Roman sur une lune verte
156 pages
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Roman sur une lune verte , livre ebook

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Description

Mise en perspective avec la planète géante qui domine de sa masse monumentale le ciel de tous ses satellites, Ossy n’est qu’une goutte d’eau. Elle est pourtant la plus imposante et la plus éloignée, la plus lente dans sa rotation et sa révolution, et par convention la dernière des trois cent cinquante et une lunes de Karra la rouge. Roman est stupéfait : c’est le plus merveilleux spectacle qu’il ait jamais contemplé. Pastel émergé du cosmos, la lune émeraude emplit doucement son champ de vision... C’est à peine s’il perçoit leur entrée dans l’atmosphère. La Grise plonge vers la surface comme une bille de plomb et se redresse juste à temps pour venir friser les vaguelettes vertes. Ibéris lui sourit. C’est chez elle.

« Bienvenue Roman. »

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 15 février 2019
Nombre de lectures 0
EAN13 9782414312009
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0052€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-414-31201-6

© Edilivre, 2019
Le jeu
Une brise glacée s’insinue le long d’une épine vertébrale, une sueur froide, Roman frissonne. Le duel psychique s’éternise : il s’était emparé des trois premières manches assez facilement, mais la septième et décisive partie est annoncée serrée.
Ses fondamentaux sont flexibles et ses offensives percutantes, mais depuis la mi-temps, aucun atout de son Jeu ne se révèle efficace face à cette adversaire décalée. La polémique oblique vers le concept de confrontation. Bien que leur joute soit à l’évidence prise pour exemple dans l’illustration du thème, il se risque à spéculer sur l’éradication des prérogatives de victoire. L’emploi de paradoxes spécieux comme base dialectique est un de ses expédients favoris. Il escompte entraîner cette garce dans une noyade cérébrale basée sur la revendication même de son incohérence. Il élabore de la sorte une dimension télépathique malléable à souhait, et qu’il présume imparable.
En conséquence une cuisante claque d’amertume vient conclure son échec. Sa rivale excentrique l’a démoli.
La victoire n’est pas enviable, et d’autant moins l’affrontement. Comment ai-je pu à ce point la sous-estimer, et tabler sur une pareille tactique ? Au mépris de mes états d’âme la plupart des vivants sont violents et friands de pouvoir. Humilié ? C’est possible … La poursuite illusoire d’un objectif quelconque me suffira bien pour ne plus l’être. Ce ne sera cependant pas celui qu’ils souhaitent m’imposer. Alors, briser la règle et disparaître, j’approuve. Ensuite ? Le hasard est romantique, mais il nécessite une source … D’entre elles, Ossy paraît la plus potable. Voyage, incertitude et contrebande m’ouvrent leur bras, profitons-en.
« Ibéris, tu veux du vin ? Ibéris ? Ibé… ! »
Un rayon vert vient lui griller la cervelle, et sa lourde chute entraine aussi la culbute d’un goûteux butin : du très grand vin.
« Merde, le pif ! »
Ses jambes flageolent un petit peu. Son prodigieux compagnon l’apeurait. Il tétanisait parfois cette longue femme noire et nue qui s’approche à pas lents de la dépouille avachie sur les coussins. Passé un court moment d’hébétude, accroupie, elle redresse la bouteille et recueille dans sa paume le filet de vin qui coule de la table basse. Elle finit par déposer son arme pour essuyer la naissance d’une larme au bord de ses yeux verts. Le monstre velu qu’elle avait autrefois soustrait des steppes givrées d’un monde lointain avait pris trop d’assurance ; il était devenu imprévisible, et dangereux. Pourtant, il lui manifestait encore de l’affection, ou tout au moins de la reconnaissance, pour avoir emmené son existence sur les voies de la civilisation. Mais il était temps de clore ce chapitre. En Ossy, patrie des sans-lois, ce monstre lui avait permis de gravir les échelons, et de gagner la considération des Kaïns et autres Seigneurs Financiers. Tant pis. Ibéris est une condottiere impulsive qui ne peut malheureusement plus se permettre de pardonner l’ombre de ceux qu’elle aime, comme son monstre chéri, d’une passion déraisonnée, voire même dans ce cas précis, sexuellement contre-nature.
Je suis une authentique désaxée… Qui va maintenant devoir lourder cette masse poilue d’une demi-tonne. Masse poilue qui traîne une sacrée charrette de dettes… Sans compter le cadavre à liquider, j’ai de quoi m’occuper. Il faudra surtout former un nouvel associé sans trop tarder.
Son Clan, son œuvre nécessite à sa tête un duo, car le succès de sa féminité dans cet environnement violent n’est pas un fruit chanceux. Il découle d’une stratégie diversifiée qui lui a jusqu’ici procuré les moyens de défier les Kaïns en toute indépendance, et sur leur propre terrain : la piraterie.
* * *
Lamanièle est enceinte. Cette délicieuse bergère parcourt la lande depuis sa prime enfance. Le cheptel de son grand-père est conséquent, et toute la famille s’y consacre à temps plein. Malgré le poids des traditions du terroir, l’insoumise est jusqu’ici parvenue à ses fins. Au lieu de se résigner à se voir bannie des pâturages comme ses consœurs et germaines reléguées aux fourneaux dès les premiers signaux de l’âge pubère, elle, elle a tenu tête auprès de ses moutons pour s’attarder dans de vertes bruyères, balayées sans relâche par les vents marins. Ces espaces perdus et perchés sur des falaises qui surplombent à pic les champs de récifs déchiquetés par les déferlantes du cap, aux confins du bout du monde et dont elle se rêve la princesse.
