Chroniques enfantines
68 pages
Français

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Chroniques enfantines , livre ebook

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Description

« Mes souvenirs de toute petite enfance restaient accrochés dans ma mémoire. »
Dans cet ouvrage, Nathalie Bouvy nous invite à assister à une projection de scènes d’enfance, en dévoilant des morceaux de l’univers d’une petite fille comme on passerait d’une fenêtre à l’autre pour en observer les différents paysages.
Des petits souvenirs donc, parfois sans queue ni tête ; des images nettes ou des impressions confuses, des souvenirs olfactifs qui ressurgissent brusquement à cause de la présence d’une odeur, d’une sensation tactile ou la vue d’un objet. Des réminiscences parfois obscures, qui nous invitent à replonger dans ce lointain passé qui est celui de notre enfance...

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 14 août 2014
Nombre de lectures 0
EAN13 9782332759344
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0082€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-332-75932-0

© Edilivre, 2014
Préface
J’ai gardé des images-souvenirs de ma toute petite enfance. J’avais entre un an et demi et quatre ans au moment où se déroulent ces scénettes.
En les écrivant, je suis étonnée de la précision que prennent certaines esquisses : la chaleur sur ma peau, la sensation d’humidité, le pointu des cailloux, le désagrément de certains tissus et la fraîcheur de certains parfums.
Je ne me souviens d’aucun visage sauf des contours de celui de la petite voisine. Je ne pourrais jamais décrire ni ma mère ni Yaya : je ne me souviens que de silhouettes et d’odeurs. Je n’ai aucun souvenir de papa ou de sa voiture à cette époque. Pourtant je sens sa présence mais il ne joue aucun rôle dans mes souvenirs. Il n’est jamais entré dans mes scénettes, il est resté dans les coulisses.
Mes sœurs et mon frère sont un groupe informe : ce sont « ils », « les autres ». Ils sont là mais impossible de dire qui est qui. Je n’avais aucune idée de ce qu’ils faisaient, pourquoi ils étaient présents ou absents et je ne les comprenais pas. Ils étaient importants comme entourage mais si l’un d’eux avait disparu, je ne m’en serais jamais aperçue.
Ces souvenirs sont comme une lanterne magique ensorcelée. Une scène est revécue avec précision et n’a aucun rapport avec le souvenir suivant. Ou le précédent. Ce sont tout simplement mes « petits » souvenirs, une chronique enfantine sans queue ni tête. Des images nettes ou des impressions confuses ressurgissent brusquement à cause d’odeurs, de sensations tactiles ou à la vue d’un objet. D’autres souvenirs sont fichés dans ma mémoire depuis toujours.
Ces « retours » dans ma petite enfance sont des trouées dans un monde clos et unique. Ces souvenirs se déroulent dans une enceinte bien délimitée mais remplie d’inconnus et d’incompréhensions.
L’entourage immédiat est familier, sécurisant et normal. Il donne le ton à ce qui est pris pour exact ou vrai. Enfant, la vérité est celle que l’on voit. Dans ce cadre, j’ai ma cellule bien à moi où je vis primairement. Mes souvenirs montrent-ils mes premiers heurts avec « la vie » ? Ou mes premiers besoins de « développement », d’acquérir du savoir et du pouvoir ?
Souvent reléguée dans un rôle passif, il me restait l’observation, parfois même la contemplation. D’ailleurs le décor des années cinquante m’a tellement imprégnée que je recherche des objets de cette époque-là. Certaines images de ces années-là me ravissent et je retombe dans mes livres d’enfants avec grande sérénité.
Toute petite, je suis impuissante : je ne parle pas ou à peine. Beaucoup de choses m’échappent et je ne sais pas m’exprimer ou si mal. Il me reste alors ma coquille à moi ou je me retire avec ou sans trouvailles. En me « ressouvenant », j’ai parfois l’impression d’avoir été une paire d’yeux blottis dans un coin.
Mon premier souvenir et le plus joyeux est celui de ce jour d’été ensoleillé où je porte une belle barboteuse. Je suis heureuse de mes beaux vêtements et de sentir le soleil sur ma peau en pirouettant rien que pour le plaisir d’être.
Ecrire ce petit passé est un départ… d’écrivain.
Eindhoven mai 2012
Grandir
Je m’éveille et vois Maman et Yaya au pied de mon petit lit-cage. Les parois en sont très hautes. J’aperçois deux silhouettes découpées par la lumière diffuse des fenêtres juste derrière elles. Les rideaux ne sont pas très épais et colorient la lumière en bleu. C’était un après-midi d’été car je suis sans couverture.
Que viennent-elles faire ? Elles parlent. Elles parlent sans trop bouger comme si elles étaient là depuis longtemps. Je ne distingue pas leur visage, je ne sais pas qui est qui. C’est l’unité « Maman-Yaya ». J’écoute leur bruit de paroles. Oh !… elles disent que je deviens trop grande pour le petit lit.
Vite je tends mes jambes et mes doigts de pieds pour toucher le fond du lit. Pour être grande comme les autres et avoir un lit facile d’accès mais surtout facile à quitter. En étendant mes jambes, je sens la boule mouillée de mon lange entre mes cuisses. Cette sensation est extrêmement désagréable et dans un réflexe, je relâche mes jambes pour ne plus sentir ce tissu râpeux et humide. Je ne touche plus le fond du lit, je ne suis plus grande. Va-t-on quand même me donner un autre lit ?
Maman et Yaya partent sans rien me dire. Que vont-elles décider ? Pourquoi me laissent-elles dans mon lit ? A cause de mon lange mouillé peut-être ? Elles s’en vont et moi je reste avec un sentiment bizarre. Pourquoi n’ont-elles pas vu que j’étais réveillée ? Elles m’ont vue puisqu’elles me regardaient. Ou examinaient-elles seulement le lit ? Mais je suis dans le lit, elles ont dû me voir. Elles se sont dirigées vers la porte, sont sorties sans se retourner, sans me regarder moi, sans me faire signe, sans me faire comprendre ce qu’elles voulaient.
Changer de lit, avoir le même lit que les autres, les grands, faire partie de leur groupe, de leur monde, est un but énorme, immense.
L’après-midi a continué, je ne sais plus comment. Je suis restée couchée, ahurie : j’étais devenue invisible.
Je ne pense pas avoir eu un nouveau lit assez rapidement.

