Le Faiseur d étoiles
134 pages
Français

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Description

« La retraite ? Je n'y serai jamais. J'ai quatre-vingt-dix-huit ans. Quatre-vingt-dix-huit ans et toutes mes dents ! Les praticiens disent que c'est le fait d'avoir “travaillé en mâchoire” qui les a rendues si solides. Travailler en mâchoire c'est lorsque nous nous portons, nous-même ou notre partenaire, à la force de la mâchoire. Mon frère et mon oncle, qui avaient cette même spécialité, ont gardé une belle denture toute leur vie, eux aussi. Nous étions trapézistes et l'histoire que je vais vous raconter est la mienne, mais aussi un peu la leur. » À travers des mots vibrant de passion et une mémoire étonnante des détails, Pierre Bergam nous relate avec émotion son extraordinaire parcours, ainsi que celui de son frère, pour entrer dans le cercle circassien sans être des « enfants de la balle », c'est-à-dire nés de parents artistes. Le travail, les innombrables heures de répétition et le soutien de leur oncle leur permettront, à force d'acharnement, d'aller au bout de ce qu'ils voulaient devenir, de vivre leur amour pour la scène et le spectacle, malgré les difficultés ainsi que les risques du métier. Continuant à transmettre sa passion dévorante en l'enseignant à merveille, Pierre Bergam nous fait partager d'authentiques anecdotes familiales et professionnelles, riches de galas, de rencontres avec des célébrités, mais aussi de récits tragiques, comme les accidents de pistes. Un ouvrage qui nous fait découvrir les coulisses d'un monde de strass et de paillettes, et nous démontre que la persévérance et la ténacité permettent de réaliser les rêves les plus inaccessibles et, aussi, de concrétiser ceux des autres dans une belle aventure humaine.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 15 juillet 2019
Nombre de lectures 2
EAN13 9782342166972
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0052€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Le Faiseur d'étoiles
Pierre Bergam
Société des écrivains

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Société des écrivains
175, boulevard Anatole France
Bâtiment A, 1er étage
93200 Saint-Denis
Tél. : +33 (0)1 84 74 10 24
Le Faiseur d'étoiles
 
Toutes les recherches ont été entreprises afin d’identifier les ayants droit. Les erreurs ou omissions éventuelles signalées à l’éditeur seront rectifiées lors des prochaines éditions.
 
Préface Par Anny D UPEREY
En ouvrant ce livre, vous allez à la rencontre d’un homme formidable.
Je peux énumérer sans crainte ses multiples qualités, car je le connais assez pour savoir que le bougre ne rougit pas facilement, si pudique soit-il !
Je citerai d’abord la passion, intense, pour ces arts du cirque aérien, passion qui ne s’est jamais démentie, et qui le conduit à enseigner encore à un âge (chut ! La pudeur…) où d’autres se contenteraient de sucrer leurs fraises…
La fidélité en amitié – je ne saurais me hasarder à étendre cette fidélité au chapitre de l’amour, mais elle ne m’étonnerait pas de la part de cet homme-là !
Le professionnalisme et un extrême sens des responsabilités. Il en faut, pour avoir envoyé en l’air, pendant 35 ans, des amateurs (personnalités, comédiens principalement) pour le prestigieux « Gala de l’Union des Artistes », amateurs accomplissant sous sa direction de périlleux numéros à 12 ou 15 m de hauteur, alors qu’il n’existait à l’époque aucune « sécurité » sérieuse - à part un dérisoire matelas au sol, offrant une protection de principe, puisque les figures les plus dangereuses s’accomplissaient souvent en dehors du fameux matelas ! Notre sécurité, c’était l’exigence de Pierre, son expérience, la justesse de l’estimation des moyens de chacun, sa prudence tatillonne pendant les entraînements.
L’amour de la vie, de la jeunesse, le conduit maintenant à transmettre sa passion à de futurs jeunes artistes de cirque, après une brillante carrière. Pierre a 20 ans dans sa tête !
Je vais arrêter là pour les qualités principales, vous allez en découvrir bien d’autres au fil des pages.
Ha ! Si tout de même ! J’en oubliais une : la drôlerie. Un humour et une verve « parigotte » dignes d’un Audiard nous ont souvent pliés de rire entre deux exercices ! Oh oui, que nous avons ri, en préparant nos folies aériennes !
J’ai accompli grâce à lui trois numéros de trapèze pour le Gala – un en duo, avec Francis Perrin, et deux en « grand ballant » solo. Vous découvrirez dans ces pages le récit que j’en fis dans un de mes ouvrages personnels, « Le rêve de ma mère ». Ces numéros restent parmi les plus beaux et marquants souvenirs de ma vie. Je suis si fière d’avoir accompli cela grâce à toi, Pierre !
Le dernier de ces numéros fut accompli à Los Angeles, devant le « tout Hollywood », le Gala ayant été cette année-là délocalisé là-bas, et rebaptisé par les Américains « Circus of the stars ». Pour le coup, c’est moi qui mets de côté ma pudeur, en osant dire que nous fîmes un triomphe… Un triomphe tel que nous fumes réengagés l’année suivante pour exécuter de nouveau ce numéro, seuls Français dans un spectacle entièrement américain !
Qui eût dit, mon cher Pierre, que notre complicité atteindrait son point d’orgue à Hollywood ? Je sais que tu en es fier – tu peux l’être !
Je t’admire et je t’aime.
 
