L’Afrique subsaharienne : pratiques foncières, mutations de l’habitat rural et crises de l’espace agricole : de la géographie rurale

Folly Jean-Pierre Clavere Tomety

Description

Les caractéristiques traditionnelles (l’inaliénabilité, la sacralité, l’indivisibilité) inhérentes aux domaines fonciers en Afrique subsaharienne sont bouleversées de nos jours en raison de l’émergence des marchés fonciers et de l’introduction du droit moderne au détriment du droit coutumier. De même, l’habitat traditionnel dans les milieux ruraux d’Afrique subsaharienne est en mutation vers le modernisme aussi bien dans son organisation spatiale que dans ses matériaux de construction. Cette dynamique du foncier et cette mutation de l’habitat rural sont l’un des facteurs liés aux crises de l’espace agricole que l’on observe aujourd’hui dans certains secteurs de l’Afrique subsaharienne surtout si on perçoit ces crises sous l’angle de l’indisponibilité et de l'appauvrissement. N’étant pas suffisamment disponibles, les terres cultivables sont surexploitées, deviennent pauvres et nécessitent alors l’utilisation accrue des intrants. Ailleurs où les terres sont suffisamment disponibles, elles sont sous-exploitées faute de force de travail et de moyens d’exploitation.

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Informations

• Publié par: Edilivre
• Date de parution: 08 août 2018
• Nombre de lectures: 2
• EAN13: 9782414254507
• Langue: Français

Extrait

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intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-414-25451-4

