Les ELUS
234 pages
Français

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Description

Le vent. L’eau. La terre.


Le feu est étouffé,


mais les braises crépitent encore.



Les cendres de mon cœur incendié et les horreurs qui enflamment mon esprit sont tout ce qu’il me reste. Où est-elle ? Le territoire des humains est à découvert ; Atlas s’épuise de jour en jour pour le protéger. Les mages noirs sont dangereusement discrets, une mèche de cheveux bleus a été retrouvée dans les cachots de Torrent et un immense dôme de diamant s’érige devant le palais… Quelque chose se trame; mes alliés et moi, Thomas, allons découvrir ce que c’est.


Je suis Tobias, nouvel Empereur du Royaume de Torrent, désigné par nul autre que mon père, Kathar. J’ai lancé l’opération Diamant. Mon plan donnera enfin à mon royaume la gloire qu’il mérite. Mais une humaine chamboule tout. Belle, exubérante, insolente, elle ne respecte pas le rôle que je lui ai assigné. Ce qu’elle est ? La clé. La clé de quoi, exactement ? Ça, je l’ignore encore.


Malgré les mémoires perdues, les amours et les amitiés oubliées, nul n’abandonnera avant d’avoir fait tomber ce mur de brume.



Un désir commun : défaire ce qui fut fait.


Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 23 novembre 2021
Nombre de lectures 0
EAN13 9782898320149
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0350€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

À la mémoire de Nanook, mon Polaire à moi, qui nous a quittés beaucoup trop tôt.

À mon mari Jimmy, mon comptable pas cliché du tout.
La Cité des Oubliés…
Je répétais ces mots mentalement, essayant de me les approprier, de les assimiler.
La Cité des Oubliés, comme dans : effacée? Perdue? Abandonnée… Introuvable?




