Petit volume contenant quelques aperçus des hommes et de la société
70 pages
Français

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Petit volume contenant quelques aperçus des hommes et de la société , livre ebook

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Description

On a fait bien des écrits dans le genre de La Bruyère et de La Rochefoucauld ; on en fera beaucoup encore, et la matière ne sera pas épuisée. Quelle matière que l’homme et la société, nos goûts et nos travers, nos ridicules et nos vices, nos intérêts et nos actions !L’expérience du monde ne se compose pas du nombre de choses qu’on a vues, mais du nombre de choses sur lesquelles on a réfléchi. Combien d’hommes, après de grands voyages et une longue vie, n’en sont pas plus avancés !Fruit d’une sélection réalisée au sein des fonds de la Bibliothèque nationale de France, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques dans les meilleures éditions du XIXe siècle.

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EAN13 9782346065066
Langue Français

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Extrait

À propos de Collection XIX
Collection XIX est éditée par BnF-Partenariats, filiale de la Bibliothèque nationale de France.
Fruit d’une sélection réalisée au sein des prestigieux fonds de la BnF, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques de la littérature, mais aussi des livres d’histoire, récits de voyage, portraits et mémoires ou livres pour la jeunesse…
Édités dans la meilleure qualité possible, eu égard au caractère patrimonial de ces fonds publiés au XIX e , les ebooks de Collection XIX sont proposés dans le format ePub3 pour rendre ces ouvrages accessibles au plus grand nombre, sur tous les supports de lecture.
Jean-Baptiste Say
Petit volume contenant quelques aperçus des hommes et de la société
AVERTISSEMENT DE L’ÉDITEUR
Cet ouvrage a paru pour la première fois en 1817, et dès l’année suivante il fallut en faire une seconde édition, qui fut enlevée avec la même rapidité. Depuis lors, le Petit Volume a toujours manqué dans la librairie, et l’on a souvent regretté que des travaux plus importans aient empêché l’auteur de le reproduire. Les leçons qu’il professait, les nombreuses réimpressions de son Traité, la publication de son Cours complet d’Economie politique pratique, absorbaient tout son tems. Il n’oubliait cependant pas entièrement son Petit Volume ; c’était même un délassement de prédilection pour lui que d’y revenir, pour modifier quelques pensées, en ajouter de nouvelles, ou souvent aussi pour donner, par un léger changement, plus de force ou d’originalité à l’expression, plus d’image à la pensée. Il avait préparé ainsi cette nouvelle édition et comptait la livrer à l’impression, lorsqu’il a été subitement enlevé à sa famille, à son pays, et à une science qui lui a dû ses plus grands progrès, et qui a rendu son nom si justement célèbre.
PETIT VOLUME
On a fait bien des écrits dans le genre de La Bruyère et de La Rochefoucauld ; on en fera beaucoup encore, et la matière ne sera pas épuisée. Quelle matière que l’homme et la société, nos goûts et nos travers, nos ridicules et nos vices, nos intérêts et nos actions !

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L’expérience du monde ne se compose pas du nombre de choses qu’on a vues, mais du nombre de choses sur lesquelles on a réfléchi. Combien d’hommes, après de grands voyages et une longue vie, n’en sont pas plus avancés !

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Un bel esprit qui n’a que de l’esprit, lit un opuscule, rencontre une vérité triviale et la tourne en ridicule : C’est une niaiserie, suivant lui ; tout le monde sait cela.  — Cet homme qui a tant d’esprit, n’en a peut-être pas assez. Pourquoi n’essaie-t-il pas du précepte de l’abbé Galiani ? Cet abbé de bouffonne mémoire disait : Vous lisez les lignes qui sont dans mon livre ; vous n’y profiterez guère : c’est le blanc qui est entre les lignes qu’il faut lire, car c’est là que j’ai mis ce qu’il y a d’essentiel.  — Une vérité non contestée a souvent des conséquences que l’on conteste beaucoup. Elles ne sont pas exprimées ces conséquences ; cherchez-les donc ; elles sont peut-être entre les lignes.

