Mon frère
160 pages
Français

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Description

Michel, le frère de l’auteur va se suicider. Dans dix-huit jours, il mettra fin à une vie de souffrance, de médicaments, d’enfermements psychiatriques, mais aussi de petits bonheurs, la partie de foot, de pétanque. Il consigne ses derniers jours dans un journal avant de s’en aller. Daniel, son frère aîné, se souvient. Il raconte leur fraternité complice dans cette famille nombreuse, mais aussi les malédictions des ancêtres Labille et Christophe. Il décrit son frère comme un ours perdu dans la ville. Nous le suivons sur les traces de son passé de champion, d’amoureux, de marginal fort et fragile. Ses traces s’arrêteront dans un jardin,. mais le dialogue « entre frères de lumière « là-Haut ». Un témoignage saisissant et nécessaire autour de la question du suicide.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 30 septembre 2019
Nombre de lectures 0
EAN13 9782414354559
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0067€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
194 avenue du Président Wilson – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-414-35456-6

© Edilivre, 2019
Exergue


Notre devoir le plus impérieux est peut-être de ne jamais lâcher le fil de la merveille.
Grâce à lui je sortirai vivante du plus sombre des labyrinthes.
Christiane Singer (Fragments d’un long voyage)
Dédicace


A mon frère, Michel
Avant-propos
Avant de te donner la mort, Michel, tu as noté quelques mots : ta souffrance avec les médocs, ton passé noir, ton ennui quotidien.
Tu remercies aussi celle que tu aimes, mais tu ne peux plus continuer. Déjà depuis plusieurs mois, tu notais dans un petit carnet ta gratitude pour ta famille, ta reconnaissance posthume pour Papa, mais aussi ton impuissance à vivre ici. Tu nous avais déjà fait peur un an plus tôt. Tu préparais cette sortie de secours – Dieu seul sait où elle mène-, celle qui te libérerait de cette prison dans laquelle tu étouffais depuis des années, ressassant nuit et jour ton passé douloureux.
Toi pour qui penser était secondaire, voilà que cette pensée de plus en plus sombre te faisait même oublier ta nature première, naturelle, sauvage, joyeuse, celle de l’homme-ours que je voyais en toi (surtout quand nous jouions au foot ou aux boules !).
Tes derniers mots écrits en ce dernier jour étaient « Adagio Laure Fabian », et tes premiers mots sur cette feuille étaient Roman Michel, en lettres majuscules, sans plus d’indications. Ce roman, la tentative ultime où tu t’autorisais enfin à revoir l’histoire de ta vie, toi le vilain petit canard. Avec ce suicide, tu écrivais déjà le dernier acte de ton roman, noir.

Dernière lettre de Michel
Moi ton frère, avec, j’espère, ta bénédiction de « Là-haut », je m’autorise à écrire ce livre, par reconnaissance de ce que nous avons vécu ensemble bien sûr, mais aussi pour comprendre comment et pourquoi nous en sommes arrivés à ce drame.
Je ne veux pas écrire uniquement une biographie exacte des faits de ta vie, même si je tiens à une réhabilitation de « qui tu étais vraiment de l’intérieur ».Cela n’engage que ma vision de frère dans la limite de l’inconnu qui dormait en toi.
Avec ce livre, je choisis la liberté de re-voir ton histoire, non les événements réels et marquants de ta vie bien sûr, mais dans la part d’ombre qui pesait sur toi ces dernières années. C’est ma façon de te redonner la place au soleil que tu t’es rarement donnée.
J’ai changé certains noms, prénoms, rôles des uns et des autres ; mais j’ai gardé ceux des lieux où ton histoire s’est passée : Margency, Enghien, Eaubonne ; des faits importants qui ont jalonnés ta vie : le tennis, le foot, la Grèce, les évènements mémorables en famille, ton réveillon « happening », tes amours aussi, et puis tes accidents, l’hôpital, les cliniques…
Enfin, ce témoignage c’est peut-être la possibilité pour nous les vivants qui restons, tes frères, sœurs, mère, membres de la famille et amis, de remplir ce vide que tu laisses dernière toi.
Ce vide immense, c’est l’absence de l’homme touchant que tu étais. Sache, Michel, que dans mon cœur tu restes le frère attachant, l’ours joueur, imprévisible et inoubliable.
Ton frère Daniel
 
Journal
4h 44 – Studio d’Enghien
Encore ce rêve épuisant : je joue au foot avec des vieux potes d’enfance.
Terrain glissant, presque boueux, ballon incontrôlable.
Pourtant je suis un « bon », d’habitude (demandez aux potes !), je plante des buts et récupère les ballons perdus, mais là, non.
Enervé, je distribue quelques tacles aux adversaires, ma carrure me le permet, 1m82, 92 kilos. Un bon coup d’épaule et ça suffit à faire valser l’autre. Tiens, prends ça, mon gars ! Coup de sifflet.
Le petit homme mince comme un poteau de but se dirige vers moi comme un robot et me met un carton rouge sous le nez !
Je rêve ! Un carton rouge pour ça ! J’attrape le carton et le déchire !
Non, ça ne marche pas, il est plastifié ! Alors j’en fais une boule et le met dans ma bouche en regardant droit dans les yeux le petit flic noir.
Le joueur tombé à terre en profite pour venir m’attraper par le maillot, mais d’un coup de bras droit je le renvoie cueillir des pissenlits. Début de bagarre générale.
L’arbitre arrête le match…
 
