C est urgent... ou pas
168 pages
Français

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C'est urgent... ou pas , livre ebook

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Description

J'ai parfois réussi.
Me faufilant dans les couloirs encombrés, j'ai exercé avec passion.
La colère des accidentés, la rage des malades et la douleur des parents ont peu à peu endommagé mes barrières. L'humour n'a pas toujours suffi.
Devenu parfois plus technicienne que médecin, au risque de paraître sans humanité, j'ai peu à peu capitulé.
Je livre ici des rencontres qui ont forgé l'âme du médecin que je suis aujourd'hui.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 18 juillet 2019
Nombre de lectures 0
EAN13 9782414282753
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0052€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
194 avenue du Président Wilson – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-414-28276-0

© Edilivre, 2019
Dédicace

Pour l’amour de ma mère, la fierté de ma grand-mère,
À Hélène,
On ne répare pas un cœur brisé.
C’est urgent...ou pas.

Je m’appelle Sonia. Devenir urgentiste était pour moi une évidence dès ma troisième année de médecine. J’ai l’instinct qu’il faut et la rage de vaincre nécessaires. J’aime soigner, rassurer et consoler. Beaucoup disent que je suis un bon médecin. Les interventions en SMUR (Service Mobile d’Urgences et Réanimation) sont des défis et je m’acharne à réanimer ces personnes lâchées par la vie. J’ai mis quelques années à comprendre qu’un cœur battant ne suffisait pas toujours.
Luc est urgentiste depuis plus longtemps que moi. Les urgences, c’est sa vie. Il est marié avec une institutrice. Ils ont trois enfants. Luc est un passionné gentil et il prend plus de gardes qu’il ne le devrait, le plus souvent pour rendre service, mais aussi parce qu’il se sent bien aux urgences. Il essaie cependant de profiter de ses enfants dès qu’il peut, parfois au détriment de son épouse qui aimerait, elle aussi, plus d’attention. Elle s’inquiète parfois de le voir travailler autant et s’interroge sur ses motivations. Elle le trouve bien trop proche de son équipe. Je pense qu’elle a tort de s’inquiéter : Luc, c’est un grand frère…
Jean-François « Jeff » est marié. Aide-soignant dans le service depuis peu, il est aussi pompier. Sa femme est infirmière libérale. Ils ont un peu de mal à s’organiser dans leur vie de couple, surtout avec leurs deux enfants en bas âge. Jeff est jeune et a plein de projets. Son dynamisme est son point fort.
Hélène est infirmière dans le service depuis plus de vingt ans. C’est un pilier. Elle adore ce terme. Les internes la craignent un peu car elle ne supporte pas l’incompétence et les hésitations, mais elle leur apprend beaucoup aussi. De l’instinct, elle en a, et lorsqu’elle dit que quelqu’un doit être vu rapidement, il vaut mieux se dépêcher d’y aller. Son mari n’a pas supporté son rythme de travail ni ses récits d’histoires aussi affreuses qu’incroyables. Il est parti et ses enfants ont également quitté le domicile depuis peu pour vivre leur vie. Elle a cependant un réseau amical important et va décompresser chaque semaine au club de gym.
Brigitte est la reine du geste technique. Infirmière anesthésiste, elle nous accompagne en sortie SMUR. Elle aime l’ordre et la précision. Elle me donne de petites tapes sur les mains quand je commence à farfouiller dans le matériel. Elle me sait tout feu tout flamme et attend que je grandisse un peu. Je l’appelle souvent Mamie ce qui me vaut à nouveau une petite tape, sur la tête cette fois.
J’ai l’impression que Mireille a toujours été là ; elle est notre sœur, notre maman, notre mamie. Toujours d’humeur égale, son titre d’aide-soignante est sa raison d’être. Elle doit partir à la retraite l’année prochaine, mais c’est manifestement un projet renouvelable.
Nous sommes une famille : nous traversons ensemble des tragédies, des miracles et des exploits, dans notre travail et dans nos vies. J’ai vécu avec eux mes grossesses ; ils m’ont consolée lors du décès de mes grands-parents ; j’ai soufflé des bougies aux urgences et ouvert des cadeaux de Noël. J’y ai tout appris. Nous nous retrouvons autour d’un café dans la salle de repos ou pour fumer une cigarette dehors dans la fraîcheur apaisante de la nuit. Nous savons tout sur tout le monde. Comme dans toutes les familles il y a des heurts mais aussi de la complicité et des réconciliations. Ça peut paraître utopique mais la vie aux urgences est tellement particulière que cette proximité d’équipe est nécessaire et à mon avis, indispensable.
Je relate ici quelques épisodes de notre histoire, des événements extraordinaires de notre quotidien qui nous ont fait rire, pleurer mais qui nous ont aussi changés.


