De la désindustrialisation à la tertiarisation, vers un mélange des genres
190 pages
Français

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Description

Depuis ces trente dernières années, la désindustrialisation reste une réalité complexe mais néanmoins avérée, surtout en terme d'emploi. Mais la séparation entre industrie et services devient de moins en moins nette. D'une part, l'industrie se « tertiarise » en produisant de plus en plus de services ou en consommant davantage de services qu'elle produisait autrefois et qui sont désormais externalisés ; de même, la part des métiers tertiaires dans l'industrie ne cesse d'augmenter et l'investissement y devient de plus en plus immatériel. D'autre part, le tertiaire s'industrialise : le nombre d'ouvriers est plus élevé dans le tertiaire que dans l'industrie ; les entreprises de services produisent sur un mode industriel. C'est bien vers un mélange des genres entre industrie et services que tend l'économie française avec une interpénétration croissante entre ces deux ensembles. La croissance forte du tertiaire, notamment de l'emploi, durant ces dernières décennies n'est-elle pas source de diversité et de complexité ? La « tertiarisation » de l'économie ne pose-t-elle pas des problèmes statistiques, conceptuels et méthodologiques : les notions de volume et de productivité du travail ne sont-elles pas à revoir dans le « tertiaire moderne » ? Ces questions ne deviennent-elles pas importantes du fait même du poids croissant de ce secteur dans l'économie du pays ? L'ouvrage de Michel Braibant décrypte au fil d'une étude rigoureuse, les mutations du paysage économique français depuis 1980 dévoilant ainsi la désuétude de la classification traditionnelle de l'activité en trois secteurs.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 19 février 2015
Nombre de lectures 0
EAN13 9782342034745
Langue Français
Poids de l'ouvrage 4 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0082€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

De la désindustrialisation à la tertiarisation, vers un mélange des genres
Michel Braibant
Société des écrivains

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Société des écrivains
14, rue des Volontaires
75015 PARIS – France
Tél. : +33 (0)1 53 69 65 55
De la désindustrialisation à la tertiarisation, vers un mélange des genres

 
 
Les données sont en grande partie extraites des travaux et des publications de l’Insee ou d’Eurostat mais les conclusions n’engagent que la responsabilité de l’auteur. Celui-ci tient à remercier particulièrement Sylvain Billot, Anne Maurellet et Thierry Méot pour leur contribution et notamment leur relecture et leurs conseils. De même, il remercie Ronan Mahieu et l’ensemble du Département des Comptes Nationaux de l’Insee qui l’ont accompagné pour la réalisation de cet ouvrage. Il exprime sa gratitude aux personnes qui, à titre personnel, ont apporté leur aide pour la rédaction de cet ouvrage.

 
 
Vue d’ensemble
 
 
 
Que signifie la notion de désindustrialisation [1] 1  ? Tout d’abord, on peut se référer à la part de l’industrie dans la valeur ajoutée globale en volume et surtout en valeur, puis à l’évolution de la valeur ajoutée en volume. On peut ensuite observer les effectifs « en personnes physiques » ou en « équivalents temps plein » (qui prend en compte le temps partiel) en suivant à nouveau, les évolutions ou la part de l’industrie manufacturière dans le total des effectifs.
 
Avec 10,5 % des effectifs globaux en 2012, la désindustrialisation semble avérée en France, non seulement parce que ce pourcentage a diminué mais aussi parce qu’il est très bas [2]. D’autres indicateurs sont pertinents comme le taux de marge (rapport entre l’excédent brut d’exploitation et la valeur ajoutée), l’évolution des exportations et surtout celle du solde du commerce extérieur (négatif, il traduit une désindustrialisation surtout s’il était positif dix ans plus tôt). L’évolution du contenu en importations des emplois intérieurs (consommation finale, consommation intermédiaire et formation brute de capital fixe) est aussi un indicateur pertinent. Une hausse de ces ratios traduit une désindustrialisation : ce qu’on produisait auparavant est désormais importé. Enfin, l’externalisation des services peut traduire une désindustrialisation et expliquer une baisse de la valeur ajoutée industrielle.
 
En effet, si une entreprise industrielle a une activité auxiliaire de services, par exemple l’activité « expertise comptable », celle-ci est incluse dans la valeur ajoutée de l’entreprise industrielle et donc dans la valeur ajoutée industrielle. Si l’entreprise décide d’externaliser cette tâche, alors la valeur ajoutée de l’activité d’expertise comptable bascule dans la valeur ajoutée des services.
 
La désindustrialisation en France, qui n’est pas récente, semble se renforcer entre 2000 et 2012 : c’est ce qui ressort du faisceau d’indicateurs précédents issus de la comptabilité nationale, en comparant la France à ses principaux partenaires européens [3] (voir annexe 1 et 2).
 
Elle se caractérise par plusieurs critères concomitants : un recul de l’emploi industriel ; un recul de la part de la branche industrielle dans la valeur ajoutée globale à prix courants (voir lexique) ; une dégradation de sa situation financière et du solde extérieur, marquée à la fois par la hausse de la part des importations dans la consommation des ménages ou celle des entreprises et par la perte de compétitivité sur les marchés étrangers. La France subit de plein fouet ces phénomènes durant la dernière décennie [4].
 
Dès 1975, l’emploi industriel baisse tandis que celui des services marchands continue de croître. À la même époque, la part de l’emploi industriel commence à baisser. En 1980, on note un décrochage entre l’évolution de la valeur ajoutée en volume de l’industrie et celle des services marchands.
 