Réveil en nage.
Tu fais craquer une allumette et tires sur une cigarette. Première bouffée de la journée, plein d’autres verront le jour et disparaîtront dans la nuit noire. Le silence pèse encore de son poids sur ta carcasse de solitaire, mais il berce encore les humains à cette heure-là.
Un oiseau commence à claironner sa joie de vivre. Tu regardes un peu autour de toi, les posters de femmes nues. Tu ne les as jamais enlevés, même quand tu étais avec Christelle. C’est comme ça. Et à côté, toutes les cartes postales de vacances, de voyages de tes frères et sœurs. Nous savons que tu aimes en recevoir, toi qui ne pars jamais. Enfin, plus depuis ton premier voyage à l’étranger, en Grèce.
Tu étais parti avec un copain du tennis, quatre-vingts kilos de bagages chacun, boules de pétanques, sono, etc. Je revenais de Thaïlande et nous nous sommes croisés sur le perron de la maison des parents. J’ai ri en vous voyant chargés comme des mulets. Vous êtes revenus en tee-shirt, les mains vides. Et la tête pleine d’images fortes collées au cerveau.
La Grèce. Une maison abandonnée près d’Athènes.
Le feu autour de toi se rapproche pour te dévorer, et toi impuissant, pieds et poings liés. Tu essayes de te débattre mais la corde à linge t’arrête le sang et te taraude de douleur.
« Quel con j’ai été d’avoir écouté ce type et son acolyte au camping ! Cool les mecs, avec la tchatche à l’italienne. »
– « Allez venez, on va allez faire un méchoui dans une maison abandonnée là-bas, pas loin. C’est moins con que de payer le camping ici. »
– Toi : « Je sais pas, on a notre avion demain à Athènes. »
– « Allez ! Cool, les gars, on va se faire une bonne bouffe, on va trouver une ou deux gazelles pour fêter votre départ. Allez, prends ta corde à linge, on en aura peut-être besoin… »
Puis ce type autour du feu là bas qui sort un cran d’arrêt : « Allez les gars, on file le flouze et le reste, et pas de con… »
Pas le temps de finir sa phrase que tu lui tombes dessus et roules sur lui. Les coups partent. Le type se blesse avec son couteau, tu en profites pour te relever et déguerpir. Mais ton copain qui n’a fait que compter les points se retrouve avec le couteau sous la gorge.
Le type crie : « Toi, fils de pute, reviens ou je fais la peau à ton pote. ! »
Tu t’es arrêté net dans ta course.
« C’est pas vrai, quel con celui-là ! Incapable de rien faire, comme sidéré devant son écran de télévision. Mais là, c’est du direct… »
Michel, tu t’arraches en serrant les dents et en traînant des pieds.
L’autre en profite pour te tomber dessus avec son couteau et te le mettre sous la gorge en te tordant un bras. Maintenant il t’attache avec une corde, s’assied sur toi en jurant : « Tu vas voir connard, je crois bien que je vais te les couper… T’as vu ce que tu m’as fait ? » Grogne-t-il en t’envoyant un coup de pied dans le ventre.
Ton copain est aussi attaché et pleure comme un enfant.
Toi tu encaisses en serrant les dents et les tripes. Le Diable en personne est sur toi. Tu sens qu’un type comme ça est impitoyable. Tu n’en attends rien et tu te prépares déjà au pire sans vouloir y croire. Le type vous fait maintenant les poches, soutire deux portefeuilles, en sort les billets.
« Quelle misère ! Bande de clochards ! Vous valez pas la peine que je me foute le ventre en l’air pour ça ! ». Il accompagne sa rage d’un coup de poing sur ta mâchoire.
Le type se relève : « Allez, Tony, prend les vestes, les montres, les sacs, on se casse, on a trop traîné avec ces Français à la con… »
Ton copain supplie qu’on ne lui prenne pas sa montre. Il ne sait pas ce que vaut sa vie.
Les deux gars finissent de s’en mettre plein les poches et sortent de la pièce en riant.
Michel, tu es terrorisé dans cet enfer. Mais tu es un homme d’action. Tu te tortilles pour te rapprocher de ton sac. Un réchaud est là à coté, tu essayes de l’attraper avec les dents. Voilà ! Ça marche, tu l’allumes, le gaz automatique a déclenché la flamme. Tu vas pouvoir brûler tes liens.
Mais un basculement brusque fait tomber le réchaud ; la flammèche prend sur le sac d’à coté, les habits, le reste… En à peine une minute, c’est une torche de deux mètres de haut qui envahit la pièce. La chaleur commence à être insoutenable.
Tu ne peux plus bouger, tu es acculé au mur. Tu commences à voir ta vie défiler. « Adieu maman, papa, mes frères, mes sœurs, ma famille, Chris chérie, adieu la vie, je ne pourrai jamais vous dire que je vous aime, et je ne vous l’ai jamais vraiment dit. »
La porte s’ouvre. Ce sont des habitants du hameau voisin qui ont accouru en voyant de la fumée sortir de cette cahutte. Ils s’empressent de vous détacher, de vous sortir de cette fournaise.
Le reste, Michel, tu peines encore à te le remémorer et même à en parler… Tu apprendras, rentré en France, que les deux types ont été arrêtés. Recherchés par Interpol. Le type diabolique était un violeur récidiviste en Corse, Italie et Grèce.
Tu recevras une convocation au tribunal d’Athènes pour le procès, mais malgré l’insistance de ta famille, tu n’iras pas. Trop choqué.
Maintenant, tu t’es redressé lentement au milieu de ton petit studio.
Une chose vient se frotter contre tes jambes. C’est Titi ton chien. Bébé pour les intimes. Un jeune boxer noir et blanc comme un jeu d’échecs ambulant. Il n’a qu’un œil, il s’est fait dévorer par le berger allemand d’une amie cool à toi. Il jappe car il sait déjà qu’il va avoir droit à son moment à lui, dehors.
Tu réajustes ta veste, attrapes la laisse, l’accroches au collier de Titi,

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