Identité
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Identité , livre ebook

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Un jeune homme à la recherche de sa famille biologique, un couple en déroute.

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Publié par
Date de parution 29 juin 2021
Nombre de lectures 66
Licence : Tous droits réservés
Langue Français

Extrait

"- Hamed, s’il te plait, maitrise-toi ! Je souffre autant que toi. Et ce n’est pas dans l’avion
que nous allons deballer nos problemes conjugaux.
- J’en ai marre de cette vie que je t’impose. Je ne t’en voudrais pas si tu decidais de me
quitter."
Je sentais les yeux de nos voisins de cabine poses sur nous. Les quelques
regards compatissants, les fuyants, et surtout les agaces que la perspective des eclats
de voix n'enchantait pas.
Il y avait 15 mois qu'Hamed s'etait lance dans cette quête effrenee. 15 mois au cours
desquels la recherche de l'identite de ses parents etait devenue une veritable
obsession.
Tout avait commence lors d'une soiree d'ete chez nous à Petworth, Washington
D.C. Nous celebrions le retour de la chaleur et des barbecues entre amis. Hamed et moi
vivions justement avec 4 amis d'horizons distincts, dans ce quartier de classe moyenne.
Nous venions des quatre coins des USA, et nous etions reconstitue une famille dans les
murs de cette maison de bois avec son rocking-chair sous la veranda.
Nous parlions de vacances à venir, de retrouvailles. Puis une connaissance lointaine
avait fait une blague sur les veritables origines d'Hamed. De ces blagues sur les
personnes dites de couleur dont on remet en cause la nationalite pour des questions
d'apparence.
"Mes tes parents t'ont adopte? Pourquoi ne t'ont-ils pas rebaptise John ou Steve?"
avaitil dit.
L'attaque etait vive, même sans mauvaises intentions. Ce n'etait pas la premiere
fois qu'Hamed se confrontait aux prejuges et aux remarques blessantes. Il avait grandi
avec des parents blancs et le lot de questionnements que cela generait. Et j'avais grandi
avec lui sur ces sujets au cours des quelques annees que nous avions parcourues
ensemble. Le racisme n'avait pas ete une question pour moi avant de le rencontrer en
freshman. Évidemment, je savais de quoi il s'agissait. Je n'avais par contre aucune
notion de son caractere omnipresent. Je ne me sentais tout simplement pas concernee.
Et puis il y avait eu Hamed. Les traumatismes avoues à demi-mot dans une Amerique
conservatrice. Les micro-agressions vecues à ses côtes sans même qu'il en soit
conscient parfois. Les interrogations sur son identite propre que je ne pouvais pas
comprendre de prime abord. Ces preoccupations ne m'avaient jamais effleure. J'etais
qui j'etais et j'avais traverse la vie sans que personne ne remette cela en question.
C'etait la discussion de trop, celle qui avait tout declenche. Et de recherches
Internet en demarches administratives nous etions là.
Il y avait d'abord eu des discussions avec ses parents. Intenses. Et les
distensions qui les accompagnaient. La reconnaissance etait immense. Hamed ne leuren voulait pas. Ce qu'il voulait, c'etait savoir. Mais pour sa mere comme pour son pere,
savoir signifiait s'eloigner. Les deux comprenaient son envie, son besoin de connaitre la
verite, mais juraient ne pas avoir quoi que ce soit à lui dire.
Il avait d'abord fallu se renseigner sur les procedures, les droits des enfants
adoptes à l’international. Nous avions ensuite ecume les administrations qui se
succedaient comme les grains d’un chapelet.
Je m'etais engagee dans ce periple avec lui loin de savoir le poids qu’il allait
prendre dans notre couple. Nous nous aimions. Je n'en doutais pas. Mais de se poser
autant la question d'où il venait, Hamed avez remis à plus tard, delaisse, oublie. Et
j'etais le partenaire fidele, mais aussi l'amie blessee. Il me fallait accepter d'être là sans
prendre autant de place qu'auparavant. Et la plaie ouverte etait beante. Pas un jour sans
qu’eclate une dispute pour un sujet ou pour un autre. Nous etions à fleur de peau. Un
amour devenu haine parfois. Je devais lui laisser de l'espace. Et il sentait ma peine,
mais la recherche de la verite le consumait. Et avec elle, la peur de voir l'homme que
