Trophée des plumes 2022 -LA MUE
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Trophée des plumes 2022 -LA MUE , livre ebook

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Description

La famille Dikanda et leurs invités sont consternés. Partis à la célébration du mariage de leur fils le fringant Blaise Dikanda, ils viennent de subir une terrible humiliation. De celles qui se racontent de génération en génération. La mariée ne s’est pas présentée à la Mairie.
Un couple d’amis proche de la mariée, cherchera quant à lui, à comprendre ce qui a poussé une personne si réfléchie, à agir de façon aussi surprenante.
Par une écoute bienveillante, ils l’amèneront à faire son introspection, nous conduisant sur les chemins où sa quête de sens l'aura menée.

Informations

Publié par
Date de parution 29 mai 2022
Nombre de lectures 20
Langue Français

Extrait

« Trophée des plumes 2022 » - La Mue
Une heure que nous attendons sous le soleil, que la star du jour se pointe. Que se passe-t-il ? Où est la mariée ? Le Maire arrive sur le perron de l’hôtel de ville, et annonce qu’il ferme ses bureaux. Même si à forced’attendre, on s’en doutait un peu, l’annonce du Mairea l’effet d’une bombe. La marraine hurle. La connaissant, elle doit sans doute regretter, son argent et son temps perdu dans les préparatifs. La mère du fiancés’évanouie, et Blaise lefutur époux s’enfuit dans sa voiture, nous laissant à nos spéculations. Léonie et moi nous nous regardons et sans dire un mot, nous regagnons la voiture, directionnotre chambre d’hôtel.En chemin, je reçois un appel masqué.
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Allo Lili ! où es-tu ? tout le monde te cherche ! Tu es seul ? Non. Léonie est avec moi. Tu as fait fort ma belle ! Venez me retrouver à Chamarande. C’est à une heure de là où vous êtes. Ne le dites à personne. Ok on arrive.
Une heure plus tard, nous la retrouvons dans sa chambre d’hôtel. Elle a les yeux bouffis, et sa chambre reflète le désordre intérieur dans lequel elle doit être actuellement. Son trousseau de mariée est dispersé, comme s’ila été piétiné. Elle s’informe des évènements de la matinée, etaccepte enfin de répondre à nos questions.
Lili - Cette journée estl’une desplus belle de ma vie.
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Vraiment ? demanda Léonie, interloquée.
Vous ne le savez pas, mais, j’avais onze ans, quand ma mère m’a fait venir en France.Au pays, ma mère avait le statut de la femme du blanc. Donc, je baignais dans l’honneur et la considération qu’on lui vouait. J’imaginaisdoncdans ma tête d’enfantque les facilités financières et sociales dont on jouissait alors,se poursuivraient sinon se multiplieraient lorsqu’on rejoindrait le pays de François son mari.
Tout ne fut que désillusions. De la villa à Bastos, je tombais dans desbarres d’immeubles à Créteil. Mes frères, les métochess’abrutissaient aux jeux vidéo et vivaient dans une réalité virtuelle d’où ils ne sortaient que poussés par les nécessités de la vie. Vivre dans un HLM miteux, et voir mes parents, ces anciens riches,s’esquinterdans des boulots mal payés, avait considérablement diminué mon estime pour eux.Finie l’opulence, ici on comptait les miches de pain, et la longueur du papier toilette. Je regrettais notre ancienne vie.
Je parlais avec un accent, et mes camarades s’en moquaient. Alors,pour m’intégrer, j’optais pour le mimétisme. Copiant les dernières modes, occidentalisant mon accent et, m’inventant une vie de privilégiée.Le mythe tomba le jour où, une de mes camarades s’incrustachez nous. Elle découvrit ma réelle condition de vie, ets’empressa dela raconter à toute la classe. Au collège, la moquerie vira au harcèlement, et je perdis l’envie d’aller à l’école.
Ma féminité s’était précocement développée et j’attirais les regards, dontcelui de mon beau-père. La main baladeuse et les allusions salaces, il trainait de plus en plus à la maison, pour mon plus grand malheur. A la même période,j’ai rencontréBilal, un gars de la cité. Il devint, mon ami, et mon amant.Je l’aidais dans ses trafics.Il savait ma cupidité, et mon gout du luxe, et me tenait en
laisse avec des cadeaux, des flatteries, etde l’argent. Plus tard, il me demandad’étendre mes faveurs sexuelles à un de ses amis, pour lui rendre service. Je n’aurais pas dû. De «une seule fois ma chérie s’il te plaît», j’en vint à coucher à sa demande, plusieurs fois par jour avec des hommes différents. Le jour où l’un de ses « amis » me viola, je me mis à réfléchir à ma situation. Qu’est-ce que je voulais faire de ma vie ?Comment j’en étais arrivée là?
