Trophée des plumes 2022 - Le calcul
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Trophée des plumes 2022 - Le calcul , livre ebook

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Description

Au Sénégal, je crus un jour que mon compte était bon !... Un peu comme l'interminable mélopée Baye Fall des jeudis soir à Cap Skirring, je me mis à réciter tous les villages diolas des environs : Oussouye, Bouyouye, Ouïlle ouïlle ouïlle (non, ce village diola, du moins à ma connaissance, n'existe évidemment nulle part ailleurs que dans mon imagination qui interprète telle quelle l'intonation que je perçois quand un Diola me parle en diola !) Une douleur fulgurante venait de me transpercer le ventre au point de pousser l'estomac à faire remonter par l'oesophage un cocktail au goût douteux : déjeuner de midi + bile + acide gastrique. Quel poison toxique avais-je donc avalé pour être mal à ce point, au premier jour de janvier 2019 et qu’il faisait si doux dehors ? Appelé à la rescousse, le docteur Karim passa me voir en ce beau jour de Nouvel An (pas sûr que votre médecin européen assure pareil service, ni un jour de Nouvel An, ni quand la température affiche 30° et qu'il joue au golf). Il diagnostiqua une “colique néphrétique”. Si, comme moi avant ça, vous n'avez jamais eu de coliques néphrétiques, profitez bien de la chance d'être en bonne santé, car le jour où ça vous arrive, ouïlle ouïlle ouïlle, comme on dit en diola ! Les crises provoquent des contractions très douloureuses, les voies urinaires étant bloquées par un mauvais calcul de rein. En définitive, mon compte était bon parce que le calcul était mauvais !...

Informations

Publié par
Date de parution 31 mai 2022
Nombre de lectures 11
Langue Français

Extrait

Au Sénégal, je crus un jour que mon compte était bon !... Un peu comme l'interminable mélopée Baye Fall des jeudis soir à Cap Skirring, je me mis à réciter tous les villages diolas des environs : Oussouye, Bouyouye, Ouïlle ouïlle ouïlle (non, ce village diola, du moins à ma connaissance, n'existe évidemment nulle part ailleurs que dans mon imagination qui interprète telle quelle l'intonation que je perçois quand un Diola me parle en diola !) Une douleur fulgurante venait de me transpercer le ventre au point de pousser l'estomac à faire remonter par l'oesophage un cocktail au goût douteux : déjeuner de midi + bile + acide gastrique. Quel poison toxique avaisje donc avalé pour être mal à ce point, au premier jour de janvier 2019 et qu’il faisait si doux dehors ? Appelé à la rescousse, le docteur Karim passa me voir en ce beau jour de Nouvel An (pas sûr que votre médecin européen assure pareil service, ni un jour de Nouvel An, ni quand la température affiche 30° et qu'il joue au golf). Il diagnostiqua une colique néphrétique. Si, comme moi avant ça, vous n'avez jamais eu de coliques néphrétiques, profitez bien de la chance d'être en bonne santé, car le jour où ça vous arrive, ouïlle ouïlle ouïlle, comme on dit en diola ! Les crises provoquent des contractions très douloureuses, les voies urinaires étant bloquées par un mauvais calcul de rein. En définitive, mon compte était bon parce que le calcul était mauvais !... Sur les conseils du médecin, je pris donc rendezvous avec un spécialiste en urologie à l'hôpital régional de Ziguinchor. C’est un hôpital d'aspect vétuste, bien loin de l'architecture neuve et flamboyante de l'hôpital de la Paix, situé à quelques kilomètres de là. Et contrairement aussi à l'hôpital de la Paix, ça grouille de monde à l'hôpital régional ! Les malades se faisant sans doute soigner en plus grand nombre à cet endroit parce que ça doit coûter moins cher.
