Les six vies de Salomon
61 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Les six vies de Salomon , livre ebook

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
61 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

A différentes époques, avant Jésus-Christ et bien après, les tribulations d’une tribu qui tente de survivre dans un monde violent et dépourvu de sens, ou alors sous la tutelle d’un démiurge fou.




Le narrateur, Salomon, et d’autres, ne paraissent tenir bon que par la succession de raids sanglants. Ils évitent ainsi de par trop cogiter car, dans les moments de répit, des hommes chevauchant des gros porcs, des navigations aléatoires, des moujadines ou des villages peuplés d’habitants armés d’ustensiles électro-ménagers d’un autre temps mettent à mal la raison.



Heureusement, peut-être, comme pour tout aplanir, il existe la broyotine, genre de guillotine en plus radical.



Récit nerveux et absurde, drôle et perturbant, Les six vies de Salomon est un conte post-apocalyptique et mystique désespéré qui laisse aux lectrices et aux lecteurs le sentiment d’un malaise pénétrant derrière l’apparente gaudriole.


Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 09 mars 2023
Nombre de lectures 0
EAN13 9782940700196
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0052€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Hélice Hélas Editeur bénéficie d’une prime à l’encouragement de l’Office fédéral de la culture pour les années 2021-2024, et d’un conventionnement avec l’Etat de Vaud et la ville de Vevey pour les années 2022-2024.
© Vincent Kappeler, 2022 pour le texte
© Sjostedt, 2022 pour l’illustration de couverture
© Hélice Hélas Editeur, 2022
ISBN Numérique : 9782940700196
www.helicehelas.org
Collection Mycélium mi-raisin


