Le Petit trompe la mort
56 pages
Français

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Description

« Plus notre bateau progresse vers sa destination finale et plus je ressens désormais au fond de moi cette impérieuse nécessité de voir, de toucher, de vérifier, et de me confronter à tout ce qui m’a été si souvent raconté. De ma propre initiative, je ne serais certainement jamais revenu sur les pas de mes parents. Maintenant que je suis là, je ressens soudainement une soif irrépressible et éperdue de me rapprocher de ce qui a été mon passé. »

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 05 octobre 2012
Nombre de lectures 2
EAN13 9782748388503
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0041€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Le Petit trompe la mort
Christian Touchard
Société des écrivains

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Société des écrivains
14, rue des Volontaires
75015 PARIS – France
Tél. : +33 (0)1 53 69 65 55
Le Petit trompe la mort
 
 
 
 
Préface
 
 
 
C’est dans l’unique but de leur rendre hommage que, toutes les fois où cela a été possible, j’ai pris la liberté de nommer sous leur vrai patronyme les personnes qui figurent dans les pages qui vont suivre. J’espère sincèrement qu’ils ne m’en voudront pas. Ma seule motivation a été de rendre toute son authenticité à une histoire tirée d’un fait divers réel. J’ai voulu honorer tous ceux, qui de près ou de loin, sont intervenus, quelle qu’en soit la façon et quel que soit le moment, dans le déroulement des événements que je relate. Que je sois pardonné pour les quelques éventuelles erreurs et confusions que ce récit pourrait comporter. Et que les personnes qui auraient mérité d’y figurer ne me tiennent pas rigueur d’avoir omis de leur attribuer un fait, ou d’avoir attribué ce fait à une autre personne.
Ce récit a été inspiré par les souvenirs et le témoignage de deux de ses principaux protagonistes : Louisette et Jacques Touchard, les parents de Christian, petit héros malgré lui de cette histoire hors du commun, en fait mes parents. Il a également été rédigé suivant mon interprétation personnelle des informations qui m’avaient été transmises, elle-même suscitée par l’émotion vive que m’avait procurée l’évocation de cette aventure. Ce récit peut, parfois peut-être, prendre quelques libertés avec les faits réels, qui ne seront de toute façon contestés par aucun témoin. La mémoire est un compagnon serviable mais parfois infidèle de nos vies, transformant à sa guise des événements bien réels, non dans le but de tromper, mais tout simplement parce que le plus important est moins ce que nous avons vécu que la façon dont nous l’avons reçu, ainsi que l’héritage que nous en avons gardé au fond de nos cœurs.
Ainsi, n’ayant pas pour objectif de réaliser une reconstitution historique, je peux très humblement confesser que certains événements et certains faits quelque peu oubliés ont peut-être été très légèrement romancés, mais cela n’enlève rien à la véracité et à l’authenticité d’une histoire qui a bien eu lieu.
Je dédie cette histoire à toutes les personnes qui y ont pris part et sans qui je ne serais pas qui je suis, sans qui je ne serais pas, tout simplement.
 
 
 
 
 
