Cahier d’un petit Ardéchois
206 pages
Français

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Cahier d’un petit Ardéchois , livre ebook

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Description

« Louis, ou plutôt Petit-Louis, c’était moi, petit garçon abandonné là par la vie qui passe.

À la mort de mes parents je fus confié à une tante à Lyon... Une tante si l’on veut qui m’apprit à vivre de la mendicité.

Suite à un accident, mon destin bascula, et je me retrouvai dans la campagne ardéchoise.

Là, je découvris le rude travail agricole et... »

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 19 mai 2017
Nombre de lectures 3
EAN13 9782414081035
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0060€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d'adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-414-08101-1

© Edilivre, 2017
Du même auteur
Du même auteur :
Chez Mon Petit Editeur
– La gardianne 2012
– Le grand mas 2014
Chez Edilivre
– Histoires Ardéchoises 2016
Dédicace

Cette histoire est authentique. Le nom des personnages ont été changés. Petit Louis est toujours mon ami ainsi que toute sa petite famille.
Sa ferme n’est pas trop loin de celle de mes grands parents. Pour rien au monde je ne manquerai de passer quelques heures avec lui, lors de ma visite familiale.
Mon ami que Dieu protège toute ta petite famille et prenne soin de toi.
Ton ami d’enfance.
La photo de couverture est de mon ami Christian Mendez grand photographe naturaliste Camarguais.
Merci Christian
1
Quand je regarde ce temps là, c’est comme si j’ouvrais un livre d’images, ou mieux encore un cahier de dessins d’enfants.
La maison est une grande caisse cubique, percée d’alvéoles réguliers, d’où sortent des têtes blondasses ébouriffées. Elle est surmontée de tuyaux en tôle et de tire-bouchon de fumée.
Les arbres sont posés sur un cercle de métal découpé et proprement arrondis.
On est en Avril, le printemps a donné tout son effort en tirant au jour un brin de chiendent entre deux pavés, et garnissant de jeunes feuilles les arbres de la rue de la République. Un printemps raté, qui cependant faisait s’ouvrir les fenêtres, grouiller la marmaille le long des trottoirs et apparaitre sur le pas des portes les femmes qui se chauffaient le corps à un soleil nouvellement doré.
La poésie était représentée par un serin dans sa cage sur le rebord de la fenêtre qui s’égosillait, un géranium tout rose déjà et une romance qui balançait son refrain dans une mansarde.
Au centre de l’image, un gamin de dix ans, aux joues rouges, d’un rouge quasi scandaleux, au milieu de l’anémie générale. Louis en eut rougi encore s’il avait pu : mais il avait par un don de la nature, atteint son maximum.
Louis, ou plutôt petit-Louis, c’était moi…
Ce n’était pas grand-chose. Ce n’était guère qu’une rognure de petit garçon abandonné là par la vie qui passe.
Ma mère était morte en me mettant au monde. Ne l’ayant jamais connue, la seule chose que je savais d’elle, c’est qu’elle était Ardéchoise et avait résidé quelques années à Antraigues sur Volane avec mon père. Quand à moi, j’étais né à Privas. Mon père était mort sur le bord d’un chemin, imbibé d’alcool, renversé par une voiture. L’histoire des miens commence et s’arrête à leur mort. Personne ne peut me dire mot de mes grands-parents qui résidaient à Alissas.
J’ai l’air d’être arrivé dans ce quartier Lyonnais, et même dans ce monde, comme un petit chat qu’on a rencontré miaulant et se frottant à une borne, attendant la main qui le soulève et l’emporte au chaud.
Il y a de grands trous d’ombre dans ma jeunesse et mon enfance. Ici, dans la campagne Ardéchoise, on sait ce que sont devenus les gens : établir les liens de parenté est un sujet de conversation et les cousinages les plus éloignés sont repérés. On se sent aussi moins seul, et des fils nous rattachent et même nous relient les uns aux autres, à travers la plaine, et les villages les plus dispersés.
A Lyon, surtout dans le quartier ou je vivais, il n’en est pas de même. On vous voit, on ne vous voit plus ; personne ne s’en préoccupe…
On s’en va chacun de son coté, toujours pressés, comme si on courait après la vie pour la faire se sauver plus vite.
J’étais confié à une tante… Une tante si l’on veut. Du moins on me la faisait nommer ainsi. Elle avait toujours derrière elle une trainée de quatre gamins, qui comme des marcassins, la suivaient à la queue leu-leu dans le quartier. Parfois s’abattaient sur nous des séries de taloches, quand elle giflait le numéro de tête c’était moi. C’était alors mon rôle que de les ramasser et ensuite de les moucher. Après quoi l’arche était d’aplomb et solide.
Ce n’est pas que j’ignorasse moi même les calottes. J’en recueillais ma large part, à cause des désillusions que je causais à ma tante : car enfin à dix ans, il est bien juste, n’est-ce pas qu’un enfant commence à rendre des services, surtout quand le chômage domine dans la région. Tous les tisseurs de la Croix rousse ferment les uns après les autres, du fait que la soie tissée est moins chère en provenance de Chine qu’une fabrication Française.
