Trophée des plumes 2022 - le bout du tunnel

Athéna Mondah

Description

Un récit décrivant la marche ardue vers la paix intérieure .

Informations

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• Date de parution: 30 mai 2022
• Nombre de lectures: 182
• Langue: Français

Extrait

ATHENA MONDAH

LE BOUT DU TUNNEL Ma tête posée sur les genoux de ma mère, je sens ses larmes qui tombent dans mes cheveux, je les entends, ses pleurs, malgréles effoƌts titaŶesƋues Ƌu’elle fait pouƌ Ŷe pas s’effoŶdƌeƌ. Je suis la ƌaisoŶ d’uŶe telle peiŶe, je suis Đelle Ƌui a fait de cette femme si forte une loque tout comme moi. Toutes deux sur le ĐaŶapĠ, je sais Ƌu’il suffiƌait juste Ƌue je lui dise «maman,j’ai faiŵ. Tu peudž ŵe faiƌe à ŵaŶgeƌ s’il te plait? » Pour mettre fin à cet engrenage. Mais je ne le ferais pas, toutsiŵpleŵeŶt paƌĐe Ƌue sa petite ƌose Ŷ’est plus. Sa fille ĐhĠƌie Ƌu’elle a ŶoŵŵĠe ƌose daŶs l’espoiƌ Ƌu’elle soit aussi ďelle et aimée que Đette fleuƌ faŶe à vue d’œil.La dernière fois oùj’ai ƌi siŶĐğƌeŵeŶt, Đ’Ġtait duƌaŶtcette soirée de décembre dans la cuisine de son restaurant à tester les nouvelles recettes de gâteauxƋu’il souhaitait ajouteƌ à sa Đaƌte. - Papa, je crois que tu devrais ajouter plus de cannelle sur celui-ci Après avoir porté le morceau de gâteau à sa bouche, il me sourit et me tapote la tête - Je crois bien que la relève est assurée avec toi dans les fourneaux ma rose

Je lui rends son sourire quand tout à coup des hommes masqués pénètrent dans notre bulle de bonheur armés de couteaux. Instinctivement, je me cache dans le dos de mon hérospeŶdaŶt Ƌu’il doŶŶe tout Đe Ƌue ĐoŶtieŶt la Đaisse enregistreuse aux malfrats. Mais ils trouvaient que ceŶ’Ġtaitpas assez, ils en voulaient plus, ils voulaient sa rose. EnessaLJaŶt de ŵe pƌotĠgeƌ, Đ’estlui qui a peƌdu la vie. Les siƌğŶes de la poliĐe et de l’aŵďulaŶĐecouvraient à peine les cris de mon âme meurtrie. Je venais de perdre ma raison de vivre, je venais de le voir être poignardé à mort.

Apƌğs Đe dƌaŵe, je Ŷ’ai pas dit uŶ ŵot peŶdaŶt deudž ŵois, plus personne ne ŵ’a vu pleuƌeƌou ŵaŶgeƌ. La siŵple vue d’uŶ plat ŵe doŶŶe la ŶausĠe. J’Ġvite la cuisine comme on évite la peste. Moi qui faisais partie de ceux qui vivent pour manger, je ne faisais désormais même plus partie de ceux qui mangent pour vivre tout simplement parce que je ne le veux plus, je ne veux plus respirer. Et personne ne pourra m’aider, je le sais tout bonnement parce que je

