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pages
Français
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2016
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Ebook
2016
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Publié par
Date de parution
07 décembre 2016
Nombre de lectures
0
EAN13
9782342058833
Langue
Français
Dimanche 5 avril 2009, résidence George Sand à Bouffémont. Omar M'Bai est agressé par des voisins de l'étage au-dessus. L'algarade prend fin grâce à l'intervention de José Brunel, un voisin de palier. Omar s'en sort avec une entorse du genou qui lui vaut vingt et un jours d'interruption temporaire de travail. Commence alors un marathon judiciaire comparable à un match de ping-pong, financièrement asphyxiant pour Omar que les avocats tentent d'épuiser. Par incompétence ou collusion, ceux-ci lui appliquent tour à tour le tarif le plus onéreux tout en lui rendant le service minimal, et sans beaucoup de zèle, sous prétexte qu'il s'agit d'une « petite affaire », alors que leurs factures s'amoncellent et que le spectre du licenciement de fonctionnaire plane sur Omar au ministère du Travail. Omar assigne l'État français devant la Cour de Strasbourg, au titre des articles 3 (traitements dégradants), 6 (procès équitable) et 8 (domicile et vie privée) de la Convention européenne des droits de l'homme. Mais y aura-t-il un jugement ? Omar assigne l'État français devant la Cour de Strasbourg, au titre des articles 3 (traitements dégradants), 6 (procès équitable) et 8 (domicile et vie privée) de la Convention européenne des droits de l'homme. Mais y aura-t-il un jugement ? Au-delà du droit à l'oubli quasi abrogé par les lois ultra-répressives de Nicolas Sarkozy, c'est la question de la réparation des agissements des autorités judiciaires nationales qui va se poser...
Publié par
Date de parution
07 décembre 2016
Nombre de lectures
0
EAN13
9782342058833
Langue
Français
Y aura-t-il un jugement ?
Alexandre Thomas
Mon Petit Editeur
Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Mon Petit Editeur
175, boulevard Anatole France
Bâtiment A, 1er étage
93200 Saint-Denis
Tél. : +33 (0)1 84 74 10 24
Y aura-t-il un jugement ?
À Marie, ma mère
Heureux ceux qui ont faim et soif de justice, car ils seront rassasiés
(Évangile selon Matthieu, 5 : 6)
Avertissement
Cette histoire inspirée d’un fait réel met en scène certaines situations fictives avec des personnages réels dont les noms et prénoms ont été modifiés.
Première partie
1
Dimanche 5 avril 2009
Le ramdam dura plus longtemps qu’à l’accoutumée. Au bout de deux heures, Omar se leva et descendit. Avant de sonner à l’interphone, il avait tenté de dialoguer avec ses voisins, mais il n’avait essuyé que des insultes.
La gendarmerie avait classé sa plainte et cessé de répondre à ses appels. Notre héros avait songé à déménager, mais il avait jugé cette idée lâche, d’autant plus qu’il peinait à trouver un logement à côté de son travail. Avec des loups, se disait-il, il faut se battre comme un loup.
Lorsqu’il regagna le deuxième étage, Katia, Océane et Michel Amar l’attendaient devant sa porte. Dans l’appartement d’en face, José Brunel avait collé l’œil au judas. Au troisième étage, Martial et Sandy suivaient le spectacle, perchés sur la rambarde de l’escalier. « C’est toi qui as sonné ? » s’enquit Michel Amar d’une voix véhémente.
Omar ne répondit pas. Les deux hommes ne se parlaient guère. Tant bien que mal, Omar se fraya un passage et entra dans son appartement. Michel Amar avança et réitéra sa question. Omar se retourna et saisit la porte. Michel Amar lui asséna un coup de pied. Quelques mois plus tôt, Omar avait subi une méniscectomie du genou gauche. Il hurla de douleur, lâcha le battant et recula en tenant son genou. Il avait mal et envie de s’asseoir. Michel Amar s’engouffra dans l’appartement et commença à le frapper.
