86
pages
Français
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2019
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Ebook
2019
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Publié par
Date de parution
28 juin 2019
Nombre de lectures
0
EAN13
9782898036200
Langue
Français
Publié par
Date de parution
28 juin 2019
Nombre de lectures
0
EAN13
9782898036200
Langue
Français
Copyright © 2019 Christian Perrot
Copyright © 2019 Éditions AdA Inc.
Tous droits réservés. Aucune partie de ce livre ne peut être reproduite sous quelque forme que ce soit sans la permission écrite de l’éditeur, sauf dans le cas d’une critique littéraire.
Éditeur : François Doucet
Directeur de collection : Simon Rousseau
Révision éditoriale : Simon Rousseau
Révision linguistique : Isabelle Veillette
Conception de la couverture : Mathieu Caron-Dandurand
Images de la couverture : © Getty images
Mise en pages : Félix Bellerose
ISBN papier 978-2-89803-618-7
ISBN PDF 978-2-89803-619-4
ISBN ePub 978-2-89803-620-0
Première impression : 2019
Dépôt légal : 2019
Bibliothèque et Archives nationales du Québec
Bibliothèque et Archives Canada
Éditions AdA Inc.
1385, boul. Lionel-Boulet
Varennes (Québec) J3X 1P7, Canada
Téléphone : 450 929-0296
Télécopieur : 450 929-0220
www.ada-inc.com
info@ada-inc.com
Diffusion Canada : Éditions AdA Inc. France : D.G. Diffusion Z.I. des Bogues 31750 Escalquens — France Téléphone : 05.61.00.09.99 Suisse : Transat — 23.42.77.40 Belgique : D.G. Diffusion — 05.61.00.09.99
Participation de la SODEC.
Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada (FLC) pour nos activités d’édition.
Gouvernement du Québec — Programme de crédit d’impôt pour l’édition de livres — Gestion SODEC.
Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada
Titre : Métempsychose / Christian Perrot.
Noms : Perrot, Christian, 1968- auteur.
Description : Mention de collection : Collection Corbeau
Identifiants : Canadiana 20189432179 | ISBN 9782898036187
Classification : LCC PS8631.E7786 M48 2019 | CDD C843/.6—dc23
En hommage à Howard Phillips Lovecraft
(1890-1937)
PROLOGUE
La cérémonie impie atteignait son paroxysme, Rodrigue le sentait au plus profond de ses tripes. Le rythme de l’incantation montait, crescendo, à l’assaut de la voûte nocturne. Bien que piquetée d’étoiles, cette dernière n’abritait aucune lune, comme si un voile sombre la couvrait. À moins que l’astre de la nuit n’ait préféré s’enfuir pour éviter d’assister au sabbat infâme qui bafouait la nature par sa perversion.
Les corps nus des officiants paraissaient couverts d’humeur visqueuse sous l’avare lumière dispensée par une poignée de bougies, aussi noires que du naphte, exhalant une insupportable puanteur. Au centre du cercle formé par celles-ci gesticulait le maître de cérémonie. L’instigateur de ce rassemblement d’âmes corrompues, seule personne de l’assistance à connaître les horribles phrases idoines crachées dans un langage étranger à la nature humaine. Les mots impossibles à prononcer par des cordes vocales jaillissaient de ses lèvres couvertes de sang frais. Soumis à cette mélopée, l’air alentour paraissait s’épaissir de manière surnaturelle.
Dans un paroxysme de hurlements gutturaux, une monumentale silhouette se dressa à la périphérie de la zone éclairée. Une créature avançait d’une démarche si pesante qu’elle donnait l’impression d’être une montagne en mouvement. Son pas fit trembler la Terre elle-même, telle une chair palpitante marquée au fer rouge. Bousculant les bougies sombres, la chose contre nature fut un court instant visible, de même que le prêtre impie éructant les pires monstruosités de sa voix altérée.
Un simple coup d’œil porté sur la créature invoquée par la cérémonie suffisait à rendre totalement fou le plus flegmatique des hommes. Pourtant, le regard de Rodrigue n’y glissa qu’une infime seconde, préservant un court instant sa santé mentale déjà compromise par les évènements. L’identité du maître de cérémonie, cependant, fit chavirer sa raison. Le gouffre de la démence s’ouvrit en grand sous les pas du spectateur à la manière d’un squale gobant un nageur imprudent.
Tout en tournoyant sur lui-même dans sa chute interminable, l’image du visage de l’officiant brûlait la rétine de Rodrigue.
Son propre reflet…
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— Monsieur, votre ceinture, je vous prie ! Monsieur, s’il vous plaît… Monsieur ?
Sentant la main de la Mort venue en personne lui secouer l’épaule, Rodrigue s’extirpa de son cauchemar digne d’un film d’horreur en aspirant profondément. Incapable de crier, il ne put que cligner des paupières à la manière d’un poisson échoué sur une plage. Les ultimes brumes oniriques s’évaporant, il sursauta en discernant un visage près du sien.
— Monsieur, s’il vous plaît, répéta l’hôtesse de l’air. Attachez votre ceinture !
Comprenant enfin où il se trouvait, Rodrigue opina de la tête, cherchant son souffle.
— Désolé, croassa-t-il, la gorge aussi aride que la vallée de la Mort. Je m’étais endormi… Quel cauchemar !