Ŷ’eŶ veudž pas de leuƌ aide, je veudž juste le voiƌ, le seŶtiƌ, l’eŶteŶdƌe. Mais ils ne le comprennent pas, ce psychologue de banlieue encore moins. Ce matin, je devais encore supporter ce vieux plouc qui se prend pour un psychanalyste, il pense vraiment savoir ce que je peux ressentir. - Alors, dites-moi rose, vous croyez queĐ’estde votre faute si votre père Ŷ’est plus ? J’avais envie de lui hurler à la face, bien sûrƋue Đ’est de ŵa faute. C’est ŵoi Ƌui ai iŶsistĠ pouƌ Ƌu’oŶ ƌeste si taƌd eŶ ĐuisiŶe, Đ’estŵoi Ƌui ai voulu l’aideƌ aveĐ ses recettes. Si je Ŷ’avais pas ĠtĠlà, il Ŷ’auƌait eu peƌsoŶŶe à dĠfeŶdƌe, les voleuƌs auƌaieŶt pƌis l’aƌgeŶt etseraientpaƌtis. Ils ŵ’auƌaieŶt laissĠ ŵoŶ père. Mais Đoŵŵe d’haďitude, jelui ai sorti mon sourireŶaƌƋuois et j’ai ĐoŶtiŶuĠ à regarder par la fenêtreeŶ igŶoƌaŶt de ďoŶ Đœuƌ toute la suite de ses interrogations. Le soir, eŶ ƌeŶtƌaŶt de ŵa sĠaŶĐe Đhez le psLJ, il ŵ’atteŶdait devaŶt le seuil de Ŷotƌe poƌte aveĐ uŶ ďouƋuet de fleuƌs à la ŵaiŶ. Je ŵ’appƌoĐhais leŶteŵeŶt de lui ƋuaŶd il ŵ’apeƌçût et aĐĐouƌu pour me serrer dans ses bras et déposé un tendre baiser sur mes lèvres. - Comment va la plus belle des roses ? me demanda Jake - Elle va très bien, et comment va le plus beau des petits-amis ? - Il va très bien aussi, ça te dit un restaurant ? Comme à chaque fois quand il me pose cette question, mon regard devient ďlaŶĐ. Je sais Đe Ƌu’il essaie de faiƌe. Je sais Ƌu’il veut ďieŶ faiƌe ŵais je Ŷ’LJ aƌƌiveƌais pas. Je Ŷe pouƌƌais pas… -Rose, je t’eŶ supplie. Il faut Ƌue tu essaies, il faut Ƌue tu ŵaŶges. Les yeux remplis de larmes, il prit ma main et souleva la manche de mon sweet- shirt. - Regarde par toi-ŵġŵe, tu Ŷ’achaque foiss plus que la peau sur les os. A Ƌue ŵoŶ tĠlĠphoŶe soŶŶe. J’ai peuƌ, j’ai peuƌ Ƌue Đe soit ta ŵğƌe Ƌui ŵ’appelle pouƌ ŵ’annoncerƋue l’amour de ma vie est morte à 17 ans. - Arrête Jake, je t’eŶ pƌiearrête Et là, je me suis effondrée en larmes sur le sol. - Je suis désolée ai-je ĐƌiĠ ŵais je Ŷ’LJ aƌƌive pas. Il ŵe ŵaŶƋue telleŵeŶt Jake.Đ’est Đoŵŵe si j’avais des aiguilles daŶs le Đœuƌ etques’ilarrêtait

de battre. Tu vois,j’auƌaisplus mal. Toutes les fois Ƌue je ŵ’évanouis par manque de nourriture. Tu sais, je le vois, je le vois Ƌui ŵ’atteŶds au ďout d’uŶ tuŶŶel. Et à ĐhaƋue fois, je ŵeréveille dans un hôpitalavaŶt d’avoir pu saisiƌ sa ŵaiŶ. C’est de votƌe faute.Vousŵ’empêchez de retrouver mon père. Je me redressai alors juste pour le pousser de mes bras de fillette de 10 ans -C’est de votƌe faute! hurlais-je A tel point que ma mèreŵ’eŶteŶditet sortit de la maison pour assister à cette scèneloiŶ d’être plaisante. Elle demanda alors à Jake de partir et me conduisit au salon. Nous voici donc toutes les deux sur ce canapé, elle, sanglotantà l’extérieur et moi mourantà petit feu à l’intérieur. Elle finit par briser le silence. -Je t’eŶ pƌie, ƌose dit-elle en me caressant les cheveux. Laisse-moit’aideƌ, laisse-moit’aideƌ à ƌetƌouveƌ uŶéquilibre, une place dans cette vie. Laisse-moit’aiŵeƌ.

Avant que je ne puisse dire un seul mot, elle se leva, se dirigea vers la cuisine. Elle revint à ma grande stupeur avec un biberon rempli de lait. Dans mon for intérieur, je décidai de la laisser me nourrir.

Recroquevillée dans les bras de ma mère, la tétine dans la bouche, mes larmes perlaient le long de mes joues sans que je ne puisse me retenir. A quel moment j’eŶétais arrivé à détester la vie à ce point ? Àouďlieƌ Ƌu’il LJ’avait d’autƌes personnes que j’aiŵais Ƌui, ellesétaienteŶĐoƌe vivaŶtes. Et l’uŶe d’entre elles me montre en ce moment mêmeƋu’il Ŷ’a pas de liŵites à l’aŵouƌ d’uŶe ŵğƌe.

Il a vraiment fallu que je touche le fond pour avoir envie de remonter la pente, je suis bien consciente que ce ne sera pas aiséŵais je vais ŵ’aĐĐƌoĐheƌ pouƌ elle, pour Jake mais surtout pour moi.Aujouƌd’hui c’est du lait, demain ça sera de la purée puis je dévorerais à nouveaux des steaks. Je vais retrouver cet équilibre, cette paix intérieure. Je vais vivre pardi!