Burkina Faso, rêve d'Afrique

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Description

Au fil du temps, au fil de leurs voyages, Olivier Chomis et Robert Laurent enrichissent leur amitié d'une complicité intellectuelle et d'une complémentarité artistique. Rêve ou réalité ? Le regard du photographe, la réflexion du médecin hésitent entre les deux. A travers ces lignes et ces photos, les auteurs tentent de mieux comprendre, de mieux faire vivre leur expérience. Sans imposer leur vision, ils proposent de parcourir cette contrée aux contrastes étonnants qu'est la province de Fada M'Gourma, au Burkina Faso.

Sujets

• Autobiographie
• Récit
• Témoignage
• Lettres et linguistique

Informations

• Publié par: L'Harmattan
• Date de parution: 01 novembre 2009
• Nombre de lectures: 202
• EAN13: 9782336265896
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 5 Mo

Extrait

Burkina Faso, rêve d'Afrique

Robert Laurent
Du même auteur
Pierre et Simon, jour après jour , Édition Panthéon
© L’HARMATTAN, 2009
5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com [e-mail] [e-mail]
9782296107298
EAN : 9782296107298
Sommaire
Page de titre Du même auteur Page de Copyright Epigraphe -I- -II- -III- -IV- -V- -VI- -VII- -VIII- -IX- -X- -XI- XII
Ne perdez pas votre temps à chercher des légendes aux images qui vont défiler sous vos yeux au fil de ces quelques pages. Ne cherchez pas la corrélation image-texte ou texte-image, découvrez-là.
Certains passages de ce manuscrit n’ont aucune correspondance en cliché, en particulier les descriptions de certaines scènes au centre de soins ou de la vie des sœurs du monastère.
Il est des lieux, des circonstances, des situations où l’intimité dégagée, les lois en vigueur, la pudeur ou la culture interdisent toute ingérence, toute violation, et où le voyeurisme serait une atteinte grave à la vie privée des individus.
Découvrez le village de Diabo à travers votre vécu personnel, vos convictions, vos rêves. Vous allez traverser une tranche de vie sans aucune influence venue de l’extérieur. Mettre un titre de façon arbitraire, une légende, une interprétation à une photo, c’est déjà vous imposer une vision, une philosophie. Influencer votre esprit est un peu le dominer. Le regard des uns est différent de celui des autres ; la réalité est par contre unique.
Regardez, attardez-vous sur ces images, quelques secondes, quelques minutes et puis... Revenez un autre jour poser votre regard sur ces mêmes photos ; elles ne seront plus les mêmes, vous ne serez plus le même. C’est l’œil qui fait l’image.
Nous ne ferons pas l’Afrique à deux Toi, guide intime de nos vies Qui fis secrètes tes souffrances Pour mieux combler nos ignorances Tu pars, loin, pour un autre pays Entre un au revoir et un ailleurs Tu choisis l’absolu bonheur Nous ne ferons pas l’Afrique à deux.
A Jean-Jacques
-I-
Simon, ce soir-là, ne demande pas à prolonger sa journée ; exténué par une lourde tâche professionnelle et par la vie trépidante qu’il mène depuis des années, il décide de grignoter un petit repas en écoutant quelques nouvelles, toutes plus dramatiques les unes que les autres, puis de s’abandonner dans les bras de Morphée.
Simon, connaissez-vous Simon ? Certainement; Simon c’est ce petit homme grisonnant pas encore vieux mais plus tout à fait jeune ; oui, voilà vous le remettez ! Simon, c’est ce personnage que vous observez dans votre miroir au moment du rasage, du maquillage : oui, Simon vous y êtes, c’est lui, c’est l’autre, … c’est vous.
En cette fin de soirée, les images de la journée défilent dans la mémoire toute fraîche du bonhomme.
Notre héros a rencontré beaucoup d’interlocuteurs, des plus anonymes aux plus importants, ou tout du moins se persuadant de l’être. Il a parfois écouté, regardé, observé ; souvent il a rêvassé en observant les lèvres de ces personnes se mouvoir comme dans un film muet, dessinant des figures amusantes, cocasses, dans l’espace, s’accompagnant de gesticulations manuelles avec soulèvement, froissement, étirement des sourcils. Il rit encore en se remémorant certaines de ces rencontres.
Mais durant toutes ces heures tout fut uniforme ; les femmes, les hommes, les enfants dansèrent dans l’uniformité d’une vie ; leur vie, sa vie aussi.
Les discours, les projets, les soucis, les ambitions sont identiques pour tous. Les habitudes, les costumes, les attitudes sont stéréotypés ; le monde paraît bien triste à qui sait l’observer. Simon trouve même son univers un peu sinistre, pauvre en couleurs ; il vit dans un monde, dans son monde, en noir et blanc. Aucune couleur ne semble être capable d’égayer cet univers froid, normalisé, uniformisé, globalisé, aseptisé où pourtant rien ne manque. L’homme est prisonnier de son confort, il en oublie que là, tout près de lui, un enfant passe, une femme pleure, un voisin se perd dans un désespoir.
Durant toutes ces considérations, les aiguilles des horloges poursuivent leur chemin inexorablement et Simon s’aperçoit vite que l’heure de son coucher sera la même que d’habitude. Encore une preuve de régularité de sa vie.
Un petit tour par la chambre de ses enfants et Simon rejoint Marie son épouse, déjà prête pour le voyage de la nuit.
La nuit, le seul moment du jour où la vie des uns n’est pas la vie des autres. La nuit où nos rêves font que nos vies se séparent tel le train sur l’aiguillage ; chacun peut enfin partir sur des chemins escarpés de l’aventure, de son aventure.
Le rayon lumineux du radio réveil entretient pour quelques instants encore Marie et Simon dans le monde des éveillés, dans l’univers du réel, ce monde qu’ils leur tardent tant de quitter l’espace d’une nuit afin de mieux aborder la journée du lendemain qui sera, n’en doutons pas, aussi monotone que celle qu’ils s’apprêtent à déserter.
Plus de bruit, plus de lumière, les heures inscrites en rouge sur l’écran du réveil s’effacent enfin, discrètement, timidement, lentement.
Seul Morphée a désormais droit de cité dans la chambre, dans l’antichambre du voyage individuel, de l’évasion, du rêve ; enfin le rêve. Même Marie s’apprête à se séparer de Simon pour quelques secondes ; même Simon estompe de sa mémoire sa compagne, sa raison de vivre, la mère de ses enfants, l’amour d’une vie.
Voilà, les chemins se séparent ; à chacun son univers, à chacun son aventure, à chacun sa nuit.
-II-
Simon descend d’un avion sur une terre brûlée par le soleil. A son grand étonnement tout est pareil, désespérément pareil, tout lui semble pareil. Quel désespoir, quelle mauvaise surprise ; quel est cet univers sans relief ?
Il fait chaud, les décors sont teintés d’un jaune ocre telle une photo vieillie ou un film tourné en sépia. Le vent brûlant souffle sur les visages desséchés, le sable tourbillonne ; ce sable responsable de la couleur, soulevé qu’il est par l’harmattan, le vent venu de l’Est.
Tout autour de l’avion, puis dans l’aéroport, des voix s’élèvent, crient, chantent. Des enfants proposent des cartes téléphoniques, des journaux, des montres, des objets tous plus inutiles les uns que les autres. Un gadget vendu sera un repas avalé ; alors où se situe l’inutilité ?
Dehors, une cohorte d’hommes s’affaire autour de Simon pour lui porter ses bagages. Tous sont noirs, souriants, accueillants… Même un peu trop. Simon s’engouffre dans une voiture pilotée par un grand gaillard noir, et le voilà parti pour des pistes inconnues.
Simon ose une question à ce chauffeur sorti de nulle part :
- Où suis-je ? Où allons-nous ?

