L improbable vie d un acrobate
116 pages
Français

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L'improbable vie d'un acrobate , livre ebook

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Description

En prenant pour point de départ les obsèques de son frère Mehdi, et jusqu'à la disparition de son coéquipier de toujours, Michel Rios remonte le fil du temps et retrace sa vie si particulière et improbable d'acrobate, depuis sa naissance en Prusse orientale en 1942 d'une mère juive aisée, abandonnée alors qu'elle est enceinte puis recueillie par un acrobate marocain de passage en Allemagne. Avec Mehdi, ils n'étaient pas prédisposés à devenir les meilleurs acrobates du monde dans cette discipline si particulière, les jeux icariens. Le chemin vers la gloire a été long, tortueux et parfois éprouvant pour ces deux frères : de leurs premières années passées à faire la quête dans les bistrots du quartier de la Goutte d'or, en passant par l'apprentissage rigoureux au sein de cirques prestigieux (et d'autres moins), jusque sous les projecteurs du Lido à Paris, du Caesars Palace et du MGM Grand Hotel à Las Vegas, leur parcours a été semé d'embûches, mais aussi rythmé par les succès. « Michel Rios, une des grandes figures de l'art du cirque, nous entraîne dans les coulisses de ses années à travers le monde, de Berlin à Las Vegas, du Lido au Radio City Music Hall de New York, mais aussi, dans une vie romanesque qui pourrait inspirer Steven Spielberg. Un livre passionnant, émouvant, plein d'anecdotes surprenantes. Un régal ! » Jean-Sébastien Stehli, Directeur Adjoint de rédaction, Madame Figaro «C'est une véritable histoire qui va de haillons à abondance. En ma qualité de fondateur et directeur artistique, j'ai eu le privilège de travailler avec Michel et Mehdi Rios pendant 2 ans au Big Apple Circus à New York. Lisez ce livre, c'est une belle et prenante aventure.» Paul Binder, Fondateur et Directeur Artistique Big Apple Circus à New York

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 04 janvier 2019
Nombre de lectures 0
EAN13 9782342164824
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0049€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

L'improbable vie d'un acrobate
Michel Rios
Société des écrivains

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Société des écrivains
175, boulevard Anatole France
Bâtiment A, 1er étage
93200 Saint-Denis
Tél. : +33 (0)1 84 74 10 24
L'improbable vie d'un acrobate
 
Toutes les recherches ont été entreprises afin d’identifier les ayants droit. Les erreurs ou omissions éventuelles signalées à l’éditeur seront rectifiées lors des prochaines éditions.
 