Il y a plusieurs bâtiments répartis un peu n'importe comment sur une grande surface au sol. D'abord, ma femme et moi ne trouvons pas de service d'accueil à l'entrée. Seuls quelques gardiens règlent la circulation. J'entre donc au hasard dans le premier bâtiment Radiologie et fais le pied de grue comme tous les autres devant le bureau d'une secrétaire. La foule se presse et pose des questions. La secrétaire répond :  Asseyezvous là et patientez. Quand vient mon tour, elle m'indique où se trouve le bâtiment Urologie. Il y a encore plus de monde. Nous nous adressons au planton en uniforme militaire de service pour lui expliquer avoir rendezvous à 11h avec l'urologue. Il répond :  Asseyezvous là et patientez. Comme il y a plus de 50 personnes assises, patientes et en attente, je sors mon téléphone et appelle l'urologue pour lui confirmer que je suis bien arrivé à l'heure qu'il avait convenu. L'urologue me fait passer dans son bureau et me conseille de passer une échographie. Il appelle le service du bâtiment Echographie qui lui répond avoir trop de demandes et qu'il est impossible de faire passer quelqu'un d'autre aujourd'hui. Ne s'avouant pas vaincu, il contacte le camp militaire situé à quelques kilomètres, et là, par contre, le service est disponible (j'en conclus que le service militaire est une bonne option). Arrivés à bon port, on nous dit d'abord : asseyezvous là et patientez avant de me suggérer ensuite d'aller (en attendant) payer à la caisse de la caserne. Ce dont je m'acquitte. Tiens, le tarif pour les étrangers est 150% plus cher ?! Revenant à mon écho... revenant à mon écho (... et oui, il y en a !), après avoir bu les 15 verres d'eau nécessaires au remplissage d'une vessie vide de la taille d'une lanterne, l'appareil révèle, comme le bain à Archimède, la pomme à Newton ou la station Mir à Paco Rabane, où se situe le calcul.
La doctoresse me dit que les résultats vont suivre.  Asseyezvous là et patientez. J'avoue qu'il était assez difficile de rester assis à patienter car il a bien fallu évacuer les 15 verres d'eau en faisant une bonne dizaine d'allersretours aux toilettes. Deux heures après, nous retournons voir l'urologue qui, après examen de l'échographie, me recommande de prendre rendezvous pour une analyse de sang et pour un scanner. Tout simple, à priori ! Mais la prise de sang, c'est pour le lendemain et quelques jours plus tard pour le scanner, soit deux journées de travail à nouveau perdues et 240 km supplémentaires en taxi. Le jour suivant, je retourne donc à l'hôpital régional de Ziguinchor pour la prise de sang... Je me dépêche pour arriver à 8h du matin. J'entre dans le bâtiment Analyse et fait le pied de grue comme tous les autres devant la porte du service. Après avoir examiné la demande de l'urologue, on me dit d'aller payer l'examen à la caisse puis de revenir avec la preuve de paiement. Après avoir cherché dans plusieurs directions, je me retrouve un peu par hasard devant la caisse, à l'entrée de l'hôpital. Un bon point : seules trois personnes font la file. Quand vient mon tour, le caissier me dit :  Avant de payer, vous devez d'abord aller à la facturation à côté... Je regarde sur le côté et découvre une foule de gens qui, telle une marée noire aussi épaisse que la soupe populaire, est amassée devant le guichet Facturation. Il me faut donc une bonne heure pour payer la prise de sang qu'on ne m'a pas encore faite (au tarif pour les étrangers... donc plus cher !) Le ticket de paiement en poche, je me représente devant la porte du service Analyse.  Asseyezvous là et patientez. Après une heure de patience, on me fait plusieurs essais de piqûres (c'est pas de veine) et on me dit que les résultats vont suivre.  Asseyezvous là et patientez. Je demande si on ne peux pas
transmettre ces résultats directement à l'urologue qui les avait demandés pour pouvoir faire le scanner. On me répond : Pour le scanner, ils n'ont besoin que de connaître le taux de créatinine. On peut vous dire cela rapidement...  Asseyezvous là et patientez. Deux heures plus tard, je repars avec le résultat griffonné sur un bout de papier. Il est deux heures de l'aprèsmidi et je suis toujours à jeun. Le lundi suivant, je retourne pour le scanner. Rendezvous était pris à 8 h à Ziguinchor. Je suis en retard, mais puisqu'on doit quand même attendre, je m'en fous ! J'entre dans le bâtiment Scanner et refais le pied de grue comme tous les autres devant une nouvelle porte du service. Après avoir examiné la demande de l'urologue, on me dit de sortir de l'hôpital pour acheter à la pharmacie les produits d'injection nécessaires pour faire un scanner, puis de payer l'examen à la caisse et de revenir avec la preuve de paiement. Oui, oui, je sais, je sais !... Les sous d'abord, les soins ensuite !... Je connais le refrain : sous sous ou tagada soin soin ! Question : mais comment font ceux qui n'ont pas de sous ?... Et bien, je crois qu'ils ont recours à la naturopathie : ils finissent par manger les pissenlits par la racine ! Heureusement pour moi, quelqu'un note le prix sur la demande de l'urologue (au tarif étrangers, bien sûr !). Du coup, j'explique au caissier qu'on m'avait dit de venir directement à la caisse payer le montant indiqué, sans passer par la facturation. Cette inspiration m'épargne une heure de cohue et de bousculade. Le ticket de paiement en poche, je me représente devant la porte du service Scanner mais celleci est maintenant... fermée. D'autres personnes sont assises et attendent. La porte reste fermée, fermée, fermée. Une jeune femme un peu forte commence à s'impatienter :  Ils ont donné rendezvous à tout le monde à 8h... et à 10h, les portes sont toujours closes. C'est du n'importe quoi !
