L Aventure l Oréal
176 pages
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L'Aventure l'Oréal , livre ebook

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Description

En 1948, on a peine à l'imaginer aujourd'hui, L'Oréal n'était qu'une PME. En 35 ans, son chiffre d'affaires est passé de 200 millions à 20 milliards de francs. Ce livre révèle que les facteurs tels que l'argent ou les techniques classiques de gestion ont joué un rôle mineur dans cette expansion. Pour François Dalle, celle-ci a été principalement due à l'adhésion de tous à ce qu'il appelle l'esprit L'Oréal : l'installation dans " le mental " de l'entreprise d'une volonté forcenée de conquête et de développement, associée à une véritable mystique de la qualité et au souci de saisir avant les autres " ce qui commence ". C'est ce qui a permis de diversifier les activités de L'Oréal, de les étendre à toute l'Europe, au Japon et aux deux Amériques, et de traverser sans faiblir les crises des années 70 et 80. François Dalle est entré en 1942 chez Monsavon, une petite savonnerie qui appartenait à Eugène Schueller, le fondateur de L'Oréal. Il a ensuite dirigé L'Oréal à partir de 1948, d'abord aux côtés d'Eugène Schueller, puis comme président de 1957 à 1985.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 octobre 2001
Nombre de lectures 0
EAN13 9782738185099
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,1050€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© ÉDITIONS ODILE JACOB, OCTOBRE 2001
15, RUE SOUFFLOT , 75005 PARIS
www.odilejacob.fr
EAN : 978-2-7381-8509-9
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo
Avant-propos

