Trophée des plumes 2022 - IL ME FALLAIT PARTIR
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Trophée des plumes 2022 - IL ME FALLAIT PARTIR , livre ebook

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Description

Il me fallait partir Malgré les larmesde sang de la mère poule, elle ne peut parvenir à soustraire son enfant des grifes d’un épervier qui a déjà pris son envol. Nous tentâmes pourtant désespérément de poursuivre la voiture. Hélas ! La terre venait de tomber sur nos têtes. Nous avions les yeux grands ouverts pourtant la cécité nous envahissait. Nous ne savions où poser les pieds ; quelles postures adopter. Nos deux têtes sans cheveux, sandales aux pieds, habits longs aux cous étirés, baluchons en mains…tous les regards du monde entier étaient rivés sur nous. Nous nous arrêtâmes au même endroit sans opérer le moindre mouvement pendant plusieurs heures. L’endroit se vidait peu à peu. Les gens marchaient avec empressement. Les voitures se raréiaient. Soudain, sans qu’aucun signe apparent du ciel ne nous prévienne, une forte pluie se mit à s’abattre. Le lendemain matin, le soleil avait tout de même pu se pointer à l’heure. Il démarra en force comme s’il avait un retard à rattraper. Notre abri de fortune était adossé à un marché autour duquel gravitaient plusieurs gares routières. C’était un vaste marché. A cette heure déjà, il grouillait de monde. Irehima et moi formions une paire. Le destin nous avait liés. Mes pas se posaient à la place des siens et vice versa. Le soir tombé, nous nous surprenions à partager nos dortoirs avec d’autres garçons et illes. Etaient-ils dans la même situation que nous ? Avaient-ils eux aussi été parachutés dans cet univers ?