C hapitre 1
Thomas
Je repris connaissance et la première image qui percuta mes pensées me scia en deux. Je déglutis. Elle me donnait la nausée. C’était comme un film qui tournait en boucle au ralenti dans ma tête. Un long métrage d’horreur. Gabriella qui recevait un poignard en pleine poitrine. J’ouvris subitement les paupières et la souffrance m’obligea à les refermer aussitôt. La douleur traversait mon crâne de part en part.
Mon esprit embué avait perdu la notion du temps. Le calme semblait de retour sur la terre des mages. Je n’entendais plus de cris, de pleurs ou d’explosions. Cela durait-il depuis longtemps ? Je l’ignorais. Jusqu’à quand ? Je le savais encore moins.
Gabriella .
Je revivais ce moment affreux dans ma tête, telle une malédiction. Ce foutu poignard fiché en plein là où il ne fallait pas…
Non.
Elle ne pouvait pas être morte. C’était impossible. Elle avait réussi sa mission. Elle s’était dressée contre l’ennemi. Avec les autres Élus, elle avait mis fin au règne de mon tyran de père, l’empereur Kathar. Elle m’avait secouru. Malgré tous mes mensonges et mes secrets, elle m’avait aidé. Son cœur ne pouvait pas avoir cessé de battre alors que le mien pompait encore.
Je la revoyais dans toute sa puissance, contrôlant son élément et enflammant le royaume de Torrent avec son pouvoir. Elle était grandiose, presque bouleversante. Je savais ce dont elle était capable, mais la voir en pleine action, c’était autre chose. C’était à la fois magnifique et terrorisant. Je n’avais jamais rien vu de comparable. Ni Kathar ni Atlas avaient de telles aptitudes. J’en étais persuadé.
Gabriella ne pouvait pas avoir été assassinée par une simple lame.
Le souvenir d’une femme aux cheveux argentés et au sourire de vipère vint assombrir mes pensées déjà troubles : Scarlet. Cette horrible garce l’avait poignardée.
Non.
Je n’arrivais pas à m’y résoudre. Un monde sans Gabriella serait trop terne et angoissant. Elle était vivante. Il devait y avoir une explication.
Des voix et des pas résonnèrent dans la pièce d’à côté. Je remuai. Mon corps en entier semblait fracturé. Je pouvais presque sentir des fragments d’os vagabonder allégrement dans ma cage thoracique. Ma respiration était sifflante, éraillée. Mes lèvres étaient craquelées. J’avais soif. La totalité de mon être était asséchée. Je tentai de me redresser, mais ma clavicule droite se tordit douloureusement. Je retombai durement, étouffant une plainte. Mon dos et mes flancs n’étaient plus qu’un ramassis de chair en lambeaux, entremêlée de sang séché. Jamais je n’avais été torturé de la sorte.
J’ouvris les yeux, du moins celui qui n’était pas complètement tuméfié. Une douce lueur orangée illuminait l’horizon. Le soleil allait bientôt se lever. Ma vision s’habitua tranquillement à la pénombre et je distinguai les objets qui m’entouraient. Malgré la douleur lancinante, j’arrivais à balayer la pièce du regard. J’étais allongé dans un grand lit. Une table de chevet se trouvait sur ma droite et une chaise avait été déposée tout près. Je repérai une armoire appuyée contre le mur qui me faisait face. Une odeur me titilla les narines et mon ventre gargouilla péniblement. Quelqu’un cuisinait à proximité. Je ramenai mon attention vers la fenêtre, ravalant difficilement le surplus de salive que mes glandes produisaient en réponse aux effluves appétissants. À l’extérieur, des ombres se mouvaient dans la faible lueur du crépuscule. Les mages blancs n’avaient probablement pas beaucoup dormi dans les dernières heures. Je refermai les yeux et inspirai un bon coup, des larmes brûlant mes joues à vif. Les mêmes scènes recommencèrent à défiler derrière mes paupières closes : Scarlet dégainant son poignard et le lançant vers l’Élue du feu, les iris jaunes de la vipère savourant son exploit et les flammes s’éteignant peu à peu dans le regard de Gabriella.
La porte grinça, chassant momentanément les images atroces qui me pourrissaient l’âme. Quelqu’un pénétra dans la chambre, avant de refermer derrière lui. Du coin de l’œil, je vis une silhouette rassurante se mettre à longer inlassablement le mur avec des enjambées feutrées et discrètes. J’aurais pu reconnaître cette démarche entre mille.
—Linc, râlai-je.
Il s’arrêta net.
—Thomas. Comment te sens-tu ? me questionna-t-il en s’approchant.
—Où est-elle ? demandai-je en regardant mon oncle.
—On n’en sait rien, me répondit-il sans détour.
—Que s’est-il passé à Torrent ? Gabriella ne peut pas être morte, dis-je en m’étranglant sur ce dernier mot. Elle ne peut pas, Linc.
Je n’avais pas crié ni pleuré une seule fois lorsqu’on me torturait. Toutefois, à l’idée de perdre Gabriella, je gémis pitoyablement. J’étais amoché physiquement, mais ce n’était rien en comparaison de la souffrance qui me vrillait le cœur. Un sanglot s’échappa de ma gorge contractée pour parcourir mon corps, laissant un tremblement incontrôlable dans son sillage. Mon oncle posa ses paumes de chaque côté de mon visage, me forçant à relever le menton. Son geste était ferme, mais apaisant. Ses mains fortes dégageaient une odeur de foin qui me rappelait mon enfance. Cette enfance qui m’avait en partie été dérobée par mon géniteur ignoble. Je l’avais vu abattre ma mère de sang-froid et il avait tenté de me corrompre de toutes les manières sournoises imaginables. Si j’avais résisté, c’était grâce à Lincoln. Lui croyait en ma bonté. Il m’avait élevé et éduqué. Il m’avait empêché de prendre la mauvaise voie. Il m’avait plutôt montré à faire le bien autour de moi, à soigner les malades et à donner sans rien attendre en retour. C’était ça, un vrai père. Son odeur me rappelait nos après-midi en forêt, à cueillir des plantes médicinales pour les offrir à nos voisins… Nos ennemis, selon Kathar. Mon oncle m’avait également appris à aimer. Son amour pour Kayla, la commandante de l’armée des mages blancs, semblait impossible, mais, malgré les embûches, les dangers et la frontière infranchissable entre leurs royaumes, ils avaient réussi à se retrouver.
—Elle est vivante. Ce que tu as vu n’était pas réel, Thomas.
Je le fixai sans comprendre. Devais-je être soulagé ou encore plus inquiet ? Je m’apprêtais à poser d’autres questions lorsque Lincoln me repoussa délicatement pour que je m’allonge.
—Tu oscilles entre la semi-conscience et l’inconscience depuis trois jours. Maintenant que tu sembles complètement revenu, laisse-moi soigner tes blessures. Ensuite, je t’expliquerai, m’assura-t-il en rabattant quelques mèches rebelles qui s’échappaient de son chignon.
Je soupirai, résigné, avant de me laisser aller contre l’oreiller moelleux. Mon oncle avait probablement fait le maximum pendant que j’étais dans les vapes. Mais tenter de soigner un inconscient était risqué. Le corps combattait, se protégeait. Notre subconscient ne voyait pas la différence entre la magie qui torture et celle qui guérit. Ma conscience, elle, m’envoyait des signaux limpides. Je souffrais le martyre et mon corps réclamait qu’on l’apaise. Je fermai les paupières et, au moment où Linc se mit à l’œuvre, une douce chaleur se répandit en moi, pansant chaque plaie, chaque fracture et chaque écorchure. Mes muscles se détendirent un à un, alors que mon cœur, lui, se contractait cruellement devant mon impuissance.