Préface
Vincent Kappeler et la pomme qui ne faisait pas venir la nuit

Je n’ai pas lu le bouquin de Vincent Kappeler que vous vous apprêtez à découvrir. Je ne suis pas fou. J’ai déjà lu les quatre précédents, ça me suffit amplement. Il y a une autre raison pour laquelle je n’ai pas lu ce livre : pour éviter de ruiner ma réputation s’il est mauvais. Quand un type me demande de lui écrire une préface, j’accepte en général pour être gentil. Mais en même temps, il est impossible de savoir au moment de la demande si le roman sera bon ou pas vu qu’il n’est habituellement pas terminé. Si on a l’occasion de le lire par la suite et qu’on se rend compte que c’est une daube innommable, il est un peu tard pour se désister. La meilleure solution est donc de ne surtout pas le lire avant publication et de bien le préciser au début de la préface. Comme ça, si en parvenant au terme de ce volume vous regrettez votre achat, vous ne pourrez pas vous en prendre à moi. Je me décharge ainsi de toute responsabilité. C’est assez malin, je trouve.
Je reste toutefois parfaitement qualifié pour rédiger cette introduction. On sait bien que les écrivains sortent toujours le même livre toute leur vie durant. En changeant juste un peu les noms à chaque fois. Il est facile d’inférer à partir des quatre bouquins déjà publiés auparavant ce que contiendra celui que vous tenez entre les mains. Je sais déjà que Vincent Kappeler ne fera au fil des pages strictement que ce qui lui plaît. Et voilà la première chose qui le rend sympathique. Au moins, avec lui, on est certain de ne pas se retrouver en terrain balisé, sur l’autoroute empruntée par les best-sellers tous identiques et uniformément ennuyants. C’est déjà ça.
Remarquez, je n’aurais rien contre le fait que Kappeler écrive des best-sellers. Ça lui permettrait de me payer pour mon travail, alors que là je bosse pour la beauté du geste. Mais si après quatre publications il n’a pas encore touché le jackpot, c’est qu’il n’a pas ça en lui. Ce type est un loser, et voici la deuxième chos e qui le rend fréquentable. Même s’il essayait de toutes ses forces de pondre un roman à succès, par exemple un thriller à la mode scandinave, il ne pourrait pas s’empêcher de tout foirer en créant des personnages biscornus auxquels on arrive difficilement à s’identifier car ce qui les motive est généralement saugrenu, tout comme leurs actions. Quant à ses intrigues, il aurait beau faire, elles finiraient immanquablement pleines de trous et de rebondissement illogiques. Il ne fait pas exprès. Il est juste incapable d’écrire autre chose. Heureusement, il y a des gens qui aiment les romans de traviole, remplis d’histoires bancales et de personnages inexplicables. Mais pas assez pour devenir riche. Ce qui explique que Kappeler soit pauvre et qu’il le restera, troisième motif qui le rend précieux.
J’ai demandé un jour à Vincent Kappeler s’il s’inspirait des romans de Raymond Queneau, car j’ai trouvé des similitudes entre leurs deux univers teintés de surréalisme. Mais il m’a répondu que non. Comme quoi ça ne sert pas à grand-chose d’être cultivé quand on écrit une préface. Enfin, bien fait pour moi. Ça m’apprendra à perdre mon temps à rencontrer des écrivains. Ces bons-à-riens n’ont la plupart du temps pas lu les mêmes livres que moi et ne répondent jamais ce que je veux à mes questions. On dirait qu’ils font exprès pour me contrarier.
Ce qui avait suscité ma question n’était pas seulement la parenté entre les personnages lunaires de l’auteur du Chiendent et ceux, plutôt martiens, de Kappeler, mais aussi parce que j’ai soupçonné dans Dynastie (L’Age d’Homme, 2019) l’utilisation de contraintes oulipiennes. Kappeler y racontait la vie de 26 enfants nés d’un même père dont les initiales du prénom égrenaient l’alphabet. Mais il semble qu’il ne mette pas tant d’ordre que ça dans ses histoires. Vu que dans sa tête c’est aussi plutôt mal rangé.
Nous en arrivons déjà au sixième paragraphe de cette préface, et on n’a encore rien appris de passionnant sur Vincent Kappeler, à part que c’est un pauvre loser qui n’écrit que ce qui lui plaît sans s’inspirer de Queneau. C’est maigre. Et ça pourrait s’appliquer à pas mal d’autres écrivains. Il m’apparaît inévitable que, pour approfondir le propos, il va maintenant falloir en passer par l’exercice désagréable de l’analyse de texte. Heureusement, quand je lis des livres, je trace des petits traits au crayon dans les marges pour signaler ce qui pourrait servir plus tard. Je suis assez prévoyant comme gars. Je n’ai donc pas besoin de me retaper les quatre bouquins de Kappeler pour trouver un passage à décortiquer.
J’ouvre celui qui me tombe sous la main, disons Loin à vol d’oiseau (L’Age d’Homme, 2015) et je recopie le premier passage que j’ai souligné. Voilà, en page 9 :