- Bonjour, comment vas-tu ? Et ta famille ?
Simon, un peu interpellé par la réponse de son chauffeur, reprend ses esprits : - Je suis Simon, et toi ? Où allons-nous ? - Ne t’inquiète pas, tout va bien ; je suis Jean, Jean-Baptiste, comme Jean le Baptiste, tu dois connaître ; je vais te conduire à travers mon beau pays et t’emmener dans mon village.
Simon se détend, sourit même. Il se sent presque en sécurité derrière la ferraille de la voiture. Ce grand gaillard de Jean lui paraît sympathique. - Tu es tout simplement à Ouagadougou, mon frère.
Simon se retrouve donc en Afrique de l’Ouest, au Burkina Faso, au pays des hommes intègres.
Derrière Simon, une petite ombre le suit tel un ange gardien et ne cesse de photographier. A droite, à gauche, devant, derrière, à travers les vitres de l’auto ou, lors d’arrêts, par la portière entrouverte. A chaque ouverture de la porte, des nuées d’enfants se précipitent pour proposer leurs trésors. Vite, il faut refermer au risque de se retrouver envahis. La petite ombre s’en donne à cœur joie ; les enfants sourient de toutes leurs dents… Ou de leurs non-dents.
La traversée de la capitale Ouagadougou se fait avec quelques difficultés, les embouteillages sont monstrueux, mais tout se passe dans la bonne humeur, sans émeute, sans insulte, sans se presser. Le temps ne presse pas. Existe-t-il d’ailleurs, ce temps ?
Des images furtives frappent la rétine du voyageur et quelques-unes resteront à tout jamais gravées dans sa mémoire.
Là-bas, de l’autre côté de la route, trois hommes déambulent, portant des chaises, des tables, des vieux bancs ; où vont-ils ? Que vont-ils faire ? Probablement tenter un troc, une vente miraculeuse.
Un peu plus loin, le regard de Simon fixe une charrette écrasée sous le poids d