Les secrets de Monsieur Synthèse
890 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Les secrets de Monsieur Synthèse , livre ebook

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
890 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Louis Boussenard (1847-1910)



"Ce jour-là, c’était au commencement d’avril 1884, M. le préfet de police paraissait en proie à une violente préoccupation. Assis devant un vaste bureau encombré de papiers, il inventoriait le contenu d’un portefeuille, et s’interrompait fréquemment pour tortiller sa fine moustache déjà grisonnante, ou fourrager les boucles de sa chevelure harmonieusement disposée au petit fer.


Puis, son impatience étant exaspérée plutôt que calmée par ces tiraillements des appendices pileux, il se levait brusquement, repoussait d’un coup de jarret le fauteuil qui s’éloignait en ronflant, et parcourait, d’un pas saccadé, le cabinet tendu de reps vert, l’immuable reps sans lequel il n’est point d’art décoratif pour nos modernes administrations.


– Et cet imbécile d’agent qui n’arrive pas ! murmura-t-il en se mirant à la dérobée dans la grande glace à cadre noir scellée sur la cheminée.


Pour la troisième fois son doigt pressa un bouton d’ivoire qui mit en mouvement tout un système de carillons électriques.


Au même instant, un huissier très grave, rasé de près, au crâne luisant, écarta la portière, s’avança de trois pas avec une sorte d’empressement solennel et sembla prendre racine au milieu d’une rosace du tapis."



Qui est Monsieur Synthèse ? Un savant qui s'est enrichi par ses inventions ? Un génie mégalomane et amoral ? Un danger pour l'être humain ? Un danger pour les Etats ?


Un roman fantastique toujours d'actualité !

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 14 avril 2023
Nombre de lectures 0
EAN13 9782384422173
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0022€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Les secrets de Monsieur Synthèse

suivi de

10.000 ans dans un bloc de glace


Louis Boussenard


Avril 2023
Stéphane le Mat
La Gibecière à Mots
ISBN : 978-2-38442-217-3
Couverture : pastel de STEPH'
lagibeciereamots@sfr.fr
N° 1215
Les secrets de Monsieur Synthèse
Prologue
Savants et policiers
I

Chez le préfet de police. – Portefeuille volé. – Le rapport du Numéro 27. – Monsieur Synthèse. – Un crédit de cent millions. – Un homme qui vit sans manger ni dormir. – Commande et livraison de cinq cents scaphandres. – Coup de couteau. – L’agent Numéro 32. – Un professeur de « substances explosives ». – Alexis Pharmaque. – Les paroles s’envolent, les écrits se volent. – La piste. – Encore Monsieur Synthèse. – La maison mystérieuse de la rue Galvani. – Portes closes. – Consigne inflexible. – La flotte de Monsieur Synthèse. – Le Grand-Œuvre.