Dans le parcours d’immigration, on parlebeaucoup des problèmes rencontrés par les adultes. Et pourtant, les enfants qui immigrent sans être autant préparés que leurs parents, peuvent vivre des traumatismes qu’ils cachent derrière leur émerveillement. Rien n’est anodin dans la vie d’un enfant. Eux aussi ressentent le déracinement, la peur du changement, et la crainte de l’autre. Mais à cause ou grâce à l’école, ils doivent faire fi de leurs inquiétudes,pour s’intégrer rapidement. Or, l’apprentissage de ces nouveaux codes de vie, se fait souvent dans la douleuret l’incompréhension. Au gré des moqueries et de la méchanceté de leurs petits camarades. Peu de parents se soucient de cet aspect de l’immigration. Eux qui la conçoivent comme une chance, un cadeau qu’ils offrent à leur famille.S’ils savaient ! Au-delà de l’opportunité, c’est aussi un drame qui se joue pour l’enfant.
Un après-midi,je décidai de pousser la porte d’une association. Ensuite, je pris la décision de quitter ma famille, mon quartier, de couper les ponts avec mon passé et prendre un nouveau départ dans la vie. A seize ans, je suis partie vivre en foyer. Loin de mon ancien monde, j’airepris mes études. Petit à petit, je me construisais une petite vie tranquille, jusqu’à la rencontre avec Blaise. J’avais trouvé une nouvelle famille dans un centre de réveil évangéliste. Un dimanche à la fin du culte, Papa Pastom’informa qu’il avait une révélation à me faire. Le Saint-Esprit lui avait annoncé que le frère Blaise Bikanda était mon mari. Convaincue que cette union avait le sceau de Dieu, je ne menais pas plus loin la réflexion. Avec du recul, je dois avouer que je me suis engagée dans cette relation avec de mauvais mobiles. Blaise est beau, élégant et il a fait de longues études. Je m’engageais dans cettehistoire, avec le poids de mes complexes, et l’avidité. Je lui vouais une admiration sans bornes.
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Léonie renchérit, Ah ça tu peux le dire ! Ce n’était pas de l’admiration, maisde l’adoration.
Lili esquissa un pâle sourire et poursuivit. Courtois et attentionné en public, il m’humiliait dans l’intimité.Il ne me frappait pas, mais, les horreurs qui sortaient de sa bouche ! Avec lui je me sentais comme une lopette. Le pire c’est que je pensais mériter tout ça. Personne, pas même nos coreligionnaires n’imaginent ce que j’ai enduré.Il a fait le vide autour de moi. Il est dépensier. Il ment comme il respire. C’est un as de la manipulation. Avec lui, c’est toujours la fautes des autres, jamais la sienne. Quelques jours avant le mariage, Monsieurn’avait toujours pas donné sa participation financière. Les discussions à ce sujet viraient systématiquement à l’orage. Alors, hier matinaprès une énième dispute, j’ai eu besoin d’aller me confier à ma marraine. Je savais qu’à cette heure, elle était à son bureau.Je n’ai pas eu besoin de sonner parce que la porte était ouverte. C’est comme ça que j’ai découvert le pot aux roses. Blaise Bikanda mon soit disant fiancé, culbutant Mme Nkeng Henriette, dans son bureau, la veille de notre mariage.
Un silence se fit letemps de digérer l’information
Je suis ressortie sur la pointe des pieds, tellement j’étais choquée. Je suis rentrée chez moi en larmes. Mais à un moment, il a bien fallu faire mon introspection. Pourquoi c’est toujours moi la proie?
La découverte de leur trahison m’a donné la force de surmonter ma lâcheté viscérale, et me regarder telle que je suis réellement. Voir mes propres travers, et aussi mes forces. Mon problème en soi, ce
n’est pas les autres, mais mes fragilités. Ellesremontent très loin dans mon passé, le manque de confiance en soi, le besoin de sécurité, et laquête constante d’un amour idéalisé.J’utilises les autres comme une béquille affective. Je ne vois pas les gens tels qu’ils sont, mais tels que je voudrais qu’ils soient. J’aibesoin de gagner en force morale, en maturité. Trouver mon harmonie va passer peut-être par une thérapie, ou me libérer de certains poids affectifs, ou me séparer de certaines personnes.C’est décidé, mon avenir je l’envisage avec toutes les couleurs de l’arc en ciel pour refléter la sérénité qui m’ouvrira tous les possibles du monde.Je sais que je vais devoir prendre des décisions difficiles. D’ailleurs,si je commençais par une franche discussion avec Monsieur Blaise Dikanda
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