Finalement, la préposée au scanner ouvre la porte et fait entrer une dame âgée qui ne tient plus debout à force d'être restée assise.  Les autres, asseyezvous et patientez. Un docteur arrive avec deux gars qui passent avant les autres sous le regard furax de la jeune femme un peu forte. Lorsque le docteur ressort, elle lui dit ses quatre vérités en wolof. De ce que j'en ai compris, elle lui reproche de passer devant tout le monde parce qu'il a une blouse blanche. Privilège de l'uniforme ! Toute les personnes devant moi finissent par passer au scanner. Je reste alors seul dans la salle d'attente. Un autre docteur vient avec un autre gars qui passe encore devant moi. La préposée au scan m'explique que c'est une urgence... Soit.  Patientez encore un peu et je vous prends après, me dit elle... Inch'Allah. Il est presque midi lorsque vient mon tour. Elle me pose un cathéter, me fait coucher dans le scanner, les bras bien droits audessus de ma tête pour ne pas gêner les mouvements de l'appareil, me prévient qu'il faudra bloquer ma respiration, puis elle retourne se réfugier dans son local de travail. Elle me dicte ses ordres à travers l'interphone du scanner qui se met en mouvement :  Patientez... patientez. Le scanner ne bouge plus. J'attends dans une position inconfortable, bras tendus, pantalon sur les cuisses, cathéter au poignet qui repose sur une barre de fer. J'attends. J'attends. J'attends. Heureusement qu'elle ne m'a pas demandé de bloquer ma respiration ! Après dix minutes, mes bras tendus s'engourdissent et je les ramène sur ma poitrine en attendant la réaction de la préposée au scanner que j'imagine derrière la vitre, en train de vérifier où se situe mon problème sur son ordinateur. Silence... J'attends. J'attends. J'attends. Bon, ça commence à bien faire. Toc, toc, estce qu'il y a un
pilote dans l'avion ? J'attends. J'attends. J'attends. Après une bonne demiheure, la préposée réapparaît pour me dire :  Désolée mais il y a eu une urgence. Je vais maintenant vous injecter un produit qui va peutêtre provoquer des céphalées ou des vomissements, mais il ne faut surtout pas bouger. Elle m'injecte à travers le cathéter un truc qui chauffe tout le corps en passant dans mon sang, me demande de me remettre en position et retourne derrière sa vitre. J'attends. J'attends. J'attends. Estelle encore partie prendre en vitesse sa pause déjeuner ? Enfin, elle me dit :  Bon, on va commencer... Deux, trois blocages de respiration plus tard et hop, c'est fini ! Il est deux heures de l'aprèsmidi et je suis toujours à jeun. Avant de partir, elle me dit de beaucoup boire et manger. Elle ajoute :  Revenez me voir après. Je lui demande :  C'est pour déjà avoir les résultats ?  Non, c'est pour être certaine que vous avez bu et mangé suffisamment (je dois sans doute ressembler au petit enfant qui vient de naître et qui ne comprend rien du tout à ce qu'elle me dit)... Vous pourrez venir chercher les résultats la semaine prochaine ! J'insiste pour savoir si on ne peux pas transmettre ces résultats directement à l'urologue qui les avait demandés et qui travaille ici, à l'hôpital.  Non, il faut patienter pour ça. Revenez la semaine prochaine. Je comprends mieux à présent pourquoi on appelle les clients d'un hôpital des... patients ! Je crois d'ailleurs que je ferais bien de patienter avant d'y retourner ! J'envoie donc un taxi chercher les résultats la
semaine suivante et attends ensuite plus d'un mois en espérant que les mélanges d'huiles essentielles préparées par ma femme, les jus de citrons et papayes pressés par mon fils ou les incantations christiques d’un ami très pieux me guérissent du mal. Plus simplement, j'attends surtout que le temps fasse son oeuvre et que mon corps rejette l'intrus. Malheureusement, mon corps n'a plus 20 ans et l'intrus s'incruste. Les crises sont moins douloureuses et moins fréquentes, mais la pierre au rein, aussi appelée calcul (sans doute parce queπr calcule une circonférence), ne se dissout pas. Je retourne donc voir l'urologue qui propose deux solutions : 1. La chirurgie ouverte : elle peut se faire à l'hôpital régional de Ziguinchor : on paie... on patiente... puis on endort entièrement le patient, on ouvre, on retire les pierres en espérant qu'il ne faille pas toucher à la vessie (on ne sait jamais), on referme et on prie qu'il n'y ait pas d'infections en faisant repatienter le patient pendant plusieurs jours dans ce vieil hôpital vétuste... Euuuh ouiiii, mais quoi d'autre ? 