Piège de famille - Acte 1
334 pages
Français

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Piège de famille - Acte 1 , livre ebook

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Description

De Pertuis à l’Estaque l’auteur revisite son enfance comme une mise en garde qu’il adresse à tous ceux dont le cœur domine la raison.


Qui l’emportera du bonheur de revivre ces folles anecdotes ou du besoin cruel de dénoncer tout haut le piège de famille qu’on lui aura tendu cinquante années plus tôt ?


Une thérapie tardive qui relate en trois actes la révolte d’un jeune homme blessé puis d’un homme trahi.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 07 octobre 2019
Nombre de lectures 0
EAN13 9782414386543
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0082€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Cet ouvrage a été composé par Edilivre
194 avenue du Président Wilson – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com
 
Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.
 
ISBN numérique : 978-2-414-39167-7
 
© Edilivre, 2019
Remerciements
A Carine REYNAUD, j’adresse mes profonds et sincères remerciements pour ses avis éclairés et ses conseils techniques sans lesquels cet ouvrage n’aurait pu aboutir.
A Christine, Laurence, Stella.
Acte 1 : L’Enfance Prélude
J’avais dix ans et le port de l’Estaque embaumait l’air iodé et les posidonies. Mes grands parents tenaient en ce temps là, un de ces kiosques « à chichis 1 « qui font la renommée de ce petit village marseillais.
Sans doute pour se purger de ces relents marins, leur saison terminée, Paul et Marthe s’exilaient à Peyrolles en Provence dans un petit cabanon, si discret, qu’on l’aurait cru caché entre les pins tordus et les amandiers noirs. Je nous revoie tous trois dans la 1501 2 , un peu las du voyage, mais heureux d’emprunter enfin, le chemin de Trempasse.
Comme s’ils répondaient à un signal magique, nos chiens se réveillaient. Sans doute ressentaient-ils l’agitation fébrile qui nous envahissait.
J’espérais comme autant de repères, ces virages pas toujours très commodes quand on croisait quelqu’un, les carrés de luzerne, les vignes au sol moutarde bordées de chênes verts.
Mais plus on approchait, plus la peur nous prenait, panique, irrationnelle, exaspérée par le cliquetis trop plastique de notre clignotant.
Et s’il n’était plus là ? Si on nous l’avait pris ? Inquiets, nous nous penchions à s’en tordre le cou et les chiens intrigués couinaient à qui mieux mieux.
C’est là, dans le secret de notre cabanon, que mon grand père Paul me dévoilait le soir venu, les splendides mystères de sa jeunesse corse.
Il me fallait d’abord promettre le silence, ne rien dire à mon père qui vouait au passé, une haine féroce. Allez savoir pourquoi.
Sans doute ignorait-il qu’au risque de se perdre tout homme doit un jour retrouver ses racines.
Ces soirées d’automne resteront à jamais de grands moments magiques. L’émotion était là, dans les yeux malicieux, scintillants de bonheur, de ma grand-mère Marthe :
– « Calme toi donc Jean-Paul, tu ne vas plus dormir ! »
Il racontait si bien que j’avais l’impression d’être dans la rivière pour attraper les truites sous les blocs de granit ou piéger les perdreaux en bordure des blés… Et la nuit j’en rêvais à en perdre la tête.
Soixante ans ont passé.
A mon tour de léguer à mes petits enfants mon plus bel héritage, ces tonnes de bonheur, de joie et de folie qui ont fait mon enfance.
Mais comment ré-ouvrir ce livre de famille dont j’ai scellé les pages, il y a de ça trente ans ? Famille… Enfin, si l’on peut dire ! Plutôt une tribu régie par des principes qui leur ont fait confondre amour et nourrissage.
Vivre dans cette secte, le mot n’est pas trop fort, imposait l’allégeance au couple dominant. J’entends déjà leurs voix, pour certains, s’élever des profondes ténèbres : « Et tu comptes étaler notre vie au grand jour ? »
Quel cynique procès !
Quand on sait toutes les frustrations, tous les renoncements, ces efforts douloureux auxquels j’ai du tant de fois consentir pour rester dans leur cercle, devoir apprivoiser aujourd’hui cette respiration par trop irrégulière, contenir l’hésitation du stylo sur la feuille et ne pas renoncer, est un bien lourd et injuste tribut.
Mais qu’importe le prix, je veux dès maintenant reprendre pied à pied, le moindre souvenir à ceux qui espéraient me les avoir volés.
Marguerite DURAS ne disait-elle pas : « Ecrire c’est se taire. C’est hurler sans bruit. »
Alors si ce journal, comme une thérapie, pouvait me libérer, me purger, peut-être pourrai-je enfin, un peu mieux me comprendre et que l’on me comprenne.
Je souhaite à ceux qui auront comme moi, pu croire aveuglément aux dires de leurs proches, de trouver le courage et la force de commencer le leur.
Sans doute me faudra-il un jour faire face au châtiment final qu’ils m’auront réservé, mais c’est une autre histoire, chaque chose en son temps…
Pour l’heure, partageons tous ces instants sublimes où se sont emmêlés ma mémoire et mon cœur. C’est tout ce qu’il me reste.
Alors à ceux qui m’ont connu, j’avoue avoir parfois romancé les histoires, forcé les caractères, embelli les images mais c’est un parti pris, qui m’en tiendrait rigueur ?