 
Anny D UPEREY
 
 
 
 
Partie 1 : L’incroyable histoire de Pierre, le trapéziste.
Chapitre 1 : Nous voulions devenir artistes.
La retraite ? Je n’y serai jamais. J’ai quatre-vingt-dix-huit ans. Quatre-vingt-dix-huit ans et toutes mes dents ! Les praticiens disent que c’est le fait d’avoir «   travaillé en mâchoire   » qui les a rendues si solides. Travailler en mâchoire c’est lorsque nous nous portons, nous-même ou notre partenaire, à la force de la mâchoire. Mon frère et mon oncle, qui avaient cette même spécialité, ont gardé une belle denture toute leur vie, eux aussi. Nous étions trapézistes et l’histoire que je vais vous raconter est la mienne, mais aussi un peu la leur.
Nous étions tous trois des Pisciacais. Ce mot vous paraît compliqué ? Je vais vous expliquer : à l’époque romaine Poissy s’appelait Pisciacus parce que la Seine était très poissonneuse. Si on regarde la racine, ça se rapproche assez. Mais tiens, restons dans les poissons ! Il est une belle histoire pisciacaise, celle du pêcheur Homery : il avait pour habitude de tendre ses filets chaque jour sous les arches du pont de Poissy, non loin du restaurant tenu par la famille Panier. Au petit matin du 22 juillet 1839, ses efforts furent récompensés : c’est un magnifique esturgeon qui s’y trouvait ! Il mesurait 3 mètres et pesait 100 kg ! Quel gabarit ! Alors, ce restaurant gastronomique a changé de nom, depuis il s’appelle « L’Esturgeon ».
Ah ! Poissy ! Poissy… Si on me demande où je suis né, je réponds souvent « À Poissy, tout comme Saint Louis ! » C’est aussi là que vivait Meissonnier, maire de Poissy en 1878. J’aurais bien été tenté de vous dire d’aller voir la statue en bronze de cet artiste peintre sur la place de l’Église, mais la malheureuse s’est retrouvée fondue par les Allemands pendant la guerre ! Cependant, un somptueux parc à l’anglaise avec sa pièce d’eau porte aujourd’hui son nom. Une nouvelle statue à son effigie y a été érigée.
Poissy est une petite ville agréable située entre la forêt de Saint-Germain-en-Laye et la Seine. Au début du xx e  siècle c’était un lieu formidable pour la jeunesse, les balades en forêt, grimper aux arbres, le canotage et la natation évidemment, car le fleuve était plus accueillant qu’actuellement ! Il y faisait bon vivre.
Mon frère et moi y sommes nés et y avons grandi. Je suis arrivé au monde en 1921, mon frère Lucien dix-huit mois plus tard, en 1922. C’est dire comme nous avons pu en voir, des changements !
La découverte de notre passion s’est faite progressivement. Nous avions entre sept et dix ans, nous étions inscrits au patronage paroissial : c’était un lieu formidable avec des jeux sportifs qui nous ont un peu dégourdis. Si je dis que c’était formidable, c’est que les prêtres ne nous demandaient pas si nous allions à la messe ou non, ils s’ingéniaient seulement à s’inquiéter de nous et nous ne traînions pas dans les rues. Et puis, bien sûr, il y avait Georges, notre oncle. C’est sous sa direction que nous avons commencé une formation athlétique. L’admiration sans faille que nous lui portions nous a, il faut le dire, menés vers notre rêve. Il avait bien compris, Georges, que notre plus grand désir était de faire comme lui : devenir artiste. Et c’est ce que nous avons fait.