2. L'endoscopie : elle se pratique dans une clinique à Dakar : on anesthésie la moitié basse du corps, on fait passer un tube et la pierre est directement extraite à travers lui. Mais par où faiton passer le tube ? Oui, oui, par là !... Par la voie naturelle, mon kiki ! Voilà encore une expérience traumatisante de vie qui s'ajoute à la liste. Après avoir été me faire arracher un ongle à 20 ans, couper les cordons de la bourse (vasectomie) à 35, recoller la rétine de mon oeil à 50, il ne manquera plus qu'une coloscopie à ce palmarès pour faire le tour de mes pires angoisses. Mais pourquoi estil si fréquent de toujours devoir subir ce qu'on ne veut surtout pas subir et, par contre, ne jamais obtenir facilement ce que l'on désire ardemment avoir ? Dieu, pourquoi tant d'injustice, que diable ? Enfin soit, j'opte pour Dakar. J'appelle le chirurgien, un Professeur, que l'urologue m'avait renseigné (il fallait bien faire
appel à un Professeur pour m'expliquer par a+b comment faire l'opération du calcul !) Il propose de me rencontrer le lendemain et de me passer au bloc deux jours plus tard. Je préviens ma compagnie d'assurance en Belgique, que je dois me faire opérer au Sénégal et saute dans l'avion pour Dakar avec ma femme (qui veut s'assurer que je serai toujours vivant à la sortie d'hôpital). La clinique, située face à l'océan le long de la corniche de Dakar, est coquette et équipée à l'européenne. L'accueil est rapide et (Thibaud) courtois. Une vaste chambre individuelle avec salle de bain particulière m'est réservée. Très vite, les questionnaires préopératoires sont remplis. Très pro (Courtois) ! Premier os : c'est pareil qu'à Ziguinchor (par conséquent, je suppose que c'est ainsi que les soins de santé fonctionnent dans tout le Sénégal) et il faut payer avant de se faire opérer (tout de suite donc). Comme il est prévu de m'hospitaliser huit jours, le devis dépasse mon budget. Je n'ai pas tant d'argent sur mon compte. Je peux en envoyer depuis la Belgique, mais je serai parti avant qu'il n'arrive. J'en parle au médecin. Il m'écoute et écourte la durée de trois jours. Cela m'arrange doublement :  d'une part, on peut rentrer un mardi avec le bateau, moins cher que l'avion ;  d'autre part, cela réduit la fract... non... la facture de ce premier os en évitant aussi de nous retrouver sans un rond durant quelques jours à Dakar. Second os : ma compagnie d’assurances me contacte pour prévenir qu'ils ne rembourseront rien, parce que je séjourne à l'étranger depuis plus de trois mois. Depuis des années, je paie des primes qui m'assurent en cas d'hospitalisation partout dans le monde. Je n'ai pas souvenir avoir fait auparavant appel à l'assistance de cette compagnie en Belgique ou à l'étranger, vu que je suis en bonne santé (... justement parce que je vis plus de trois
mois à l'étranger dans un endroit paradisiaque où il fait bon vivre, où il n'y a ni stress, ni pollution, où je fais du sport chaque jour, où je mange sainement au point d'avoir retrouvé le poids de mes 18 ans, je ne consomme ni tabac, ni alcool, ni drogue, ni rock'n'roll et j'ai même arrêté de boire du CocaCola depuis deux mois parce qu'il n'est plus nécessaire de réveiller une digestion paresseuse causée par un tropplein de chips et de chocolat. Quand je pense en plus que ces primes ont augmenté de près de 150 % par rapport à la prime d'origine, le refus de la compagnie d’assurances basé sur une clause discrètement introduite en corps 6 au milieu d'un recueil encyclopédique de termes juridiques (qu'on appelle aussi conditions générales au verso) me laisse un poil amer. Depuis la crise financière que quelques vautours et pigeons ont provoqué avec l'appui des organismes financiers telles que les banques et compagnies d'assurances, ces dernières s'évertuent à détruire la relation de confiance qu'ils avaient avant avec leurs clients. Or, le bon fonctionnement de notre système économique se base justement sur la confiance. A force de détruire la base, ce système pyramidal finira bien par s'écrouler (et les banques, et les compagnies d'assurances, et nous avec !) Il faudrait les juger pour primes contre l'humanité, ouais ! En deux mots : je râle ! Après avoir rongé mes os, je ronge mon frein et attends l'opération. Toc, toc, on vient me chercher ! L'anesthésiste pique dans la colonne vertébrale. Je reste totalement conscient mais ne sens plus mes jambes... On les place sur des étriers, exposant mon intimité à tous les intervenants de la salle d'op' (heureusement, je n'entends pas de petits ricanements !) Le chirurgien introduit la sonde... Je ne sens rien... ouf ! En regardant le moniteur, j'arrive à voir l'intérieur de mon bas ventre grâce à la petite caméra fixée sur la sonde (heureusement, ce ne sera pas publié sur internet !)