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S’élever à des considérations générales c’est, à la vue d’un fait, remonter à la loi dont ce fait n’est qu’une conséquence. Newton, assis sous un pommier, voit tomber une pomme ; bien d’autres avant lui en avaient vu autant. Le premier il rapproche ce fait, insignifiant en apparence, de la déviation de la lune au-dessous de sa tangente ; il mesure la rapidité de ces deux chutes ; il trouve qu’elles appartiennent à une loi commune que confirment toutes les autres observations ; et voilà la gravitation universelle découverte. Socrate méprise Anitus ; Anitus fait condamner Socrate  ; dès là, vous déplorez cette loi de notre nature, qui nous enseigne que les hommes ne pardonnent jamais le mépris.
Lorsqu’une fois on a pris l’habitude de généraliser facilement, et qu’on le fait avec un jugement passablement sain, on peut ensuite descendre de la loi générale à des faits particuliers même inconnus. C’est ainsi que Newton a prédit les aberrations des planètes qu’on n’avait pas encore observées de son temps. C’est ainsi que la connaissance de la nature humaine fait prévoir les aberrations des hommes, même avant qu’elles n’arrivent.
La fermeté de caractère, quand elle se trouve jointe à la faculté de généraliser, fait les hommes supérieurs. Ceux-là savent penser, et en même temps ils savent agir.

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A mesure que l’intelligence grandit, les considérations relatives aux personnes prises individuellement frappent moins, et les généralités davantage. Un enfant, un esprit peu cultivé comme il s’en trouve parmi le beau sexe, ne font attention qu’aux individus. Chaque personne est un être réel, qui frappe les sens ; tandis qu’une nation est un être de raison, dont les maux, les besoins, dont l’opinion ne frappent que l’esprit ; et même il faut y avoir bien réfléchi.

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Dire des vérités générales et éviter de dire des niaiseries paraît facile aux écrivains vulgaires, et fort difficile à ceux qui ne le sont pas. Exemple : Il faut éviter la douleur ; mais la mort n’est rien du tout. Niaiseries, direz-vous : et cependant ces deux propositions sont combattues par un des plus beaux génies de la France, par l’illustre Pascal. Il regardait la douleur morale ou physique comme extrêmement désirable pour faire son salut, et la mort comme le passage le plus important, parce qu’il décide de notre sort pour l’éternité. Cette opinion, pour cet excellent esprit, n’avait pas la moindre incertitude ; il l’avait méditée pendant toute sa vie ; il avait déjà écrit deux volumes pour l’appuyer ; il se proposait d’en écrire quatre dans le même but. Maintenant une moitié des hommes soutient que c’est une vérité, l’autre moitié pense que cette double assertion peut être l’objet d’un doute ; et vous prononcez que c’est une niaiserie ! Je ne suis pas si hardi.

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Nous serons tous jugés par la postérité  ; ceux de nous du moins qui valent la peine que la postérité les juge ; et quand les nations se tirent de la barbarie, la postérité est très proche : les hommes qui nous succéderont immédiatement, commenceront à instruire notre procès. Ceux d’entre nous qui ont joui d’une grande influence en qualité de rois, d’hommes en crédit, de millionnaires, d’écrivains distingués, seront jugés individuellement. Une ville, une nation seront jugées aussi sur la conduite qu’elles auront tenue en telle ou telle occasion. Les circonstances, les opinions, les faits que nous ne voyons qu’imparfaitement, que nous jugeons sur des rapports incomplets, infidèles, à travers nos préventions, seront jugés aussi bien que les hommes. On ne sera plus partagé sur ce qui nous partage. Tous les arrêts seront sévères  : quel motif aurait-on de nous ménager ! mais ils seront équitables ; car les hommes à venir se trouveront désintéressés dans nos affaires. Ils auront notre instruction et la leur par-dessus. Ils seront plus âgés et plus expérimentés que nous qui le sommes plus que nos ancêtres. Enfin, la postérité aura l’immense avantage de juger nos œuvres après les résultats obtenus. Aussi l’homme qui prévoit le mieux l’issue de chaque affaire, juge-t-il comme la postérité.

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Quand on cite un fait comme étant la cause d’un autre, uniquement parce qu’il l’a précédé, c’est comme si l’on disait que les Romains ont fait la conquête du monde parce qu’ils consultaient les poulets sacrés. Il faut de plus prouver rigoureusement que l’effet est lié à la cause.
Sur les frontières de la Suisse et de la Savoie, au pied du mont Salève, est un grand village nommé Chêne, dont une moitié est catholique, et dépend de la Savoie, et l’autre moitié est protestante. Il y a peu d’années le feu prit à la partie catholique et menaçait de la consumer toute. Les habitans coururent à l’église et se mirent en prières. La partie protestante accourut avec des secours, et l’incendie fut &

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