Vies de chiens
86 pages
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Vies de chiens , livre ebook

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Description

Et si nos amis les animaux pouvaient parler ? Imaginez les histoires qu'ils pourraient raconter. Les secrets que nous leur confions, nos chagrins, nos joies, des moments de vie. J'ai toujours eu des chiens, je leur ai beaucoup parlé, j'ose penser qu'ils ont bien écouté.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 02 août 2019
Nombre de lectures 0
EAN13 9782414362431
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0037€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
194 avenue du Président Wilson – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-414-36244-8

© Edilivre, 2019
Préface
Je flotte dans ma sphère mouvante, bien nourrie. J’entends le vent doux, une musique lointaine. Ici il fait chaud, je me suis toujours bien sentie dans cet univers de douceur mais, je commence à être à l’étroit. J’évolue, la géode a atteint sa taille maximale. Je donne des coups pour agrandir l’espace qui se réduit de jour en jour.
Quelque chose change, l’environnement est lourd, visqueux, palpable. Une tension règne, j’ai peur. Ils ont éloigné mon père. Ils s’affairent autour d’Elle, s’agitent, lui donnent des conseils qu’Elle n’écoute pas.
Elle, ma mère.
Je suis attirée par cette chambre, étrange pulsion. Je lutte contre cet irrésistible mouvement. Mes forces m’abandonnent, ma vision se trouble, l’air commence à manquer, les chuchotements deviennent cris, les bruits s’intensifient, dehors le vent hurle, les feuilles volent en gémissant. Dans la chambre, autour du lit, les pas claquent, la lumière devient si forte, mes paupières fermées brûlent. On me tire la tête, les bras dans un étau, la peur me paralyse. Voilà que je hurle pour ne pas entrer tandis qu’elle hurle pour que je sorte, comme pour se libérer d’une douleur si forte.
Je ressens, pour la première fois, cette peur de l’abandon qui ne me quittera pas. Elle me rejette, Elle, ma mère, indifférente à ma souffrance, m’expulse de son intimité si longtemps partagée, comme on crache un gros noyau d’abricot, sans état d’âme, comme une délivrance longtemps espérée.
Son soulagement est si fort, si vivant que je le ressens comme un chagrin.
Je suis née, sans le comprendre, sans l’avoir désiré. Rien ne sera plus comme avant, jamais.
Un liquide visqueux et rosâtre sèche sur ma peau fragile, j’ai froid, de grandes mains m’ont retirées de ce giron chéri, d’autres tachées de rouge ont coupé le cordon de vie, dernier lien vivant avec ma mère, elles en ont fait un nœud qui bientôt prendra cette vilaine teinte noire de la nécrose. L’odeur de chair pourrissante amplifiera ce sentiment de perte.
J’ai pris pied dans un univers étrange, hurlant pour appeler la vie. Des mains me lavent, m’habillent, les membres emprisonnés dans un drap de coton rêche, première entrave à ma liberté.
Je me retrouve dans les bras las de ma mère, je savoure ce contact, je happe avec avidité son sein nourricier. J’en profite au delà de toute raison, avec déjà la peur du temps qui passe.
Je suis dans la pénombre, l’ange est passé, ma mémoire absolue se vide, m’entraînant lentement vers l’oubli, vers l’inconnu, il a posé ses doigts sur mes yeux, sur ma bouche et m’a susurré qu’une vie commençait pour moi.
Kerry
Il y a un nouveau bébé dans la maison. Je surveille déjà Julie deux ans. Je regarde Béatrice deux jours. Elle gigote beaucoup dans son berceau, pousse de petits cris. Sa bouche remue sans cesse comme si elle cherchait des mots qu’elle ne connait pas. Je voudrais la rassurer, Gilles son grand père, m’a interdit de lui lécher le visage.
– Elle est trop petite, Kerry, il faudra attendre quelques mois. Viens nous allons retourner jardiner, laissons les femmes ensemble.
Gilles et moi retournons chez nous par le jardin. La grande maison a été partagée en deux. Le jeune couple : Rosette, Julien, les petites et le magasin d’un côté. Gilles et Violaine, les parents de Rosette, et Marie sœur de Violaine de l’autre. A l’arrière, en contrebas, un grand jardin et des poules
Avant de jardiner, Gilles monte dans la cuisine, ouvre la gazette et se sert un café. La cafetière est restée au chaud sur le coin du foyer.
– Mon bon Kerry, ils n’ont toujours rien compris. Nous n’avons pas encore reconstruit les dégâts de la guerre. Et les massacres continuent. Cette fois en Palestine à Qibya. Pourquoi ne peuvent-ils pas vivre en paix après ces horribles années. Ils ont ouvert un grand musée à New York, cette Amérique où Doris est partie avec son John. Au Mexique les femmes peuvent voter, le monde change. Ça ne fera pas de mal qu’on reconnaisse enfin les capacités de nos femmes. Regarde Violaine, Marie et leur mère Clémence, comme elles ont travaillé pour l’union coopérative et les mineurs. Magasin, café, salle de théâtre que ma belle-mère a construite avec son mari et qu’elle a fait fonctionner, après la mort de celui-ci, avec ses deux filles. A la mort de leur mère, Violaine et Marie ont remis la coopérative et Violaine a ouvert son magasin et son atelier de couture.
En me racontant cette histoire que je connais déjà, Gilles feuillette l’atlas qu’il a toujours à portée de main et cherche la Palestine. Gilles est fier de sa femme, quand il en parle, il a du mal à s’arrêter.
Il dépose son journal, ferme le livre et nous descendons tous deux dans le jardin, son passe-temps, son bijou, mon aire de jeu. Nous y passons des journées entières quand je n’ai pas la petite Julie à surveiller. Gilles m’a bien expliqué que c’est fragile un enfant, que je dois être très délicat, mais, mon instinct m’avait déjà renseigné. Mon rôle se borne surtout à prévenir quand elle fait des bêtises. Julie est assez sage, très calme, Béatrice qui vient d’arriver est déjà remuante, ne se laisse pas oublier.
Les mois passent, le bébé grandit, je surveille ses cabrioles dans son berceau, puis ses premiers pas, elle s’accroche à mes poils pour ne pas tomber. Le temps passe, la marche maîtrisée, Béatrice me fait plein de bisous, m’appelle dès que je m’éloigne.
– Keyi, keyi
Et se met à quatre pattes pour me rejoindre plus vite. Gilles ne cesse de dire que c’est une canaille. Moi je ne reçois que des câlins. Parfois Gilles l’assied sur mon dos en la tenant bien, elle est si légère, elle rit aux éclats, tirant sur mes poils noirs et bouclés. Heureusement qu’elle nous a cette petite.
 
