Paranoïa, tu as tué Juliette
81 pages
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Paranoïa, tu as tué Juliette , livre ebook

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Description

Janine vit aujourd’hui en Bretagne en compagnie de son mari Antoine. Elle est retraitée et prend le temps d’apprécier chaque moment heureux. Mais bien des peines, bien des déceptions, bien des larmes ont émaillé sa vie et l’ont menée à Brest. Ainsi, à vingt et un ans, elle donnait naissance à Juliette, petite fille métisse dont le père l’abandonna. Heureusement, Janine rencontra vite Antoine, et Juliette fut bientôt rejointe par Clément. Cette petite famille vivra heureuse jusqu’au voyage de Juliette en Angleterre, d’où elle ramènera une étrange maladie, psychologique et incurable. Malgré son amour et son courage, Janine ne pourra que constater la lente descente aux enfers de sa fille, atteinte de paranoïa. Un récit grave et alarmant, qui sensibilise autant qu’il émeut le lecteur. J. Le Verge rend palpable le désespoir et la frustration qu’elle subit au quotidien, dans une histoire vraie écrite sur le mode de la confession, avec sensibilité et objectivité. Un livre beau et triste à la fois, réaliste en tous points, surtout dans l’expression d’une douleur trop longtemps contenue.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 15 décembre 2011
Nombre de lectures 0
EAN13 9782748371987
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0067€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Paranoïa, tu as tué Juliette
Janine Le Verge
Société des écrivains

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Société des écrivains
14, rue des Volontaires
75015 PARIS – France
Tél. : +33 (0)1 53 69 65 55
Paranoïa, tu as tué Juliette
 
 
 
À mon mari, compagnon de toujours,
À mes deux enfants,
À mes cinq petits-enfants.
 
 
 
Avec tout mon amour et ma compassion.
 
 
 
 «  Carpe diem . »
Horace
 
 
 
« Sois sage, ô ma douleur, et tiens-toi plus tranquille.
Tu réclamais le soir ; il descend ; le voici :
Une atmosphère obscure enveloppe la ville,
Aux uns portant la paix, aux autres le souci. »
Charles Baudelaire, Recueillement
 
 
 
Préface
 
 
 
Ce récit est une histoire vraie que j’ai vécue pendant de longues années. Tous les faits relatés sont exacts et seuls les prénoms ont été modifiés.
Si j’ai voulu raconter cette folie qui a accompagné ma vie et qui l’a façonnée pendant si longtemps jusqu’à parvenir à la détruire, c’est, bien sûr, parce que je n’arrivais plus à la garder en moi. Il fallait que je l’exprime, et, comme je ne pouvais la crier, je l’ai écrite.
Mais je l’ai surtout fait pour montrer ce qu’est un délire paranoïaque, comment il est apparu chez quelqu’un de parfaitement normal et très facile à vivre, comment il a pu, au fil du temps, détruire toute une famille, la mienne. Et pourtant, lorsque je prononce ce mot, paranoïa, je le trouve beau, élégant, agréable à l’oreille…
 
 
 
Chapitre 1
 
 
 
Je ne sais pas s’il est possible de rester objective lorsque l’on raconte des épisodes importants de sa propre vie, et pourtant c’est ce que je voudrais arriver à mettre sur papier maintenant.
 
Pour cela, il faut que je fasse un très lointain retour en arrière, un grand voyage d’une cinquantaine d’années. C’est seulement ainsi que j’aurai une petite chance de comprendre comment peut naître un délire, comment il peut modifier de fond en comble une personnalité, comment il peut se structurer, s’amplifier, se nourrir de faits en apparence plus ou moins réels mais totalement et volontairement déviés de leur sens premier pour devenir des « preuves » destinées à l’étayer.
 
Ce délire qui n’est pas le mien, mais à côté duquel je sais que je devrai vivre jusqu’à la fin de mes jours, je veux lui faire face et, s’il grandit encore, je veux le regarder droit dans les yeux, l’observer, l’étudier, le comprendre. C’est un délire paranoïaque, donc contre lequel je ne peux absolument rien. Je ne peux surtout pas le contrer sans mettre ma vie en danger pour rien, strictement rien, car la violence des malades atteints de cette psychose est telle qu’elle ne supporte aucune contradiction et se déchaîne alors de façon redoutable, totalement incontrôlée.
 
Il n’existe aucun traitement médical, aucune psychothérapie possible, et il n’existe pas non plus de guérison, ni même d’amélioration spontanée. Il faut que je vive avec car, en plus, j’y pense sans arrêt, je peux même dire qu’il m’habite et reste le centre de ma vie.
Je vais donc essayer, en l’écrivant noir sur blanc, d’analyser ce délire, de le disséquer, de le reprendre à son tout début et de suivre sa longue, très longue évolution, sa progression inexorable et destructrice…
Nous sommes le samedi 19 juin 2010. C’est un jour tout aussi banal que les autres mais, pour moi, c’est celui où, assise à mon bureau, j’ai décidé d’écrire pour tenter enfin de comprendre comment ma vie a pu ainsi basculer dans un tel gouffre.
 
Je suis seule, tout est calme autour de moi, cette ambiance est tout à fait propice à la réflexion, à un lointain retour dans le passé pour reconstituer le déroulement des faits qui m’ont amenée à côtoyer cette paranoïa qui a détruit la vie de toute notre famille. C’est difficile, mais je veux comprendre ce qui est, peut-être, incompréhensible.
 