1 . Beignets circulaires, typiquement marseillais

2 . Modèle de Simca
L’Estaque du fond de ma mémoire
Je n’ai rien vu venir…
C’est en cinquante-deux que je voyais le jour, à Pertuis en Vaucluse. Les lendemains de guerre font dit-on des heureux. C’était un beau présage.
Existe-t-il au monde un plus joli village que celui où l’on naît ? Le mien, du haut d’un promontoire, surveillait la Durance qui parfois s’étalait dans les prairies voisines. Geneviève ma grand-mère maternelle et pépé Louis, son deuxième mari y tenaient une épicerie très florissante, place de l’église, à moins que ce ne soit, place de la mairie. Une rue les sépare, alors elles s’observent !
Comme pour assourdir les débats politiques ou quelque confession un peu trop avouée, en son centre bruissait le gazouillis d’une belle fontaine. Je n’ai pas eu la chance de connaître le père de ma mère, Antoine, mort trop jeune à la guerre. En souvenir de lui, je porte son prénom.
(Je reviendrai plus tard sur cette époque-là.)
Qu’il est dur sans un guide de remonter le temps ! Mon plus vieux souvenir ? L’appartement peut être dans lequel nous vivions, mes parents et mon frère. Un petit, tout petit logement au second étage d’un vieil et grand immeuble, rue des scaphandriers, en plein Estaque-plage au nord-ouest de Marseille.
Pour qui n’est pas du sud, Estaque en provençal vient de s’estaquer, c’est-à-dire accoster, s’arrêter un moment dans ce port de pêcheurs, avec sa rue centrale qui séparait deux mondes celui de l’homme en haut, et celui de la mer, tout en bas d’un pentis 1 . Cette grève de pierres était sensée ôter à notre méditerranée, sa fâcheuse tendance à dépasser l’hiver, un peu trop ses limites.
D’Estaque, il y en a trois, celle du bord de mer, jadis bordée d’une authentique plage, c’est celle des grands peintres, Braque, Cézanne, Dufy, Renoir, mais aussi des touristes, pêcheurs, et commerçants, c’est le cœur du village.
Perchée en haut du boulevard Bandini, l’Estaque gare sera toujours pour nous, le lieu par où l’on part pour se rendre à St Charles ou vers la côte bleue.
Et puis, il y a aussi celle qu’on aime un peu moins, l’industrielle Estaque Riaux qui a longtemps pollué notre espace, mais nourri nos familles. C’est le dernier repère. Dépassez ses usines, vous quitterez Marseille.
Notre ruelle, les gens la surnommaient assez bizarrement la rue muette ! Un cul de sac que fermait l’imposante façade de notre immeuble. Personne n’y parlait jamais car ici tout résonnait et en haut des étages, chacun pouvait entendre ce qu’on disait en bas ! Ni bruit, ni ascenseur, mais des escaliers si raides que sortir de chez soi demandait réflexion. Aussi, un ingénieux système de corde et de poulie, permettait de monter les sacs à provisions jusque devant sa porte, à condition bien sûr de ne pas être deux à vouloir l’actionner ! Le ton montait parfois. Il n’était pas rare qu’une voisine m’interpelle du haut de son balcon : « Eh Jean-Paul tu veux bien m’acheter trois cent grammes de gras doubles à Verdier ? Je t’ai mis le porte-monnaie et vingt francs pour ta peine. » J’acceptais volontiers, non pas pour la piécette, mais pour faire plaisir, à moins que ce ne soit pour le « merci beaucoup tu es un ange » qui viendrait forcément.
Pour moi, c’était pénible d’accéder jusqu’au deuxième étage, les marches étaient bien hautes et trop irrégulières, mais une fois en haut, quelle récompense ! A perte de vue, la Méditerranée, le Frioul, le Château d’If, le phare de Planier et, tout en bas des falaises au couchant, la petite île vine. Nous l’appelions ainsi.
Sans vraiment savoir pourquoi, ce n’était pas le large qui m’attirait le plus, il était bien trop loin. Ce qui me fascinait c’était le premier plan, les blocs de la blanche jetée qui émergeaient des toits. Pour les apercevoir je devais me hisser sur la pointe des pieds, les jambes m’en tremblaient, le vertige sans doute !
Flanquée d’un phare rouge, c’est sur elle que comptaient tous les patrons pêcheurs pour protéger notre port du labé 2 en hiver. Cette rangée de rochers allait devenir pour de longs mois d’été, mon terrain d’expériences, mon eldorado, ma terre d’évasion, et mon refuge aussi.
De ce petit quartier, je n’ai rien oublié. Nos voisins et leurs cris, nos jeux dans les ruelles, les odeurs à chaque heure, et ce sacré mistral qui m’aurait volontiers fait sauter la rambarde si je n’avais pris garde de bien m’y cramponner.
Tout respirait la vie, ce qui était frappant c’est qu’en si peu d’espace on avait pu caser tant et tant de commerces. Notre immeuble hébergeait une boulangerie en haut de quelques marches en marbre que les pieds des clients avaient polies et creusées par endroit. Je devais les gravir à quatre pattes, ce qui à chaque fois, faisait hurler de rire le petit boulanger toujours vêtu de blanc, et coiffé, même en été, d’un bonnet ridicule : « Alors tu y arrives ou tu veux que je t’aide ? »
Je ne saurai décrire ce que j’aimais le plus, aller acheter seul le pain, m’enivrer des odeurs vanillées de levain et de sucre, ou coller contre moi la boule encore chaude dont la croûte craquait. A deux pas sur la droite, c’était « la chevaline ». On aurait dit la maison d’un vampire ! Un rouge vif recouvrait la frêle porte en bois, les murs, et les joues du boucher, sauf celles de sa femme si blafarde qu’elle me faisait peur !
Quand c’était son mari qui découpait la viande, je passais mon chemin, j’obéissai

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