 
Devant moi, semble s’ouvrir à l’infini la prodigieuse immensité de l’océan. Nulle chose, nulle forme ne vient rompre l’étrange et houleuse platitude de cette étendue d’eau qui m’entoure à perte de vue. Pris entre ciel et mer, saoulé d’un mélange d’embruns, du bruit mêlé et assourdissant de la mer et des moteurs, d’odeurs et d’un perpétuel et incessant mouvement imposé par l’océan à notre embarcation, je ressens l’enivrante et vertigineuse impression de m’enfoncer dans le néant.
Poussé par ses deux énormes hélices, notre bateau fend puissamment les flots à très grande vitesse. À l’arrière, une longue traînée blanche et bouillonnante, trace inexorablement le chemin éphémère qui m’éloigne du continent et me rapproche un peu plus de l’histoire toute singulière de ma naissance.
Partis du goulet de Fromentine, où se situe un petit embarcadère de la côte vendéenne tout proche du passage du Gois, la très célèbre voie carrossable dont la particularité est d’être submersible à marée haute et qui relie le continent à l’île de Noirmoutier, nous mettons le cap sur une toute petite pointe de terre entourée d’eau, d’à peine vingt-trois kilomètres carrés, bien au large des côtes, qui m’est à la fois si familière et totalement inconnue. Comment cela est-il possible, peut-on légitimement s’interroger. Là, réside tout le paradoxe et l’étrangeté de ce récit.
Si un trop célèbre maréchal lui a apporté une certaine forme de notoriété, j’ose affirmer sans aucune vanité avoir certainement été à l’époque des faits que je relate, un de ses habitants les plus connus et avoir même marqué l’histoire de l’île de mon passage, y laissant une empreinte vitale inoubliable. Pourtant, d’ici quelques heures, dans l’anonymat le plus total, je poserai pour la toute première et très probable unique fois, le pied sur ma terre natale : l’île d’Yeu.
Oui, par l’étrange caprice d’un destin facétieux, j’ai réussi le bien involontaire exploit d’avoir été conçu sur cette île, d’y avoir vécu les tous premiers jours de mon existence, d’avoir ému et mobilisé presque toute la population de Port-Joinville, sa capitale, d’avoir même été pour elle un précurseur et une sorte de héros aujourd’hui oublié, mais sans pourtant en être officiellement natif, ni même être Vendéen aux yeux de l’administration et surtout sans même n’avoir jamais foulé son sol, ne serait-ce qu’une seule seconde !
Il fait très beau et presque chaud, le ciel est fait d’azur en cette matinée du 26 février 2000. Pour mon plus grand bonheur, mon épouse et mes trois enfants sont là, tout près de moi, jouissant également de ce spectacle fascinant. Ils semblent heureux, eux aussi. Mes enfants, avec l’insouciance de leur jeunesse, s’amusent de cette traversée et des sensations uniques procurées par ce magnifique engin, étonnant compromis entre un bateau de transport et ces énormes bolides des mers que sont les offshores. Ils courent, allant de la cabine intérieure au pont extérieur où, s’approchant au maximum de la poupe du bateau, ils jouissent quelques instants du spectacle des deux grosses gerbes marines qui nous poussent avec force. Puis, étourdis de bruit et de vent du large, mouillés de fines éclaboussures salées projetées par milliers, ils rentrent en riant se mettre à l’abri. Ma femme se tient près du bastingage. Elle observe, amusée, les allers et retours des enfants. En cet instant, je l’observe attentivement et elle m’apparaît comme peut-être je ne l’ai plus regardée depuis longtemps. Je réalise alors avec une émotion mêlée de stupeur que la routine, la force de l’habitude et le fait de la côtoyer chaque jour, ont presque fini par me faire oublier qu’au-delà d’être ma femme et la mère de mes enfants, elle est aussi et surtout une autre personne. À force de regarder l’autre chaque jour, ne finit-il pas par disparaître, ne laissant voir que ce qu’il fait et non ce qu’il est ? Je crois finalement que ce qui est le plus destructeur entre deux êtres qui se rencontrent et qui choisissent de partager leurs vies pour fonder une famille, c’est l’oubli ; au-delà d’être un conjoint, au-delà d’être une mère ou un père, chacun est avant tout quelqu’un d’autre. Ce quelqu’un qu’ils étaient avant de faire cette rencontre qui va tellement les changer en apparence, mais ce quelqu’un qui, s’il sommeille au fond d’eux, ne disparaît jamais vraiment. Ce quelqu’un qui a justement permis que leur rencontre se fasse, ce quelqu’un pour qui chacun a choisi que sa vie soit bouleversée et qui, pourtant, s’efface peu à peu pour laisser la place à un autre homme, à une autre femme qui ne se connaissent pas et qui finalement ne se reconnaissent plus. Malheureusement et involontairement, je réalise que moi aussi, j’ai parfois trop oublié de continuer à regarder cette personne qu’elle était et qu’elle est toujours. Moi aussi, trop souvent soumis au terrible rouleau compresseur de la vie quotidienne, je ne lui ai pas accordé toute l’attention que j’aurais dû lui porter et qu’elle méritait. La vie est une lutte constante. Trop souvent, et trop facilement, l’on s’imagine que remporter une victoire c’est gagner la guerre. On s’endort alors sur de maigres lauriers, oubliant trop hâtivement que tout se mérite et le réveil nous fait alors tomber de haut. Le vent joue dans ses cheveux que retiennent ses lunettes de soleil, portées haut sur sa tête. Dans ce décor naturel et grandiose, sa fine et longue silhouette ainsi que son port altier lui donnent des allures de star. Ignorante des pensées qui agitent mon esprit, elle me regarde et me dit quelque chose que je ne puis entendre ; le mugissement des moteurs brassant l’océan couvre le son de sa voix. En souriant, elle m’envoie un baiser du bout de ses doigts, puis sans même attendre ma réponse en retour, elle se replonge dans la contemplation amusée de ses enfants. Elle ne verra pas l’émotion brouiller mon regard.
Ce retour sur mon passé m’ouvre les yeux sur ce qui fait toute la richesse de mon présent.
J’aurais pu ne vivre que pendant les quelques jours qui ont suivi ma naissance. Après avoir hésité, mon destin a décidé qu’il en serait autrement. Il m’a été accordé de pouvoir accomplir ce qui pour moi reste la chose la plus belle : fonder une famille.
Je les regarde tous les quatre. Ils sont ma raison d’être, ma fierté. Ils me sont plus précieux que le plus fabuleux des trésors et je les remercie et remercie la vie chaque jour d’être la source d’une telle béatitude et de me permettre de ressentir cette sublime et enivrante sensation d’aimer, vraiment. Dans une forme d’altruisme égoïste, je ressens qu’il n’y a rien pour moi de plus fort au monde, de plus abouti, de plus parfait que d’avoir cette intime conviction que je pourrais sacrifier sans hésiter ma propre vie pour préserver ce qui lui donne tout son plaisir, tout son sens et toute sa raison d’être : ma famille.
Eux aussi ont entendu le surprenant récit d’une partie de mon enfance et ont voulu m’offrir à l’occasion de mon anniversaire un présent exceptionnel ; ce retour sur ce qui a été, est et sera pour moi et à jamais, le grand mythe de ma naissance. Pour eux c’est un simple voyage, pour moi un retour aux sources en forme de véritabl

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