Trophée des plumes 2022 - (J ai perdu le nord)
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Trophée des plumes 2022 - (J'ai perdu le nord) , livre ebook

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Description

Mère, j'ai perdu le nord...

Informations

Publié par
Date de parution 07 juin 2022
Nombre de lectures 8
Langue Français

Extrait

Mère,
J’ai perdu le nord
C’est telle une enfant prodigue que je me dirige vers toi par cette note. Veuille prêter oreilles aux sanglots de mes larmes qui se mélangent à l’encre de mes écrits. Si je savais, oh putain ! J’ai pas pu échapper à cette célèbre formule et son cortège de honte, de déshonneur et de regrets. Comme tu me le disais jadis, c’est quand les répercussions de nos actes irréLéchis commencent par jaillir que l’on pense à s’en repentir. À tes pieds chutent alors mes mots aux béquilles défaillantes. Agenouillés, ils quémandent le pardon d’une mère et les conseils d’une amie.
Mère, te souviens-tu encore de ces cours que je séchais pour aller vendre de la glace pour la voisine ? De ces jours où j’allais chercher du coton dans le champ de son mari ? Cette année où je me suis retrouvée obligée de travailler pour me payer ma contribution scolaire et m’oFrir le luxe de pouvoir passer mon examen du baccalauréat auquel je tenais beaucoup, parceque papa avait préféré rejoindre ses petites copines que de s’occuper de nous ?
Notre responsable de classe — un jeune homme à la « poche remplie » — s’était rapproché de moi dans le temps puisque mes amies l’avaient mis au courant de ma situation. ’air compatissant, il avait proposé m’aider à condition que je lui promette qu’on grimperait ensemble de temps en temps les échelles des ciels voluptueux. aire donc de moi l’objet d’assouvissement de ses désirs libidineux. Une occasion pour lui d’avoir ce pourquoi il me harcelait depuis fort longtemps sans succès. J’étais vraiment déchue à l’idée qu’il veuille que je me vende. Mes copines désapprouvaient mon projet de lui servir une réponse négative et m’avaient même craché à la Igure que je manquais de sérieux. Que si j’acceptais ses avances pour proIter de sa fortune, je ne devrais en aucun cas être étonnée qu’il opte à son tour de vouloir de moi ce que j'avais de précieux à oFrir. Et que je ne pouvais ne pas faire autrement car, mon avenir dépendait en partie de l’aide qu’il me porterait.
C’était bien diîcile de tenir tête aux arguments de ces diablesses quand je regardais ma situation. J’ai commencé dès lors à penser que si je cédais, je me sentirais mieux Inancièrement et pourrais subvenir à mes besoins sans souFrir sous le chaud soleil à chercher de l’argent. Je savais bien que les motsdignité,virginité etIdélité existaient et rimaient d’ailleurs bien entre eux. Mais puisque monbaccalauréatavec le rimait FCFA, je pensais ne pas avoir le choix. Alors, j’ai accepté par désir de sécurité Inancière. C’est ainsi qu’un soir, dix-huit ans d’abstinence se sont évaporés en sueurs et que ma vie d’allumeuse rémunérée a commencé par écrire la préface de son histoire. Je n’avais plus rien à attendre de l’incertaine grâce de l’octogénaire aux désirs de jeunesse ni
des reliques d’une brave mère. Ô mère, j’ai bafoué ton éducation pensant que c’était l’idéal et que j'agissais comme il le fallait, tout en me convainquant que j’avais pas d’autres choix. Alors qu’on a toujours le choix ; même face à un seul enjeu, on a le choix entre choisir et ne pas choisir.
Dernièrement, le jeune homme en question m’a contactée me demandant de le rejoindre chez lui de toute urgence. J’ai dû comprendre en faisant attention au timbre de sa voix, qu’il avait un problème sérieux dont l’exposé serait inapproprié au téléphone. Je me suis donc empressée de m’apprêter pour le rejoindre en prenant un Taxi-moto pour m’y conduire. En cours de route, on a été confrontés en un premier temps à un embouteillage qui nous a fait perdre assez de temps et en un second, à une panne à quelques mètres de la destination. J’ai dû terminer le reste du trajet à pied — à défaut d’attendre la réparation de la moto — puisque mon homme ne cessait d’appeler pour savoir si je ne venais pas.