 
Nous sommes le 24 août 2011, en route vers le funérarium du mont Valérien, à Nanterre, tout près de Suresnes, où Mehdi Lahoussine habitait. Mehdi Rios est le nom avec lequel il a fait le tour du monde ainsi que sa réputation. C’est mon frère, nous ne nous sommes pas quittés depuis plus de 66 ans en tant que frères, amis et partenaires dans un métier que nous aimions et dans lequel nous excellions. Mehdi est décédé le 18 août 2011, le jour de l’anniversaire de sa fille Natalie. Toutes sortes de souvenirs me submergent et m’envahissent, une chose m’en rappelle une autre, dans un désordre étonnant…
Nous sommes partis tôt d’Autrêches, petit village de l’Oise où nous vivons Nancy et moi, dans une maison que nous avons achetée il y a plus de vingt ans à Natacha Ginsburg, la fille du premier mariage de Serge Gainsbourg. Nous y habitons depuis 2007. Il y a avec moi, Benjamin, notre fils, arrivé la veille de Richmond en même temps que Dick, le frère de Nancy, qui habite également aux États-Unis, à Matthews, Caroline du Nord. Dick est avec Nancy dans un autre véhicule. Benjamin est avec moi ; il a toutes les qualités que j’aurais aimé avoir, il est plus grand que moi, ce qui n’est pas difficile, a le sourire facile, une intelligence et un sens de l’humour largement au-dessus de la moyenne. Il y a aussi Paul Binder, un très bon et vieil ami et son fils Max, arrivés eux aussi la veille d’Istanbul en Turquie. Nous lui avions appris le décès de Mehdi alors que Paul se trouvait à l’aéroport JFK de New York, en route pour la Turquie pour aller voir Max, qui y travaillait. Il n’a pas tergiversé : il prendrait le premier avion d’Istanbul pour Paris avec son fils, et serait là à temps.
Notre fille, Jamie, est déjà sur place, au funérarium. C’est elle qui s’est chargée des formalités et de l’organisation. Jamie est aussi belle, tenace et organisée que sa mère, ce n’est pas peu dire pour toutes les deux. C’est peut-être leur héritage juif, ou leur éducation américaine…
C’est à Las Vegas que j’ai rencontré Nancy, la mère de mes enfants, en 1972. Nous avons travaillé dans le même spectacle du Lido au Stardust Hôtel et Casino, pendant trente mois. Et pendant trente mois, je l’ai vue six jours par semaine, deux spectacles par jour, trois les samedis, passer à côté de Mehdi et moi sur l’arrière-scène pendant que nous nous échauffions avant les spectacles. Je l’entendais arriver avant de la voir, les chaussures de claquettes qu’elle portait me prévenaient, j’arrêtais mon échauffement pour la regarder passer dans son costume de marin année 30, sexy, sans être provocant. Elle était superbe. En passant, c’était toujours les mêmes mots : « Bonjour… bonjour… bonsoir… bonsoir », en français. C’était tout. Mehdi l’appelait « Jo », pour Josephson, son nom de jeune fille, afin de la différencier d’une autre danseuse, qui s’appelait aussi Nancy. Ça lui est toujours resté. Je l’appelle toujours Jo. Je la voyais parfois au coffee shop du Stardust entre les spectacles. Je m’invitais pour un café et venais la déranger pendant qu’elle lisait imperturbablement son New York Times . Elle savait que je sortais avec une autre danseuse du spectacle, enfin plusieurs. Je n’avais pas la meilleure des réputations. J’essayais, et essayais encore. Rien à faire. Elle aussi était prise. Pour moi, ce n’était qu’un détail.
Parfois, je venais à la cafétéria, elle n’y était pas. Je me persuadais que c’était son jour de repos. Je refusais de croire qu’elle était avec son musicien ou un autre. J’ai décidé que je n’aimais pas les musiciens. Pour elle, je devenais de nature possessive, je le suis resté, bien que je n’aie possédé tout juste que son sourire, à ce moment-là.
Vers la fin de notre contrat, après plus de deux ans et demi, Mehdi et moi étions programmés au Lido à Paris, où un nouveau contrat et aventures nous attendaient. Nancy me fait savoir qu’elle désirait visiter la France, et me demande si je pouvais lui trouver un logement bon marché. Nos amis les Castors, des artistes qui vivaient à Paris, mais travaillaient pour le moment aussi à Las Vegas, au Circus Circus Casino, avaient leur appartement boulevard de Rochechouart, en face de là ou j’habitais, vide et disponible. Je l’ai proposé à Nancy. Elle est venue pour quinze jours, repartie, puis revenue pour toujours, cela fait 43 ans. Nous nous sommes mariés le 29 janvier 1978 le jour de mon anniversaire « pour que tu n’oublies pas » avait dit Nancy. C’était le 21 shi vat 5738 année juive, au Temple Sinaï à Pittsburgh Pennsylvanie, devant une soixantaine de personnes, parents et amis de Nancy. Les seules personnes que