j'aimais rester cette personne dedoublee, dependante de la reponse qu'il allait trouver.
Cette reponse allait-elle le changer pour toujours? Allions-nous nous retrouver un
jour? J'avais passe des semaines à ses côtes à me poser ces questions. Au bord du
gouffre. Je serai là jusqu'à ce qu'il trouve ce qu'il cherche. Je l'accompagnerai dans ce
processus jusqu'au bout. Mais peut-être serait-ce aussi le bout pour nous. Et plus les
jours passaient, plus j'avais acquis la certitude que cet amour que je lui portais ne
suffirait pas à sauver ce que nous avions construit.
Les formulaires, courriers, files d'attente, portes fermees, fonctionnaires
dilettantes, s'etaient succede. Puis un jour, son pere avait parle. Ce n'est pas qu'il ne
voulait rien dire. C'est que la peur de le perdre etait trop grande.
Hamed n'avait pas seulement ete adopte. Ses parents se desesperaient de ne
pas pouvoir avoir d'enfant, et des amis du Country Club leurs avaient parle d’une
possibilite. Ils avaient paye. Hamed etait arrive.
Ils s'etaient convaincus de l'avoir sauve d'une pauvrete extrême, d’un pays
devaste. C’est sa mere qui avait choisi de conserver son prenom. Puis les difficultes de
la parentalite, les questions posees par la difference de couleur de peau, les
mouvements sociaux recents, les avaient bouscule. Hamed n'avait jamais pose trop de
questions et ça leur allait bien. Et même la culpabilite incertaine ressentie ces dernieres
annees n'avait pas mene au dialogue.
Son pere l'avait mis en contact avec leurs anciens amis. Et malgre les reticences
et les embûches, il avait trouve un nom de village. Nous en etions à notre 4eme voyageet etions par 2 fois rentres les valises pleines de prelevement ADN. Le Nigeria faisait
maintenant partie de la famille. Et Hamed apprenait à s’y faire une place. Tout au long
de ce voyage à la rencontre de lui-même, je tombais des nues devant ce que pouvait
nous faire faire le desespoir, je m’emerveillais devant un continent que je connaissais si
peu, j'admirais la pugnacite d'un homme que je savais si bouleverse par les
evenements. Mais le mal etait fait. Et le Nous s'etiolait chaque jour un peu plus au profit
du Je.
C'etait une autre fois le sujet de nos tensions du jour. Lors de notre voyage
precedent, les sentiments etaient si lourds à porter que je m'etais rêvee laissant tout
derriere moi et disparaissant lors de notre escale à Londres. Mais je voulais être là. Me
dire que nous avions gravi cette montagne ensemble.
J'allais le quitter malgre ses yeux penseurs, sa peau d'ebene que j'aimais tant, et
son intelligence. Cette envie de devorer le monde. Tout cela ne suffisait plus. J'allais le
quitter, et c'est lui qui me le proposait aujourd'hui faisant mon cœur en tomber par terre.
“- Hamed si cet avion tombait à cet instant, es-tu sûr que ce sont les derniers
mots que tu voudrais me dire?”
Il me regarda abasourdi.
“- Mais qu'est-ce qu’il te prend? Qu'est-ce que cette idee folle? J'approche du but. Nous
savons maintenant. Et ma famille sait qui je suis. Je sais que cette histoire a laisse des
traces. Je me souviens de cet amour simple que nous vivions il y a quelque temps. Mais
je sais aussi que je ne peux pas te garantir que nous le retrouverons. Je t'aime, mais il
me fallait faire ce chemin et je suis presque à la fin. Je vois l'epuisement, la tristesse, le
doute. Je n'ai pas de mots pour te remercier d'avoir ete avec moi jusque-là. Mais tu
merites autre chose que ça.”
“- Ce sont vraiment tes derniers mots? Ceux que tu voudrais me dire si cet avion se
crashait à cet instant?” lui dis-je en colere et deçue.
Il me regarda en face intensement et une douleur sourde apparut dans le bas de mon
dos à ce moment precis. Je me retrouvais recroquevillee de douleur sans realiser ce qui
m'arrivait.
“- Y a-t-il un docteur dans l'avion?” entendis-je au loin en pensant : d'avoir tellement dit
que notre avion aller s'ecraser , voilà que je vais y mourir.
“- S’en suivirent un atterrissage d’urgence et quelques errances medicales avant
que nous comprenions que tu venais au monde. Sans prevenir. Sans t’être annonce.
Notre premier enfant. Et ne sur le continent de ses ancêtres. Deux histoires qui se
rencontraient.”

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