Douloureux cheminement
202 pages
Français

Douloureux cheminement , livre ebook

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202 pages
Français

Description

Cet ouvrage raconte l'intolérable parcours d'un enfant de l'Assistance publique, déshérité et abandonné. Son histoire débute en 1932. Les souffrances physiques et morales dont il fut victime tout au long de sa vie contribueront à modifier durablement son regard sur la société. Tout au long de ce récit apparaissent la méchanceté, le mépris, et l'injustice que la population, dans sa quasi totalité, affiche à l'égard des enfants abandonnés.

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Informations

Publié par
Date de parution 01 février 2012
Nombre de lectures 45
EAN13 9782296482593
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0800€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Un douloureux cheminement
Michel Ozwald
Un douloureux cheminement
Un pupille de l’Assistance publique raconte
Nous savonsqu'il reste dans ce livre des imperfections;nousprenons cependant l'option de le faire circuler,àpetit tirage,remerciant d'avance tous ceuxqui nous aideront à le perfectionner dans les tirages successifs.
© L’Harmattan, 2012 5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr ISBN : 978-2-296-55918-9 EAN : 9782296559189
Chapitre I
 La pauvre femme, encore très jeune, était désespérée : pleurant à chaudes larmes, elle hésitait à confirmer sa décision première. Devait-elle s’obstiner dans sa volonté d’abandonner son enfant ou devait-elle y renoncer, malgré les difficultés de ce choix.  C’était une situation dramatique: ayant mis au monde ce petit garçon le 6 juillet; le 21, alors qu’elle sortait de l’hôpital de Saint-Quentin, à peine rétablie de ses couches, il fallait qu’elle se décide.  Elle avait pourtant prévenu les responsables de l’hôpital lors de son admission : déjà mère d’un garçon, elle était dans l’impossibilité d’élever ce nouveau né. Vivant seule, elle était pour la deuxième foissfille mèreset elle ne pouvait assurer l’éducation de 2 enfants tout en travaillant. D’ailleurs son maigre salaire n’y aurait pas suffi.  Son désir d’abandonner son nouveau-né, déclaré avant la naissance, avait eu pour effet de déclencher une procédure particulière : deux fonctionnaires municipaux avaient assisté à l’accouchement. C’était la loi et la signature de ces deux fonctionnaires sur l’acte d’abandon était obligatoire.  On essaya de la dissuader de son projet de se séparer de ce bébé en lui faisant remarquer combien il était beau et en bonne santé et en lui rappelant aussi que c’était son devoir de l’élever. On lui proposa même de l’aider en lui octroyant une pension alimentaire les premiers mois. Rien n’y fit, elle signa l’acte d’abandon. Elle insista pour qu’on lui permette de choisir le prénom de l’enfant puis émit le désir de lui donner son nom de jeune fille.  Elle précisa encore qu’elle souhaitait que le petit Michel soit baptisé et le cœur serré, son petit balluchon à la main, en pleurs, ses cheveux blonds serrés dans un foulard, elle disparut.  Comme tous les enfants abandonnés le petit Michel fut dirigé vers la crèche de l’hôtel-Dieu de Laon.  L’hospice de cette ville était un bâtiment triste, vieux, datant probablement du dix-huitième siècle et assez mal entretenu. La crèche n’était pas plus gaie, les grandes pièces où étaient réunis les 7
berceaux faisaient peine à voir : peintures sombres et usées, vitres opaques, vieux parquets noircis Les berceaux, en fer autrefois laqué étaient gris et les volutes de fer forgé qui devaient leur donner auparavant un aspect décoratif avaient perdu de leur effet et faisaient plutôt penser à des barreaux de prison.  Une cinquantaine de très jeunes enfants occupaient les berceaux. Certains dormaient mais la majorité hurlait. A coup sûr ils nécessitaient des soins car une forte odeur d’urine et d’excrément prenait les rares visiteurs à la gorge.  Le personnel attaché au fonctionnement de ce triste endroit ne semblait pas s’émouvoir d’une telle situation. Très peu nombreuses, nonchalantes, les femmes de service traversaient les chambres sans aucunement se soucier des pleurs des bébés. Pour elles c’était une situation normale et si ces enfants souffraient d’une quelconque maladie, elle n’en avait cure.  Des visiteurs, il n’y en avait guère; qui donc pouvait être intéressé par ces enfants défavorisés. Ils étaient en sécurité, nourris et soignés : la nation avait fait son devoir. Le reste, c’est-à-dire tout ce dont a besoin un enfant pour s’épanouir leur était interdit, d’ailleurs personne n’aurait eu l’idée de leur témoigner la moindre attention et encore moins un peu d’affection.  En fait ils étaient considérés tels de petits animaux, rien de plus.  C’est ainsi qu’en cette année 1932 les pouvoirs publics traitaient les orphelins et pis encore lorsqu’il s’agissait desbâtardss. C’est comme cela qu’on les nommait habituellement en apportant à ce mot tout le mépris que la société du moment ressentait à l’égard des enfants illégitimes, abandonnés. Personne pour se demander la raison pour laquelle ils pleuraient, personne pour changer leurs couches souillées, personne pour leur parler doucement comme une maman sait le faire. Non ! Ils n’avaient droit à rien de tout cela ; c’était des orphelins et c’était déjà bien qu’on les ait recueillis.  L’administration, après avoir mis à l’abri ces enfants, avait pour deuxième mission de leur trouver une nourrice. C’est ainsi qu’une information était fournie par les mairies du département et de braves gens se déclaraient volontaires pour recevoir ces petits déshérités.  Ce n’était pas toujours pour des raisons charitables que ces 8