je connaissais étaient Nancy, ses parents et ma mère qui a bien voulu faire le déplacement. Les deux jours précédant notre mariage, une visite à la mairie de Pittsburgh était de rigueur pour une déclaration sur l’honneur de célibat, une prise de sang pour s’assurer ne pas être consanguin et un rendez-vous avec Rabin Fuchs pour me rencontrer et parler du déroulé de la cérémonie au Temple. Bien que né juif, élevé par un musulman qui mangeait des Schweineschnitzel, buvait des côtes-du-rhône plus que de raison et qui, parfois, faisait le ramadan pour faire comme ses amis et collègues acrobates marocains. Je n’avais jamais mis les pieds dans un temple ni participé à un mariage juif. Je ne savais pas comment me comporter. Ce seront deux premières pour moi. Je me souviens comme si c’était hier de ne pas être arrivé à casser cette saloperie de verre sous mon talon tellement il était enroulé de papier adhésif « pour que tu ne te blesses pas » avait dit Rabin Fuchs, alors que mon métier était de jongler mon frère avec mes jambes, et que j’avais une force énorme dans celles-ci. C’est peut-être une des raisons pour laquelle notre mariage tient si bien. Pendant notre voyage vers Nanterre, au mont Valérien, Paul Binder, est assis avec moi à l’avant de la voiture. Ben et Max sont à l’arrière alors que Nancy et son frère nous suivent dans un autre véhicule. Le trajet me paraît interminable, entre les moments de silence pesant, de rires et d’anecdotes sur Mehdi, eux, nous, moi.
Mehdi est né un mois après la capitulation du régime nazi en Allemagne, le 9 juin 1945 à Berlin, Hundekehlestrasse 34, dans une grande maison cossue et en parfait état, malgré les bombardements et la destruction d’une grande partie de Berlin. Comment Djamaa Ben Lahoussine, notre père, a-t-il réussi à obtenir un relogement dans cette superbe maison, après que notre précédent logement, qui se trouvait du côté est de Berlin tout près d’Alexanderplatz, a été complètement détruit par les bombardements ou les canons de l’Armée rouge. Nos grands-parents maternels habitaient avec nous dans une grande partie du rez-de-chaussée.
Sur un des côtés de la maison, il y avait un énorme saule pleureur, et dessous, une table en bois et deux bancs sur lesquels je montais pour me balancer avec les branches lianes. Grand-père parfois en arrachait quelques-unes et les tressait pour m’en faire une couronne.
À l’arrière de la maison, entre le saule et le garage, se trouvait un jardin qui me paraissait immense ! Grand-père avait transformé ce jardin en potager, et une partie était réservée à des plants de tabac ou quelque chose de similaire. Ce dont je me souviens est que mon grand-père faisait sécher des feuilles de tabac, les découpait et en bourrait sa pipe avec son pouce. Il y avait aussi des fraises, beaucoup de fraises, des tomates et des choux. Peut-être que si j’y retournais aujourd’hui, ce potager me paraîtrait tout petit.
Djamaa arriva un jour avec une Peugeot 202 toute noire, toute belle et rutilante. Comment il se l’est procurée, un autre mystère à ce moment de l’après-guerre quand on ne pouvait rien se procurer, surtout les Allemands. J’ai compris, de nombreuses années plus tard, grâce à des agendas de 1942 à 1976 que j’ai retrouvés et où Djamaa notait presque tout, qu’il était devenu un champion du marché noir. Et ce qui devait arriver arriva. Il a probablement été dénoncé par un voisin. Selon ma mère, la délation était devenue un sport berlinois à cette époque. D’ailleurs, ça l’est toujours, surtout avec les gens âgés. Djamaa se retrouva en prison, il y est resté 1 mois. Lorsqu’il est sorti, il a recommencé, il avait des clients qui attendaient.
Djamaa était artiste de cirque et de music-hall depuis son enfance. Avec son partenaire, Jimmy, ils faisaient un numéro de claquettes et d’acrobaties burlesques. Tous deux Marocains, ils avaient des passeports français. Le Maroc était un protectorat français. Au début de la guerre, ils se trouvaient en tournée avec leur numéro en Allemagne. Ce style de spectacle de variétés y était très populaire entre les deux guerres, et il y avait un grand nombre de ce type de théâtres de variétés. Au cours d’une des représentations, au Hansa-Theater de Hambourg, des militaires sont venus pour les réquisitionner et leur faire faire la tournée des KDF (Kraft Durch Freude, « la force par la joie ») pour les officiers et soldats allemands. Ils n’avaient plus le droit de circuler ailleurs que dans les villes de garnison pour distraire les militaires.
Leur numéro s’appelait « Les Rios ». De n

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