L’idée de ce livre remonte à une conférence que j’avais faite en Sorbonne, à la demande de Mme  Ahrweiler, alors chancelier des universités de Paris. Celle-ci voulait rapprocher du milieu des entreprises les étudiants de toutes disciplines dont elle avait la charge. Un forum avait été organisé dans ce but, qui se tint ensuite, chaque année, et prit le nom de Forum de la Réussite. Il m’avait été demandé d’évoquer mes années à L’Oréal lors de la première manifestation qui eut lieu en 1988 et de dégager de mon exposé des enseignements pratiques pour les étudiants qui se trouveraient en face de moi. Aussi étions-nous convenus que je ferais d’abord un exposé succinct, sur lequel j’inviterais ensuite les étudiants à réagir, afin d’adapter mes recommandations finales à leurs préoccupations.
Ces préoccupations se révélèrent très orientées vers des soucis de réussite immédiate. « Quelle est la fonction la mieux payée à L’Oréal ? Celle qui est la plus prometteuse d’une belle carrière ? Le marketing ? La communication ? La finance ? Comment devient-on P-DG ?… » C’était la première fois, depuis Mai 68, que je me trouvais face à un grand rassemblement d’étudiants et, à travers leurs questions, je constatais que « L’imagination au pouvoir », « N’écoutez pas les gens de plus de 30 ans », « Il est interdit d’interdire », tous ces slogans contestataires paraissaient oubliés. Il n’était plus question de critiquer le système, encore moins de le mettre à bas. Les étudiants cherchaient unanimement à savoir quel était le meilleur moyen de s’y insérer.
Cela pouvait se comprendre. Nous n’étions plus dans les années 60, au temps, somme toute heureux, où les jeunes pensaient pouvoir se permettre de folles récréations sans avoir conscience de compromettre durablement la croissance de l’économie et leur emploi. En 1988, au contraire, la France était installée depuis déjà dix ans dans un chômage à deux chiffres et je savais qu’il frappait les jeunes, y compris les jeunes diplômés, deux fois plus durement que les autres Français. Je ne l’avais pas caché à mon auditoire, me fondant sur les résultats d’une étude que j’avais menée, deux ans plus tôt, à la demande du gouvernement. Face à une telle conjoncture, rien ne paraissait plus futile que l’attitude météorologique adoptée par tant d’hommes politiques, de droite comme de gauche, qui consistait à attendre de l’extérieur la croissance et l’emploi. Nous devions au contraire nous convaincre que le retour à la croissance et au plein emploi dépendait de nous tous, des chefs d’entreprise comme des travailleurs et des futurs travailleurs, de sorte que j’aurais aimé que le Forum de la Réussite changeât de nom pour s’appeler le Forum de l’Effort.
L’ambiance dans laquelle nous vivions, à la fin des années 80, offrait de profondes similitudes avec celle que j’avais connue avant la guerre, au cours de ma jeunesse et de mon adolescence. Dans ma famille, nous ne manquions de rien d’essentiel, mais nous menions une existence relativement austère. L’attachement de ma mère, flamande d’origine, à la religion catholique et le militantisme social de mon père, modeste industriel, modelaient nos existences. Nous habitions à proximité de l’usine de mon père et nos voisins immédiats appartenaient, pour la plupart, à des familles d’ouvriers. Nous n’ignorions rien de leurs problèmes matériels, ni de leur état d’esprit. Nous savions que l’austérité leur était imposée, que la religion ne les aidait pas toujours à la supporter, qu’en fait ils s’attachaient, de plus en plus nombreux, à une foi nouvelle et que, leurs patrons ne leur offrant pas l’espoir d’une vie meilleure, ils étaient prêts à toutes les révoltes pour connaître des « lendemains qui chantent ».
À mon tour, j’étais révolté, mais de façon différente. Je me disais qu’il devait exister d’autres ouvertures et qu’il fallait se mettre à leur recherche. Mon père, de son côté, m’incitait à tirer parti de mes moments d’inaction forcée (je souffrais d’asthme et dus, longtemps, garder la chambre) pour me documenter et, avant toute chose, pour essayer de comprendre les raisons de ce marasme. La grande guerre, puis la grande dépression des années 30, en faisaient incontestablement partie. La dépression était survenue alors que la France venait d’être saignée par quatre années d’une guerre dont les récits qu’en faisaient nos aînés nous glaçaient d’horreur, mes frères et moi. Parce que c’était une marche, la région du Nord, où j’ai vécu jusqu’à mon entrée à l’Université, à Paris, avait particulièrement souffert des destructions de cette guerre. Nous entendions dire que l’Allemagne aurait dû payer, mais qu’elle ne l’avait pas fait, de sorte que les frais de la reconstruction avaient un peu plus appauvri le pays. En revanche, nos maîtres nous avaient enseigné à l’école primaire que le Nord faisait exception car, ses équipements ayant été remis à neuf dans les années 20, il jouissait, pour son développement industriel, d’atouts dont les autres régions étaient dépourvues.
Je voyais bien, pourtant, qu’il n’avait pas su, ou pu, en tirer parti. Le souvenir que je garde de mes années d’adolescence, les années 30, est conforme à ce que, plus jeune, j’avais déjà pressenti : une succession de conflits sociaux, de grèves dures, avec occupations d’usines et charges de gardes mobiles pour en évacuer les ouvriers. C’est alors que j’ai commencé à me rendre compte, confusément, que le facteur matériel, le capital, pour parler comme les économistes, ne suffisait pas à assurer le développement. Il fallait une conjonction de facteurs autres, à commencer par le moral, ou ce qu’on devait appeler plus tard, dans le milieu du sport de compétition, le mental. Or le Nord n’avait pas le moral. On se plaisait pourtant à vanter les qualités de ses ouvriers, leur acharnement au travail. Ce sont des gens qui cachent, sous un abord souvent rude, une très grande jovialité. Ils ont le goût de la fête. Notre petit village organisait, chaque année, plusieurs courses cyclistes et tenait sa ducasse, où se produisait l’harmonie municipale. La vie associative était très animée. Les anciens combattants bien sûr, le patronage, mais aussi le club de football que j’avais d’ailleurs créé, les Longues Pipes et les Buveurs de Bière, toutes ces organisations étaient très actives.
Et puis, insensiblement, vinrent des temps différents. Avec la crise du début des années 30, la vie de notre petite communauté changea. Les ouvriers, qui constituaient la majorité de la population du village, élevaient la voix de plus en plus souvent et de plus en plus violemment, pour exprimer, de façon lancinante, la même plainte concernant l’insuffisance de leurs salaires. Beaucoup de patrons en convenaient mais, dans leur milieu, on s’accordait à estimer que les entreprises n’avaient pas les moyens de distribuer davantage de pouvoir d’achat à leurs employés. Je n’avais aucune raison de mettre en doute leurs affirmations car leurs entreprises, notamment dans le textile, qui était la grande spécialité du Nord, étaient manifestement des gagne-petit. Mais il en était ainsi parce que les produits qu’on y produisait étaient des produits simples, faisant appel à des méthodes simples et traditionnelles. Pour assurer la charge des usines, on se croyait obligé de chercher des débouchés à l’exportation. Il faut savoir que, depuis au moins Jules Ferry, « les débouchés » étaient une des grandes justifications de l’empire colonial de la III e  République et qu’ils étaient particulièrement importants pour le textile. Ce secteur était, dans les années 30, un de nos secteurs industriels les plus exportateurs. Or il exportait essentiellement, vers les colonies, des articles banals, faciles à fabriquer au kilomètre, de sorte que, loin de constituer une panacée, l’exportation contribuait à faire de l’industrie textile, le symbole du Nord, une industrie à faible valeur ajoutée. Même les patrons vivaient chichement. C’était le règne du capitalisme sans abondance.
Il était clair qu’il aurait fallu commencer par rendre ces entreprises plus profitables. C’est là que j’ai acquis la certitude que le capitalisme ne peut se justifier que dans la mesure où il apporte l’abondance. Mais, comment y parvenir sans rechercher la complexité des productions plutôt que leur simplicité, sans pratiquer l’écoute du consommateur ni s’efforcer de mobiliser à son service le progrès technique, l’innovation, le perfectionnement professionnel des membres du personnel ? En bref, j’avais acquis la conviction que la mission du dirigeant et, d’une manière générale, celle de tous les hommes d’entreprises devaient être de faire croître la valeur ajoutée par leur entreprise aux produits qu’elles achètent à l’extérieur. Sans valeur ajoutée, pas de richesse produite au bénéfice du consommateur, pas de richesse distribuée aux actionnaires et aux membres du personnel.
Ces idées avaient dû être mises en sommeil au cours de ma préparation militaire, puis pendant la guerre et enfin pendant l’Occupation. Mais je ne les avais pas oubliées. Elles ont rejailli à la Libération, au spectacle de l’abondance matérielle que donnaient alors les armées américaines. Je n’avais pl

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