Du miracle en économie : Leçons au Collège de France
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Du miracle en économie : Leçons au Collège de France , livre ebook

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Description

Le dénuement est le lot commun des hommes depuis les origines. Il y a seulement deux cents ans, la surmortalité, les maladies endémiques, la disette, l'analphabétisme sévissaient encore en Europe occidentale, comme aujourd'hui en Afrique, en Amérique latine ou en Asie. Pourtant, l'Europe occidentale, suivie par les États-Unis et le Japon, a su s'arracher à ces fléaux. Comment expliquer le miracle du développement ? Comment peut-il s'étendre aux trois quarts de l'humanité qui sont encore voués aux péripéties de la dictature ou de l'anarchie, de la violence et de la misère ?Alain Peyrefitte, membre de l'Académie française et de l'Académie des sciences morales et politiques, a prononcé au Collège de France, comme professeur-invité, cette série de leçons sur le « miracle » du développement, thème qui est depuis quarante ans au centre de ses réflexions.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 mai 1995
Nombre de lectures 22
EAN13 9782738161833
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0900€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

DU MÊME AUTEUR
Rue d’Ulm, chroniques de la vie normalienne , 1946 (nouvelles éditions, 1964, 1978 et 1994).
Le Sentiment de confiance , essai, 1947.
Les Roseaux froissés , roman, 1948 (nouvelle édition, 1978 ; édition de poche, 1985).
Le Mythe de Pénélope , essai, 1949 (nouvelle édition, 1977).
Faut-il partager l’Algérie ? essai, 1961.
Quand la Chine s’éveillera… le monde tremblera , essai, 1973 (nouvelles éditions, 1980 et 1990 ; éditions de poche, 1975, 1979, 1991).
Le Mal français , essai, 1976 (édition de poche, 1978 ; nouvelles éditions, 1979, 1995).
Discours de réception à l’Académie française et Réponse de Claude Levi-Strauss , 1977.
Les Chevaux du lac Ladoga – la justice entre les extrêmes , essai, 1981 (édition de poche, 1982 ; nouvelle édition, 1995).
Quand la rose se fanera , essai, 1982 (édition de poche, 1984).
Chine immuable et changeante , album (texte de l’auteur, photographies de Michel Piquemal), 1984.
Encore un effort, Monsieur le Président …, essai, 1985 (édition de poche, 1986).
Réponse au discours de réception à l’Académie française de Georges Duby , 1988.
L’Empire immobile ou le Choc des mondes , récit historique, 1989 (édition de poche, 1991).
Discours de remise du prix Tocqueville à Octavio Paz , 1990.
Réponse au discours de réception à l’Académie française de Jacqueline de Romilly , 1990.
La Tragedie chinoise , essai, 1990 (édition de poche, 1992).
Images de l’Empire immobile , album (reproductions d’aquarelles de William Alexander et des pères Castiglione et Attiret, ainsi que de peinture chinoise anonyme sur soie ; textes de l’auteur), 1990.
Un choc de cultures , * La vision des Chinois, 1991.
La France en désarroi , 1992 (édition de poche, 1994 ; nouvelle édition, 1995).
Réponse au discours de réception à l’Académie française de Jean-François Deniau , 1993.
C’était de Gaulle *, 1994.
Direction d’ouvrages collectifs
Qu’est-ce que la participation ? (auditions de François Bloch-Laîné, José Bidegain, François Ceyrac, Eugène Descamps…, avec une introduction et des commentaires de l’auteur), 1969.
La Drogue (exposés du Pr Jean Delay, du Pr Deniker, du Pr Lebovici, du Dr Olievenstein…, introduits et commentés par l’auteur), 1970.
Décentraliser les responsabilités. Pourquoi ? Comment ? (rapports d’enquêtes de Michel Crozier et Jean-Claude Thœnig, d’Octave Gélinier, d’Élie Sultan, présentés par l’auteur), 1976 (édition de poche, 1979).
Réponses à la violence. Rapport au président de la République du Comité d’études sur la violence, la délinquance et la criminalité , présidé par l’auteur, 1977 (édition de poche, 1977).
L’Aventure du XX e  siècle , 1986 (nouvelles éditions, 1987, 1988, 1989, 1990, 1991, 1992, 1993, 1994, 1995).
À paraître
La Société de confiance , essai sur les origines et la nature de la civilisation industrielle.
C’était de Gaulle ** .
© O DILE J ACOB, MAI  1995 15, RUE S OUFFLOT , 75005 P ARIS
www.odilejacob.fr
ISBN  : 978-2-7381-6183-3
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo .
Les pages qu’on va lire représentent une réécriture des notes d’après lesquelles, à l’automne 1994, j’ai prononcé au Collège de France, comme professeur-invité, ces leçons d’ éthologie comparée du développement.
A. P.
La notion de « miracle » en histoire économique