J’ai toujours eu besoin des autres pour trouver une justification à mon existence. C’est pour cela que j’ai toujours pensé que j’étais née à vingt et un ans, lorsque j’ai eu mon premier enfant, ma petite Juliette, ma petite merveille. Avant sa naissance, le seul but de ma vie était de devenir médecin, de travailler à améliorer la vie des gens, à guérir leurs maladies, à soulager leurs souffrances, à les aider à vivre le mieux possible, eux et toute leur famille, car je voulais être « médecin de famille ».
 
Mais mes parents ne l’entendaient pas de cette oreille. Ils voulaient que je devienne professeur de lettres classiques, sous prétexte qu’au lycée je brillais dans cette discipline. De plus, mon père voulait absolument que je sois fonctionnaire car mon grand-père paternel, qui était artisan sellier-bourrelier, avait fait faillite lorsque les voitures avaient remplacé les chevaux. Pour pouvoir continuer à faire vivre sa famille, il avait accepté un poste de professeur de sellerie dans un centre d’apprentissage, en toute connaissance de cause puisqu’il savait mieux que personne que ce métier n’avait plus aucun avenir à l’époque. Je remarque que, déjà vers 1920, la logique de l’Éducation nationale laissait plutôt à désirer ! Mais, mon pauvre grand-père n’avait pas supporté le changement absurde de sa situation et il s’était donné la mort. Bien sûr, ce suicide avait beaucoup traumatisé mon père, et il ne voulait plus entendre parler de professions libérales.
 
Il ne se rendait pas compte que je n’étais pas du tout faite pour exercer le métier d’enseignant, métier difficile et pour lequel il est absolument nécessaire d’avoir la foi, la vocation. Moi, depuis la classe de quatrième, ma vocation, la vraie, la seule, celle qui restait si solidement ancrée en moi, était d’être médecin de famille, donc d’exercer en libérale en ville, au milieu de gens qui me feraient confiance pour partager, d’une certaine façon, leur vie de tous les jours.
 
Maintenant je pense que si seulement j’avais osé parler à mon père, à cœur ouvert, il aurait réussi à comprendre à quel point ma détermination était forte, il aurait réussi à me faire confiance et je ne l’aurais certainement pas déçu. Mais, mon père m’intimidait, je ne réussissais pas à me confier à lui, à lui parler franchement de mes problèmes, à lui demander conseil. J’aurais dû le faire car nous avions suffisamment de points communs pour parvenir à nous comprendre, et même à nous mettre d’accord sur beaucoup de choses. Cela m’aurait évité beaucoup d’erreurs, beaucoup de doutes. Mais à l’époque, je ne m’en rendais pas compte…
Je suis finalement devenue médecin, grâce à un homme merveilleux, exceptionnel, que j’ai enfin rencontré et qui a partagé ma vie. Mais, cela est une autre histoire dont je parlerai plus tard…
 
À vingt ans, j’étais donc en pleine licence de lettres, contre mon gré, et j’attendais un enfant ! J’avais en effet cru rencontrer le grand amour, le seul, le vrai, celui qui vous fait perdre totalement la raison, en la personne d’un étudiant métissé africain-portugais, qui terminait une licence d’anglais et dont la famille demeurait au Congo. En effet, son père possédait sur le port de Pointe-Noire une entreprise de gros matériaux de construction que fréquentait, pour son travail, un frère de ma mère. Ce jeune homme était beau comme un dieu, très cultivé, élégant, spirituel, et… baratineur à souhait, tout pour étourdir une gourde comme moi, qui ne connaissait rien de la vie, ne voyait pas plus loin que le bout de son nez, croyait tout ce qu’on lui disait et ne pouvait que se donner à fond, aveuglément, totalement. Rien que le fait qu’il ait des relations sexuelles avec moi, une blanche, était une preuve irréfutable qu’il ne pouvait être raciste ! Faut-il être naïve et même idiote pour penser une chose pareille et foncer avec confiance dans cet amour qui me semblait si pur, si idyllique ! Il me racontait l’avenir que nous aurions en commun, et je le croyais, je ne doutais pas une minute de sa franchise. Alors, lorsque j’eus la surprise de me retrouver enceinte, bien sûr c’était un peu trop tôt mais, après tout, ce n’était pas si grave puisque nous nous aimions (!!!), et ce futur enfant ne pouvait être que du bonheur…

Nous étions en 1960, en province, et à l’époque, c’était une honte de se retrouver « fille-mère ». Or, c’est ce qui m’arriva, évidemment ! Le père de mon enfant ne pouvant, au plus profond de lui-même, envisager d’épouser une femme blanche, et ne voulant surtout pas s’embarrasser d’un enfant, me fit gentiment (maintenant je dirais plutôt lâchement) patienter avec de magnifiques promesses d’avenir commun, jusqu’aux grandes vacances que je devais passer chez mes parents. Je partis donc confiante, comme d’habitude… et je ne reçus plus jamais aucune nouvelle de mon si beau parleur qui, de son côté, était parti en vacances et ne me donna plus aucun signe de vie, laissant mes lettres sans réponse. Malgré l’évidence, je ne croyais toujours pas qu’il m’avait laissé tomber. Pour moi, c’était certain qu’il allait se raviser et que, au moins lorsque l’enfant serait né, il reviendrait tout content de reprendre notre vie commune et d’avoir la joie d’être père.
 
Il n’est pas besoin de dire que cela n’arriva pas. Dans l’immédiat, il me fallait affronter mes parents et toute la famille pour leur annoncer la « bonne » nouvelle : j’allais avoir un enfant sans être mariée, et, de plus, cet enfant serait métissé, ce qui allait sans aucun doute faire tache dans le quartier ! Évidemment, la réaction fut immédiate, car mes parents, eux, comprirent tout de suite que le père avait pris la clé des champs et que je devenais donc la honte de la famille, celle dont il fallait à tout prix cacher d’urgence la grossesse, avant même de d

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