Ils se retrouvèrent dans la cuisine, coincée entre la chambre et le salon. Omar s’empara du premier objet qu’il trouva à portée de main et frappa au visage son adversaire. Mais, au lieu de se carapater, Michel Amar poussa un cri rauque et continua à se colleter. Omar abandonna le tuyau d’aspirateur et agrippa son adversaire.
Fragilisé par un genou convalescent et déjà très affaibli, il redoutait le pire, craignant que les trois intrus ne s’acharnassent sur lui. « Tant que je le tiens, se disait-il dans son for intérieur, Michel Amar au moins ne me fera rien. »
Katia Amar entra dans l’appartement. Elle ne parvint pas à séparer les deux hommes et ressortit en vociférant comme une hystérique. Océane commença à se battre aux côtés de son père. Elle perdit une chaussure en frappant Omar étendu par terre. Appelé à la rescousse, Martial mit sa petite sœur Sandy à l’abri, avant d’accourir sur les lieux.
« Omar, ça suffit », dit l’adolescent, la mine innocente. « Il a compris », poursuivit-il d’un ton rassurant. Martial parlait évidemment de son père. Sa grande sœur et sa mère l’affligeaient et il en avait assez du laxisme de son père, qu’il comparait à un caniche aux mains des deux femmes. Sans cesse, Katia Amar et Océane provoquaient Omar. Michel Amar les laissait faire. Martial se félicitait intérieurement et il aurait aimé que son père retînt la leçon.
Omar avait perdu ses lunettes de correction. Martial les lui apporta bienveillamment. Touché par l’altruisme de l’adolescent, Omar lâcha Michel Amar et récupéra les verres légèrement abîmés.
Océane abandonna ses chaussures sur place. Les yeux embués de larmes et le souffle coupé, elle alla s’effondrer dans les bras de sa mère en pleurant comme une Madeleine. Dès qu’il se releva, Michel Amar reprit la bagarre. Nonobstant son genou endolori, Omar le repoussa jusqu’à la porte. José Brunel attrapa Michel Amar par les bretelles de sa salopette et l’exfiltra de l’appartement. Martial demanda à Omar de fermer la porte à clé et sortit en dernier. Omar passa dans la salle de bains et fit couler de l’eau. Il attrapa un gant et nettoya le sang, pendant que Katia Amar tambourinait à la porte en proférant des insultes racistes.
Les deux femmes traînèrent les pieds dans l’escalier en poussant des cris. José Brunel leur conseilla de regagner leur appartement. Une fois chez elles, Katia Amar et Océane générèrent un boucan assourdissant, comme si elles avaient brisé un tabou. Omar se boucha les oreilles. Scotché à son fauteuil, il regardait son genou sanguinolent enfler à vue d’œil. Il téléphona à la gendarmerie. Une patrouille était en route. Lorsqu’il raccrocha, on l’appela à l’interphone. Il se leva avec peine et claudiqua jusqu’à la porte.
« Nous voilà », ricana nerveusement Arnaud Pétard. Il connaissait par cœur la version de la famille de Michel Amar et dissimulait à peine sa colère.
« Vous n’arrivez jamais au bon moment, s’indigna Omar.
— Pauvre bouc émissaire ! La terre entière vous persécute. Mais quel malheur vous est-il donc arrivé aujourd’hui ?
— J’ai très mal. Permettez-moi d’aller m’asseoir. »
Arnaud Pétard hocha la tête et palpa son revolver, avant de traverser la porte entrebâillée. Aussitôt, Jordan Sanchez, son coéquipier, également armé, lui emboîta le pas.
« Vous les avez provoqués ? demanda Arnaud Pétard.
— Comme d’habitude, ironisa Omar d’une voix lyrique. Franchement, si j’avais voulu me battre, je serais directement monté au troisième étage.
— Alors, pourquoi avez-vous sonné chez eux ?
— Juste pour attirer leur attention.
— On ne sonne pas chez les gens.
— Que fallait-il donc faire ?
— Aller vous promener.
— C’est une plaisanterie. Mon geste désespéré n’octroie à personne le droit de venir se faire lui-même justice. »
Sous le regard méfiant des gendarmes, Omar tira une chaise et remonta son pantalon jusqu’au genou gauche en pleine turgescence et encore taché de sang.
