Les Nuits absurdes
178 pages
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Les Nuits absurdes , livre ebook

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Description

« Raconte-toi. » C'est ce que nous disait Yves Simon dans les années soixante dix. Dans ces pages, l'auteur répond à l'invitation du chanteur et se livre sans détour, sans concession, ni faux semblant.

Il évoque un parcours dans la dépendance à l'alcool, une sortie de route et une résurrection. Il ne décrit pas simplement, mais transcende sa réalité et lui tord le cou par la poésie et la volonté de sublimer les mots, même les plus sordides. Essayer de fabriquer de la beauté avec de la tristesse.

L'alcool est le mirage d'un bonheur qu'on ne pourra jamais atteindre en suivant cette route. Nous vivons tous dans une prison sans barreaux. Dans notre dépendance au monde qui nous entoure, nous traversons tous des nuits absurdes. Il faut les accepter et ne jamais les renier.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 20 mai 2020
Nombre de lectures 0
EAN13 9782414393909
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0052€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Cet ouvrage a été composé par Edilivre
194 avenue du Président Wilson – 93210 La Plaine Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com
 
Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.
 
ISBN numérique : 978-2-414-39403-6
 
© Edilivre, 2020
Prologue
S’arracher des griffes de l’alcool est une insurrection charnelle et spirituelle, un combat cellulaire, une débâcle organique, une révolution permanente. La douleur si profonde engendrée par cette lutte peut être accompagnée, mais en aucun cas ne se partage, tout comme elle ne s’explique. Aucun mot ne saurait être à la hauteur de ce châtiment venu d’autres âges.
Aucune esquisse de victoire ne peut jaillir de cet intime charnier. Alors, pour le reste de cette vie d’homme, il faut se contenter d’une rémission, d’un pacte signé avec ses démons un jour de bonne grâce.
Cependant, dans tous les champs de ruines, tous les villages bombardés, parfois sans même les chercher, on trouve au creux des pierres des raisons d’espérer, des cartes postales de vacances heureuses, des lettres d’amour d’avant-guerre qui vous réchauffent le sang comme un feu rédempteur.
On se souvient alors que tout était possible avant le grand saccage. Et puis, on se relève, la tête se redresse, aspirée par le ciel. Reprendre sa place dans le bazar du monde, c’est retrouver l’impérieux désir de vivre, mais bien plus qu’au sens de respirer, d’être ou d’exister par notre seule substance, il nous faut vivre libre…
Dix ans. Il m’a fallu dix ans pour digérer cette histoire, traverser mon champ de mines. Mesurer chaque pas pour savoir où je mettais les pieds. Réconcilier mon corps et mon esprit. Signer mes accords d’Oslo, même si je savais bien que la poignée de mains entre Rabin et Arafat à Washington, finalement, n’avait été qu’une illusion. Je devais prendre ce risque. Même si les premières lignes furent ma thérapie, aujourd’hui, même si elles ne devaient servir qu’à une seule personne pour s’extraire des sables mouvants alcooliques, alors j’en serais le plus heureux des hommes.
On ne vit pas la nuit, on se brûle. On n’existe vraiment que des premières lueurs du jour jusqu’au dernier rayon de soleil qui disparaît derrière l’horizon.
À l’origine
Faire des enfants, bâtir sa maison, écrire des livres, des chansons, nous passons nos vies à bricoler des particules destinées à nous survivre. La vie s’écoule entre nos mains comme le sable qui nous filait dans les doigts sur les plages de notre enfance au temps où tout était possible.
Jusqu’alors, dans ce jeu de construction, je n’avais jamais eu d’autre prétention que d’être simplement quelqu’un de bien, ni plus, ni moins. Je revendiquais presque cette banalité. Un fils unique, mais jamais gâté, un ami attentif et dévoué, un amant aux saillies presque toujours sincères. Musicien passable, un guitar hero de thé dansant, humble cavalier, quoique toujours trop orgueilleux. J’étais heureux autant qu’on puisse l’être dans ce monde que je trouvais pourtant de plus en plus cruel.
Faut-il du courage venu de nulle part, ou une maladroite inconscience pour oser révéler ses défaillances et ses plaies béantes ? Sur cette terre où la performance fait loi, je sais bien qu’il ne fait pas toujours bon afficher ses faiblesses et sa déchéance. Je fais confiance à mon instinct. Le moment est venu.
Croquer à nouveau la vie à pleines dents, c’est aussi se réconcilier avec la notion de risque. Il n’y a pas de réelle jouissance sans l’exaltation procurée par l’inconnu. Il faut savoir quitter le sable de notre piste aux étoiles pour l’inconfort du trapèze volant. Toutes ces pages arrachées à ma mémoire n’ont pas d’autre but que de témoigner à la barre du procès contre mon humanité.
Je ne sais quelle force intransigeante m’avait privé jusque-là de toute capacité de récit. Certes, je possédais bien la matière première, mais la machine restait désespérément en panne. Et puis, vient le jour où tout se met miraculeusement en branle. D’abord quelques mots, les premières esquisses de souvenirs, un paragraphe, puis deux, et tout s’enchaîne dans l’inexorable noircissement des pages.
Je le sais aujourd’hui, toute tentative d’écriture aurait été vaine dans le bordel émotionnel. En pleine tempête, il n’y a pas d’autre urgence que de sauver les meubles, parer au plus pressé. Il faut sauvegarder ce qui peut l’être ou ce qu’il en reste, en essayant d’éviter les pièges et les erreurs engendrées par la précipitation.