Arrivée à l’adresse adéquate, j’ai constaté que le portail était entrouvert et le gardien n’était pas à son poste. Je me suis introduite dans la concession toute pressée de prendre rapidement un bain et de me changer. a porte d’entrée était également à peine rabattue. Quand je suis entrée, je vis une immense chute du liquide vital couler les marches de l’escalier et un cri étouFé au loin me parvenait. « Que ce passe t-il ? Pourquoi tant de sang ? Chéri, tu vas bien ? » lançai-je en l’air pour ne recevoir comme réponse, que l’écho de mes questions. Je courus vers les escaliers, montai suivant les traces du sang qui dégoulinait des marches et parvins à la porte d’où provenait le liquide vital. Pour une habituée des lieux, je me sentais étrangère face à la porte que je découvrais pour la première fois. J’entendis venant de l’intérieur, une voix faible semblable à celui de mon homme qui psalmodiait. J’étais soulagée à l’idée de le savoir en vie. Je posai avec empressement ma main sur la poignée, ouvris la porte d’un coup et j’eus en vue une eFroyable chambre sectaire remplie de fétiches. Je vis sa propre mère dressée à même le sol, la tête reposant sur un autel comme une oFrande et lui était paré d’habits fétichistes. ïl l’avait zigouillée et avait nourri son fétiche de son sang. a scène m’a fait penser instantanément au tueur en série recherché depuis quelques temps des forces de l’ordre. es journaux de la place le dénomment Suceur de sangpuisqu’il vide ses victimes de tout leur sang pour en nourrir son fétiche – machine à billets de banque. Je l’avais jamais soupçonné capable de faire du mal à quiconque jusqu’à croire qu’il pouvait tuer sa propre mère dont il me parlait au mieux. a dame était sûrement au mauvais endroit, au mauvais moment. ïl aurait fallu de peu pour que je sois à sa place.
Tant qu’il était encore tant, j’essayai spontanément de sauver ma tête et il essaya aussi de me rattraper. En m’enfuyant, je glissai dans le sang qui coulait et Is une légère chute. Je me relevai aussitôt et courus de toutes mes forces jusqu’au salon. Presque en position de m’échapper de
l’immeuble, mon amant bloqua la porte en se servant de la commande de sécurité ; j’étais alors prise au piège. Je faisais face au criminel qui portait dans sa main droite, un poignard peint de sang qu’il tenait fermement. Une petite table circulaire sur laquelle était posée un pot de Leurs nous séparait. ïl essayait incessamment de me joindre à l’autre bout de la table en agitant son couteau et j’essayais de l’éviter en restant au côté opposé par rapport à lui. ïl était fou d’une rage criminelle, avait les yeux écarquillés ; l’expression de son visage était claire : me mettre hors d’état de nuire… J’avais le cœur qui battait à cent par tierce et le corps tout tremblant — bref, je sentais la mort rôder dans les parages. Et comme tout Homme face à la mort, j’essayais de… Coup de grâce, la police arriva sur les lieux. ïls étaient accompagnés du gardien de la maison qui aurait sentit quelque-chose de suspect et était allé les alerter. Pointant leur arme sur nous, les policiers nous ont ordonnés de mettre nos mains en l’air, notiIant surtout au criminel de laisser tomber son couteau. ’un des oîciers de police cassa la vitre de la porte et ils sont entrés pour nous passer les menottes.
ïls croient maintenant que je suis sa complice puisque j’avais du sang sur le corps quand ils nous ont arrêtés. Pire, mon amant a conIrmé leur soupçon disant qu’il suîsait de contrôler la date de ses virements bancaires vers mon compte : c’était après chacun de ses crimes. J’aurais dû t’écouter pour sembler à toutes ses braves femmes qui gagnent le respect par leur labeur et non en le vendant… Je suis partie de la maison croyant vivre ma vie en toute liberté, loin de tes reproches et de tes conseils que je considérais peu. Moi qui croyais que tu voulais me priver de ma jeunesse, alors que tu voulais juste m’éviter ce jour de regrets… Et là maintenant, j'ai ma vie entre parenthèse, t’écrivant avec remords depuis les quatre murs d’une prison criminelle, condamnée à y passer un bon nombre d’années. Mère, j’ai perdu le nord… M’est-il possible de le retrouver ?
Ta Ille unique
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