Trophée des plumes 2022 - (Votre titre de publication)
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Trophée des plumes 2022 - (Votre titre de publication) , livre ebook

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Description

entre Amour et désillusion, entre recherche d'équilibre et fatalité, le narrateur nous fait voyager dans l'idylle de jeunes étudiants ayant une soif inaltérable de vie

Informations

Publié par
Date de parution 05 juin 2022
Nombre de lectures 17
Langue Français

Extrait

VENUS : Trophée des plumes 2022
On s’est connu à l’université de manière assez banale, de ces banalités dont souvent se couvre le destin. Elle était assise à mes côtés. Je ne l’avais pas remarqué jusqu’au moment où elle leva la main pour poser une question. Question qui semblait avoir mis en mal le professeur puisqu’il mit plus de 20 minutes à répondre. Cela suscita mon intérêt pour elle. Je commençais à lui jeter des regards que je n’assumais pas. Il faut en avoir pour parler dans une salle de 500 personnes qui guettent tous que tu dises une bêtise. Au moment de la pause, je îs exprès de passer devant elle. Elle m’avait remis une pièce et m’avait presque supplié de lui acheter de l’eau. J’avais acheté une tasse de « café Touba ». Je le lui dis, lorsqu’à mon retour, elle me demanda son sachet d’eau. A ma grande surprise, la demoiselle n’avait rien dit, elle s’était levée et avait disparu. Elle était revenue au bout de quelques minutes avec un sachet d’eau et une tasse de café qu’elle m’avait remise toute rieuse. Je lui dis que « je m’appelais kénar sarr et que j’avais terriblement honte, » en lui tendant la main. Elle répondit « Anta Diouf, tu le mérites amplement » sans daigner prendre la main que je lui tendais. Après Un bref moment d’hésitation, elle ajouta « tu as un prénom assez original. Tu sais au moins ce qu’il signiîe » je dis « Non » elle enchaina « il a une signiîcation dans ma langue mais n’espère pas que je te le dise ». Je dis pourquoi ? Elle répondit « parce que tout se paye ici mon cher, tu viens de me le démontrer ». Elle ît mine de s’essuyer le front. Le professeur ît son entrée en ce moment, le calme le suivit et le cours reprit. Je l’avais passé à essayer de cerner son visage caché à moitié par ses longues mèches qu’elle relevait et qu’elle balançait tantôt en arrière et avec une îne délicatesse. Elle n’était pas extraordinairement belle, ou du moins, je ne pouvais apercevoir sa beauté dès cet instant.
Dès cet instant, Anta, tu peuplas mon monde. Je te voyais partout : dans ma chambre, dans les toilettes, au resto, entre deux pages quand enîn j’arrivais à ouvrir un cahier, la nuit quand tout monde crois que tout le monde dort. Ton sourire, tes mèches, et le bout de ton nez persistaient en boucle dans ma tête. Il a fallu attendre 15 jours pour la revoir. Le collectif des étudiants avait appelé à boycotter les cours aux motifs : par arrêté, le ministre de l’enseignement supérieur avait décider que les bourses ne couvriraient pas tous les étudiants. Ceux qui avaient le Bac avec une mention passable ne devaient pas avoir de bourse jusqu’à ce qu’ils aient validé leur première année. J’étais dans le lot. Je maudissais le collectif des étudiants, je maudissais la bourse, la grève, le ministre de l’enseignement supérieur.
, l’impact fut tel que je l’avais imaginé : violent. Mon imagination n’avait rien exagéré. Elle avait changé de coiFure et celle-là mettait à nu un joli petit visage rond et laisser éclater la sensualité de ses lèvres, la înesse de son cou. Mes yeux s’étaient perdus dans les siens globuleux et d’une troublante brillance. Il me fallut son rictus pour me convaincre de ne pas fuir. J’entamai la conversation sans savoir par où commencer, un plongeon direct dans un espace sans fond véritable. Mais j’avais réussi, sans comprendre comment. Nous avions parlé des cours et de là d’où l’on venait. Nous nous liâmes amitié naturellement et sincèrement.
J’ai toujours eu le sentiment que les sensations diminuent d’intensité quand on en parle. Les mots enlèvent souvent aux choses internes leur véritable sens. Certaines choses ne se disent pas, elles se révèlent par elles seules à qui sait les capter et leur donner un sens. On ne s’était jamais rien dit, Anta et moi. Notre amour s’était révélé par l’acte. Si les mots lient les hommes certains actes lient leurs âmes. On se jura îdélité dans la liberté. Anta était une intelligence vive et rebelle et je crois que c’est ce qui nous rapprochait le plus. J’aimais être en contradiction avec elle. Elle s’en sortait à tous les coups. Pour la secouer, je lui jetais souvent à la îgure
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La femme ne peut-être l’égale de l’homme. Ça, c’est Dieu qui le dit. Une lueur combattive s’allumait dans son regard puis peu à peu un sourire venait la chasser « Ké », (Elle m’appelait ainsi) tu veux me mettre en mal avec Dieu mais raté. S’Il nous n’a pas mis cote à cote c’est parce que Dieu a voulu que nous soyons
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derrière vous pour que le monde ait un certain équilibre pour que cela tienne. Il faut que la femme ait un mari et l’homme une femme pour que cela tienne. Et c’est une responsabilité qu’il vous a conîée. La responsabilité de cette humanité reposait sur vous, qu’est-ce que vous en avez fait : des guerres, des tueries, des bombes qui peuvent éteindre l’humanité (elle rit), des génocides, des crimes, des assassinats……. Des coups d’état. Vous avez installé la peur et la méîance mon cher. Vous avez failli. Ce monde n’a besoin que d’amour et c’est nous qui pouvons le lui donner. Nous ne voulons pas être vos égales, cela fausserait l’équilibre du monde, nous voulons prendre les reines. Tu appelles à la révolution là. Tu parles comme si on était les seules responsables. C’est tout féminin. Vous n’êtes jamais responsables. Vous vous dérober toujours derrière l’innocence et la faiblesse. Toujours victime. Si on en est là, à se faire la guerre, c’est parce que Mame Awa à pousser Mama Adama à manger la pomme interdite. Vous avez toujours eu le pouvoir. Combien d’hommes ont perdu courage et vertu pour vous, combien d’hommes se sont fait la guerre pour vous, combien d’hommes se sont agenouillé sur l’autel de l’amour. Je t’ai déjà raconté l’histoire de Guedj Diouf, l’homme qui avait déîé Dieu parce que ayant trouvé sa belle morte on lui avait dit que c’est Dieu qui le lui avait pris. Vous êtes aussi responsables que nous si ce monde est une pourriture. Je me demande souvent si vous n’avez pas créer l’amour pour nous rendre bête. Alors tu es maintenant d’accord que vous rééchissez par votre bas-ventre ! avait-elle ajouté après un ricanement cruel puis elle continuait Un jour ça sera nous et ça sera à vous de reste au foyer et de regarder bandes de fainéants. Nous sommes plus intelligentes, souvent plus saints d’esprit, plus travailleuses, plus méthodiques, plus méticuleuses… Le monde n’est pas prêt pour ça ma belle ! avais-je répondu en mimant de vouloir l’embrasser.
Quelqu’un toqua à la porte de la chambre, Anta lui dit d’entrer. C’était Alfouseyni, mon voisin de chambre qui était aussi notre camarade de classe. Avec lui nous formions un trio Ami-Amour. Alfouseyni avait compris notre idylle sans qu’on ait à lui en parler. Il nous appelait les pigeons.
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Alors les pigeons vous êtes prêts On sera un peu en retard c’est sur Ce prof ne vient pas souvent tôt. Nous sortïmes
Après Anta, ma passion c’était l’errance. Ne rien faire et marcher sans but quelconque, voyager sans destination préalable. Libre comme le temps ou le vent. Cet été, j’avais mis le cap sur NdoFène Sine mon village d’origine, le village natal de mon père. NdoFène c’est mon deuxième chez moi comme on dit souvent. Il y’a une partie de moi en ces lieux, j’ai cherché en vain ce que c’est. Ou peut-être que j’aime me faire réveiller par des « coquelicots » incessants, me faire du bon « thiéré » avec du lait de vache bien frais, et passer le reste de la journée sous un arbre à picoler du thé et à discutailler : des champs, de la récolte, des chevaux, des vaches, des moutons, des chèvres, de lutte, de politique, de mysticisme, des malentendus, des femmes, de la dernière rumeur, de plaisirs simples. Il susait que j’y pose les pieds pour ne plus rien désirer sauf la simplicité des gens qui y vivaient, leur chaleur et leur quiétude. J’avais une telle soif de vivre, que je me disais que l’école m’avait peut-être abruti. Je brandissais liberté. Point ferme.
L’éclat du soleil avait échi, il avait beaucoup plu la nuit. Le vent glacial et l’atmosphère grisâtre annonçaient un jour mieux. Du bon temps sahélien propice qu’à boire du thé et à faire une bonne sieste. C’est en ce jour au allant ordinaire de ce mois de septembre que le sort frappa par un appel avec une voix féminine, aigue, enrouillée et tremblante et qui me disait :
VENUS : Trophée des plumes 2022
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Allo ! c’est bien vous Kénar Sarr ! Oui eFectivement ! avais-je répondu un peu anxieux mais trop loin de me douter de ce que cette voix allait me dire après.
Elle débita, dubitative, hésitante, elle semblait chercher des mots ou peut-être de la force
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Anta m’a beaucoup parlé de vous et c’est d’ailleurs la raison pour laquelle j’ai pensé à vous appeler. Je suis sa sœur Yacine…Kénar, Anta « ganiouna » Anta est décédée avait-elle lâché dans un torrent de sanglot qui avait émoustillé le subit éclat de sa voix……la voix de Yacine me parue soudainement lointaine, si lointaine que je semblais ne plus l’entendre. Un vide avait comme envahi tous mes sens. Ce fut un choc terrible. Je me rappelle n’avoir aucune réaction sur le coup. De quoi était-elle morte ? je n’eus pas le temps de demander à Yacine, elle avait raccroché. La réalité à cela de cruel, elle ne laisse aucune alternative, aucun détour possible. Je voulu crier, pleurer, cogner le mur, manifester mon mal-être. Mais je n’en îs rien. Un deuil que je porterai peut-être toute ma vie. Les êtres chers ne meurent pas, ils vivent dans nos souvenirs à travers une parole, un fou-rire, une mimique parfois un lieu, un parfum.
Il faut impérativement être un fou ou un enfant pour prétendre n’avoir de compte à rendre à personne, ni même à Dieu. Je ne sais pas lequel nous étions Anta et moi, des fous ou des enfants mais nous vivions une vie qui suscitait à mon égard de la peur. Une peur provoquée par un désir fou de titiller les limites, l’impensable, l’infaisable et aussi par ma conscience complice qui ne s’y refusait plus. « On n’a pas fait de mal quand on arrive à dormir la nuit » disait Anta.
Un jour on a voulu faire l’amour sur un pont, le fameux, le mythique pont aidherbe. Il était 3 heures presque 4 heures du matin, on revenait de lamingo, un restaurant-bar coté sur l’ile nord de Saint-Louis et on était ivre-mort. Sur un air de déîs Anta avait dit :
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Veux-tu faire quelque chose que tu n’oublieras jamais ? Quoi encore ? je pensais à une baignade nocturne, à une course comme nous le faisions d’habitude où sauter du pont et rejoindre cette eau mouvante et d’apparence peu profonde (tout était possible on était ivre) mais c’était méconnaitre cette îlle aisons l’amour ici avait-elle sié à l’une de mes oreilles avec une sensualité que l’alcool avait certainement décuplée Quoi tu es folle ou quoi ? sur ce pont ? le froid qu’il fait ici et puis on ne sait jamais il y’a toujours des passant ici quelqu’un pourrait nous voir ou pire nous îlmer… et……
Elle ne me laissa pas terminer, je sentis sa main s’agripper vigoureusement sur mes couilles. Anta ne semblait même pas m’entendre, elle savait que je me défendrai mais que je lâcherai prise. Elle le savait ce genre de désirs ne concourent pas avec la raison ni avec une quelconque état d’âme. La tension montait entre précipitation et désir incontrôlable quand soudain un rire eFroyable nous surpris. Du côté du pont, la voix revint lourde « Domi xadj yi » îls de chien. Notre ferveur fondit en panique et nous primes la fuite. Un mille mètre digne d’une prestation aux jeux olympiques. Quand nous nous sommes arrêtés à la sortie du pont, mon ventre était en bouillie et je vomis tout ce que j’avais bu et mangé. Elle tournoyait autour d’elle, les yeux imbibés de larmes à force de se tordre de rire. Elle était heureuse et plus belle.
Je suis parti à Niodior le même jour pour assister à ses funérailles. Après l’appel de Yacine j’avais fait mes bagages et j’avais rejoint la gare-routière de Diakhao. Pendant tout le trajet mes pensées ne purent la quitter. Est-ce vraiment réel ? Il n’y avait rien de tel que son sourire. Pour moins que le sourire d’Anta Diouf, des hommes ont pris des armes, ont traversé l’océan et se sont battus contre d’autres hommes, décimant ainsi des villes entières. Je sortis mon téléphone pour regarder une de ses photos qu’elle m’avait envoyée deux jours plutôt sur WhatsApp. Elle était sur une plage. Derrière elle, le soleil
VENUS : Trophée des plumes 2022
formait une boule amboyante dépourvu de toute sa gloire sur un ciel nuancé de gris et de feu. La îne lumière qu’il projetait donner plus d’éclat à sa noirceur. Elle portait un chapeau en paille de sorte que de ses yeux on ne pouvait qu’apercevoir que l’éclat, un t-shirt blanc un peu large sur ses épaules mais qu’elle avait pris le soin de nouer autour de la taille et une culotte en « jean » qui dépassait à peine ses fesses rebondies. De grosses lèvres roses pulpeuses, qui contrastaient avec son teint, laissaient entrevoir de petites dents brillantes et sa fameuse molaire argentée, isolée au coin de sa bouche. Une perle venue des abysses du delta du Saloum.
La mort d’Anta m’a mis en face de la fatalité, le visage indiFérent et presque moqueur de la vie. « Adina dey woor » « la vie trahit ». Nous clamions liberté et nous vivions ainsi mais rien ne semble plus illusoire : nous naissons sans notre avis et nous mourons aussi ainsi et entre les deux ce qu’on estime être nos choix. Etre libre c’est souvent ériger ses pulsions en maitre et il n’y a pas plus grande et plus monstrueuse servitude. J’ai entr’ouvert tous les tiroirs de mon âme pour situer le vide. Ce vide qui me pèse tant. Et pour la première fois je me suis senti si vulnérable qu’il susait de peu, d’une moindre incompréhension pour que je trépasse de l’autre cote, vers la marge. S’en été îni de la vie d’Anta, le soleil continuait de briller et la lune toujours à charmer de sa douceur. Pourquoi avait-elle vécu juste 23 année. C’était insensé. Mieux valait ne pas vivre que de mourir à cet âge. Et c’est aujourd’hui seulement que je me rends compte qu’elle n’a pas vécu en vain et qu’aucune vie n’est en réalité vaine fusse-t-elle de deux minutes, de deux heures, de deux jours, de deux mois, de deux années. Anta fut pour moi Amour sous toutes ses îgures possibles : celui donné et celui reçu en retour, sauvage et pur, déraisonné et inconditionnel, celui fait de passion profonde mais aussi de silence et de larmes.
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