personnes accueillaient ces enfants : certaines, très pauvres, en acceptaient plusieurs ; ainsi la multiplication de la maigre prime mensuelle allouée pour l’entretien de chaque enfant leur permettait de survivre.  Il s’agissait souvent de veuves de guerre ; nous étions en 1932. Les conséquences néfastes de la grande guerre n’avaient pas totalement disparues, elles affectaient particulièrement les milieux pauvres. Le petit Michel n’eut pas à attendre longtemps dans ce lugubre hospice de Laon ; né le 6 juillet, abandonné le 21, c’est en octobre qu’il fut placé en nourrice.  C’est une dame âgée d’une cinquantaine d’années qui vint le chercher.  Elle habitait un village situé à trois kilomètres de la petite ville de Guise dans lequel serpentent plusieurs bras de la jolie rivière qu’est l’Oise, à cet endroit.  Ce village comptait un bon millier d’habitants. La plupart des hommes travaillaient aux usines Godin de Guise, le reste était employé dans les quinze fermes de la localité.  La personne qui venait de recueillir le petit Michel était une personne honnête, courageuse et droite. Elle était mère de 2 filles qui, mariées, avaient quitté depuis longtemps le domicile parental. Son mari, grand gazé de la guerre, était décédé depuis plusieurs années à la suite d’horribles souffrances.  Dans le désarroi du veuvage, sans ressources et dans la solitude, la pauvre femme s’était résignée à accepter la demande en mariage d’un soupirant tenace. Mais elle n’avait pas eu de chance, rapidement elle avait constaté que son deuxième mari était un ivrogne. La situation empira lorsque, les soirs de beuverie, il prit la détestable habitude de la battre sans vergogne. Ne pouvant supporter ces excès, elle s’était enfuie et, peu informée de ses droits, n’avait même pas demandé le divorce.  Sa santé ne lui permettant pas de travailler dans les champs comme que la plupart des femmes du village, elle vivait dans la misère. Le maire de la commune, voyant la pauvreté dans laquelle elle était, lui avait suggéré de s’adonner à L’éducation d’enfants de l’assistance publique. Personne très organisée, voulant élever ces enfants correctement, elle avait choisi de les accueillir très jeunes afin de ne pas avoir à assumer de trop lourdes charges d’éducation 9
au plan strictement psychologiques. Il faut préciser que parfois, certains de cesspupilles de l’assistance publiques, c’est ainsi que l’administration les définissait, avaient reçu en héritage certaines déficiences génétiques de parents alcooliques ou tout simplement indignes.  Parfois il s’agissait d’enfants qui étaient privés de leurs parents pour des raisons plus graves : emprisonnement voire crime.  Dès que l’enfant accueilli savait marcher seul, elle en prenait un autre et ainsi de suite. Ces pensionnaires lui étant enlevés à l’âge de 14 ans, madame Legrand, c’était son nom, vivait en permanence entourée de six bambins.  C’est ainsi que cette brave dame a élevé douze enfants de l’assistance publique.  C’était la pauvreté extrême : la maison, vétuste, ne disposait d’aucun confort, il n’y avait ni eau courante, ni électricité, ni toilettes, ni salle de bain. On s’éclairait avec une lampe à pétrole et la maison était chauffée à l’aide d’un seul poêle, situé dans la cuisine, qui servait principalement pour la cuisson des aliments.  L’hiver on laissait ouvertes les portes donnant dans les chambres jusqu’à 20 heures, moment où, pour des raisons d’économie, on laissait mourir le feu ; ainsi un peu de chaleur se répandait dans les autres pièces.  Une fontaine située à trois cent mètres de la maison permettait l’approvisionnement en eau : c’était la corvée journalière de ramener les lourds seaux d’eau nécessaires au besoin du Foyer. L’hygiène ne laissait pas d’être problématique, la nuit on avait recours à un seau placé dans la cuisine mais dans la journée, nul autre agrément qu’un petit coin du jardin où l’on faisait un bon usage des cendres du poêle familial. C’était ainsi chez les pauvres gens.  Malgré le manque de confort la toilette journalière était sacrée et la bonne madame Legrand exigeait unsdébarbouillages sérieux chaque matin afin de maintenir ses petits dans un état de propreté impeccable.  Le samedi soir, un énorme cuvier d’eau chaude recevait, les uns après les autres, les six enfants. Des vêtements propres et repassés 10
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