L’homme reprit ses esprits par paliers en s’efforçant de se focaliser sur les détails de son environnement tout en reprenant pied avec la réalité. Commercial dans une grande société québécoise distribuant des accessoires pour dentistes, Rodrigue voyageait beaucoup, parfois trop à son goût. Les nombreux allers-retours entre son domicile de Boischatel, le siège de la compagnie à Québec, et leur succursale de Paris faisaient de lui un client fidèle des avions de ligne. Or, pour l’heure, le vol actuel se trouvait malmené par des conditions atmosphériques plutôt désastreuses.
Pour mieux chasser les images de son rêve éprouvant, il prit en main le livre acheté à l’aéroport au moment du départ : Spectres , de Dean Koontz. Pas étonnant qu’il fasse des cauchemars ! À bien y réfléchir, il l’avait acquis dans une sorte d’état second puisqu’il n’aimait pas du tout les romans fantastiques. Cependant, le souvenir de sa femme, Françoise, demeurait si vivace en lui qu’il accomplissait encore parfois des actes n’ayant plus lieu d’être. Combien de fois avait-il ainsi acheté un livre pour elle ? Difficile de miser sur un chiffre. Pauvre Françoise, fauchée en pleine jeunesse. Il s’en était fallu que de la rencontre d’un passage piéton et d’un chauffard…
Reposant le roman dans le vide-poche de son siège, Rodrigue tourna son attention sur les hôtesses de l’air qui semblaient courir partout en ordonnant aux passagers de boucler leur ceinture. Les soubresauts de l’engin en disaient long sur le temps extérieur. Étreint par un sombre pressentiment, le passager ne put résister à la tentation de questionner l’une des employées passant à sa portée.
— Tout va bien, mademoiselle ?
Malheureusement, un brusque sursaut de l’avion de ligne ôta à l’hôtesse la possibilité de répondre. Pris dans un trou d’air particulièrement conséquent, l’appareil décrocha de son altitude dans une protestation de tôle malmenée. Déséquilibrée, la jeune femme bascula en arrière avant de heurter sans ménagement la cloison. Le choc fut rude. La moquette couvrant le plancher accueillit durement le corps féminin dans un bruit mat. Assommée net, l’hôtesse demeura immobile, inanimée.
Réagissant uniquement à l’écoute de son instinct, sans réellement réfléchir, Rodrigue se leva. Il s’agenouilla au-dessus de la jeune victime avant de lui tapoter les joues pour essayer de la ramener à la conscience.
— Mademoiselle ?
— Restez assis ! commanda une autre voix provenant de l’arrière.
— Je veux sortir, laissez-moi sortir ! beugla un homme manifestement frappé de démence.
— Ne touchez pas à ça ! intima une hôtesse.
L’intonation de la voix féminine véhiculait une peur si profonde qu’elle ne pouvait échapper à quiconque l’entendait.
Rodrigue releva immédiatement les yeux vers la scène se déroulant à l’extrémité du couloir central. Plusieurs passagers paraissaient s’interposer entre une porte extérieure et le forcené. Une courte bagarre s’ensuivit, bientôt terminée par un claquement sec d’origine indéterminée. Une nouvelle dépression extérieure obligea l’avion à prendre quelques paliers d’altitude, manifestement contre son gré, à en croire les protestations de ses organes mécaniques. Dans un étrange bruit de succion, la carlingue parut alors happée par une force invisible qui arracha la porte, comme une main géante ouvrirait une vulgaire boîte de sardines.
Instantanément, tel un fauve trop longtemps détenu en cage, l’air contenu dans l’habitacle s’enfuit en mugissant par l’ouverture, emportant tous les objets non maintenus. Quelques secondes à peine et Rodrigue se retrouva, lui aussi, pris dans la tourmente. Par pur réflexe, il s’accrocha à un siège proche. L’espace d’une poignée de secondes, il se crut sauvé. La valise qui le faucha sournoisement lui prouva le contraire. Par pur réflexe ou par chance, il s’agrippa de nouveau. Hélas ! il se trouvait désormais très près du seuil béant vers l’extérieur. Rapidement, il comprit qu’il ne pourrait lutter longtemps contre le souffle puissant de la dépressurisation. Un nouveau décrochement de l’avion fut fatal ; il bascula dans le vide en hurlant sa terreur.
Dehors, une tempête régnait en maîtresse incontestée de l’air. Une myriade d’éclairs zébrait les nuées : colère de Zeus ou véritable phénomène atmosphérique inhabituel… Un déluge digne de celui de la Bible trempa instantanément les vêtements du malheureux tournoyant dans l’air brassé de rafales aux voix discordantes.
Durant une brève seconde, Rodrigue crut rêver encore. Cette chute ressemblait tant à celle de son récent cauchemar qu’il parvint à se convaincre de son éveil prochain. L’hôtesse lui conseillerait sans doute de boucler sa ceinture et de relever la tablette du siège devant lui. Peut-être même lui suggérerait-elle de se rendre aux toilettes avant l’atterrissage…
Une surface liquide aussi noire que du pétrole et plus dure qu’un mur le frappa traîtreusement alors qu’il croyait quitter son monde onirique. Le souffle coupé par le choc, Rodrigue avala un tonneau d’eau incontestablement salée. Trouant la surface à la manière d’un diablotin quittant sa boîte, l’homme recracha tout ce qu’il put. Hélas, l’océan le rattrapa bien avant qu’il ne parvienne à reprendre son souffle. Malmené par les remous, il creva derechef l’onde pour