Ce jour-là, c’était au commencement d’avril 1884, M. le préfet de police paraissait en proie à une violente préoccupation. Assis devant un vaste bureau encombré de papiers, il inventoriait le contenu d’un portefeuille, et s’interrompait fréquemment pour tortiller sa fine moustache déjà grisonnante, ou fourrager les boucles de sa chevelure harmonieusement disposée au petit fer.
Puis, son impatience étant exaspérée plutôt que calmée par ces tiraillements des appendices pileux, il se levait brusquement, repoussait d’un coup de jarret le fauteuil qui s’éloignait en ronflant, et parcourait, d’un pas saccadé, le cabinet tendu de reps vert, l’immuable reps sans lequel il n’est point d’art décoratif pour nos modernes administrations.
– Et cet imbécile d’agent qui n’arrive pas ! murmura-t-il en se mirant à la dérobée dans la grande glace à cadre noir scellée sur la cheminée.
Pour la troisième fois son doigt pressa un bouton d’ivoire qui mit en mouvement tout un système de carillons électriques.
Au même instant, un huissier très grave, rasé de près, au crâne luisant, écarta la portière, s’avança de trois pas avec une sorte d’empressement solennel et sembla prendre racine au milieu d’une rosace du tapis.
– Le Numéro 27 ?... fit brièvement le préfet.
– Le Numéro 27 arrive à la minute, et attend dans l’antichambre le bon plaisir de Monsieur le préfet.
– Qu’il vienne !...
« Mais allez donc... dépêchez-vous » ! dit-il en bousculant l’huissier toujours solennel, dont les jambes n’évoluaient qu’avec une majestueuse lenteur.
Puis, le préfet poussa un soupir de satisfaction, s’assit sur son fauteuil, couvrit d’un buvard le portefeuille toujours ouvert, prit une lime à ongles pour se donner une contenance, composa son visage et attendit.
– Le Numéro 27 !... annonça l’huissier.
– C’est bon ! Je n’y suis pour personne.
Puis, avisant le nouvel arrivant, un homme d’une trentaine d’années, au visage intelligent, mais singulièrement pâle, il l’interpella rudement, sans même lui rendre son salut.
– Vous voilà donc enfin, Monsieur !
« Comment ! Il est dix heures du matin, et je vous attends depuis hier soir !...
« Je vous charge d’une mission confidentielle, très importante, avec recommandation expresse de faire toute la diligence possible, et vous me laissez « croquer le marmot » pendant douze heures !
– Mais, Monsieur le préfet...
– Silence !
« Votre mission accomplie bien ou mal, je n’en sais rien encore, vous vous amusez à badauder au lieu d’accourir, et vous vous faites voler, comme un niais, le portefeuille renfermant, avec mes instructions, ce rapport qui me tient tant à cœur !
L’agent, franchement interloqué, en voyant son chef instruit d’une particularité qu’il croyait être seul à partager avec le voleur, ne put retenir un geste de surprise.
Puis, à ce geste, aussitôt réprimé, succéda, rapide comme la pensée, un jeu de physionomie indiquant un travail mental pouvant se formuler ainsi :
– Tiens !... Tiens !... Est-ce que le patron serait plus fort que je ne le pensais ?
« Se défie-t-il de moi ?
« Est-ce lui qui m’a fait voler mon portefeuille ?
« Mais à quoi bon !
– Eh bien ! vous ne dites rien ?...
« Qu’avez-vous à répondre ?
– Que le fait est rigoureusement vrai.
« On m’a enlevé mon portefeuille... Oh ! très subtilement, et le filou qui a fait le coup, est un malin.
« Mais, à malin malin et demi, et mon coquin a été le premier volé.
« Car, d’une part, le portefeuille ne contenait pas un sou, et mon rapport est écrit en caractères cryptographiques dont seul je possède la clef.
– Vous croyez ? fit ironiquement le magistrat.
– Absolument, Monsieur le préfet.
– Si pourtant je vous montrais ce document, ou plutôt sa traduction en bon français, que diriez-vous ?
– Que c’est impossible !
– Tenez, mon garçon, voici l’original écrit par vous au crayon, et voici la traduction...
« Je garde cette dernière... lisez votre factum à haute voix ; pendant ce temps, je vais collationner.
Mais l’agent, complètement abasourdi, croyant rêver, demeure comme pétrifié, les bras collés au corps, sans même paraître voir le mouvement de son chef qui lui tend le papier.
Le préfet savoure un instant son triomphe, et reprend de sa voix dure :
– Il me semble que j’attends !
Le Numéro 27 paraît faire un effort violent, tire son mouchoir de sa poche, essuie la sueur qui ruisselle sur son visage livide, prend le papier, et lit d’une voix altérée :

« Affaire Synthèse.
« Conformément aux ordres de mon chef, j’ai cherché à m’édifier sur le compte d’un personnage mystérieux qui, depuis environ un mois, constitue pour la société parisienne une sorte d’énigme vivante... »

– Voilà, ou je ne m’y connais pas, de la véritable littérature de journal à un sou, interrompit ironiquement le magistrat.
« Mais, continuez... nous collationnons...
« La critique viendra en temps et lieu.

... « Ce personnage, qui répond au nom bizarre de Monsieur Synthèse, habite au Grand-Hôtel.
« Monsieur Synthèse est un grand vieillard dont il est impossible de préciser l’âge, mais, nonobstant sa verdeur, on peut assurer qu’il a doublé le cap de la soixantaine... »

– De plus en plus roman-feuilleton, murmura le préfet.