« J’ai vu beaucoup de forêts mais je n’ai jamais coupé d’arbres. Comprends-tu, Monique, ce que je veux dire par là ? Moi non. »
Bon, en fait ce n’est pas si intéressant que ça. Je me demande pourquoi j’ai souligné ce passage… Tant pis, on va faire avec. Donc, ce qu’on constate d’emblée, c’est qu’il y a un personnage féminin e t qu’il s’appelle Monique. Or, c’est peu courant en littérature. Par exemple, pas un seul personnage de La Recherche du temps perdu de Proust ne s’appelle Monique. Enfin je crois. Je le dis de mémoire. Ça mériterait vérification mais, honnêtement, je n’ai pas envie de me refaire les sept volumes juste là, même si j’avais bien ri en les lisant la première fois. Je n’ai pas échappé à la relecture de Kappeler pour me jeter dans celle de Proust, quand même… Pour la démonstration, admettons qu’il n’y a pas de Monique chez Proust. Et je crois qu’il n’y en a pas non plus dans les deux Zola que j’ai lus. Et je suis quasi certain que Madame Bovary est également dépourvu de Monique. Ça se saurait sinon. On peut en conclure que Kappeler est un auteur hautement original et personnel qui s’oppose résolument à la tradition romanesque francophone.
Revenons maintenant à la première phrase, « J’ai vu beaucoup de forêts mais je n’ai jamais coupé d’arbres. » Ici, l’auteur décrit une situation très commune. La plupart des gens s ont dans le même cas. A part les bûcherons professionnels. On peut déduire de cette phrase que Kappeler est comme tout le monde, conformiste et peu aventureux. Pas du genre à, sur un coup de tête, empoigner une hache pour aller couper des arbres dans la forêt au beau milieu de la nuit.
Or, on remarquera que cette deuxième constatation contredit absolument la première. Il en découle que Vincent Kappeler cultive les contradictions. Et on rajoutera pour faire bonne mesure que c’est ce qui fait son charme. Même si on ignore si c’est vrai. Mais ça sonne bien.
J’ai examiné le reste du passage un petit moment (environ 30 secondes) et je peux affirmer qu’il n’y a rien d’autre de significatif à en tirer. Mais enfin c’est déjà pas mal pour juste trois lignes. Franchement, je ne pensais pas pouvoir dire autant de choses intelligentes à partir de cet extrait.
J’aimerais terminer cette brève présentation de l’auteur par une phrase tirée de Love stories (L’Age d’Homme, 2018) qui selon moi contient la chose la plus vraie qu’i l ait jamais écrite dans toute son œuvre : « Manger une pomme ne fait pas venir la nuit. » Il a raison. J’ai essayé. Encore qu’on puisse en discuter, car si on mange la pomme vers 16h30 au mois de décembre, la nuit arrive juste après. Mais c’est une exception. En général, manger une pomme ne fait effectivement pas venir la nuit.
Il ne me reste plus qu’à vous souhaiter une bonne lecture. Tout comme vous, je vais à mon tour me plonger dans ce bouquin. J’espère qu’il est bien. Mais s’il est mauvais ce n’est pas trop grave : je le recevrai sûrement gratuitement.
 
Stéphane Babey
Rédacteur en chef de l’hebdomadaire satirique romand Vigousse
I. CREATOR (3472 av. J.-C. - 3458 av. J.-C.)
Elle marcha longtemps. Guidée par la douleur, elle se retrouva à cent lieues de son foyer. Il y avait là une bergerie. De l’ombre ne ferait pas de mal. Elle s’allongea dans la paille et le travail commença. Comme elle était seule pour accoucher, elle ne dérangea personne avec ses cris. Elle pleura toutes les larmes de son corps en déposant son fils sur sa poitrine. Il s’appellerait Salomon, comme son père. Ses dernières forces la quittèrent, elle hurla à l’aide mais personne ne l’entendit.
 
Pour son âge, Salomon était déjà très débrouillard. Il comprit que, un peu comme une citerne, il avait du temps à disposition avant que la source ne se tarisse. Il s’alimenta aux seins de sa mère inanimée en attendant que quelque chose se passe et dormit le reste du temps.
Il fut ensuite pris en charge par des chèvres qui venaient de dévorer son placenta. Comme il n’était pas venu les mains vides, il méritait un petit coup de main. La femelle lui présenta ses tétines et d’instinct, Salomon s’en nourrit.
Le corps du berger devait aussi pourrir quelque part dans cette colline car personne ne revint s’inquiéter des bêtes. Ainsi se déroulèrent les premiers mois de la vie de Salomon, entre tétées et broutage d’herbe. Il découvrit aussi avec ses frères et sœurs les jeux et fut expulsé plus d’une fois sur lui-même en roulant comme une boule après avoir pris un coup sur la tête.
 
L’insouciance prit fin six ans plus tard lorsqu’un groupe de chasseurs passant dans le coin découvrit ce garçon nu broutant à quatre pattes au milieu de chèvres et d’autres animaux. Ils le capturè

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents