Jeu, compétition et pouvoir dans l espace germanique
337 pages
Français

Jeu, compétition et pouvoir dans l'espace germanique , livre ebook

337 pages
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Description

Qu'ont de commun le jeu, que l'on pourrait croire enfantin et gratuit, la compétition, généralement sportive ou intellectuelle, et le pouvoir, enjeu sérieux aux graves conséquences? Leur intrication est analysée ici dans des champs disciplinaires aussi divers que la psychanalyse, les sciences de l'éducation, la sociologie, l'économie ou encore les sciences de la culture. Ce volume explore le phénomène ludique dans l'espace germanique.

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Informations

Publié par
Date de parution 01 novembre 2012
Nombre de lectures 13
EAN13 9782296509375
Langue Français
Poids de l'ouvrage 4 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,1450€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

encore les sciences de la culture. Croisant les réLexions sociologiques
(în XIX
Sous la direction deMechthild Coustillac et Françoise Knopper
et Françoise Knopper Jeu, compétition et pouvoir dans l’espace germanique
De L’Allemand
JEU, COMPÉTITION ET POUVOIR
DANS L’ESPACE GERMANIQUE
De l’allemand (DA) Collection dirigée par Françoise Lartillot (Germaniste, Professeur de l’Université de Metz) et Joël Bernat Comité scientifique Axel Gellhaus (Aix-la-Chapelle), Michel Grunewald (Metz), Eva Koczisky (Budapest, Szeged), Nadia Lapchine (Toulouse), Reiner Marcowitz (Metz), Ina Ulrike Paul (Munich, Berlin), Alfred Pfabigan (Vienne), Uwe Puschner (Berlin), Jean Schillinger (Nancy), Françoise Lartillot (Metz), Joël Bernat (Nancy) Le titre de cette collection fait écho à celui de Mme de Staël,De l’Allemagne, qui voulait diffuser plus largement la littérature et la pensée allemandes en France. La connaissance de l’Allemagne et de ses lettres s’est diversifiée depuis, elle n’est plus, espérons-le, la cause de quelque bannissement ; pourtant il ne semble pas superflu de soutenir par une médiation renouvelée la diffusion de ce qui s’écrit « en allemand » (que ce soit de textes d’Allemagne, d’Autriche, de Suisse alémanique, …). Tel est le sens de «DA» : un premier volant de la collection présente des traductions de textes encore inconnus en France, soit littéraires soit critiques, elle ne négligera pas de présenter à l’occasion des textes qui, pour être déjà connus en langue française, n’en recèleraient pas moins encore quelque secret recouvert par certaines habitudes de lecture et qu’il s’agirait alors d’exhumer. La lecture critique sera au cœur de l’autre volant de «DA», lectures d’œuvres en langue allemande, qui proposeront non seulement des voies d’accès mais aussi une réflexion sur ces voies, qu’elles suivent et feront donc jouer les points de vue. Donc une collection qui se divise en deux séries : des études et recherches universitaires, et des traductions inédites en français.
JEU, COMPÉTITION ET POUVOIR
DANS L’ESPACE GERMANIQUE
Articles réunis par Mechthild Coustillac et Françoise Knopper
© L’Harmattan, 2012 5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr ISBN : 978-2-336-00376-4 EAN : 9782336003764
Avant-propos Dans sesLettres sur l’éducation esthétique de l’homme, texte fondateur rédigé en 1794-95, Friedrich Schiller fait de cequ’il appelle l’« instinct de jeu »(Spieltrieb)laprincipale clé de l’idéal deplénitude humaine. C’est en effetpar lejeu, comme lepense cegrand humaniste allemand,que l’homme parviendrait à restaurer l’unitéperdue de sa nature déchirée entre l’« instinct sensible »(der sinnliche Trieb), domaine des lois de la naturequi réclamerait du changement, et l’« instinct formel » (der Formtrieb), domaine de la raison et de la libertéqui aspirerait à la stabilité et à lapermanence. En permettant à ces deux instincts antagonistes d’agir de concert, lejeu pconcilier le devenir et l’êtreermettrait non seulement à l’homme de « e absolu, le changement et l’identité »(XIV lettre), mais aussi de retrouver sa liberté, consubstantielle à son humanité au sens noble du terme. Cette dernière ne lui serait doncpleinement accessiblequegrâce à son instinct de jeu : « L’homme nejoueque là où, dans lapleine acception de ce mot, il est homme, et il n’est tout à fait hommeque là où iljoue. » Près d’un siècle et demiplus tard, en 1938, l’historien néerlandais Johan Huizingaplace lui aussi lejeu au centre de l’humain, en ajoutant aux concepts d’homo sapiens et d’homofabercelui d’homo ludens. Dans son ouvrageHomo Ludens – Essai sur lafonction sociale dujeu,qui servira de e référence aux théoriciens dujsiècle, ileu du XX jette les bases d’une théorie moderne dujeu, examiné sous l’angle de son rôle civilisationnel et social. Huizinga définit lejeu comme « une action libre, sentie comme ‘fictive’ et située en dehors de la vie courante, capable néanmoins d’absorber totalement lejoueur ; une action dénuée de tout intérêt matériel et de toute utilité ; qui s’accomplit en un temps et dans un espace expressément circonscrits, se déroule avec ordre selon des règles données, et suscite dans la vie des relations degroupe s’entourant volontiers de mystère ou accentuantpar le guisement leur étrangeté vis-à-vis du monde habituel »(Gallimard 1951, 35). Ici encore, la liberté est, comme chez Schiller, associée à l’idée dejeu, mais ce dernier est décrit comme une activité exercée dans un espace spatio-temporel séparé de la « vie courante », selon sespropres règles bien définies, alorsquejeu et vie sociale auraient été indistinctes dans les civilisations archaïques comme le montreraient,par exemple, les dénominations anciennes de la compétition (agôn) et de la lutte armée dans les langues germaniques ou engrec. Cependant, le caractère ludique et agonal perdurerait au sein des sociétés occidentales modernes dans des domaines aussi diversque le commerce, les sciences ou la viepolitique, et il se trouverait même renforcépar les moyens de communication modernes. Vingt ansplus tard, le sociologue Roger Caillois soumet les thèses de Huizinga à une lecture critiquequi, elle aussi, fera date. Dans son essaiLes jeux et les hommes(Gallimard 1958), il systématise la réflexion entreprise par l’historien néerlandais en esquissant les lignes d’une sociologie fondée
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Mechthild Coustillac & Françoise Knopper
sur le critère de fécondité culturelle dujeu. Élément civilisateurpar excellence, lejeu, en disciplinant les instinctsprimitifs, leur imposerait une existence institutionnelle et ferait ainsi entrer les sociétés dans la civilisation. Cailloispropose une classification des différents types dejeu en fonction de leur caractère fondamental, déterminépar l’attitude desjoueurs et le ressort psychologiquequi les fait agir. Desquatre catégories dejeux,agôn(jeux de compétition),alea (jeux de hasard),mimicry (jeux d’imitation et d’interprétation)etilinx(jeux du vertige), c’est lapremière, celle de l’agôn, qui retient iciplusparticulièrement notre intérêt. L’agôn– à côté de l’aleaserait en effet la catégorie ludique prédominant dans les sociétés civilisées évoluées, que Caillois appelle aussisociétés à comptabilité ousociétés à codes et barèmes, et notamment dans les sociétés démocratiques, caractérisées par la compétition réglée. En s’inspirant de Montesquieu, dont il est un grand lecteur, Caillois associe ainsi, à partir de la notion de jeu, les différents ressorts psychologiques qui font agir les hommes à différents types de société, et il adopte, à l’instar de Montesquieu, une posture de moraliste quand il met en garde devant les risques de corruption des fonctionnements sociaux. En quittant l’espace qui lui est réservé pour entrer dans le monde réel, le jeu ne tarderait pas à s’en trouver corrompu, les attitudes des « joueurs » perverties. L’agôn, source de courage, d’esprit de l’effort et de saine émulation, engendrerait alors ruse, violence et volonté de puissance. Cette construction rationaliste et moraliste qui, depuis, a fait l’objet de critiques (Jacques Ehrmann, 1969), nous amène néanmoins au cœur de notre problématique. Le présent volume s’inspire des impulsions données par Huizinga et Caillois, qui ont fécondé la réflexion sur le phénomène ludique dans des champs disciplinaires aussi divers que la psychanalyse, les sciences de l’éducation, la sociologique, l’anthropologie ou encore les sciences de la culture. Les travaux ici réunis explorent la présence du phénomène ludique dans l’espace germanique en s’articulant autour de trois pôles, la théorie, la société, ainsi que la littérature et les arts. La première partie est consacrée aux approches théoriques – psychanalytiques, sociologiques, anthropologiques ou philosophiques – du jeu. En amont de la dimension culturelle et sociale du jeu privilégiée par Huizinga et Caillois, le psychanalyste J. Bernat s’intéresse au rôle du jeu (play) dans l’élaboration des problématiques de la compétition et du pouvoir par le jeune enfant et analyse certaines formes « adultes » du jeu (game) comme résultant d’un échec de ce processus d’élaboration à l’époque infantile. J.-M. Pouget aborde ensuite le rôle du jeu en tant que pacificateur et régulateur des rapports sociaux de la Grèce antique à nos jours. En croisant les analyses de Friedrich Nietzsche et de Norbert Elias, il oppose la fécondité du modèle grec, où l’ensemble de la société serait soumis à l’émulation
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pacifique et dont s’inspireraient les compétitions sportives de nos sociétés modernes, au modèle absolutiste, où la pacification serait obtenue par la monopolisation de la violence et la répression de toute confrontation agonale au sein du corps social. Avec O. Agard, qui propose une lecture critique de l’ouvrageGrenzen der GemeinschaftLes limites de la communauté ») du philosophe et (« sociologue Helmuth Plessner, nous plongeons au cœur de la République de Weimar et de la problématique des modèles –völkischcommuniste – ou fondés sur l’idée de communauté et où l’espace public et, partant, toute possibilité de jeu, se trouveraient abolis. Rejetant les modèles communautaristes, mais aussi la culture luthérienne de l’intériorité, Plessner se fait l’avocat d’une réhabilitation du politique et du jeu diplomatique. Si la possibilité du jeu suppose l’existence de tensions et d’antinomies que l’esprit humain peut, par des stratégies ludiques, chercher à concilier comme l’avait souhaité Schiller, ou à tout le moins désamorcer, le philosophe Hegel, comme le montre L. Calvié, s’était, cent ans avant Plessner, rangé dans le camp des adversaires du jeu en faisant la critique de l’ironie romantique car « l’identité de l’esprit, c’est-à-dire de la raison et donc aussi de la liberté, avec le cours de l’histoire mondiale » qu’il stipulait « ne saurait tolérer le jeu de l’ironie », laquelle suppose « l’absolue souveraineté du moi », dans la filiation du subjectivisme idéaliste et criticiste de Kant et de Fichte. En dépit de cette critique hégélienne de l’art romantique, reprise par Heine, des modes de pensée ludiques seraient à l’œuvre chez le philosophe, tandis que le poète se voit reprocher, par son contemporain Arnold Ruge, de trahir, à cause de son ironie et de la liberté de son jeu littéraire, sa « dépendance du romantisme allemand et de sa composante ludique ». Dans la deuxième partie du volume, le jeu est considéré dans ses rapports au fonctionnement social à différentes époques et dans différents contextes géopolitiques dans les pays et communautés de langue allemande. G. Buscot procède à une analyse comparative des festivités organisées à l’occasion de e e chaque changement de domination, du XVII au XIX siècle, dans deux villes rhénanes frontalières au passé franco-germanique, Fribourg-en-Brisgau et Strasbourg. Ces fêtes princières, qui revêtaient à bien des égards un caractère ludique, pourraient, globalement, être comprises comme un « jeu d’influence réciproque, jeu de séduction, jeu de pression », une « comédie que les acteurs s’emploient à jouer sérieusement ». La contribution d’I. Hillesheim, à travers la lecture d’un roman publié par Sophie von La Roche en 1771, nous transporte dans l’univers d’une cour princière allemande. Dans cette société de cour, qui rappelle celle décrite par Norbert Elias, la jeune et naïve héroïne découvre un univers où le jeu sous toutes ses formes règne en maître, un univers des luttes d’influence qui ne
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