Je ne pensais que d’aller à l’école au lieu de faire des petits boulots dans les beaux quartiers et d’apitoyer quelques dames riches par mes vêtements tout déchirés. Et je ne rapportais que 20 franc par jeudi ! Encore fallait-il me surveiller pour que je n’en dépense pas la moitié à acheter quelques crayons ou des cahiers avec la couverture représentant des animaux, a la papeterie de la rue de Créqui.
On donnait en effet dans l’école que je fréquentais une éducation de riche. Les leçons de morale ne s’adaptaient guère au milieu ou je vivais ; elles avaient trait au respect du bien d’autrui, aux devoirs envers les autres et même envers les gens pauvres !… Le seul chapitre sur les devoirs de moralité avait un rapport bien net avec ma vie ; mais la charité c’est moi qui la demandais ! Ma maitresse nous faisait voir tout un beau panorama humain, plein de nobles sentiments et bien peint comme une toile de maitre.
Alors que voulez-vous ! Je m’étais agrandi les yeux à force de regarder les choses trop lointaines de cet autre monde. Le monde des civilisés. Je l’imaginais plein de beaux devoirs, d’escaliers étincelants, de rampes de lumières, telles dans les grands magasins de l’avenue de la République. On y vit heureux. On y est aimé, on se sacrifie. On donne aux pauvres pour les voir sourire. On est riche pour jeter autour de soi, des pièces de un franc ou d’avantage.
Ou est la belle dame qui parfume à son passage le logis des pauvres, le bon riche qui apporte son argent en placement dans les banques.
A l’école je vivais dans des enceintes morales ou l’on adore son père, qui rentre à la maison le soir après sa journée de labeur bien fatigué… Il vous embrasse et d’une main vous caresse, tandis que de l’autre il tend à la mère l’argent de sa paie… Dans ce paradis éclos au dessus des feuillets, des livres, on dort les fenêtres ouvertes, pour que l’air rentre dans l’appartement et chasse les maladies ; ou l’on dit : merci madame. On ne mange pas avec les doigts, rapport aux microbes qui vous dévorent le corps. On doit toujours répondre aux lettres et se dévouer à la patrie, comme monsieur Gély qui pendant la guerre de 40 coupa les fils du télégraphe et faisait dérailler les trains des Allemands, si bien qu’il fut décoré par le Général De gaule de la croix de guerre à la fin du conflit…
Les traits d’héroïsme et de dévouement sont beaux comme le ciel quand on le regarde au fond de la cour profonde et pareille à un puits entre six étages. Dans vos yeux papillote une larme, on aime que ça vous pique jusqu’au fond du cerveau. La tête se perd là haut et s’en va comme un ballon.
Pour une gifle !
– T’es encore dans la lune ! bon a rien.
Non c’était dans le soleil. Mais je suis réveillé, je prends mon masque pour aller au coin de l’église Saint Nizier où il y a un mariage qui s’apprête de sortir ; on peut en rapporter jusqu’à 50f. La calotte m’a donné la physionomie voulue ; j’ai les yeux plein de larmes… Me voici à mon poste, et le cortège sortit, lent, solennel, comme une image de livre, comme le sacre de Napoléon page 185 de l’histoire de France.
– Un petit franc, madame ! ma mère est si malade…
Le reste de la phrase bave et se perd comme dans une eau qui n’a plus la force de jaillir du robinet… Mes yeux caressent la robe d’une dame. Oh ! Que cette étoffe doit être douce ! Tout en marmonnant, je tends le doigt pour la toucher. Mais une petite pièce retenti, descendue des fourrures dans un geste gracieux, une pièce de 5 franc, pâle et distinguée au milieu de ma gamelle vide et rouillée. Je la vois s’éloigner avec grâce et légèreté…
Cependant le cortège est absorbé par des voitures klaxonnant, décorées de grandes bandes de tulle blanc et de roses blanches. Il ne reste plus qu’une petite étoile sur l’antenne de radio de la dernière voiture qui s’éloigne en direction du quai de la pêcherie.
Tout à coup, je rentre de mon rêve, dans ma peau terrestre qui en frémit. Tiens à mes pieds, un carré de cuir bordé de dorures ; c’est un porte billet qui vient de pousser là, par miracle. D’instinct, comme un chien ou un chat, je le flaire. Il sent bon ; c’est la même odeur que la pièce de 5 franc. La pièce vient de ce beau carré de cuir que j’admire, comme si il était tombé du ciel.
Et brusquement, sans réfléchir, me voici parti à courir après la propriétaire du porte billet. Toutes les leçons de madame Mario me poussent ; les lunettes de la maîtresse me regardent, les exemples de l’histoire sont derrière moi avec l’héroïsme de Vila et de mademoiselle Dodu. Enfin j’arrive, mes joues rouges brûlantes, avec mon cœur qui bat la chamade, au restaurant ou les taxis s’arrêtent pour décharger leurs clients et notamment ceux du mariage qui étaient attendus pour le repas de noce.
La dame aux fourrures sent un frôlement de nez de chien sur sa main. Ce sont mes doigts avec le porte billet. Je la regarde, elle me sourit, fait un geste de surprise joyeuse.
Mais rompre la marche d’un cortège, c’est aussi grave que de s’arrêter net dans un discourt politique.
La dame continue son chemin tout en me recommandant :
– Attends-moi une minute, là, à l’entrée du restaurant, je vais revenir.
Elle reviendra, je sentirai donc une fois encore l’odeur du paradis, je verrai l’ange blond, la belle image…
J’attendis un instant, la porte se referma. Mais tout à coup, les yeux abandonnés par

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