Naître coupable et sans espoir
130 pages
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Naître coupable et sans espoir , livre ebook

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Description

Trop de morts tragiques, trop de heurts familiaux, trop de coups encaissés pour se taire plus longtemps. Aussi cette nouvelle œuvre autobiographique de J. Cariou se veut-elle l'occasion de solder quelques comptes avec une vie qui, injuste, offre tout aux uns quand elle reprend tout aux autres. De son enfance marquée par la violence domestique à la disparition de son frère, du rejet maternel à l'internement à la demande de sa mère et de sa sœur cadette, l'auteur dévoile, de manière brute, les sombres épreuves qui ont émaillé sa trajectoire erratique. Qui en ont même fait un écorché vif.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 05 juillet 2013
Nombre de lectures 0
EAN13 9782342009194
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0067€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Naître coupable et sans espoir
Joël Cariou
Société des écrivains

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Société des écrivains
14, rue des Volontaires
75015 PARIS – France
Tél. : +33 (0)1 53 69 65 55
Naître coupable et sans espoir
 
 
 
À mon frère P.
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Une famille particulière
 
 
 
Prologue
 
 
 
Si j’ai décidé de livrer les méandres de ma vie terriblement ordinaire de prolo sans envergure, c’est que mon père vient de décéder brutalement des suites d’un cancer de la gorge. La fin de sa vie a été axée sur la souffrance, autant physique que morale. Sa maladie l’avait réduit au silence et son seul moyen de communication était une ardoise et une craie. Malgré ces terribles circonstances, il n’a jamais baissé les bras. Il ne s’est pas apitoyé sur son sort et jusqu’au bout, il a conservé sa dignité. Je respecte cet homme pour l’insoumission dont il a fait preuve face à cette maladie que l’on surnomme « le crabe ».
J’ai quant à moi fait preuve d’une lâcheté exemplaire vis-à-vis de lui. Je me suis abstenu d’aller le voir en maison de repos ; son éventuelle réaction était une telle source d’angoisse… Des années d’absence nous avaient peu à peu éloignés mais je n’ai pas d’excuses pour avoir oublié mes devoirs de fils.
 
Pendant deux années consécutives, j’ai noirci les pages d’un journal intime. Jour après jours, j’ai couché sur le papier ma petite vie de prolétaire. Ce cher journal intime fut d’une patience exemplaire, toujours dans l’attente journalière des mots qui viendraient décrire ma vie insipide et sans saveur. Une vie malgré tout remplie de mots décrivant ces putains d’angoisses qui me terrassent, me tuent à petit feu, du stress qui me bousille, du cyanure qui circule dans mes veines. Sans crier gare, ces angoisses se manifestent par un état de stress permanent. Ce journal intime n’a aucun caractère extraordinaire mais s’avère malgré tout intéressant, même si son but peut soulever quelques interrogations : mais que cherche-t-il cet homme de quarante-sept ans pour oser exposer sa vie de fils d’ouvrier et de surcroît handicapé de la vie ? se diront certains.
Ma vie s’est arrêtée il y a sept ans, à la suite d’un pépin de santé assez surprenant, pour le simple fait que cela concerne le mental d’un individu que rien ne prédisposait à vivre une histoire semblable au film Vol au-dessus d’un nid de coucous .
J’ai malgré cette épreuve décidé de livrer mes états d’âmes, mes peurs, craintes et diverses choses qui font que cela n’est pas évident d’être un homme dans cette société qui n’épargne personne, pas même les plus faibles. Oyez, oyez braves gens ! prenez quelque temps pour jeter un œil sur ce travail d’écriture constitué de bons mots, dans une langue particulière ; la mise à nu de quarante-sept années. Je ne vis pas, je survis. Un mal être anime mes jours mais l’essentiel est invisible à l’œil nu.
J’ignore si cet ouvrage est digne d’intérêt pour le futur lecteur, mais je persiste quoi qu’il arrive. On vit une époque où tout le monde se fout de son voisin de palier. En 2012, on meurt dans l’indifférence la plus complète. Rien ne reste, même pas les principes moraux. Les mots égalité, fraternité, liberté sonnent désormais creux, annonciateurs d’un chaos proche et de la fin d’une civilisation. L’être humain est appelé à disparaître via les guerres, les émeutes, la faim, les catastrophes de toutes natures (naturelle, artificielle, provoquée). À l’heure actuelle, nous sommes dos au mur, les poings liés, attendant que le sort s’acharne sur nous. « N’aie pas peur homme, la nature connaît le grand secret ». Une seule certitude : le royaume du Père n’est pas ici.
 
 
 
 
 
 
En ce vendredi 30 septembre 2011, je décide de retracer mes quarante-sept années d’existence et par la même occasion les causes et conséquences de la mort prématurée de mon père, Pierre. Comme je l’ai précédemment mentionné, il est décédé le 22 mai 2009 des suites d’une longue maladie. Une opération n’a pas arrêté la progression du cancer dont il était victime. Je n’ai pas eu le temps de lui dire au revoir. Ma lâcheté m’a amené à l’ignorer, malgré mon envie de le voir et je ne me le pardonnerai jamais.
 