En prenant le trou noir et en suivant au fond le deuxième tunnel à droite, après un passage dans une espèce de couloir spatial recouvert de vaisseaux sanguins, au milieu d'un bosquet d'algues blanches, le chirurgien repère le calcul jaunâtre et me le fait découvrir à l'écran. Après avoir nettoyé tout ce qui le bloquait, il enlève la pierre et je tombe dans les vaps. Me voilà de retour dans la chambre où je vais pouvoir me reposer en paix (mais non, je ne suis pas mort !) Beau travail et grand merci à toute l'équipe de la clinique qui a pratiqué l'intervention. Le service était parfait ! Mais comme souvent, c'est après l'opération que les choses se compliquèrent... Lorsqu'on retira le drain (après l'avoir sifflé trois fois), les vaet vient aux toilettes se démultiplièrent pour faire hippie comme je dis (peace, comme on dit ici... Hippie peace urée : pour moi, Peace ou Paix sont des mots nobles qui deviennent vulgaires si on les orthographie autrement) et évacuer surtout beaucoup de sang. Or il fallait écourter mon séjour à cause de ce &%*¡ d’assureur qui, de mon point de vue, n'assure finalement que ses arrières, puis voyager 12 heures en bateau, débarquer à l'île de Karabane, prendre une pirogue jusqu'à Elinkine et revenir en voiture à CapSkirring. J'avais donc demandé s'il n'y avait pas un médicament pour éviter d'être incommodé par ces fréquents écoulements. Mauvaise idée... car juste avant de partir et après avoir bu les trois litres d'eau journaliers recommandés pour mon traitement, je fis une réaction allergique au médicament prescrit qui bloqua toutes les évacuations. Les heures qui suivirent se révélèrent être un véritable calvaire qui aurait fait la fierté d'un féroce bourreau chinois. Avec la même efficacité que la cure par l'eau, le bas de mon corps se mit à enfler comme une outre. Pour libérer mes fonctions, il fut décidé de faire repasser, à vif et sans anesthésie, une nouvelle sonde qui traverserait l'urètre
pour atteindre la vessie, la réaction au médicament ayant obstrué cette voie. L'intervention se révéla impossible et aussi martyrisante qu'un supplice du pal côté pile (et pour ceux qui ne sont pas au courant, ce supplice ne consiste pas à manger de la nourriture pour chien !) L'abandon de la manoeuvre me permit toutefois de souffler quelques heures. Mais par la suite, le trop plein liquide, qui poussait vers la sortie d'urgence, restait toujours coincé à l'intérieur. Mon système urinaire complètement verrouillé ne laissait passer que quelques misérables gouttelettes de sang au prix de douleurs intenses. Le voyage, enchanteur en d'autres circonstances, se mua en abominable chemin de croix. Arrivé à la rescousse, le docteur Karim de Cap Skirring ponctionna, à l'aide d'une seringue, 350 ml de sang dans la vessie. Cet acte salvateur débloqua mes systèmes internes, libérant les pressions et ramenant peu à peu l'équilibre dans mon organisme au cours des jours suivants. Je m'en tirai donc à bon compte... alors que, finalement, mon compte n'était pas bon (puisque j'avais survécu à cette épreuve !)
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