Etonnant de vivre dans un monde sur lequel je n’ai aucune influence.
Petite, je vis dans mon monde à moi.
C’est une grande zone d’ombre d’où j’émerge de temps à autre, par hasard. Ce monde est rassurant : personne ne sait y entrer et le troubler.
Seul un drôle d’instinct, de besoin me pousse à en sortir, à prendre contact avec les autres et surtout à comprendre ce qu’ils disent.
Je suis comme un petit chien : j’essaye de faire comprendre ma joie, ma tristesse, mes désirs… et je regarde les autres pour essayer de les comprendre, de les imiter. Je n’ai pas vraiment besoin de relation. Il faut qu’ils soient là et qu’ils s’occupent de moi. Hélas, pas toujours quand je le veux… alors, je retourne dans ma zone d’ombre qui m’enveloppe comme une couverture.
Le poêle
Au milieu de la chambre, de petits carrés rougeoient au centre de la nuit. Ces carreaux rouges sont chaleureux et attirants, légèrement mouvants. Parfois plus rouges ou plus oranges avec des raies jaunes, ils ressemblent à une fenêtre aux petits carreaux magiques.
Si je pouvais les toucher. Tout est silencieux. Ce rouge strié de jaune a l’air doux. Je me mets debout dans mon petit lit et veux le pousser vers ces rougeurs chatoyantes. Je me cramponne à la barre du lit et frappe le bout du lit avec mon ventre. La barre est froide, surprenant, tout le reste est tiède. Je m’approche tout doucement. Bizarrement personne ne bouge, ne se réveille, ne dit quoi que ce soit. Généralement, il y a toujours quelqu’un qui réagit et m’interpelle : je ferais trop de bruit, c’est dangereux,…
Mais là rien, aucune réaction. Pourtant ils sont là. Je ne sais pas qui mais je les connais, ce sont ceux de mon monde et ils n’ont pas de nom. Je les perçois pourtant je ne les entends pas. Je sens leur odeur de sommeil. Je n’entends pas leur respiration. Tout est parfaitement calme et noir, sauf les petits carrés.
Je continue à taper sur la barre du lit. Je vais arriver à pouvoir toucher ce beau rouge tout chaud. Le silence est compact et le noir plus fort. J’y suis presque.
Je ne me souviens plus de rien.
Quelques années plus tard, j’ai retrouvé ce poêle : gros, noir, rond luisant avec une porte à quatre ou six carreaux de Mika. Il avait été placé dans le bureau de la secrétaire de papa. Je fus troublée en le voyant… il me paraissait si connu, si familier. D’un coup, je me suis rappelé ma quête nocturne.
Le poêle et moi étions seuls. Alors j’ai enfin pu toucher ces carreaux de papier magique, ils ne brûlaient pas. Ils étaient tout gris et faisaient un petit crissement lorsqu’on appuyait dessus. Je ne retrouvais plus sa chaleur, son attirance chatoyante.
Il n’y a toujours personne et donc j’essaie d’ouvrir la porte du poêle. La poignée résiste, j’insiste. La porte s’ouvre avec un grincement sur un tas de cendres. Le poêle sent la vieille poussière, il a perdu son odeur du fond de mes nuits. Je referme la porte du mieux que je peux. Pourvu qu’on ne voit pas que j’y ai touché.
Ce poêle a perdu son attrait, il est triste de froideur. En le regardant, j’entends encore le...

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