Je vogue à nouveau sur une mer d’huile, c’est le temps de révéler ce que fut ce combat pour sortir de l’enfer, ma mise à sac charnelle, mes espérances, mes effondrements. Ce désert, je l’ai traversé sans GPS, pas même une carte ni une boussole. Cette punition injuste, elle n’était pas pour moi, non, elle n’était pas pour moi.
En ces jours de révélation, les questions se bousculent. Comment une vie jusqu’alors assez sereine avait-elle pu se transformer en cauchemar ? Qu’est-ce qui fait qu’on puisse se sentir dépossédé de sa propre chair ? Comment étais-je entré dans cet enfer sur terre ? Toute cette histoire était-elle écrite depuis bien plus longtemps que je n’aurais pu l’imaginer ? Tout le carbone quatorze du monde n’y suffirait sans doute pas pour dater avec certitude les prémices de cette dégringolade. Jusque-là, j’avais toujours pensé que la vie ne pouvait pas être bien sérieuse. La réalité s’est chargée de me faire rentrer dans les rangs.
J’ai mis du temps à me décider. Après tout, à quoi bon se raconter ? Tant de livres ont déjà été publiés… À chaque fois des histoires différentes, et des tripes qu’on déballe sur la table. J’ai longtemps trouvé la démarche impudique. Il m’aura fallu du temps pour comprendre que je n’avais pas d’autre choix si je voulais aller au bout de mon combat. Cette lutte, je devais la transcender, la faire exister au-delà de ma propre personne. Tant de compagnons d’armes sont encore enlisés sur le champ de bataille… Les mots ne soignent pas. Ils peuvent être des prothèses, des miroirs, des déclencheurs ou des coups de poing dans la gueule.
Écrire est aussi un trip égoïste à vertu curatrice, un remède de cheval qui vous oblige à faire face, affronter la réalité même quand elle fait mal. On se retrouve affublé d’un habit d’exorciste projeté dans un défilé de mode pas très tendance. Il est vrai que le constat est loin d’être fashion.
Ni concession, ni confession. De ce que l’alcool a fait de moi, rien de bandant, triste parenthèse dans une vie carburant jusqu’alors à l’essence ordinaire. J’avais fini par n’avoir pas plus de valeur qu’une tête de gondole d’un hard discounter. La chimie était devenue la gardienne de mon temple de sable. Sans le vouloir, je m’étais retrouvé enfermé dans une prison sans barreaux. Je me baignais dans une boue noirâtre, un lac d’eau morte, aucun courant pour me mener vers un quelconque océan. Un chien… un rien.
Il était plus que nécessaire, presque vital, de dégoupiller la grenade. Tout devait exploser, même si je devais prendre les éclats en pleine poitrine et devenir un blessé de guerre, un vétéran du Vietnam. J’ai dû détruire mon disque dur pour tout reconstruire, remettre les compteurs à zéro. Pour sortir de la métaphore guerrière, dans cette partie de flipper, le sort a bien voulu m’accorder l’extra-balle. À moi d’en faire bon usage. Exploser le score. Branler la machine en évitant le « tilt » fatal.
Aucune leçon à donner, que l’hypothèse d’un Dieu m’en préserve. Juste se raconter, sans détour, sans pudeur, même si je devais prêcher dans le vide. Un curé sans bible et sans sermon, au bord d’une falaise lui servant d’autel. Exit tout compromis. L’alcool est le mirage d’une oasis sans chlorophylle, un miroir aux alouettes, un tiroir aux oubliettes, une chienne de chimère. J’espère d’ailleurs ne pas choquer les amoureux de la cause grammaticale, mais j’habillerai quelquefois dans ces pages le mot « alcool » de féminins atours, tantôt fringué d’une robe mal taillée de chez Tati, tantôt d’un rigoureux tailleur Chanel. Sans véritable justification, je trouve cette petite dérive justifiée à mes yeux. Que les accros au dico me pardonnent cette inconvenance.
Bien loin de moi l’esprit de revanche, pas même sur la vie. Certes, la tentation est grande de renvoyer dans leur vingt-deux ceux qui avaient commencé à graver la date de ma mort évidente sur ma pierre tombale de granite rose, de préférence, sans même attendre le coup de sifflet sonnant officiellement la fin du match. Carton rouge ! L’intransigeance arbitrale ne m’a pas fait de cadeau. Je me réserve le droit fondamental à la rancune et au reniement des faux amis qui ont eu vite fait de déchirer mon billet de retour simplement par le fait de ne pas être là, ou trop là, en me donnant l’ordre d’arrêter de faire le con, tout ce que je n’avais surtout pas envie ni besoin d’entendre. L’alcoolique est le candidat idéal à la double peine. Faites entrer l’accusé !
Revenir de nulle part. Sacré chemin de croix pavé de turbulences. Accepter que l’on ne sera plus le même, admettre la passive métamorphose. Changer de passeport pour un trajet retour et un avenir meilleur. Remplacer la photo jaunie par une image explosive sortie d’un smartphone. Non. Il n’y a pas d’alternative, aucune tergiversation possible avec l’alcool, il faut bel et bien quitter les chemins tortueux et boueux pour rejoindre l’autoroute goudronnée de la normalité. Être à nouveau une entité parmi tant d’autres. J’ai dû bannir la métaphysique au profit d’un banal pragmatisme. Une certaine monotonie est sans doute quelque part la garante d’un passage sur terre sans trop de désillusions. Franchir les glissières de sécurité pour sortir du trafic, c’est se mettre en marge, certes pour une exaltation, mais qui n’est que temporaire. Faire le chemin à l’envers, c’est une tout autre histoire.
Non. Je ne parviens pas à éviter les fonda

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