Chapitre 2 : L’oncle Georges.
Notre oncle était anneliste. Il faisait un numéro d’anneaux très athlétique et difficile avec des croix de fer et des portés en mâchoire. Ce n’est pas conçu pour les gamins, il faut avoir au moins vingt-cinq ans parce qu’une force musculaire formidable est nécessaire, ce que Georges possédait. Le trapèze ce n’était pas son truc, mais il était là pour nous « faire un corps » prêt à affronter le métier. C’est chez lui que nous nous entraînions, que nous nous sommes fait des bras, des abdominaux. C’était un petit peu tôt peut-être, mais nécessaire en somme car c’est la base du métier. C’est difficile de décrire Georges et de le raconter, pour parler de lui et de ses exploits il faudrait un bottin ! Cependant j’ai bien deux ou trois anecdotes à vous narrer.
C’est un jour de marché à Poissy. Nous sommes là, gamins, on doit avoir sept ou huit ans, on est fiers parce qu’on est avec notre oncle, entre les grandes halles et le marché de plein air. Nous nous baladons tous les trois lorsque, au loin, nous apercevons un homme s’installant : tapis au sol d’environ quatre mètres carrés, quelques haltères et un extenseur. Nous nous approchons et constatons qu’il vend des bonbons mentholés. Il y va fort, le camelot ! Le voilà qui prétend aux passants que ses bonbons améliorent la respiration. Bon… il est un fait certain que lorsque l’on mange des bonbons mentholés une petite sensation de fraîcheur se produit dans la bouche, assez curieuse et indéfinissable, mais cela n’améliore pas la respiration ! Toujours est-il qu’il est là, cet homme, ce marchand, avec sa carrure d’haltérophile, à manier ses haltères pour ameuter la clientèle et vendre ses bonbecs. Une foule autour de lui commence à se former lorsqu’il lance un défi : « La personne qui arrivera à tendre cet extenseur derrière la nuque aura une prime de cinq cents francs !   » Un extenseur est un appareil formé de deux grandes barres avec deux poignées, le tout relié par des bandes élastiques : il faut être très costaud pour le tirer. Je regarde Georges qui ne réagit pas. Je regarde à nouveau le marchand lorsqu’on entend un brouhaha dans la foule «   Vas-y Jo, allez ! Vas-y, vas-y ! » Mon oncle est gêné, ne veut pas se donner en spectacle et refuse. « Mais vos amis vous incitent à le faire, faites-le, monsieur ! » s’exclame alors le vendeur de bonbons. Mon oncle finit par accepter, s’avance, attrape l’extenseur, le met derrière son dos et le tire fort bien. La foule applaudit, le camelot s’incline et sort comme promis un billet de cinq cents francs de son portefeuille que mon oncle refuse. « On se verra à la fin du marché », lance Georges avec un sourire. Effectivement, à midi et demi, nous rejoignons ce marchand au bistrot du coin, entre deux apéritifs et deux grenadines pour les enfants que nous sommes.
Au cours de la discussion nous comprenons que ces deux hommes ont fréquenté les mêmes lieux sportifs : ils étaient haltérophiles tous les deux et étaient passés par la Société athlétique montmartroise. À la sortie, admiratifs et curieux,

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