ISBN PDF numérique : 978-2-89808-575-8
ISBN ePub : 978-2-89808-576-5
Première impression : 2020
Dépôt légal : 2020
Bibliothèque et Archives nationales du Québec
Bibliothèque et Archives Canada
Éditions AdA Inc.
1471, boul. Lionel-Boulet, suite 29
Varennes (Québec) J3X 1P7, Canada
www.ada-inc.com
info@ada-inc.com
Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada
Titre : La chasse-galerie / Gabriel Thériault.
Noms : Thériault, Gabriel, 1983- auteur.
Collections : Contes interdits.
Description : Mention de collection : Les Contes interdits
Identifiants : Canadiana (livre imprimé) 2020008707X | Canadiana (livre numérique) 20200087088 | ISBN 9782898085741 | ISBN 9782898085758 (PDF) | ISBN 9782898085765 (EPUB)
Classification : LCC PS8639.H464 C43 2020 | CDD C843/.6—dc23
« À peine avions-nous prononcé les dernières paroles que nous sentîmes le canot s’élever dans l’air à une hauteur de cinq ou six cents pieds. […] le canot s’élança dans l’air comme une flèche, et c’est le cas de le dire, le diable nous emportait. Ça nous en coupait le respire et le poil en frisait sur nos bonnets de carcajou. »
— La Chasse-galerie Honoré Beaugrand
CHAPITRE 1
P artout, des hallucinations. Des formes et des couleurs qui vivent et qui s’agitent, dansent et s’entrelacent dans le firmament noir percé d’étoiles.
Dans mon crâne, la ligne entre conscient et inconscient éclate. Mes pensées deviennent des paroles. Mes paroles, des pensées. Les images que forme mon esprit, des hallucinations. Mes hallucinations, des images qui fendent ma tête pour jaillir devant moi dans une fête des sens.
Nous sommes cinq. Cinq bûcherons en congé pour le jour de l’An. Cinq gars complètement défoncés sur la drogue dure. Très dure, même. Sur une saloperie que personne n’a encore songé à nommer. Quelque chose de très chimique rapporté de la grande ville jusqu’à nous. Tout ce qu’il faut pour nous démolir. Nous, les soiffards d’émotions fortes. Nous, les aliénés du Nord et des chantiers.
Pourtant, ce n’est pas assez. Ou plutôt, ça ne durera pas éternellement. Nous en voulons encore plus. Toujours plus. En cette nuit du jour de l’An, nous descendons en ville. Direction : les danseuses. Notre but ? Refaire le plein de dope et, à quoi bon nous mentir, voir et toucher des femmes, dont le Nord nous prive. Quelques heures de route en forêt et nous y serons.
Les bottes plantées dans la neige, nous nous rivons le nez dans l’éternité noire du ciel. Cette immensité goudronneuse recouvre notre petit bout d’Abitibi. Autour et partout s’étend la forêt, des épinettes mêlées de nuit. Derrière, le moteur de la camionnette Ford ronronne. De la portière laissée ouverte s’échappe une colonne montante de vapeur. Quelque chose comme l’haleine tiède de la machine. On dirait que cette bête de fer hoquète et rote, qu’elle pète même. Nous en rions à nous fendre la gorge, à nous éclabousser les bottes. C’est que, la queue à la main, nous arrosons le blanc des bancs de neige, à grand coup de pinceau jaune. Mon jet à moi serpente et se dresse. Il ressemble à un flux de lumière qui fouette.
La langue poignant entre les lèvres, les sourcils froncés, je me concentre. Avec un peu d’effort, je maîtrise bientôt cette lumière avec laquelle je peins des choses grandioses. De l’Art, que les générations à venir s’arracheront. Car, cette saloperie chimique ne se contente pas de me pourrir les neurones. Elle me gonfle également de mon importance. Elle fait de moi un génie en tout.