L’unité du phénomène humain
Mon premier mot sera pour remercier l’Assemblée des professeurs du Collège de France de m’avoir fait l’honneur de m’inviter à professer dans ses murs ces leçons d’ éthologie comparée du développement , projet qui, lui, avait été présenté à l’initiative de plusieurs de ses membres.
Ceux-ci appartiennent à des disciplines diverses, comme sont diverses les disciplines qui se rejoignent dans l’ éthologie humaine comparée , c’est-à-dire l’étude comparative des comportements et des mentalités dans les sociétés humaines.
Les éthologues se trouvent, du fait de leur pluridisciplinarité obligée, dans le mauvais cas d’aborder toutes sortes de champs de recherche sans être spécialistes d’aucun. La rigueur scientifique voudrait qu’on ne parlât pas d’économie sans être économètre, du Japon sans être japonisant, du protestantisme sans être his torien des religions : c’est dire combien cette démarche requiert de prudence, de vérifications auprès des spécialistes, de constants aller et retour entre les hypothèses hasardées et le savoir vivant accumulé par d’autres chercheurs.
Mais la rigueur scientifique est aussi en droit de poser l’ unité du phénomène humain . Ne faut-il pas aller examiner dans les diverses sciences humaines ce qu’elles ont à en dire ? Ne faut-il pas imiter la sagesse des Chinois, exprimée dans l’idéogramme qui signifie érudition  ? Il se compose lui-même de deux idéogrammes, celui de la corne de bœuf et celui du tire-bouchon : l’érudition consiste à évider la corne avec un tire-bouchon. Plus on va profond, plus l’entonnoir se rétrécit, moins on retire de substance ; et plus on s’éloigne de la lumière – comme des autres érudits. Évitons le piège de la corne de bœuf…

La censure de l’explication culturelle
L’éthologie encourt aussi d’autres censures. Un de mes maîtres, qui enseigna dans cette même salle, André Siegfried, m’avait prévenu il y a quarante-six ans, quand je m’apprêtais à déposer mon sujet de thèse : « Vous vous engagez sur un terrain miné. L’étude des mentalités est rendue quasi impossible par les mentalités elles-mêmes. »
Reconnaissons que la psychologie des peuples, à laquelle il s’est lui-même essayé en publiant l’ Âme des peuples , n’a pas bonne réputation. On la prend volontiers pour une forme de racisme. On bute sur des interdits. De ce que tous les hommes sont égaux en droit , on a fini par déduire qu’ils sont pareils en fait . On répugne à reconnaître une différence d’aptitudes, fût-elle strictement culturelle.
Admettre que nos retards ou nos échecs tiennent à ce que nous avons de plus intime, notre éducation, notre imprégnation mentale, ce que nous avons reçu des nôtres, de nos parents, de notre groupe, c’est humiliant.
Pour un pays sous-développé, il est plus réconfortant d’incriminer la nature du sol, ou le régime des vents, ou l’impérialisme colonialiste, ou celui du Fonds monétaire international. Du reste, les pays les plus avancés ont pris le parti de le croire, ou de faire semblant. Et comment nier que le climat, le colonialisme, ou l’impérialisme aient aussi joué leur rôle, accentuant les différences d’aptitudes, creusant les écarts de niveau de vie, assurant la domination du fort sur le faible ?
Mais surtout, il y a une sorte de délicatesse à ne pas évoquer certaines pesanteurs de l’environnement social devant ceux qui en sont affligés. L’avance ou le retard du développement, il est plus confortable de les expliquer par la géographie, que par les mentalités.
Nous allons pourtant nous y risquer.

Ce qu’il faut expliquer : le développement
Le fait le plus marquant du demi-siècle écoulé est probablement la prise de conscience, grâce à l’accélération des transports et à l’instantanéité de la communication, de l’insupportable fossé qui sépare les pays développés des pays sous-développés.
Et le fait le plus marquant du prochain siècle sera probablement l’aggravation de ce déséquilibre, en raison de l’explosion démographique dans les pays sous- développés et du recul simultané de la natalité dans les pays développés.
Mes réflexions sur ce sujet ont été marquées par les contraintes et les chances de mon parcours. Celui-ci m’a obligé en quelque sorte à ne pas quitter le terrain du réel. Mes convictions doivent moins aux notations du lecteur qu’aux observations du voyageur, de l’élu, du responsable, à des entretiens avec des acteurs des sociétés les plus avancées comme les plus arriérées, à des rencontres avec des innovateurs, des entreprenants – ces personnages-clés dont ne se soucient pourtant ni Marx, ni Weber, ni Keynes, ni même Braudel, mais davantage, heureusement, Schumpeter et Hayek.
Cette recherche a croisé le fait et le concept de « développement » et de « sous-développement » : les « Trente Glorieuses », l’apparition d’un « tiers-monde », les espoirs et les déceptions de la décolonisation, interrogeaient nos générations. La résistance du « sous-développement » montrait les limites d’une analyse (ou d’une action) en termes d’investissements financiers, de crédits, de main-d’œuvre, de volontarisme d’État ou de parti. Il fallait s’enfoncer plus au cœur des fonctionnements sociaux – et mentaux.
En parcourant l’Afrique, du nord au sud et de l’ouest à l’est, comme rapporteur sur l’outre-mer du Parlement européen, puis, à d’autres occasions, l’Extrême-Orient, l’Amérique latine, l’Océanie, j’ai constaté que ce qu’on nomme le « sous-développement » était avant tout le non-développement tenace de sociétés coutumières ; non-développement que complique, il est vrai, depuis quelques décennies, la croissance démographique induite par la médecine occidentale ; mais qui est imputable avant tout à des facteurs culturels défavorisants ; tandis que ce qu’on appelle le « développement » est un essor, résultant essentiellement de la convergence de facteurs culturels favorisants. Ce n’est pas le sous-développement qu’il faut expliquer, mais le développement .

Les euphémismes du sous-développement
Avouons-le, l’expression de « pays sous-développés » heurte

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