 
Doris est revenue des Amériques il y a 2 mois, visiter sa famille qui lui manque. Doris a quatre ans de plus que Rosette, sa meilleure amie. Doris dit qu’elle se plaît beaucoup là-bas, que la vie est très différente d’ici. Elle raconte toujours joyeusement sa rencontre avec John, soldat américain, que Gilles et Violaine ont caché, voilà dix ans, dans leur cave au péril de leur vie.
A cette époque, Rosette, quinze ans, était à l’abri au collège chez les sœurs, elle en a gardé une grande foi en dieu. Doris raconte sa vie dans ce nouveau monde, le ranch de ses beaux parents, le Texas, les enfants dont elle rêve. Tous rêvent avec elle en regardant les premières photos colorées sur une matière transparente et fragile.
A la fin de leur séjour, les parents de Doris ne pouvant se déplacer, Rosette et son mari Julien décident de reconduire leurs amis au Havre.
Sacrée expédition !
Rosette, julien, Doris et John dans une voiture. Violaine, Marie, Gilles, Julie, Béatrice et moi, dans l’autre. Nous partons par les routes de terre, traversons des villages, regardons les stigmates de la guerre sur notre chemin, direction le Havre pour prolonger les adieux. Tous savent que Doris ne reviendra pas souvent, ces voyages coûtent très cher. Les deux voitures sont prêtes, les aventuriers aussi.
Nous sommes partis très tôt le matin, il faisait toujours noir, il est presque 15 heures quand nous arrivons au Havre. Le paquebot est à quai. Nous montons à bord et commençons la visite après avoir acheté un billet visiteur. Nous avons passé l’après-midi là-bas. Béatrice est restée dans les bras de Doris et John pendant la visite du navire. Sur le pont principal sont installés des transats en bois, Doris a déposé Béatrice sur l’un d’eux.
– Tu vois Béatrice, mon bon Kerry, m’interpelle Gilles, installée comme une princesse, riant aux éclats, comme si elle était prête à faire la grande traversée. C’est un pur bonheur cette petite.
La famille est maintenant sur le quai, le paquebot s’éloigne. Ils sont tous alignés contre le parapet. De droite à gauche, Julien avec sa petite Julie, presque trois ans, dans les bras. A côté, Marie la tante de Rosette, puis Violaine, la maman. A ses côtés, Rosette donnant juste le doigt à sa petite Béatrice, debout sur ses jambes potelées, sans grand équilibre (elle marche à peine). Tous et toutes le bras levé, mouchoir au bout des doigts pour les femmes, dans un grand signe que plus personne ne voit tant ce monstre des mers s’éloigne vite.
Moi je ne vois que Béatrice en grand danger, si ses petites jambes flanchent, la tête passant sous le parapet, elle tombe dans l’eau où se trouvait le paquebot tout à l’heure.
Gilles derrière ce petit monde se prépare pour la photo, sa famille de dos, le paquebot et coucher de soleil en toile de fond.
J’ai dû gâcher la photo, Gilles a crié, Rosette aussi.
Nous sommes rentrés fin de matinée le lendemain. Les petites dormaient dans les bras de Violaine et Marie, tous épuisés par ce long voyage.
Deux semaines ont passé, les photos sont arrivées, Gilles les colle dans l’album. Le paquebot est luxueux. Il y a les photos avec Béatrice dans un transat sur le pont de bois, Béatrice dans les bras de l’un, de l’autre. Julie, sa grande sœur, dans les bras de Julien ou Rosette. Portraits noir et blanc, petites photos aux bords dentelés. Il y a aussi le carnet de cartes postales avec vues du bateau, acheté à la boutique de souvenirs. Intérieur luxueux auquel le public n’a pas accès, bar, salle à manger, salon, immense escalier, salle de bal, casino. De quoi faire rêver toute la famille qui n’ira jamais en Amérique.
 
 
Béatrice a bientôt 6 ans, elle aime jouer dans le jardin avec son grand père, elle apprend les semis, les plantations, c’est maladroit mais Gilles ne dit rien.
Un jour de printemps, Gilles bêche le potager bien nourri. Dans la terre retournée pullulent les lombrics roses et gras. Béatrice a

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