Dans notre groupe, il y a moi, bien sûr : Xavier Tremblay, jeune pousse pâlotte de 27 ans débutant une maîtrise en sociologie. Assoiffé de justice, je lutte ferme contre la montée de la haine ; je protège les minorités racisées qui en sont victimes. Après une période trouble et un peu violente de ma vie, j’ai trouvé dans de tels idéaux de quoi surnager. Depuis, je m’y suis accroché. Un peu trop au goût de mes proches, de mes parents en particulier, pour qui je colle à l’université, avec deux bacs en poche, un en socio, l’autre en philo politique.
À la fin de la dernière session, je suis revenu dans l’Abitibi de mon enfance et de mon adolescence, que j’ai fuie quelques années plus tôt. Ici, il y a de quoi faire une passe d’argent et payer mes études. Moi, c’est un paquet d’os et de nerfs, quelques poils follets au menton, ainsi qu’un gros nez camus qui me complexe.
Il y a moi, mais il y a eux. Mes collèges, les membres de mon équipe, quatre bûcherons abattant, débitant, tronçonnant avec de grosses machines. Eux, c’est aussi un ramassis de peuple plein de préjugés, qui vote tantôt pour la CAQ, tantôt pour le PQ. Des partisans des chartes laïcardes, abonnés au Journal de Montréal, vissés aux radios-poubelles, qu’ils écoutent même ici, grâce à la magie d’Internet, tellement ils en sont intoxiqués, incapables de se passer de leur dose quotidienne de haine. Encore quelques semaines ici à me gonfler les poches, et après, je retourne en ville auprès du monde qui me ressemble et qui communie aux mêmes valeurs que moi. Ensemble, nous reprendrons la lutte. Là-bas et loin des chantiers, je ferai aussi taire cette petite voix intérieure qui se rebelle, qui a mal de voir autant d’arbres massacrés. Que m’importe que notre coupe soit supposément écoresponsable ! Ça reste un sacré écocide ! Une vraie tuerie !
Eux, c’est d’abord Jacques. Le barbu aux bras tatoués de la main à l’épaule, à la voix éraillée de fumeur et de fêtard invétéré, à la panse ronde et à la tête rougie de père Noël sur l’acide. Le vieux Hells Angels qui a défroqué, qui est repenti et repu de sang, mais qui se détruit dans la drogue dure pour oublier et se laver du sang qu’il a avalé à grande tasse et dans lequel il a trop longtemps trempé. C’est aussi mon oncle. Il a promis à ma mère, sa sœur, de me ramener en un seul morceau. Pourtant, c’est lui qui nous fournit en drogues. Enfin, c’est également notre chef d’équipe, plein d’une sollicitude paternelle à notre égard. Avec ses mains larges comme des raquettes, il manie la tronçonneuse avec l’aisance de dix jeunes intellos de mon genre. Au fond, je l’aime bien, malgré ses préjugés de petit Blanc des régions.
Il y a aussi Marc, notre poudré et séducteur. Marc, le vétéran d’Afghanistan au cou de taureau. Une face en arrêtes qui s’avance en couteau, qui coupe et qui tranche. Une armoire à glace aux muscles sculptés à coups de burin. La quarantaine affichée avec l’assurance d’une vingtenaire buvant litre sur litre de protéines liquides. Un vétéran qui n’est jamais revenu de là-bas, qui porte l’empreinte brûlante du sable sur sa peau et trimballe des shrapnells plein sa chair triturée, les restes d’une mine lui ayant ouvert la jambe et ayant tué deux de ses camarades. Moi, je ricane souvent par en dedans. Quelque part, il y a une justice sur terre ! Et vlan ! pour les laquais du colonialisme qui perpétuent le racisme sur la surface brûlante du globe !
Vient ensuite Benoît, mon cadet, le benjamin du groupe, le fils de Jacques, mon cousin, bref, aux dix-huit printemps. Une tête chevelue jusqu’aux épaules sous son éternelle casquette, même par -20, comme à soir. À soir, justement, son père l’initie aux drogues dures. T’as l’ âge, comme dirait mononcle. Un regard par en dessus qui vous ouvre l’âme et la démonte. Un gars qui ne dit rien, qui observe beaucoup, qui aime un peu trop les quatre-roues et les 12. Une inculture crasse, une intelligence limitée. Le même sang que moi, mais un océan de diff&#

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