En 2013, la part de la valeur ajoutée de l’industrie manufacturière (ensemble de l’industrie non extractive y compris les industries agroalimentaires et le raffinage pétrolier) est la plus faible en France en monnaie courante. Elle est de 11,3 % (15,7 % en 2000) contre 22 % en Allemagne et 15 % en Italie ; seul le Royaume-Uni connaît une baisse encore plus prononcée qu’en France.
 
Toutefois, on n’observe pas une telle baisse en volume ce qui amène à nuancer ce phénomène de désindustrialisation entre 2000 et 2013 ; en effet la valeur ajoutée de l’industrie manufacturière croît de 9 % en volume en France soit moins qu’en Allemagne ; mais elle baisse en Italie et au Royaume-Uni.
 
Sur tous ces points, certaines branches industrielles, telle l’automobile, sont particulièrement affectées. D’autres échappent en partie à la désindustrialisation.
 
D’autre part, existe-t-il un lien entre désindustrialisation et financiarisation ? Les placements financiers des entreprises (achat d’actions, de produits dérivés), les dividendes versés, qui s’envolent avant la crise ont-ils eu pour effet de ralentir l’investissement de celles-ci ?
 
 
Qu’en est-il des activités tertiaires ? L’examen de l’emploi tertiaire depuis un siècle, à un niveau détaillé d’activité, met en relief trois types d’évolution : certains services régressent ou se transforment, d’autres suivent le cours de l’activité économique, d’autres enfin font au cours des dernières décennies une percée fulgurante. Les liens de plus en plus étroits entre l’industrie et la plupart des services modernes remettent en question l’« image » d’un tertiaire essentiellement destiné aux ménages. En outre, le tertiaire, sauf la santé et les services liés à l’information, a été affecté avec retard mais de façon sensible, par la crise économique des années 2008-2013.
 
Ces deux évolutions concomitantes – désindustrialisation et tertiairisation – semblent plus complexes qu’il y paraît, comme si la classification en trois secteurs était aujourd’hui dépassée. Au cours de ces trente dernières années, la séparation entre industrie et services devient de moins en moins nette. D’une part, l’industrie se « tertiairise » en produisant de plus en plus de services ou en consommant davantage de services qu’elle produisait autrefois et qui sont désormais externalisés ; de même, la part des métiers tertiaires dans l’industrie ne cesse d’augmenter et l’investissement (recherche, logiciels) y devient de plus en plus immatériel.
 
D’autre part, le tertiaire s’industrialise : le nombre d’ouvriers est plus élevé dans le secteur tertiaire que dans l’Industrie ; les entreprises de services produisent sur un mode de type industriel (par exemple les repas des cantines, les services de nettoyage, le commerce et les transports) ; le capital atteint des niveaux records dans le tertiaire. C’est bien vers un mélange des genres entre industrie et services que tend l’économie française avec une interpénétration croissante entre ces deux ensembles.
 
Deux facteurs principaux ont ainsi contribué au développement des services depuis trente ans. En premier lieu, avec l’amélioration de leur niveau de vie, les ménages consomment une part toujours plus grande de services. La part des services marchands dans leur consommation est passée de 23 % en 1980 à 30 % en 2012, au détriment des produits manufacturés ; là aussi, l’évolution doit être relativisée, montrant une fois de plus que ces deux notions de biens et services restent à préciser : en 2012, en volume, la part des achats de biens par les ménages, y compris l’énergie, n’est pas inférieure à ce qu’elle était en 1949. En second lieu, les entreprises achètent de plus en plus de services pour produire : ces derniers représentent 31 % de leurs achats en 2012 contre 20 % en 1980. Ils correspondent soit à des fonctions externalisées (nettoyage, sécurité, location de matériel ou de main-d’œuvre), soit à des fonctions dont l’importance croît (informatique, communication, recherche, publicité, contrôle de gestion, etc.).
 
La notion de secteur « tertiaire » est apparue voilà presque cent ans. À cette époque, traversée par la première grande crise économique du vingtième siècle et dans la foulée des révolutions industrielles, il paraissait utile de séparer l’économie en trois ensembles afin de mieux comprendre les évolutions de l’emploi. Une première définition, négative ou résiduelle qualifiait de tertiaire toute activité qui n’était ni agricole ni industrielle.
 
Cette formulation devait être par la suite complétée par une définition moins sommaire, dont l’objet était de suggérer des critères d’homogénéité du « tertiaire ». Parmi ces derniers, trois ont souvent été avancés : une part croissante de l’emploi, une relative insensibilité aux crises économiques, et surtout un progrès technique faible. Cette dernière caractéristique n’était sans doute pas applicable à tout le tertiaire : les transports et certains commerces ont connu des gains de productivité importants. Jusqu’au milieu de la décennie 1980, on pouvait cependant admettre que la plupart des activités à faible progrès technique étaient des activités non industrielles et non agricoles.
 
Tertiaire insaisissable ? Le fait même de poser cette interrogation indique les problèmes conceptuels d’aujourd’hui : la classification en trois secteurs est contemporaine de l’époque où se dessinait une méthode homogène de représentation des évolutions économiques, la comptabilité nationale. Comparer les croissances sectorielles du volume de la production et de l’emploi obligeait de classer chaque activité dans l’un des trois ensembles. Et, si l’on admettait que la notion de « volume » (quantité physique à qualité donnée pour les biens)

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