© Edilivre, 2019
A paraître :
– « TU DOIS RÉUSSIR TA VIE, PAS D’EXCUSES À DONNER »
– « LE PROTESTANT DE VATICAN »
Introduction générale
L’occupation des terres, leur collectivisation et leur caractère sacré sont aussi vieux que la sédentarisation de l’agriculture. Cependant l’individualisation et la marchandisation des droits de propriété sont quant à elles des phénomènes sans nul doute nouveaux en Afrique subsaharienne. En effet la terre était une propriété “Ab origine” collective et sacrée dans les coutumes et traditions africaines. Elle devient de plus en plus une marchandise précieuse dans la plupart des pays d’Afrique subsaharienne. Les milieux urbains ont été à l’avant-garde de ce phénomène qui aujourd’hui, se propage vers les campagnes où certaines caractéristiques inhérentes à la collectivisation et à l’inaliénabilité des terres sont en train de disparaître. Les terres sont de plus en plus mises en vente et deviennent une source de conflits.
Les terres de culture se transforment en terrain de constructions résidentielles ou commerciales. Les hommes, à force de s’adonner à l’agriculture sédentaire, ont senti le besoin de s’installer. Leurs habitations qui se limitaient à des hangars ou à des huttes construites avec des branchages, ont évolué en habitations solides de mur en terre pétrie et de plus en plus on assiste à des constructions en parpaing de ciment avec comme devanciers les milieux urbains. Les milieux ruraux ne sont pas épargnés de nos jours en ce qui concerne cette modernisation de l’habitat et des habitations. Les concessions collectives familiales disparaissent au fur et à mesure que les terres communautaires s’individualisent. Des maisons conjugales unifamiliales émergent de cette logique qui fait naître toute sorte d’habitations
À l’occasion de son XIII e congrès tenu à Mexico en 1978, l’Union international des Architectes a constaté que l’extension des taudis et des zones de squattérisassions (le fait d’ occuper un logement illégalement ) sont deux fois plus rapides que la croissance urbaine moderne. Ce qui impressionne aujourd’hui dans les milieux ruraux est la transformation matérielle, statutaire et architecturale des habitations. Ainsi, l’on assiste à l’émergence des constructions modernes, l’apparition des maisons de location et à des habitations individuelles et conjugales au détriment des maisons de famille. Le périmètre bâti s’agrandit au jour le jour avec une occupation rationnelle de l’espace, des rues tracées en plan quadrillé à angle droit et des îlots beaucoup plus rectangulaires.
Par ailleurs, la dynamique foncière et les mutations de l’habitat engendrent toutes les deux, une crise d’espace agricole. Si la première agit beaucoup plus sur l’individualisation et la surexploitation, la seconde réduit considérablement les superficies cultivables. Il nous semble nécessaire de passer en revue quelques expressions utilisées dans ce document.
Quelques définitions :
1 – Dynamique
Le vocable dynamique vient du grec “dunamis” et veut dire puissance. Il fait référence à une évolution ou à un mouvement. A première vue, dynamique peut être d’une connotation positive mais en pratique, cette évolution peut se faire en deux sens. Une évolution régressive ou une évolution progressive. Dans ce document, notre approche se concentre sur l’évolution progressive.
2 – Mutation
Mutation vient du latin « Mutatio » et désigne un changement ou un ensemble de changements qui peut intervenir dans l’évolution d’un fait, d’un phénomène ou d’une activité spatio-temporelle. Il peut s’agir d’une transformation ou de changement de statut initial tout comme il peut s’agir d’une amélioration intrinsèque à un statut. Elle peut également désigner une augmentation ou une extension de quelque chose. Dans le cas de cette étude, il s’agit principalement de l’amélioration matérielle et statutaire des habitations et de l’organisation de l’habitat en général.
3 – Crise
Le terme crise est utilisé pour faire référence à une situation inhabituelle, à une rupture ou à un renversement du cours normal des choses. Elle vient mettre en péril un phénomène jadis équilibré et fait naître des difficultés dans l’évolution de ce phénomène. Une crise peut s’entendre aussi en terme de pénurie ou de manque de quelque chose considérée jusque-là comme suffisant. Elle peut être aussi une baisse de performance ou de rendement constaté.
4 – Foncier
Le terme foncier désigne tout ce qui fait référence à la terre considérée comme un fonds. C’est-à-dire un capital de production agricole.
5 – Habitat
C’est le mode d’organisation des hommes et de leurs habitations. Les hommes peuvent s’organiser en habitat groupé ou en habitat dispersé. L’habitat doit jouer les rôles suivants : se loger, travailler (il peut s’agir des services, d’artisanat, industrie et autres activités), développer son corps et son esprit (ce qui fait référence aux activités de loisir, de sport et de culture) et circuler (misant sur les voies de desserte).
6 – Rural
Du latin « ruralis », il fait référence à la campagne. Il désigne et caractérise des phénomènes liés à la campagne, aux champs ou aux villages. Un milieu rural est un espace ou l’activité dominante est liée à l’agriculture.
7 – Pression foncière
La pression foncière est la force d’occupation d’une superficie cultivable donnée par un nombre d’exploitants. Plus la densité de population est élevée, plus la pression sur les terres cultivables est grande.
8 – Paysage habitationnel :
C’est l’espace organisé pour des habitations, des transports et des travaux agricoles. C’est l’espace marqué par la volonté “abrituelle ,” mouvementée et vitale de l’Homme. C’est un espace toujours en mouvement de construction par opposition à l’espace habité considéré comme statique à un moment donné .
9 – Habitat ancestral :
C’est le genre d’habitat construit par les membres d’une collectivité se reconnaissant descendants d’un ancêtre commun. Ce type d’habitat est caractéristique d’une famille élargie qui subsiste en Afrique subsaharienne. Les individus préfèrent construire sur les terres appartenant à cet ancêtre en disposant les maisons les unes face aux autres laissant souvent une cour au milieu avec un arbre qui sert de lieu de repos pour chacun.
10 – Habitations intruses : Les habitations intruses sont des logements construits sur des terrains achetés par des personnes étrangères à la collectivité ancestrale. Ces habitations intruses sont souvent modernes.
11 – Habitations nucléaires ou unifamiliales : Les habitations nucléaires sont celles construites par des personnes formant une famille nucléaire de type occidentale et dans lesquelles vivent père, mère(s) et enfants. Ces personnes ne souhaitent pas se mélanger avec la famille élargie typiquement africaine. Ces habitations peuvent être modernes, traditionnelles ou semi-modernes.
12 – Minusculisation parcellaire : Une minusculisation parcellaire est la réduction régulière des superficies des terres héritées par les membres d’une collectivité donnée. Cette minusculisation parcellaire est due aux partages successifs des terres aux ayant-droits de chaque génération. Ce processus conduit progressivement à l’anéantissement des terres d’héritage.
13 – Société patrilinéaire à base masculine : C’est une société dans laquelle seule les fils ont droit à l’héritage de leur père. Le genre féminin n’est pas considéré dans le partage par héritage des biens de leur père. Cela est souvent source des conflits intrafamiliaux.
14 – Société patrilinéaire mixte : C’est une société dans laquelle le genre masculin et le genre féminin sont tous considérés dans le partage des biens de leur père.
15 – Société matrilinéaire à base féminine : C’est une société dans laquelle seules les filles sont considérées dans le partage des biens de leur mère.
16 – Société matrilinéaire mixte : C’est une société dans laquelle le genre féminin et le genre masculin sont tous considérés dans le partage des biens de leur mère.
Il y a d’autres type de sociétés où les enfants héritent des biens de leur(s) oncle(s) maternel(s) et non de leur père. Il faut souligner qu’en Afrique subsaharienne, la coutume n’a pas de testament écrit mais tout se fait selon la tradition qui a toujours prévalu depuis le temps des ancêtres fondateurs de la collectivité.
17 – Habitat-oiseau : Il s’agit des maisons entièrement construites dans les arbres et s’apparentant aux nids d’oiseau. Certains les désignent comme “ maisons-arbres” mais nous préférons plutôt le terme d’ habitat-oiseau .
18 – Habitat suspendu : Il s’agit des maisons construites soit au-dessus d’une surface hydrographique ou soit au-dessus du sol et qui sont soutenues par des pieux en bois ou en métal. D’autres parlent d’habitat sur pilotis , mais nous préférons “ habitat suspendu”
Quelques Acronymes
INED : Institut National des Études Démographiques .
FAO : Food and Agricultural Organisation.
ONU : Organisation des Nations Unies.
OMS : Organisation Mondiale de la Santé.
CNRA : Centre National de Recherche Agronomique.)
CIRAD : Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement .
Ce document qui est destiné à des chercheurs, à des étudiants et à des développeurs s’intéressant à l’Afrique, s’articule autour des points suivants :
– L’Afrique Subsaharienne, une vue d’ensemble.
– La dynamique foncière en Afrique subsaharienne.
– Les mutations de l’habitat en Afrique subsaharienne
– Crises de l’espace agricole en Afrique subsaharienne
– La Bibliographie signalétique.
Chapitre 1 L’Afrique subsaharienne, une vue d’ensemble
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