Informations

Publié par
Date de parution 01 juin 2022
Nombre de lectures 12
Langue Français

Extrait

Il me fallait partir
Malgré les larmes de sang de la mère poule, elle ne peut parvenir à soustraire son enfant des griFes d’un épervier qui a déjà pris son envol. Nous tentâmes pourtant désespérément de poursuivre la voiture. Hélas !
La terre venait de tomber sur nos têtes. Nous avions les yeux grands ouverts pourtant la cécité nous envahissait. Nous ne savions où poser les pieds ; quelles postures adopter. Nos deux têtes sans cheveux, sandales aux pieds, habits longs aux cous étirés, baluchons en mains…tous les regards du monde entier étaient rivés sur nous.
Nous nous arrêtâmes au même endroit sans opérer le moindre mouvement pendant plusieurs heures. L’endroit se vidait peu à peu. Les gens marchaient avec empressement. Les voitures se raréîaient. Soudain, sans qu’aucun signe apparent du ciel ne nous prévienne, une forte pluie se mit à s’abattre.
Le lendemain matin, le soleil avait tout de même pu se pointer à l’heure. Il démarra en force comme s’il avait un retard à rattraper. Notre abri de fortune était adossé à un marché autour duquel gravitaient plusieurs gares routières. C’était un vaste marché. A cette heure déjà, il grouillait de monde.
Irehima et moi formions une paire. Le destin nous avait liés. Mes pas se posaient à la place des siens et vice versa. Le soir tombé, nous nous surprenions à partager nos dortoirs avec d’autres garçons et îlles. Etaient-ils dans la même situation que nous ? Avaient-ils eux aussi été parachutés dans cet univers ?
Au troisième jour, il ne nous restait plus rien dans nos poches. Nous n’avions aucune autre option que de travailler pour survivre. Au cours de nos ballades, nous avions identiîé plusieurs types de boulots. Nous nous dirigeâmes à la décharge d’oignon dans un premier temps. Là bas, travaillaient plusieurs de nos compatriotes. Des camions en provenance des pays de l’hinterland, chargés d’oignon se succédaient. Dans un mouvement à la chaïne, bien coordonnés, ils déchargeaient ces camions l’un après l’autre. A leur suite, d’autres se chargeaient d’acheminer la marchandise vers les diFérents points de vente.
Nous avons été déroutés parce que nos conditions physiques apparentes ne reétaient pas la capacité d’eForts à consentir pour un tel travail. Le responsable n'avait pas tord. Irehima et moi étions de maigrelets bonshommes frêles dont les épaules venaient d’être surchargées par les angoisses que nous vivions. Nous partïmes de là désabusés. Un autre type de travail s’imposait à nous. Mais nous ignorions qu'il allait séparer nos chemins. Nous avons décidé de faire de l’escorte. Le travail consistait à prendre le sac et suivre un usager qui se rend au marché pour faire des provisions. A la în de la course, il nous rétribue selon son bon vouloir. Ce travail ne payait pas assez bien mais il était à même de nous assurer la pitance.
Le lendemain, nous nous réveillâmes avec beaucoup d’enthousiasme. Chacun était allé de son côté. La moisson fut bonne de part et d’autre. Le troisième soir, j’attendis Irehima en vain. Irehima ne venait pas. Le temps passait et irehima ne venait toujours pas. Le jour s’était couché déînitivement. La nuit avait pris le relais et irehima brillait par son absence. Que lui était il arrivé ?
Le jour d’après fut pour moi un jour de deuil. Je me laissai tout de même dicilement convaincre qu’Irehima était réellement parti. J’entrepris de fouiller le
marché dans ses coins et recoins. Je scannais tous les visages, aFrontant tout type de regards. A chaque regroupement d’hommes je nourrissais l’espoir de le croiser.
Mes pas emmenèrent vers un autre endroit du marché que je n’avais pas encore visité. J’étais perdu. J’ignorais le chemin du retour. Je passai le reste de la journée à faire une autre prospection et fus attiré par un autre type de boulot. Je me trouvais à la périphérie du marché. Plusieurs jeunes dont certains de mon âge, servaient de relais. Ils disposaient de brouettes et transportaient diverses marchandises vers les quartiers qui avoisinaient le marché. Ce travail me parut moins contraignant que celui de charger des fardeaux sur la tête.
Le lendemain matin, au moment où le soleil entamait péniblement son périple journalier, je me pointai au parking des brouettes. Il y en avait plus d’une centaine. Haman, un de mes compatriotes avait eu le nez creux d’en faire son business. Il ne regrettait pas son choix. La location journalière d’une brouette s’élevait à mille francs CA. Je m’en procurai une et me plaçai devant une ruelle beaucoup fréquentée. Mes concurrents avaient une longueur d’avance sur moi. En plus de bien maïtrisé les circuits, ils étaient déjà familiers à la plupart des clients. Je parvins tout de même à avoir quelques clients. La moisson de la journée était maigre mais je me félicitai d’avoir pu obtenir la partie qui revenait à Haman.
Dans le monde du marché et gares, le langage de la raison est parfois inusité. Celui de la violence lui vole la vedette. J’ai été ahuri de constater qu’à plusieurs endroits, des jeunes vêtus du mentaux de la violence se prévalaient d’être des dépositaires des voies et avaient érigé des corridors pour lesquels ils réclamaient leurs quotte part à chaque passant. Si j'ai pu me résigner face aux dictas de ces imposteurs, je ne pu me plier à la demande inopportune de Rougeot, un jeune homme aux cheveux roux, aux petits yeux et torse bombé qui se plaisait à se faire appeler «chef de terre». Il exigeait à chaque travailleur, la somme de cinq cents francs CA. Il disposait d’un bataillon et n’hésitait pas à en découdre avec quiconque s’oppose à ses désidératas. Je m’opposai vertement à Chello, son bras droit commis à la collecte inopportune. Cette attitude obligea Ousmane, un enfant de mon âge, qui je ne savais par quel moyen avait su que je parlais la même langue que lui à m’approcher.
- Si tu veux survivre dans ce monde, tu gagnerais à refermer tes paupières et à te sectionner la langue.
-
Non mais…
- Ton seul mot à dire c’est de faire ce qui t’es demandé…Si l’écho de ton refus d’obtempérer échoit dans les oreilles de Rougeot, ce qui tu risques serait dommageable pour toi. C’est un homme sans cœur, capable du pire.
Ousmane me rappelait Irehima. Mais sa présence ne me rassurait guère. Peut être par ce que je l'ai déjà surpris entrain de fumer une herbe douteuse ! Il me disait sans cesse que pour s’en sortir dans notre type de métier, il nous fallait de «l’inspiration». «Chaque matin, un vrai garçon doit prendre sa «dose ». Me disais-t-il à tout va. Un matin, après avoir partagé une tasse de café avec lui, je passai une horrible journée. J’eus le tournis tout au long de la journée. J’ignorais ce qui s’était passé. Ce qui m’a poussé à plus me méîer de lui, c’est sa subite admiration pour Rougeot. Le met qu’il avait vomi lors d’un repas antérieur, il en
raFolait subitement et le trouvait appétissant. En eFet, Rougeo était passé maitre dans un traîc de stupéîants. Il utilisait parfois à leur insu, des brouettiers pour acheminer sa marchandise. Quand cela se passait sans encombre, ils les remerciaient en faisant mine d’être un homme fréquentable et généreux. Ousmane venait sans le savoir d’être utilisé pour une activité illégale…
Il est plus dicile de sortir d’un cercle vicieux que d’y entrer. S’il est possible de reconnaïtre le pied par lequel on y entre, il n’est point aisé de reconnaïtre celui par lequel on en sort le cas échéant. A défaut, on s’y éternise sans voir le temps passer. aut mieux se laisser aller au gré du vent sans savoir où il nous mène que de rester dans un endroit qu’on se sait hostile.
L’univers de la gare ne m’était pas favorable. Il me fallait partir. Il me fallait fuir l’hypothétique pour l’inconnu. Je îs mes adieux à Ousmane, et pris le chemin d’un ailleurs que j’espérais mieux. Ousmane était déçu de ma décision. Mais me faillait partir. Je me mis à marcher.
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