Les urgences, c’est mon univers.
Il y règne le désordre.
Il faut passer de la salle 1 où attend une femme qui a mal à l’orteil depuis trois semaines, à la salle 2 où se meurt un vieil homme abandonné, pour finir en salle de déchoquage en plein émoi car le monsieur de quarante ans qui y est installé fait un infarctus.
Chaque matin, je rentre dans mon bureau et je me prépare. Je me déshabille et enfile ma tenue : un pantalon blanc avec des bandes réfléchissantes, un polo blanc, un gilet sans manches où il y a inscrit dans le dos : MÉDECIN – URGENCES-SMUR. Cette tenue, j’en ai rêvé des années et j’ai travaillé pour la mériter. Je prends quelques secondes pour vérifier que je n’ai rien oublié. C’est comme un acteur qui se concentre avant de rentrer sur scène… et je connais parfaitement mon rôle.
« Putain »
1 er janvier, 8 h 15.
L’air vif me pique le nez, ça me donne envie d’éternuer. Je franchis le sas d’accueil des urgences. J’ai les bras chargés de paquets de petits fours et de boissons pétillantes.
— Salut, Soso, bonne année ! Luc va être content que tu sois déjà là ; il y a un SMUR ; Va te changer, je vais lui dire que tu es là…
— Ben, ça commence bien…
Je commence à grommeler en rangeant mes affaires. Effectivement, Luc va être content ; je pense qu’après une nuit auprès des fêtards du jour de l’An, il doit avoir hâte d’aller se coucher… le SMUR du matin juste à la fin de la garde, ça tue…
À peine quelques minutes plus tard, je suis dans la voiture. Je réajuste ma veste et je ferme mon blouson avant que la voiture ne démarre en trombe.
— Un jeune, coincé dans sa voiture, à cinq minutes d’ici, m’informe Jeff, notre chauffeur.
— Bonne année, me dit Brigitte, l’infirmière assise derrière moi.
Je me tourne vers elle et lui réponds en souriant.
— Bonne année à toi aussi. Tu as passé une bonne soirée ?
— o ui, tranquille en famille…
Pas le temps de s’étendre sur nos soirées respectives, la voiture ralentit, un gendarme nous fait signe de nous garer derrière le camion de pompier.
Le chef d’agrès des pompiers nous rejoint. Nous nous croisons souvent. C’est un grand gaillard sympathique que j’apprécie.
— Bonjour Sonia… et bonne année.
— Tiens, Jonas, ça faisait longtemps ; meilleurs vœux… alors ?
— u n jeune au volant de sa voiture ; fortement alcoolisé, il est couché sur le côté. On ne peut pas le dégager, son bras est dessous la portière.
Décrit comme ça, je n’arrive pas à imaginer la position.
La voiture gît sur le côté gauche, avec à la place du conducteur un jeune boutonneux aux cheveux courts. Je m’approche et je constate effectivement que je ne peux voir que son épaule gauche, le reste du membre disparaissant sous la portière défoncée. Je m’agenouille près de la victime.
— Bonjour, je suis le médecin du SMUR.
— Putain, mais dégage-moi au lieu de me faire la causette là putain !
Charmant, vraiment.
Jonas m’emmène de l’autre côté du véhicule. À plat ventre il me montre une main violette sous la portière. Je me demande si cette main est toujours reliée à son propriétaire. Jonas reste surveiller les mouvements de cette dernière pendant que je retourne vers mon gentil conducteur.
— Vous vous appelez comment ?
— c omme ton père, putain, mais dégage-moi, ça fait chier là.
— e st-ce que vous pouvez bouger les doigts de votre main gauche ?
De sa main droite, il me fait un doigt d’honneur.
Vraiment raffiné ce garçon.
— Je parle de l’autre main.
— À ton avis ? Dégage-moi putain.
Jonas se redresse et me fait signe de la tête qu’il n’a observé aucun mouvement de doigts.
Brigitte a déjà perfusé le jeune indélicat pendant que j’essayais d’établir un dialogue constructif. Je me penche vers lui pour lui expliquer qu’on va le sédater afin qu’il n’ait pas mal pendant qu’on installe le matériel nécessaire pour soulever la voiture. Avant que je puisse lui donner plus de précisions, il vomit bruyamment et le jet atteint mes jambes.
Non, mais c’est dingue ça… il commence vraiment à me faire…
Mon pantalon est plein de vomi ; c’est chaud, ça sent mauvais… ça y est, j’en ai marre.
Les pompiers étudient avec attention ma tenue.
— Je dirais punch et vin rouge.
— o uais, y a des morceaux de fruits
— y a du rhum aussi, non ?
J’interromps leurs propos gustatifs.
— C’est fini les gars ? Vous avez fini d’installer le matériel ?
Ils ont effectivement, malgré cet intermède, installé les coussins gonflables nécessaires.
Mon nouvel ami vomisseur s’assoupit sous l’effet des drogues injectées. Je fais signe à Jonas que tout est OK.
La voiture se soulève doucement. Les pompiers passent une planche dure par la vitre brisée afin de pouvoir faire glisser délicatement notre jeune victime hors de l’habitacle.
Un coup d’œil sur le scope m’indique que le pouls, la tension et la saturation en oxygène sont satisfaisants.
— Prêts les gars ? 1, 2 et 3 !
Il est extrait de sa prison temporaire.
— Prêts pour lever ? 1, 2 et 3 !
Il est installé sur le brancard.
J’examine son bras : tout est là ; sa main se recolore doucement ; il présente une vilaine plaie du poignet mais rien à voir avec ce que j’imaginais. Il a de la chance.
Dans le VSAB (le camion des pompiers), Morphée se réveille doucement.
— Putain, pourquoi je suis attaché, c’est quoi votre truc, où je suis, putain, laissez-moi, je veux rentrer chez moi.
— On y va, doc ? me demande le conducteur.
— Ah oui, rapidement s’il te plaît, j’ai hâte de me changer !
Il sourit et fait démarrer le véhicule.
Le jeune pompier qui nous accompagne est tout blanc. Je lui fais signe de s’asseoir plus loin ; il faut dire que je sens franchement mauvais. Nous prenons de la vitesse et entamons notre petit périple vers les urgences au rythme des « putain » de notre victime.
— Ce n’est pas le rêve ça de commencer l’année avec un bourré vulgaire et un m

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