Lamanièle est la favorite de son aïeul et ses noces ne seront toujours pas célébrées cette année, au grand désespoir de sa mère, veuve, qui ne dispose pas comme sa fille des bonnes grâces du patriarche.
« Mais voilà, c’est de toi que j’attends un enfant, de cette nuit si fraîche que nous avons passée tous les deux sur la grève…
– Mais ça remonte au tout début de saison !
– Oui, la terre s’éveillera sous peu, et cet enfant de l’hiver devra naître.
– … Il naîtra donc ! Je veux t’épouser. Je trime dur et si le grand Omeo me l’accorde, je serai patron de pêche dans les deux à trois printemps prochains. Le vieux Plouque m’apprécie, et il est en âge de se retirer. Son dernier fils est parti à l’aventure derrière les montagnes depuis de nombreuses années déjà, comme tous les autres, il ne reviendra pas. Et quand bien même je n’hériterais pas de sa barcasse, j’en dénicherai bien une autre, quitte à retaper une épave ou à en construire une de mes propres mains. Une bonne barque rien que pour notre famille à nous. En attendant mieux, je dégoterai une cabane pour nous trois. Tu seras heureuse avec moi, tu verras.
– Non. Les miens n’accepteront jamais de me laisser vivre avec un pêcheur. Si je ne suis pas encore mariée, c’est parce que Grand-père me réserve pour un des fils Crotof. On est cousins, mais ça ne fait rien, il paraîtrait que les vieux tiennent absolument à renforcer la consanguinité de la famille… On attend juste qu’il rentre de guerre. Mais qu’il en revienne ou qu’il y reste, quand les vieux sauront la vérité, ils nous feront lapider en sacrifice aux Dieux.
– Ne t’inquiète pas. Mon père saura régler cette histoire, il est estimé par les anciens du village, et il a gardé de l’influence auprès d’eux. Aie confiance, ils l’écouteront.
– Non. Eugène, je ne veux pas de cette vie-là. »
C’est un bon gars, jeune, robuste et enthousiaste, caractérisé par un sempiternel sourire à désarmer tous les drames. Avant d’être embarqué dans sa dixième année sur un rafiot moisi, il raccommodait déjà tout minot les filets de pêche du vieux Plouque ; et comme tous les gens d’ici, il vénère le grand Omeo, le Dieu de la mer. Son père vagabond, migrateur épris de tourmentes et de marées, avait autrefois forcé son intégration dans le bourg grâce à de la sueur et surtout beaucoup de contrebande. Maintenant, c’est au tour du fiston d’engrosser les filles de cette contrée rude et oubliée.
Comme son paternel, il a toujours affectionné la séduction d’innocentes demoiselles, et l’épineuse posture dans laquelle il vient de se fourrer n’est malencontreusement pas sans précédent. Sauf que cette fois-ci, il aime à la folie sa bergère. Il a besoin d’elle, de cet enfant aussi. Et cela, même si elle exige les plus grands sacrifices. D’autant plus si elle les exige. Nombre des donzelles du cru auraient été flattées par son offre, seulement Lamanièle est trop altière. C’est d’ailleurs là le ferment de l’ivresse éperdue qu’il ressent pour cette fille de la lande, c’est le piquant d’une âme farouche qui daigne par instants se reposer sur la sienne… Et puis ce rire si rare et si frais, ce rire que lui seul sait si bien débusquer, ce rire qui tranche la gravité d’un regard triste et pénétrant… Ce rire comme ultime récompense. Eugène suivra, et son père comprendra. Il s’enfuira pour elle, avec elle, en abandonnant la mer et tout le reste derrière elle.
* * *
Toutes deux trop puissantes pour se résoudre au choc frontal, deux tyrannies, deux Continents sur cette planète se défient et dévorent les systèmes solaires avoisinants. Aksam et Malineen sont les Dominants : deux vastes empires antagoniques, goulus et racornis, dont la nébulosité des structures conduit à s’interroger sur l’existence même des supériorités sensées les superviser. La légende prétend qu’il y avait ou qu’il y aurait encore un terrible Dieu régnant sur les crêtes enneigées du pôle Nord, au cœur des archipels Malineen, qui agrémentent d’une myriade de petites taches torturées l’hémisphère boréal de Karra, la Géante Rouge.
Or il est relaté qu’une querelle de croyants fut à l’origine d’une guerre sans merci. Jadis, au-delà de la ceinture désertique, à l’extrémité australe de la planète, les Aksamiens proclamèrent l’autonomie religieuse. La répression Malineen qui s’ensuivit fut d’autant moins mémorable qu’aucun témoin ne survécut pour la raconter. Contre toute attente, il est malgré tout rapporté que le Continent Pourpre parvint à refouler durablement l’agression menée par les Petits du Continent Noir, et ce, grâce à son Nanoréseau. Nonobstant, loin d’incarner une alternative pacifique, comme aurait pu le sous-tendre son statut de victime émancipée, la descendance d’Aksam n’eut de cesse depuis lors d’abreuver sa soif illimitée de conquêtes, à l’instar de son rival historique. Et les deux Continents de disputer une course colonisatrice des plus démentes, quand leurs populations respectives n’occupent concrètement que les deux pôles de Karra la Géante Rouge, unique et colossale planète du système solaire, autour de laquelle s’entrecroisent dans une danse folle ses trois cent cinquante et une lunes.
Ossy n’a pas de gouvernement. Pauvre, cosmopoli

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