Je suis donc le résultat de l’union de Pierre et Marie-France ma mère ; mes parents se sont rencontrés très jeunes, au cœur de la cité de Brengall et du quartier de Menez Roz à Pont-l’Abbé. Je ne sais s’il s’agissait d’une union d’amour. Je ne le saurai jamais, même si j’ose le penser. Quoi qu’il en soit, je fus conçu vers 1964, hors mariage : un enfant non désiré, mais bien présent dans le ventre de ma mère. Une naissance qui déclencha un véritable scandale au sein de cette famille traditionnelle bretonne, aux mœurs totalement arriérées. Mes grands-parents, que je connus peu, me paraissaient droits, mais le fossé des générations perdure et l’on ne peut attendre une trop grande compréhension des personnes âgées. Malgré cela, j’ai toujours aimé mes grands-parents.
Mon grand-paternel était un érudit de première. Il tenait à jour des cahiers de bord, habitude due à son expérience dans la Royale. Un homme fameux, doté de bon sens. Il se maria à ma grand-mère, une femme très belle dans son costume de bigoudène du Sud-Finistère. Leur union ne fut pas des plus heureuses mais vit naître deux filles et deux fils, dont mon père. Ils vivaient au cœur du quartier de Menez Roz et mon grand-père paternel fut contraint de s’unir à ma grand-mère suite après qu’elle eût commis une tentative de suicide. Elle aimait passionnément mon grand-père et je ne juge pas son acte ; il faut sans doute un courage particulier pour mettre fin à ces jours. J’aimais beaucoup ma grand-mère paternelle.
Mon grand-père fut exemplaire avec ses petits-enfants. J’ai le souvenir de constructions de bateau en papier journal que l’on faisait « naviguer » sur le ruisseau parcourant le quartier. Je n’oublie pas non plus nos après-midi chez mes grands-parents, le quatre heures et la classique boîte de sucre renfermant des biscuits de toutes sortes dont nous nous régalions. Les pommes de terre au lard nichées au fond d’une cocotte. Je n’ai jamais réussi à obtenir le même résultat gustatif, malgré de multiples essais bien orchestrés. Des souvenirs gustatifs incroyables me reviennent encore. Une sacrée cuisinière ma grand-mère qui nous gâtait autant que possible. Avec mon grand père, je garde en mémoire le ramassage des fraises des bois au sein du potager. Il nous a quittés trop vite, malheureusement. J’aimais sa compagnie. L’enseignement de la vie qu’il nous prodiguait était d’une richesse incroyable.
J’espère que ces grands-parents reposent en paix là ou ils sont, même si la maladie les a emportés. Ils me manquent malgré les années écoulées. Mon regard de gosse n’a pas oublié la beauté de leur visage, leur façon de se mouvoir. Mais la mort s’en est mêlée, la seule chose permanente dans cette putain de vie. La vie est une tragédie et le royaume du Père n’est pas ici.
De leur union est né mon père, sans oublier Joël, Yves, Marcelle et Mimie : des oncles et tantes perdus de vue depuis un certain nombre d’années. Joël avait de sérieux problèmes de santé, la myopathie Duchenne, une terrible maladie qui fait vivre un enfermement total à cause des effets secondaires néfastes. À cette époque, cette maladie était mal connue dans son ensemble et la descente aux enfers de mon oncle Joël ne se fit pas attendre. Il n’avait aucune chance de survivre dans ces conditions de vie précaires.
Mon père est né le 23 janvier 1943, à Pont-l’Abbé, en pays bigouden. Je ne sais pas grand-chose de son enfance, à part la communion à treize ans, étape indispensable pour l’époque. J’ai appris qu’il était parti en pensionnat à Brest, pour apprendre le métier de carreleur mosaïste au LEP Dupuy-de-Lôme. Il est clair qu’il était doué dans ce métier : il a obtenu son CAP en moins d’un an. Incroyable ! En 1962, il part pour effectuer son service militaire en qualité d’appelé en Algérie. Il y pratiqua la spécialité de mécanicien réparateur véhicule sous le grade de brigadier. Je crois savoir qu’il apprécia plus ou moins la vie de militaire. En 1963, il fut démobilisé.
Ma mère est née le 9 janvier 1945 à Pont-l’Abbé, l’aînée d’une fratrie de onze enfants, filles et garçons. Mon grand-père maternel était marin-pêcheur, un homme d’une bonté reconnue. Un forçat de la mer. Un travailleur émérite de part les campagnes effectuées. C’était un colosse doté de mains énormes, d’une gueule incroyable et d’un physique impressionnant : il inspirait le respect. Ma grand-mère était une femme plutôt discrète mais certainement dotée d’une santé de fer pour avoir mis au monde tant d’enfants !
Maman était de constitution frêle, sujette à de nombreux problèmes de santé. À treize ans, elle devint brodeuse dans une usine ; un boulot pas facile, mais à l’époque, on n’avait pas le choix du métier que l’on voulait pratiquer. Je sais qu’elle en a bavé ma petite mère, alors même qu’elle n’était encore qu’une enfant. Tous les jours, par tous les temps, elle prenait son vélo ; ce qui forgea sans doute son fort tempérament et tant mieux.
Elle et sa famille habitaient dans le quartier de Brengall à Pont-l’Abbé, à côté du château d’eau et non loin de chez mon père. Je ne sais pas comment ils se sont rencontrés. Dans tous les cas, je fus conçu en 1964 ; enfant de l’amour ou accident, je l’ignore. Ils se sont mariés à Pont-l’Abbé. Ma mère et mon père étaient beaux sur la photo. Je ne sais pas si cette cérémonie fut heureuse mais les années de vie commune démontreraient malheureusement le contraire.
 
J’étais un fils d’ouvri

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