... « Il paraît être d’origine hollandaise ou suédoise, continue le Numéro 27, et son existence est des plus étranges. Il reçoit peu. Ses deux serviteurs, des nègres rébarbatifs, de véritables cerbères, font subir aux visiteurs une sorte d’examen, leur demandent des mots de passe, et les évincent rigoureusement quand leurs réponses ne sont pas satisfaisantes.
« On dit de Monsieur Synthèse, qu’il est un savant maniaque toujours occupé à couvrir des feuilles blanches de formules chimiques et d’équations algébriques, et que c’est là l’unique motif de la claustration rigoureuse qu’il s’impose.
« On dit également que sa fortune est colossale ; que dans son appartement, les gemmes les plus précieuses : diamants, saphirs ou rubis, traînent littéralement partout, et qu’il possède plusieurs coffres remplis de ces pierreries.
« Il y a là peut-être un peu d’exagération, mais ce que je puis affirmer, c’est qu’il possède un crédit de cent millions sur la maison Rothschild. »

– Vous dites bien cent millions ?
– Je tiens le fait du caissier principal.
– Diable ! Voilà qui est positif.
« Ses pierres peuvent n’être que des cailloux... mais l’or de MM. de Rothschild est de bon aloi.
« Continuez.

... « On ajoute, et la chose paraît surabondamment prouvée par les affirmations des gens de l’hôtel, que Monsieur Synthèse ne mange pas et ne dort jamais.
« Il n’est pas descendu une seule fois à la table d’hôte, et ne s’est jamais fait servir quoi que ce soit dans son appartement. Ses noirs n’ont jamais introduit de provisions dans l’hôtel, et ils disent, à qui veut les entendre, que leur maître ne sait pas ce que c’est que le sommeil.
« Du reste, il n’y a, dans l’appartement, ni lits, ni divans, ni chaises longues.
« Ces singularités, fort étranges, eussent peut-être suffi pour signaler ce personnage à l’attention discrète de l’autorité... »

– Vous avez raison et votre littérature a parfois du non.
« Attention discrète... c’est bien cela...
« Il faut être discret à l’égard d’un original qui peut tirer à vue cent millions, et pourtant il est bon de se renseigner sur lui.

... « À l’attention discrète de l’autorité, reprit le Numéro 27 heureux de l’approbation de son chef, si un fait, indéniable, celui-là, car il appartient au domaine de la vie réelle, n’eût traversé cette existence mystérieuse.
« Monsieur Synthèse, quelques jours après son arrivée à Paris, s’est mis en rapport avec l’importante maison Rouquayrolle et Denayrouse, et a fait une commande de cinq cents scaphandres .
« Ces appareils, perfectionnés, sont pourvus chacun d’un réservoir ayant à peu près les dimensions d’un sac de soldat. L’air respirable, emmagasiné dans ce réservoir sous une forte pression, peut subvenir aux besoins du plongeur pendant six heures. Les pompes servant à injecter l’élément respiratoire, ainsi que les tuyaux communiquant avec les appareils sont, par ce fait, supprimés, et l’homme, emportant sa provision d’air avec lui, possède une entière liberté de mouvement et d’action. Ces scaphandres sont dits : indépendants.
« La livraison a été faite il y a cinq jours, gare Saint-Lazare, payée comptant et expédiée au Havre par un train spécial.
« Les cinq cents appareils sont arrimés déjà dans la cale d’un grand steamer, Anna , amarré au quai du bassin de l’Eure. »

– C’est bien tout, n’est-ce pas ?
– C’est tout pour le moment, Monsieur le Préfet.
– Bon ! Vos hiéroglyphes sont de tout point conformes à ma traduction.
« Je n’ai rien à reprendre aux termes de ce rapport qui me dédommage agréablement de la prose habituelle à mes auxiliaires.
« Ce n’est là, d’ailleurs, qu’un embryon d’enquête ; je ne doute pas que vous n’arriviez bientôt à extraire de cette série de mystères, une bonne et substantielle note de police, rigoureuse comme une équation, et à expliquer tous ces phénomènes d’une façon satisfaisante.
« Mais, soyez excessivement prudent, et ne vous amusez plus à vous laisser voler

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents