Un choix difficile

Josue Bilong

Description

Dans cette nouvelle, il s'agit d'un problème d'argent, de pouvoir, de magie et de trahison. Pierre qui est un chef traditionnel sacrifie la santé mentale de son fils ainé Albert pour de l'argent et le pouvoir. Sa femme Chantal ne pouvant accepter une telle ignominie, se battra corps et âme pour sauver son fils en perdant son mari. Le prince Albert qui se rétablit après la mort de son père, devient lui aussi chef traditionnel et épouse une citadine qui ne connait rien d'une femme au foyer. Cette dernière se mettra à détester sa belle-mère qui ne voudrait que l'éduquer ; elle ira même jusqu'à la séparer de son fils. Cette mère qui avait sacrifié son mari pour son fils le regrettera le restant de ses jours. Elle meurt finalement dans la sollicitude et la douleur.

Informations

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• Date de parution: 29 mai 2022
• Nombre de lectures: 111
• Langue: Français

Extrait

JOSUEBILONG

UNCHOIXDIFFICILE

Tout le mondeau village en parlait, dans toutes les bouches on se le chuchotait, ce n’était plus qu’un secret de polichinelle: le Prince Albert était atteint de démence. Mais comment cela était-il arrivé ?Qu’y avait? Lui qui venait tout juste de soutenir sa thèse de-il pu se passer doctorat en psychologie encore plus, lui qui devait remplacer son père à la tête de la chefferie après que ce dernier ait rejoint ses ancêtres, lui qui était considéré comme le plus intelligent du village, c’est lui qui subitement se mit à manger dans la poubelle. Sa mère si inconsolable ne pouvait y croire, Albert était l’ainé de ses enfants, l’exemple à suivre; que pouvait-il advenir des autres wagons si la locomotive venait à dérailler ? Elle ne pouvait ni ne voulait se l'imaginer.

Afin de se requinquer, il était venu passer quelque temps à la campagne, nul ne pouvait s’imaginer que peu après il parlerait tout seul et nu. Les sentiers du village qu’ilsillonnait jadis se croyant en sécurité, lui devinrent hélas proscrits. Même les jeunes filles qui ne rêvassaient que d’être par lui en route stoppées, avaient perdu tout espoir en l’apercevant dans cet état. Qui d’entre elles pouvait encoreaccepterd’épouser un fou? Le sort d’Albert semblait être scellé et cela était inacceptable.

Son père Pierre par contre avait l'air moins embarrassé. Comme tout chef il prit la nouvelle au calme et promit à sa femme de tout faire pour que son fils retrouve la raison. Hélas les jours passaient, la situation d’Albert s’empirait etle chefne faisait rien. Il venait d’ailleurs de s’acheter une nouvelle voiture dans laquelle il se plaisait à se pavaner avec sa nouvelle épouse, une jeune fille moins âgée qu’Albertet un tel comportement venant de la part d’un chef du village ne faisait que délier les langues dans les concessions.

Maman Chantal, la première épouse du chef avait fait cette remarque il y a quelques mois que son mari se plaignait tout le temps de son sort: malgré le fait qu’il soit un chef charismatique et éloquent, iln’avait jamais pu vraiment décoller dans sa vie et pourtant ses compères roulaient

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carrosse, avaient non seulement le pouvoir, mais aussi les avoirs.Qu’avaient-ils de plus que lui pour tout avoir et lui rien ? Leurs fils étudiaient tous dans de grandes écoles en occident pendant que le seul qui avait pu s’en sortir chez lui n’était qu’Albert qui d’ailleurs n’était qu’ici à l’université de Yaoundé 1. Leurs filles se mariaient tout le temps avec des hommes fortunés alors que les siennes ne lui ramenaient à la maison que les enfants bâtards dont les géniteurs ne trouvaient bon que prendre la poudre d’escampette. Tousses sujets au village l’enviaient pendant que son âme languissait d’amertume.Qu’avait-il fait aux dieux pour mériter un tel sort, pour hériter d’un tel destin? Etait-il maudit à demeurer dans la misère? Sa vie n’avait été que malheurs et coups-bas ; le dernier en date étant survenu il y a quelques années quand son cousin Jean Émile, un haut commis de la République, plus fortuné que Pierre, voulut lui ravir la couronne après quele président de la République ait décidé d’octroyer désormais un salaire mensuel aux chefs traditionnels.Il faillit y perdre vit n’eut été la bonté divine et la vaillance de sa femme Chantal (et pourtant il n’a pas tardé à prendre unesecondeépouse, après qu’il ait eu un peu d’argent). Il en avait donc marre de croupir dans la honte et le manque du respect et décida de changer la donne. Il alla voirl’un de ses amis, unlui et luichef traditionnel comme demanda conseil pour vite faire fortune. Cet ami l'amena chez un devin, afin qu’il l’aidât à sortir du noir, à asseoir sa notoriété et le puissant marabout lui promit fortune et pouvoirs’il remplissait l’une des trois conditions suivantes :coucher avec sa fille cadette, sacrifier sa femme ou rendre fou son fils ainé. La décision ne fut point du tout aisée et il passa une semaine calfeutré dans son bureau, loin de sa famille pour réfléchir, il se demandait quel choix opérer parmi les trois propositions à la fois horribles et salvatrices. Il ne pouvait se permettre de coucher avec sa fille, c’étaitun opprobre, il en serait destitué voire banni du village. Il ne pouvait non plus sacrifier sa femme Chantal qui lui avait tout donné et l’avait supporté et secouru dans les moments les plus extrêmes. Il ne lui restait plus que son fils Albert qui devint fou deux jours après que son père soit sorti de sa réclusion. Son marabout lui avait très bien prévenu que le jour où le fils recouvrirait la santé, le père s’en irait, voila la raison pour laquelle il ne pouvait chercher à soigner Albert.

Maman Chantal toute désemparée, une mère avec le cœur en main, ayant placé tous ses espoirs sur son fils, se vit bloquer par maints obstacles quand elle prit la décision de le soigner avec ou sans l’accord de son mari.Ses vêtements tout propres au départ devinrent des haillons sur elle à cause de nombreux va et vient entre pasteurs et guérisseurs. Tous lui dirent que son mari le chef était la cause de ce malheur et que pour soigner son fils Albert, il fallait perdre son mari Pierre. Tout comme Pierre auparavant, elle devait à son tour opérer un choix très difficile :

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perdre son innocent fils qui s’était retrouvé dans cette situation à cause de l’insatiabilité de son père ou son mari avec qui elles’était mariée depuis plus de trente ans et qui avait tout fait pour elle, malgré ses bavures ces derniers moments ?

Après maintes hésitations, elle se résolut à sauver son fils, à accepter les vicissitudes du veuvage et toute ladouleur qui s’accompagne de la disparition d’un être cher. Elle le fit, Albert fut guéri et devint chef du village. Peu de temps après, il épousa une très belle fille de la ville qui ne connaissait des devoirs d’une femme que se laver elle-même. Une fille qui ne put jamais s’entendre avec sa belle-mère, car cette dernière lui rappelait tout le temps qu’elle n’était pas faite pour son fils et qu’il n’était jamais trop tard pour apprendre, chose qu’elle ne dut jamais accepter surtout venant de sa villageoise de belle-mère. Elle se résolut plutôt à la nuire, la traita de sorcière et meurtrière et réussit même à l’éloigner de son fils.Maman Chantal mourut dans l’amertume, la douleur et le dénuement total, regrettant parfois pourquoi elle sauva son fils au détrimentde son mari. C’est malheureusement dans son agonie qu’elle se rendit compte qu’on met au monde unenfant, mais pas son cœur.

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