« C’est son sang ? » s’enquit Jordan Sanchez, le trentenaire au regard intimidant. Il avait la voix rocailleuse et l’accent typiquement toulousain. Jordan Sanchez observait Omar, qu’il jugeait naturellement coupable.
« Le mien n’a pas d’importance », rétorqua Omar en regardant son interlocuteur droit dans les yeux.
« Mais vous l’avez grièvement blessé à la tête, renchérit Arnaud Pétard.
— Plutôt au visage, rectifia Omar. C’était uniquement pour me défendre. D’ailleurs, avais-je le choix, ajouta-t-il, l’air désolé. Ils étaient au nombre de quatre.
— Mais Martial ne vous a fait aucun mal.
— C’est vrai, mais il a quand même violé mon domicile avec les siens.
— Avez-vous la preuve ?
— Tenez, voici le chaînon manquant. »
Arnaud Pétard haussa les épaules et ramassa les chaussures d’Océane.
« Surtout, dit-il d’un ton ferme, ne bougez pas, on va vous placer en garde à vue.
— J’irai très loin bien sûr, fit Omar avec humour. Surtout s’il ne vous vient pas à l’esprit l’idée de m’envoyer rapidement aux urgences. »
Arnaud Pétard et Jordan Sanchez abandonnèrent Omar avec ses blessures et montèrent au troisième étage. Omar demeura immobile dans son fauteuil, jusqu’au moment où il entendit la sirène des pompiers. Il avait le feu au genou. Malgré la douleur, il se traîna jusqu’à la fenêtre. Devant la résidence George Sand, quelques locataires rassemblés discutaient à voix basse en mimant la scène à laquelle certains avaient assisté.
Michel Amar descendit avec son épouse et les gendarmes. Il marchait normalement et portait un pansement au niveau de l’arcade sourcilière. Au moment de monter dans le véhicule des pompiers, il leva la tête et aperçut Omar à la fenêtre. « Macaque, espèce de macaque », fustigea-t-il à deux reprises avant de se saisir de projectiles.
Omar tomba dans le fauteuil. Il était dépité et révulsé par tant de peine et de haine, de méchanceté et d’injustice. Seule l’incompréhension se lisait dans ses yeux mouillés et son regard triste. La gendarmerie menaçait la victime, tandis que les pompiers conduisaient l’agresseur à l’hôpital de Gonesse. Arnaud Pétard et Jordan Sanchez s’étaient rendus coupables du délit de non-assistance à personne en danger.
Il appela les urgences et patienta de longues heures durant dans les couloirs de l’hôpital d’Argenteuil. Le médecin diagnostiqua une entorse. Une infirmière plâtra son genou et lui ordonna de rentrer à la maison.
« Mais comment ? s’exclama Omar.
— Vous n’avez pas de famille ? Appelez un ami », suggéra-t-elle.
Omar regagna nuitamment son domicile en taxi, avec un arrêt de travail de huit jours et une ordonnance en poche. Le lendemain, un coursier lui apporta des médicaments et des béquilles. Des infirmières se relayèrent à son chevet pour une injection d’anticoagulants deux fois par jour pendant une semaine. Huit jours plus tard, il retourna à l’hôpital d’Argenteuil et le médecin renouvela son arrêt maladie.
2
Bouffémont, septembre 2007
Omar s’était installé à la résidence George Sand à la suite d’une mutation professionnelle. Jolie et paisible bourgade résidentielle du Val d’Oise de six mille âmes, au club de golf prisé, Bouffémont se trouve à une trentaine de minutes de la gare du Nord par le Transilien.
Située dans la rue éponyme, la résidence George Sand comprend un lot de trois bâtiments d’habitation à loyer modéré, numérotés de A à C, de trois étages chacun, alignés en file indienne le long de la voie sans issue délimitée par des espaces verts. La rue s’achève au fond par un parking ouvert bordé d’acacias et de saules pleureurs.
Premier dans l’ordre d’accès, le bâtiment A se tient à l’angle de la rue George-Sand et de la rue Louise-Michel, qui longe le chemin de fer et se perd dans les champs fleuris à trois ou