C hapitre 2
Marie
Mais où était cette satanée bague ? Ça faisait déjà deux bons mois que je l’avais égarée. Moi et ma maudite manie de jouer avec mes bijoux. Elle avait sûrement glissé de mon doigt, mais où ? Quand ? Je n’avais pas encore osé en parler à mes parents. C’était un souvenir précieux provenant de mon arrière-arrière-grand-mère paternelle. Elle avait passé par plusieurs mains, de génération en génération, pour finir… perdue je ne sais trop où. Vraiment, bravo Marie, une vraie championne ! Est-ce que l’école était terminée au moment où je l’avais perdue ? Je n’en avais aucune idée !
Pour la millième fois, je tentai de me remémorer tous les endroits que j’avais visités ces dernières semaines, ce qui me découragea encore plus. J’aimais sortir, c’était définitif. Chez Jacob, chez Simon, chez Jasmine, au centre commercial, au petit café près de chez moi, à mon cours de danse, à la compétition mondiale de ballet à laquelle nous avions participé un mois plus tôt… au Japon ! Nous avions terminé deuxièmes au monde. Nous étions folles de joie et nous avions fêté cette victoire dans un restaurant, trois ou quatre bars, et à notre hôtel. Égarer une bague au Japon, à plusieurs milliers de kilomètres de chez moi, c’était tout à fait dans mes cordes. Pourquoi faire les choses à moitié ? Avec moi, tout était démesuré. J’étais tête en l’air et facilement distraite. Surtout lorsqu’un mignon garçon grand et musclé me proposait de danser avec son accent craquant ! Le billet d’avion avait coûté une fortune et nous avions amassé la somme nécessaire pour le voyage pendant des mois. Il n’y avait aucune chance que j’y retourne dans un avenir rapproché. Ce que je pouvais être empotée !
Il me semblait l’avoir encore au doigt lorsque j’avais visité Jasmine juste avant notre dernière répétition de danse. Je me souvenais de cette séance. À quel point elle avait été pénible ! Notre professeur ne nous avait pas lâchées d’une semelle. Célestin. Il ne me manquerait pas pendant les vacances d’été. Ce qu’il pouvait me faire jurer pendant les classes, avec sa voix nasillarde. Je reconnaissais que sans lui, nous n’aurions jamais terminé au deuxième rang, mais quand même, il me rendait folle ! En plus, il se permettait de m’appeler sa diva. Franchement, j’étais loin d’être un

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